JPEG - 72.3 ko
IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Maurice, François, André, Chaumond naît le 18 juin 1916 au Houlme (Seine-Inférieure / Seine-Maritime [1] – 76), fils de François Louis Chaumond, 49 ans, employé de la Compagnie des Chemins de fer de l’État, et Constance Froissard, 42 ans, mariés le 7 septembre 1897.

En 1921, la famille habite la cité Caillouët au Houlme. Son frère, André, 18 ans, est alors employé aux Chemins de fer de l’État. Sa sœur Renée, 14 ans, est couturière.

En 1936, Maurice Chaumond habite toujours chez ses parents, alors domiciliés rue Henry-Bailleul, à Caudebec-en-Caux (76), située sur la Seine entre Rouen et le Havre. Il est célibataire et travaille alors comme ajusteur aux Établissements Amiot (Société d’Emboutissage et de Constructions Mécaniques – SECM), usine de construction aéronautique implantée dans la commune. Nationalisée par le gouvernement de Front populaire (loi du 11 août 1936), l’usine de Caudebec-en-Caux intègre la Société nationale des constructions aéronautiques du Nord (SNCAN) regroupant différentes entreprises produisant du matériel de guerre.

Maurice Chaumond travaille ensuite dans la région parisienne – dans une autre usine de la SNCAN ? -, mais revient chez son père chaque samedi.

C’est un militant communiste.

Le 15 mars 1941, un inspecteur de police le signale « …dans cette localité, le nommé Chaumont, communiste connu […] porteur d’une musette contenant des paquets emballés. Il a été rencontré un peu plus tard sur la route de Villequier à Caudebec. Le lendemain, 17 février, des papillons communistes ont été retrouvés au lieu-dit le Dos d’Âne. »

Dans la nuit du 21 au 22 octobre, Maurice Chaumond est arrêté au domicile de son père, à Caudebec, par des policiers français sur ordre des autorités d’occupation et emprisonné à la caserne Hatry de Rouen.

Rouen. La caserne Hatry dans les années 1920. Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Rouen. La caserne Hatry dans les années 1920. Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Il est ensuite transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne [2] (Oise).

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments
du secteur A : « le camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Maurice Chaumond est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande, en application d’un ordre de Hitler.

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Du convoi, il lance une lettre écrite « dans un 8 CV [huit chevaux] en long, en gare de Châlon-sur-Marne ». Il indique : « Nous sommes déportés. Le “père Lecoq” et Peiffer sont du voyage. »

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Maurice Chaumond est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45361, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Maurice Chaumond.

Il meurt à Auschwitz le 18 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher), alors qu’a lieu une grande sélection des “inaptes au travail” à l’intérieur du camp au cours de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement tués d’une piqûre intracardiaque de phénol ou gazés [3]).

Déclaré “Mort pour la France” en 1946, Maurice Chaumond est homologué comme “Déporté politique”. La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 14-11-1987). Son nom est inscrit sur le Monument aux morts de Caudebec-en-Caux.

Notes :

[1] Seine-Maritime : département dénommé “Seine-Inférieure” jusqu’en janvier 1955

[2] Sous contrôle militaire allemand, le camp de Royallieu a d’abord été un camp de prisonniers de guerre (Frontstalag 122), puis, après l’invasion de l’URSS, un « camp de concentration permanent pour éléments ennemis actifs ». À partir de septembre 1941, on y prélève – comme dans les autres camps et prisons de zone occupée – des otages à fusiller. Le 10 février 1942, il devient un centre de regroupement pour la déportation des détenus juifs et communistes, séparés dans l’enceinte du camp. Avec le développement du plan d’extermination nazi, à la mi-juillet 1942 (rafle du Vel d’Hiv), le secteur juif sera fermé et remplacé par le camp de Drancy (Seine-Saint-Denis).

[3] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à liquider des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail”.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 375 et 399.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Seine-Maritime (2000), citant : liste établie par Louis Eudier (45523), du Havre – Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen – Mairie de Caudebec – Madame O. Lepetit, amie de la famille, 15/4/1992 – Deux lettres de Maurice Chaumond, dont une de Compiègne datée du 30 décembre 1941.
- Paul Le Goupil, du convoi des tatoués (matricule 185899), Mémorial des Français non-juifs déportés à Auschwitz, Birkenau et Monowitz, ces 4500 tatoués oubliés de l’Histoire, page 15.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 165 (31363/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 6-11-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.