Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Étienne, Guillaume, Pessot naît le 14 mars 1914 à Paris 14e, chez une sage-femme (dans une maternité ?) au 4 passage des Thermopyles, fils de Guillaume Pessot, 30 ans, tanneur, et Pauline Beuvelet, 24 ans, chapelière, domiciliés au 199 rue de Bagneux à Montrouge (Seine / Hauts-de-Seine). Tous deux seront décédés avant son conseil de révision : Pauline, le 31 octobre 1917 au 96 rue Didot à Paris 14e. Quand il est encore mineur, Étienne Pessot a pour tutrice Madame Veuve Pessot, domiciliée au 4 avenue des Panoramas à Cachan (Seine / Val-de-Marne).

Pendant un temps, il habite au 122 bis rue de la Tombe-Issoire (Paris 14e).

Il commence à travailler comme manœuvre.

Le 24 avril 1934, il rejoint le 16e bataillon de chasseurs à pied auquel il est affecté afin d’y accomplir son service militaire. Mais, le 16 mai suivant, la commission de réforme de Saint-Avold le classe “service auxiliaire” pour « conjonctivite chronique bilatérale, trouble de la transparence cornéenne par séquelle d’une kératose conjonctivite photophobie ».

En avril 1935, il est domicilié au 77 rue de Bagneux à Montrouge [1] (Seine / Hauts-de-Seine).

Le 21 août 1937, à Montrouge, Étienne Pessot se marie avec Henriette Cécile Léonie Billiamattes.  Ils n’auront pas d’enfant.

Étienne Pessot est plombier-couvreur.

Du 4 au 24 octobre 1936, l’armée l’appelle à effectuer une période d’exercices au titre de la réserve, à l’issue de laquelle il reçoit le “certificat de bonne conduite”.

En mars 1939, il habite au 20 rue du Docteur Hénouille à Cachan [1] (Seine / Val-de-Marne – 94).

Le 1er septembre 1939, rappelé à l’activité militaire par le décret de mobilisation générale, il est affecté au 217e R.R.T., 2e compagnie, arrivant au corps deux semaines plus tard. Le 1er janvier 1940, il est affecté au dépôt de Cie 21. Le 14 mars 1940, il est affecté au dépôt d’infanterie 213. Le 8 août 1940, il est démobilisé à Aire-sur-l’Adour (Landes).

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 16, rue de Provigné (Provigny ?) à Cachan.

Le 1er mai 1941, Étienne Pessot est arrêté boulevard de la Vanne, à Cachan, en même temps que Georges Coudert, par des gendarmes de la brigade de Cachan alors qu’ils déposent des tracts « À bas Pétain » dans les boîtes aux lettres et tracent des inscriptions communistes sur la voie publique (également dans la rue de L’Haÿ). Tous deux sont conduits au dépôt de la préfecture de police sur l’île de la Cité (Paris 1er). Inculpés d’infraction au décret du 26-09-1939, ils sont écroués le lendemain à la Maison d’arrêt de la Santé, Paris 14e. Le 3 mai, la 12e chambre du Tribunal correctionnel de la Seine condamne Étienne Pessot à huit mois de prison.

Le 26 mai, il est transféré à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (94) ; n° d’écrou “ correction homme” 8126. Le 7 juillet, la Cour d’appel de Paris confirme sa condamnation.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 2 novembre, à l’expiration de sa peine, Étienne Pessot n’est pas libéré : le préfet de police de Paris signe un arrêté ordonnant son internement administratif.

Le 10 novembre, Étienne Pessot fait partie d’un groupe de 58 militants communistes transférés au « centre de séjour surveillé » (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne).

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le 22 mai 1942, il fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Étienne Pessot est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45973 (ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Étienne Pessot est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

En juillet 1943, la plupart des détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”) reçoivent l’autorisation d’écrire – en allemand et sous la censure – à leur famille et d’annoncer qu’ils peuvent recevoir des colis (à vérifier le concernant…).

À la mi-août, Étienne Pessot est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) et mis en “quarantaine” au premier étage du Block 11, la prison du camp. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 - où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues - et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”. Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 – où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues -
et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”.
Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 12 décembre, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blocks et Kommandos d’origine.

Le 3 août 1944, Étienne Pessot est parmi les trois-quarts des “45000” présents à Auschwitz qui sont de nouveau placés en “quarantaine” en préalable à un transfert.

Le 28 août 1944, Étienne Pessot est dans le petit groupe de trente-et-un détenus dont vingt-neuf “45000” transférés au KL [2] Flossenbürg (Haut-Palatinat bavarois, proche de la frontière tchèque), et enregistrés dans ce camp le 31 août (matricule 19880).

En janvier 1945, il est transféré au Kommando de Leitmeritz (Litomerice) – armements, huiles minérales, constructions Richard, usine Elsabe – avec Georges Hanse et Camille Salesse.

Étienne Pessot est probablement libéré dans ce sous-camp.

L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation. Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945. Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation.
Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945.
Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

Le 1er septembre 1945, à Cachan, Étienne Pessot se marie avec aimée Marcelle Coudert.

Le 8 février 1982, Étienne Pessot décède à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), âgé de 68 ans.

Notes :

[1] Montrouge et Cachan : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 346 et 347, 359, 387 et 416.
- Archives Départementales du Val-de-Marne (AD 94), Créteil : établissement pénitentiaire de Fresnes, registre d’écrou n° 151, “correction hommes” du 20 avril au 7 juillet 1941 (2742w18) ; dossier des détenus “libérés” du 1er au 13-11-1941 (511w25).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), site du Pré-Saint-Gervais ; cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; registre de main-courante du commissariat de la circonscription de Gentilly du 27 octobre 1940 au 8 août 1941 (CB.96.48)..
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI-42, n° 146.
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 3-04-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.