Christ, Eugène, Vannier, né le 26 janvier 1902 à Saint-Christophe-du-Jambet (Sarthe), domicilié à Almenêches (Orne), mort à Auschwitz à une date inconnue.

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Collection de Patrick Dauty. Droits réservés.

Christ, Eugène, Michel, Vannier naît le 26 janvier 1902 à Saint-Christophe-du-Jambet (Sarthe – 72), fils de Christophe Vannier, né en 1852 à Ségrie (72), cultivateur, et d’Eugénie Narbonne, son épouse, née en 1861 à Saint-Christophe-du-Jambet, domiciliés à la Mare à Feu lors du recensement de 1906. Christ a – au moins – une sœur aînée, Alice, née en 1894.

Christ Vannier commence à travailler comme « aide de culture », demeurant alors à Ségrie.

Il est de la classe 1922, mais le conseil de révision ajourne son service militaire d’un an pour adénite (inflammation des ganglions lymphatiques). Le 28 mai 1923, il est incorporé comme zouave de 2e classe au 1er régiment de zouaves, arrivant au corps le 5 juin, au Maroc, « en territoire civil ». Le 11 août suivant 1924, il passe au 64e régiment de tirailleurs marocains, en territoire militaire jusqu’au 17 février 1924. Le 5 mars suivant, il passe au 64e régiment de tirailleurs marocains. Une semaine plus tard, il participe à l’occupation des pays rhénans. Le 2 mai, il est envoyé dans la disponibilité, titulaire d’un certificat de bonne conduite.

En mars 1928 et jusqu’au moment de son arrestation, Christ Vannier est domicilié à Almenêches, près d’Argentan (Orne).

À une date restant à préciser, il se marie avec Yvonne Lefraut, née en 1907 dans cette commune, fille de journaliers domiciliés à La Cour-Pallière. Ils ont cinq enfants, dont Denise, née en 1923, Roger, né en 1927, tous deux à Almenêches, Marcel, né en 1930, et Yvette, née en 1934, tous deux sur la commune du Château-d’Almenêches.

Entre avril 1929 et novembre 1933, la famille habite au lieu-dit L’Orée du Bois, au Château-d’Almenêches. En 1936, la famille habite route du Pin-au-Haras à Almenêches et héberge deux enfants pris en nourrice : André, né en 1934 à Paris, et Madeleine, née en 1935 à A.P.Orne (Assistance publique ?).

Cheminot, Christ Vannier est ouvrier de deuxième classe aux ateliers des Chemins de fer de l’État (qui fusionneront au sein de la SNCF) à la gare de Surdon, sur la commune du Château-d’Almenêches, dans une usine de créosotage des traverses (traitement chimique au Crésyl ; très odorant). En octobre 1931, l’armée le classe “affecté spécial” sur ce poste.

Surdon, le chantier. Carte postale, sans date (années 1900 ?). Collection Mémoire-Vive.

Surdon, le chantier. Carte postale, sans date (années 1900 ?). Collection Mémoire-Vive.

Responsable CGT, Christ Vannier est aussi adhérent du Parti communiste depuis 1938, trésorier de la cellule d’Almenêches.

Sous l’occupation, il est signalé à la Préfecture « comme agent surveillé » (par son employeur ?).

Le 18 octobre 1941, il est arrêté dans le cadre d’une vague d’arrestations collective qui touche le département, puis interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager), où il entre dans l’organisation clandestine du camp.

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Christ Vannier est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures puis repart à la nuit tombée : Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Christ Vannier est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46172 (sa photo d’immatriculation [1] est la dernière retrouvée dans l’ordre croissant des numéros).

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Portail du secteur B-Ib du sous-camp de Birkenau par lequel sont passés tous les “45000”. © Mémoire Vive 2015.

Portail du secteur B-Ib du sous-camp de Birkenau par lequel sont passés tous les “45000”. © Mémoire Vive 2015.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Christ Vannier est dans la moitié des déportés du convoi sélectionnés pour rester dans ce sous-camp, alors que les autres sont ramenés à Auschwitz-I.

Le 27 novembre 1942, dans la chambrée (Stube) n° 7 du “Revier” de Birkenau, il reçoit un comprimé de charbon (Kohle), remède contre la dysenterie.
Christ Vannier meurt à Auschwitz à une date inconnue, probablement avant la mi-mars 1943.
Le 20 juillet 1946, Eugène Garnier, de Flers (61), signe une attestation de décès pour Christ Vannier, estimant que sa mort est survenue en septembre 1942 après que celui-ci ait contracté le typhus, précisant « qu’il a été incinéré dans ce même camp ».Christ Vannier est homologué comme “Déporté politique”.La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 8-07-2001).
Son nom est inscrit sur le monument aux morts d’Almenêche, place de l’église, et sur la plaque « À la mémoire des agents de la SNCF tués par faits de guerre » dans la gare de Surdon.
Dans la gare de Surdon… Photographie : Patrick Dauty. Octobre 2019.

Dans la gare de Surdon…
Photographie : Patrick Dauty. Octobre 2019.

Notes :

[1] Sa photo d’immatriculation à Auschwitz a été identifiée par sa famille (Patrick Dauty) en 2006, par comparaison avec un portrait civil ; voir en haut de page.

Sources :

- De Caen à Auschwitz, par le collège Paul Verlaine d’Evrecy, le lycée Malherbe de Caen et l’association Mémoire Vive, éditions cahiers du Temps, Cabourg (14390), juin 2001, notice par Claudine Cardon-Hamet page 131.
- Cl. Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 370 et 422.
- Patrick Dauty, petit-fils de Christ Vannier (messages juin 2006, mai 2011).
- Archives départementales de la Sarthe (AD 72), site internet du conseil général, archives en ligne ; recensement de population de la Ferté-Bernard, année 1886 (2Mi 289, vue 6/62) ; registre des matricules militaires, bureau de recrutement de Mamers, classe 1922, matricules de 1 à 500 (1 R 1331), matricule n° 37 (vue 41/527).
- Site Mémorial GenWeb, 61-Almenêche, relevé de Laurent Corbin (2004).
- Registre de délivrance de médicaments de l’infirmerie de Birkenau, archives du Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau (Archiwum Państwowego Muzeum Auschwitz-Birkenau – APMAB), Oświęcim, Pologne ; Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 10-03-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.