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Collection familiale. Droits réservés.

René, Paul, Trillault naît le 8 avril 1904 à Paris 12e, fils Paul Trillault, cheminot travaillant pour la société PLM (Paris-Lyon-Marseille), et de Joséphine Fautré.

Le 25 avril 1929, à Montereau-Fault-Yonne (Seine-et-Marne), René Trillault épouse Marcelle Prévost, née le 27 décembre 1910 dans cette commune. Ils auront cinq enfants vivants : Claudine, 10 ans au moment de l’arrestation de son père, Paulette, 8 ans, Marcelle, 6 ans, Renée, 4 ans, et Michel, 17 mois. En octobre 1941, Marcelle Trillault se déclare enceinte de quelques mois.

Au moment de l’arrestation du chef de famille, celle-ci est domiciliée au 2, rue Kecker à Montereau.

Serrurier-monteur en charpente métallique chez Besson, à Montereau, René Trillault est secrétaire du Syndicat CGT des Métaux de la ville.

Il adhère au Parti communiste en 1935 et participe au mouvement de grève de 1936, probablement repéré par la police à partir de cette date.

Le 28 janvier 1939, répondant à une directive de la direction générale de la Sûreté nationale, au ministère de l’intérieur, et après avoir consulté ses sous-préfets, le préfet de Seine-et-Marne transmet un long rapport sur « l’organisation et l’activité de chacun des partis extrémistes » de son département dans lequel sont répertoriées les cellules du parti communiste. Pour le secteur de Montereau, il indique que : « 15 cellules composent le secteur et comprennent environ 700 adhérents, à savoir : I° – Cellule de l’usine besson comprenant 90 membres. Secrétaire : M. TRILLAULT René Paul […]. »

Le 24 septembre 1939, en réponse à une directive du préfet, un brigadier du commissariat de police de Montereau transmet à celui-ci « les noms et adresses de ceux [membres du PCF] qui sont susceptibles d’obéir à un mot d’ordre ». Parmi les 23 hommes désignés, René Trillaut, « affecté 90 jours » (mobilisé comme affecté spécial dans une entreprise en lien avec la défense nationale). Une autre liste policière, datée du 14 octobre suivant, le désigne comme « très militant ».

Au printemps 1940, René Trillault est arrêté et écroué à la Maison d’arrêt de la Santé, à Paris (en détention préventive ou après condamnation par un tribunal ?). En juin 1940, lors de l’exode, il est transféré au camp de Gurs (Pyrénées-Orientales – 66). Il en est libéré en septembre 1940.

Dès son retour à Montereau, il recherche le contact avec ses camarades communistes. Il distribue alors l’Appel au peuple de France de Maurice Thorez et de Jacques Duclos. Il est agent de liaison au sein d’une organisation communiste clandestine. Son épouse et sa fille aînée, Claudine, sont au courant de ses activités. Le jeudi – jour sans école – cette dernière porte des tracts jusqu’à Maison-Blanche où un correspondant vient les récupérer.

Le dimanche 19 octobre 1941, René Trillault est arrêté à son domicile dans le cadre d’une vague d’arrestations décidée par l’occupant contre des communistes de Seine-et-Marne, pris comme otages en représailles de distributions de tracts et de destructions de récolte – incendies de meules et de hangars – ayant eu lieu dans le département.

René Trillault est d’abord conduit à la mairie de Montereau-Fault-Yonne, puis, le jour même, interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag122 – Polizeihaftlager), où il est enregistré sous le matricule 1762.

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, René Trillault est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

La famille de René Trillault ne reçoit ni message jeté du train ni la carte formulaire envoyée à la plupart des familles par l’administration du camp pour signaler ce transfert.

Le 8 juillet 1942, René Trillault est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46158 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, René Trillault est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Il est assigné au Block 10.

À une date restant à préciser, il est admis au Block 20 (maladies contagieuses) de l’hôpital des détenus d’Auschwitz-I.

René Trillault meurt à Auschwitz le 24 octobre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [1].En 1943, son épouse, titulaire de la Médaille des mères françaises, emménage au 15 bis, rue de Nemours à Montereau.

Le nom de René Trillaut est inscrit sur le monument aux morts de Montereau-Fault-Yonne, situé place Jacques-Leqesme, à l’angle des rues Victor-Hugo et Jean-Jaurès.

René Trillaut est homologué comme “Déporté politique” en 1954.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 3-06-2001).

Notes :

[1] Différence de date de décès avec celle inscrite au Journal officiel : Dans les années qui ont suivi la guerre, dans l’ignorance des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil, par l’intermédiaire du Ministère des Anciens Combattants, ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er du mois, le 15, le 30 ou le 31. La parution au J.O. rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts. S’agissant de René Trillaut, c’est le 15 septembre 1942 qui a été fixé par l’officier d’état civil du Ministère des anciens combattants et victimes de guerre.

Sources :
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 73, 378 et 422.
- Cl. Cardon-Hamet, docteur en Histoire, réponse du 1er mars 2005.
- Claudine Sivelle, fille de René Trillault (communication 03-2009 ; questionnaire rempli 10-04-2009).
- Archives départementales de Seine-et-Marne, Dammarie-les-Lys : cabinet du préfet, arrestations allemandes, secteur de Provins, dossier individuel (SC51231) ; notes (SC51241) ; fonctionnaires appartenant au PCF (SC51242).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1256 (37318/1942).
- Site Mémorial GenWeb, 77-Montereau-Fault-Yonne, relevé de Christian Prunier (06-2004).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 22-12-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.