André Lecompte, né le 20 janvier 1910 à Paris 6e, domicilié à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), mort à Auschwitz le 25 août 1942.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

André Levillain naît le 20 janvier 1910 à l’hôpital Garnier, au 89, rue d’Assas à Paris 6e, fils de Juliette Levillain, 24 ans, domiciliée au 10, avenue de Chevreuil à Bécon-les-Bruyères, lieu-dit entre Courbevoie et le quartier des Bruyères, sur les communes d’Asnières-sur-Seine et de Bois-Colombes (Seine / Hauts-de-Seine – 92), et de père non dénommé. Le 14 septembre 1912, l’enfant est légitimé par le mariage de sa mère avec René Victor Lecompte, cordonnier, alors âgé de 27 ans, tous deux étant domiciliés au 8, rue des Cormonds (?) à Bois-Colombes. Le famille comptera neuf enfants (?), parmi lesquels Nicolas, né en 1918, Roger, né en 1920, tous deux en Seine-Maritime, puis Paulette, née en 1922, Jacqueline, née en 1925, et Paul, né en 1926.

Puis ses parents s’installent au 315, avenue d’Argenteuil à Colombes (92). André Lecompte commence à travailler comme ouvrier mécanicien.

Il est adhérent de la Fédération Sportive du Travail, organisation que la police française considère en 1931 comme « placée sous le contrôle du Parti communiste et qui, sous couvert de sport, cherche à faire partager à la jeunesse ouvrière les doctrines de ce parti ».

André Lecompte adhère au Parti communiste de 1936 à 1938.

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 36, rue du Gros-Orme à Gennevilliers [1] (92).

André Lecompte est métallurgiste (fraiseur).

Le 2 décembre 1939, à Gennevilliers, il se marie avec Renée Paule Appel (?). Ils n’auront pas d’enfant.

À l’automne 1940, il accepte une activité de diffusion de propagande communiste clandestine, dans un groupe dont l’imprimerie, constituée de deux machines à ronéotyper était installée au domicile des époux Lerigoleur, 36 rue du Gros-Orme à Gennevilliers ; la perquisition qui y est opérée permettant également de saisir plusieurs milliers de tracts prêts à être distribués, ainsi qu’un stock important de papier d’impression.

Le 11 ou 12 décembre 1940, André Lecompte est arrêté par la police française pour “propagande communiste” parmi treize militants. Au cours de son interrogatoire devant le commissaire de police, André Lecompte reconnait les faits. Inculpé d’infraction au décret du 26 septembre 1939, il est écroué à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e).

Le 12 mars 1941, il est inculpé pour escroquerie.

Le 28 avril, la 12e chambre du Tribunal correctionnel de la Seine condamne André Lecompte à dix mois de prison pour infraction au décret du 29-09-1939 et, le 18 juillet, la 13e chambre le condamne à six mois de prison et 25 francs d’amende pour escroquerie. Le 1er août, il est transféré à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (Seine / Val-de-Marne) ; matr. 9612. Il abandonne un recours en appel, mais, à sa demande, ses peines sont confondues.

À l’expiration de sa peine, le 12 décembre 1941, André Lecompte n’est pas libéré : le préfet de police signe l’arrêté ordonnant son internement administratif.

Après son arrestation, il est possible que son épouse ait emménagé au 67, rue du Ménil, à Asnières [1] (92) ; commune mentionnée sur son acte de décès.

Le 3 janvier 1942, André Lecompte fait partie d’un groupe de 50 détenus – 38 internés politiques et 12 “indésirables” (droit commun) – extraits du dépôt et transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé (Vienne). Ils sont conduits en car, sous escorte, jusqu’à la gare d’Austerlitz où les attend un wagon de voyageurs réservé (10 compartiments ; départ 7h55 – arrivée 18h51).

Le 22 mai 1942, il fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – il est remis aux autorités d’occupation à leur demande et conduit au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, André Lecompte est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, André Lecompte est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45750 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté André Lecompte.

Il meurt à Auschwitz le 25 août 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [2].

Il est homologué comme “Déporté politique”. La mention “Mort en déportation” est portée sur les actes de décès (J.O. du 23-03-1994).

Notes :

[1] Gennevilliers et Asnières : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant d’André Lecompte, son acte de disparition par jugement déclaratif de décès (13-7-1950) indique le 31 juillet 1942, voire le 6 juillet à Compiègne (à vérifier…). Leur publication à l’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 380 et 410.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Hauts-de-Seine nord (2005), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier national).
- Archives Départementales du Val-de-Marne, Créteil : prison de Fresnes, dossier des détenus “libérés” du 1er au 19-12-1941 (511w27).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; dossier individuel au cabinet du préfet (1 W 854-35939).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : liste XLI-42, n° 111.
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 702 (24686/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 15-06-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.