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Clotaire, Marcel, Paumier naît le 31 janvier 1924 à Chémery (Loir-et-Cher – 41), dans une famille de vignerons.

Au moment de son arrestation, il est domicilié à Chémery, probablement chez ses parents.

Il est déclaré comme cultivateur.

Sportif amateur, il est membre de l’Union sportive de sa commune.

Le 22 ou 23 juin 1941, Clotaire Paumier est arrêté – probablement à la place de son frère Bernard, militant communiste très actif (voir DBMOF-Maitron, ci-dessous) -, dans le cadre de la vague d’arrestations de communistes lancée en France parallèlement à l’entrée en guerre du Reich contre l’Union soviétique. Après avoir été conduit à Romorantin puis détenu à Orléans, Clotaire Paumier est rapidement interné aucamp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Clotaire Paumier est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45954 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz. 
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartisdans les Blocks 19 et 20. Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés aux travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Clotaire Paumier est dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.

En juillet 1943, la plupart des détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”) reçoivent l’autorisation d’écrire – en allemand et sous la censure – à leur famille et d’annoncer qu’ils peuvent recevoir des colis.

À la mi-août 1943, Clotaire Paumier est parmi les “politiques” français rassemblés (environ 140) aupremier étage du Block 11 – la prison du camp – pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

Le 17 octobre 1943, Clotaire Paumier écrit à ses parents du Block 11 : « Je suis heureux de vous faire savoir que je suis toujours en bonne santé et j’espère qu’il en est de même pour vous. J’ai reçu tous vos paquets. Ne m’envoyez pas tant de pain et de biscottes. Du pain, j’en ai suffisamment ici maintenant. Mais si vous pouviez envoyer du fromage, des conserves, du sucre, de l’ail et un peu de lard salé. Vous pouvez mettre aussi dans les colis de la confiture. (…) J’espère que les vendanges se sont bien passées et que le vin est de bonne qualité. »

Mais sa lettre du 21 novembre est rédigée du Block 20 (l’ “hôpital”). Il y donne de nouvelles recommandations pour ses colis, précisant qu’on peut lui en faire envoyer par la Croix-Rouge.

Clotaire Paumier meurt à l’ “hôpital” d’Auschwitz (Block 20), le 29 novembre 1943, d’après les registres du camp ; il est l’un des derniers “45000” à mourir à Auschwitz ; du moins est-il le dernier pour lequel l’acte de décès a été retrouvé. Il a 19 ans.

Après avoir reçu son dernier courrier, sa mère fait des démarches auprès de l’antenne de la Croix-Rouge de Blois le 9 décembre et, le 15, elle s’adresse à la direction du service des internés civils. Des colis sont expédiés, mais elle reste sans nouvelles pendant plus de quatre mois. Jusqu’à ce qu’elle reçoive, le 2 mai 1944, une carte de la Croix-Rouge annonçant que le colis expédié le 16 décembre est revenu avec la mention « Ne pouvant être remis ».

Les parents de Clotaire Paumier n’apprennent sa mort qu’en mai 1945, de la bouche d’un rescapé.

Son nom est inscrit sur le monument aux morts de Chémery.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 28-02-1996).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 251 et 252, 364 et 416. 
- Roger Arnould, article paru dans le journal de la FNDIRP, Le Patriote Résistant, n° 511, mai 1982. 
- Archives départementales du Loir-et-Cher, fichier alphabétique des déportés du CRSGM (cote 56 J 5). 
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 910 (32680/1942). 
- Site Mémorial GenWeb, 41-Chémery, relevé Laetitia Tisserand (2005).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 5-08-2008)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.


PAUMIER Bernard, Albert.

Né le 2 décembre 1909 à Selles-sur-Cher (Loir-et-Cher). (…) Fils de vignerons installés à Champcol près de Selles-sur-Cher, puis à Chemery, Bernard Paumier travailla très jeune dans l’exploitation de ses parents. A la suite d’une réunion organisée par le PC à Chemery vers 1927, il adhéra à la Fédération des JC. Avec le responsable régional, Regor, il organisa localement une réunion des JC au cours de laquelle une quinzaine d’adhésions furent réalisées. Appelé au service militaire à Bourges d’octobre 1930 à octobre 1931, il assura la distribution de tracts antimilitaristes à la caserne. Le voyage de son frère Robert en URSS en 1933 renforça son engagement politique. Il anima la cellule communiste de Chemery et contribua à la constitution de cellules rurales dans les villages environnants : Châtillon, Thésée, Noyers, Angé, Thenay, Pouille. En 1935, il fut délégué des Amis de l’Union soviétique pour participer aux journées franco-soviétiques à Paris.

Aux élections législatives de 1936, candidat dans la 2e circonscription de Blois, il obtint 651 voix sur 14 436 suffrages exprimés (soit 4,50 %), soit cinq fois plus de voix communistes qu’en 1932 et se désista en faveur du socialiste Mauger. En 1936, il fut élu au bureau national de la Confédération générale des paysans travailleurs. En 1937, lors du IIIe congrès de la CGPT (Montluçon, 9 et 10 janvier), il devint trésorier et conserva cette fonction au IVe congrès (Brive, 5 et 6 mars 1939). Voir Jean Renaud.

En avril 1937, candidat au conseil d’arrondissement dans le canton de Saint-Aignan, il améliora très nettement les résultats communistes, obtenant 12,8 % des suffrages exprimés. L’hebdomadaire communiste régional publiait fréquemment ses articles. Après avoir suivi la première école centrale paysanne du parti à Draveil, il fut coopté en septembre 1937 à la section centrale agraire du PC et devint permanent. Secrétaire de la section agraire du parti, il travailla aux côtés de Waldeck-Rochet : il participa au lancement du journal La Terre et dirigea plusieurs écoles centrales paysannes.

Mobilisé le 2 septembre 1939 à Salbris (Loir-et-Cher), puis muté à Bourges en décembre 1939, il y fut incarcéré, puis interné à Orléans en raison de ses opinions politiques. Démobilisé, il rejoignit Chemery le 14 juillet 1940. Avec un jeune communiste de Saint-Romain, Marcel Marteau, il réalisa de petites affichettes : « Non aux réquisitions allemandes » et organisa dans la forêt de Saint-Aignan une réunion de communistes. Pierre Rebière du Comité central, qui lui apportait des tracts, lui demanda de réorganiser le parti en Loir-et-Cher. De septembre à octobre 1940, il parcourut le Loir-et-Cher à bicyclette pour contacter un certain nombre de communistes. Il fut ensuite chargé d’assurer des contacts à Pithiviers et à Montargis. Avec Rebière, il se rendit aussi dans la Nièvre pour y réorganiser le parti. Convoqué à Paris en novembre 1940, il fut informé par Henri Janin (voir ce nom) de sa nouvelle mission : le travail paysan en zone Nord. Il collabora au journal La Terre devenu clandestin.

Sa femme, qui l’avait rejoint à Paris en juin 1941, devint son agent de liaison. Le 22 juin 1941, les Allemands vinrent l’arrêter à Chemery : ils prirent à sa place son jeune frère Clotaire qui mourut à Auschwitz en décembre 1942.

Il poursuivit son travail clandestin sous divers pseudonymes : Christian, Bonhomme, etc. De 1941 à 1943, il assura la liaison entre la direction du PC et Michèle Bedel, secrétaire au journal Paris-Soir, qui lui transmettait les dépêches confidentielles adressées au journal.

Début 1944, il siégea à la commission agricole du Conseil national de la Résistance. A la Libération, il participa à la prise de possession du ministère de l’Agriculture et à l’installation de François Tanguy-Prigent comme ministre et fut désigné avec Waldeck-Rochet par la CGPT comme délégué à l’Assemblée consultative provisoire (novembre 1944-septembre 1945). Membre de la commission de l’Agriculture et de la Viticulture, il devint aussi pendant quelque temps membre du bureau confédéral de la CGA (Confédération générale agricole).

Candidat aux deux Assemblées constituantes sur la liste communiste qu’il conduisait, il obtint en 1945 le deuxième des quatre sièges du Loir-et-Cher, puis fut reconduit en juin 1946. Il fut réélu aux législatives de novembre 1946. Membre de la commission des finances et du contrôle budgétaire, il devint à l’Assemblée « le spécialiste des questions écrites » et intervint plus particulièrement sur les questions agricoles et viticoles. Suppléant du Comité central de 1945 à 1946, il assura pendant plusieurs années les fonctions de secrétaire fédéral du Loir-et-Cher. En juin 1951, il ne fut pas réélu député du fait des apparentements et se trouva quelque temps sans emploi. Après un passage au journal La Terre, il devint directeur de l’aérium de l’Audrionnière (Faverolles, Loir-et-Cher) pour le compte de l’Union des syndicats de la Seine (du 1er décembre 1951 au 31 décembre 1952). De mars 1953 à décembre 1956 il fut employé par L’Humanitécomme inspecteur de presse. En janvier 1956, il fut élu à la Chambre des députés dans d’excellentes conditions, la poussée à gauche ayant empêché l’apparentement centre-droite d’obtenir la majorité absolue escomptée.

Non réélu aux élections législatives de novembre 1958, il fut à nouveau candidat aux élections législatives du 18 novembre 1962, du 5 mars 1967 et du 23 juin 1968 ainsi qu’aux sénatoriales de septembre 1965 et de septembre 1974.

De janvier à juillet 1959, il travailla à l’Office parisien du papier. De 1959 à 1966, il fut secrétaire administratif du Comité central d’entreprise de la SNECMA : il s’occupa des colonies de vacances et de la gestion immobilière.

En 1965, Bernard Paumier fut élu maire de Chemery puis réélu en 1971 et 1977.

SOURCES : Arch. Dép. Loir-et-Cher, série M. — L. Jardel et R. Casas, La Résistance en Loir-et-Cher, Librairie de la Loire. — E. Bigot, Les parlementaires de Loir-et-Cher depuis 1789, Société d’art et d’archéologie de la Sologne. — P. Gratton, Les paysans français contre l’agrarisme, Maspero, 1972. — Le Travailleur. — Le Progrès du Centre. — La nouvelle République. — Témoignages de Bernard et Robert Paumier.

Thérèse Burel et D. Lemaire

Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, Les Editions de l’Atelier/Les Editions Ouvrières 1990-1997 CD-rom, version 3.61 pour Windows 3.1 Copyright CD-ROM-SNi