Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Ludwik (ou Ludwig) Motloch naît le 11 avril 1897 à Ostrawa (Tchécoslovaquie), fils de Joseph Motloch et Marie Tomessova. Il a un frère, Aloïs, qui sera mineur en Tchécoslovaquie (Luberia-Osharnia ?).

Le 17 août 1908 à Kuncicky (?), Ludwik Motloch épouse Stépanka Buchlova (ou Stephanka Buchta), née le 27 février 1898 à Ostrawa. Ils ont trois enfants dont Libuse, née le 2 février 1921 à Kuncicky (?), et Bretislaw, né le 25 février 1927 à Tucquegnieux.

La famille arrive en France le 14 septembre 1925.

En novembre 1932, ils sont domiciliés au 15, rue Alexandre-Dreux à Tucquegnieux (Meurthe-et-Moselle – 54).

Ludwig Motloch est mineur, très probablement à la mine de fer de Tucquegnieux appartenant à la Société des Aciéries de Longwy.

Le 13 mars 1934, le préfet de Meurthe-et-Moselle donne un avis favorable à la naturalisation française de Ludwik Motloch et de son épouse. La police considère alors qu’il n’est pas syndiqué.

Mais elle consignera plus tard qu’il est adhérent à la CGT de 1936 à 1937.

En 1939, au début de la “drôle de guerre”, Ludwig Motloch est interné pendant sept semaines au centre de rassemblement des étrangers à Briey, comme son compatriote Joseph Matis, de Tucquegnieux.

Le 21 janvier 1941, le préfet de Meurthe-et-Moselle signe un arrêté ordonnant son internement administratif à la suite d’une distribution de tracts communistes survenue le 18 janvier dans son secteur d’habitation. À partir du 23 janvier, il est interné au centre de séjour surveillé d’Écrouves, près de Toul (54), pendant un temps (15 jours).

Le 28 janvier 1942, il est arrêté par les « autorités allemandes ». Le 30 janvier, il est de nouveau conduit au camp d’Écrouves. Ensuite, il n’est pas clairement établi s’il est relâché ou non.

Dans la nuit du 4 au 5 février 1942, un groupe de résistance communiste mène une action de sabotage contre le transformateur électrique de l’usine sidérurgique d’Auboué qui alimente également dix-sept mines de fer du Pays de Briey. Visant une des sources d’acier de l’industrie de guerre allemande (Hitler lui-même s’en préoccupe), l’opération déclenche dans le département plusieurs vagues d’arrestations pour enquête et représailles qui concerneront des dizaines de futurs “45000”.

Le nom de Ludwig Motloch figure – n°3 – sur une « liste communiquée le 19 (février ?) au soir à la KK (Kreiskommandanturde Briey par le sous-préfet » pour préciser la nationalité de cinquante-trois hommes : il est désigné comme tchécoslovaque (erreur, ou la demande de naturalisation n’a-t-elle finalement pas abouti ?).

Qu’il ait été ou non relâché, il semble que Ludwig Motloch soit désigné comme otage à la fin février 1942.

Le 5 mars, il est parmi les 39 détenus d’Écrouves transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Le camp vu depuis le mirador central. Les “politiques français” étaient dans le secteur constitué par la ligne de bâtiments de gauche (“camp communiste”) Photo Hutin, Compiègne, carte postale. Droits réservés.

Le camp vu depuis le mirador central.
Les “politiques français” étaient dans le secteur constitué par la ligne de bâtiments de gauche (“camp communiste”)
Photo Hutin, Compiègne, carte postale. Droits réservés.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Ludwig Motloch est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45904 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Ludwig Motloch.

Il meurt à Auschwitz le 16 août 1942, d’après deux registres établis par l’administration SS du camp.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74, 368 et 414.
- Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 117.
- Archives Départementales de Meurthe-et-Moselle, Nancy, cote W1304/23 et WM 312 ; fiches du centre de séjour surveillé d’Écrouves (ordre 927 W) ; recherches de Daniel et Jean-Marie Dusselier.
- Jean-Claude et Yves Magrinelli, Antifascisme et parti communiste en Meurthe-et-Moselle, 1920-1945, Jarville, avril 1985, page 349.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 833 (21095/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 5-09-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.