Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Auguste, Lucien, Léon, Dardenne naît le 26 juin 1905, dans la maison de Denis Nicolas Sauvage, maçon à Pouru-Saint-Rémy (Ardennes – 08), fils de Marie Julienne Joséphine Dardenne, 26 ans, célibataire, sans profession, domiciliée à Fromelennes (08).

Le 19 mai 1928, au Pré-Saint-Gervais (Seine / Seine-Saint-Denis –  93), Auguste Dardenne se marie avec Julia, Victorine, Cornélie Lagaeye, née en 1908 dans le Nord. Ils n’auront pas d’enfant.

En 1929, ils habitent au 38, rue Charles-Nodier au Pré-Saint-Gervais.

Auguste Dardenne est chauffeur automobile (de camion ?).

En 1933, le couple habite au 14, rue des Pruniers à Drancy (93).

À partir du 29 avril 1935, Auguste Dardenne travaille comme chauffeur pour la société Les Jambons Français, sise 8 rue de Pantin au Pré-Saint-Gervais (93). Julia est employée par la société Lux, sise au  50, rue de la Villette au Pré-Saint-Gervais.

Selon une rapport de police ultérieur (21-07-1947), il est « membre de la cellule communiste de Pantin ou d’une banlieue environnante » (sic).

Entre septembre 1939 et juin 1940, il est mobilisé dans une unité combattante.

Du 15 octobre 1940 jusqu’au moment de son arrestation, Auguste Dardenne est domicilié au 26, rue François-Arago à Pantin [1] (93).

Le 19 janvier 1942, les autorités allemandes transmettent une demande d’enquête le concernant aux services de la préfecture de police. À cette époque, les renseignements recueillis par la police française ne lui permettent pas d’affirmer « qu’il ait jamais appartenu à l’ex-parti communiste » et rien n’a jamais donné l’impression qu’il se livre à la propagande communiste.

Le 28 avril suivant, Auguste Dardenne est arrêté sur son lieu de travail par la police allemande avec quatre autres camarades.

il est rapidement interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C, qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C,
qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Son épouse obtient le droit de lui rendre au moins une visite au camp.

Entre fin avril et fin juin 1942, Auguste Dardenne  est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Auguste Dardenne est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45423, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp) ; Auguste Dardenne se déclare alors comme chauffeur (Kraftwagenführer). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Auguste Dardenne.

Il meurt à Auschwitz le 18 septembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher), alors qu’a lieu une grande sélection des “inaptes au travail” à la suite de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement tués d’une piqûre intracardiaque de phénol ou gazés [2]) ; le motif déclaré est « bronchopneumonie ».

Sa famille effectue une demande d’informations transmise aux services de François de Brinon, délégué général du gouvernement français dans les territoires occupés. Le 16 janvier 1943, ceux-ci adressent au préfet de police une demande de renseignements sur les circonstances de l’arrestation d’Auguste Dardenne. Dans leur réponse du 11 mars suivant, les services du préfet répondent que si la date est connue, le motif est alors ignoré de la police française.

En avril 1947, sa mère formule une demande de pension de victime civile de la guerre « du chef de son fils ». Elle habite alors au 31, rue Roger-Breton (anciennement rue Charmente) avec sa fille, mère de huit enfants, et son gendre.

Le 4 juin suivant, sa veuve, Julia, formule la même demande.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son l’acte de décès d’Auguste Dardenne (J.O. du 1-03-1988).

Notes :

[1] Pantin : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 150 et 153, 385 et 400.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cabinet du préfet de police, dossier individuel (1 W 0736).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 214.
- Acte de décès à Auschwitz (31457/1942), Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Office for information on former prisoners).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 20-05-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.