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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Gabriel, Jean, Léon, Lejard, naît le 5 juillet 1901 à Barges (Côte-d’Or – 21) de Auguste Lejard, 31 ans, “pensionné”, et de Jeanne Chevalier, 25 ans, sans profession, couple de libres penseurs.

Sa mère est bonne à tout faire. Son père, employé à la Compagnie PLM (Paris-Lyon-Méditerranée) deschemins de fer, a eu les deux jambes sectionnées dans un accident du travail avant ses 26 ans et devient épicier à Barges. Il est élu conseiller municipal de cette commune sur la liste socialiste sans adhérer au parti. Le couple a deux autres fils, Ernest né en 1894 et Albert né le 20 mars 1895, mort sur le front d’Alsace le 18 juin 1915, et une fille Andrée, née en 1903.

Après avoir été élève de l’école primaire, Gabriel Lejard entre en 1913 à l’école pratique de Dijon (21), mais en est retiré dès 1916. Ajusteur à Dijon, puis, en 1917, à Lyon, il fréquente un milieu révolutionnaire composé de nombreux “affectés spéciaux” parisiens (période de guerre). En février 1918, il adhère aux Jeunesses socialistes et à la CGT. Rapidement, il est déçu par les JS et adhère au groupe libertaire. À cette époque, il accumule les lectures, celles en particulier des journaux, tel La Vague. Au début de 1918, à Lyon, il participe aux grèves contre la guerre. Après l’armistice, il milite activement dans le courant syndicaliste révolutionnaire pour l’adhésion à la IIIe Internationale.

En août 1919, Gabriel Lejard part travailler à Alger où il prend conscience de la réalité coloniale. Membre du bureau du syndicat des Métaux d’Alger, il prend part à une grève des métaux en mars-avril 1920, passe en correctionnelle et est rapatrié en France après huit mois de présence.

De retour à Lyon, il participe à la grève générale de mai 1920, et est alors licencié de l’usine d’automobiles Rochet-Schneider où il travaille.

En novembre 1920, il revient à Dijon et est embauché à la fabrique de motocyclettes Terrot.

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Dijon. L’usine Terrot.
Carte postale oblitérée en 1930. Coll. Mémoire Vive.

Le 6 avril 1921, il est incorporé au 1er régiment d’artillerie hippo(mobile). Le 1er novembre, il passe au 37e régiment d’artillerie. Le 20 janvier 1922, il passe au 8e bataillon d’ouvriers. Un mois plus tard, le 16 février, il passe au 121e escadron du Train auto. Lors de l’occupation de la Ruhr (les « pays rhénans ») en 1923, il fraternise avec les mineurs. Le 15 mai 1923, il est renvoyé dans ses foyers, titulaire d’un certificat de bonne conduite.

De retour chez Terrot en 1923, il adhère au syndicat CGTU de la métallurgie dijonnaise. À cette date, Gabriel Lejard est encore libertaire, mais il évolue vers le communisme.

En février 1924, il habite au 35, rue Pasteur, à Dijon. En octobre 1925, il est au 15, rue de la Verrerie et, en avril 1931, au 76, rue de la Vannerie. Plus tard, il emménagera au 10 rue du Creux-d’Enfer.

En 1934, il est secrétaire adjoint de son syndicat. En 1935, il adhère au Parti communiste et participe à toutes les manifestations antifascistes de 1934-1935 à Dijon. Le syndicat l’envoie à l’usine Cheveau dematériel électrique pour y organiser une section syndicale ; il perd ainsi la prime d’ancienneté et la semaine de congés payés dont il bénéficiait chez Terrot. Mais, en juin 1936, l’usine Cheveau est la première à être occupée à Dijon par les ouvriers, et la direction cède à leurs revendications en vingt-quatre heures. G. Lejard dirige l’extension du mouvement à tous les établissements de la métallurgie dijonnaise, prend très souvent la parole dans les meetings et les usines occupées, s’occupe de la création de nouvelles sections syndicales.

En 1937, il devient secrétaire général du syndicat des Métaux de Dijon et membre de la commission administrative de l’Union départementale de la Côte-d’Or.

Il est l’un des principaux organisateurs de la grève du 30 novembre 1938 pour la défense des acquis du Front populaire. Il passe alors trois fois en correctionnelle pour entraves à la liberté du travail, et n’est réembauché que sur intervention de l’inspecteur du Travail.

À partir du 20 février 1939, il est employé comme ajusteur aux établissements Roux Léger, rue Auguste-Brûlé à Dijon.

Après la déclaration de guerre, exclu de la Commission administrative de l’Union départementale, il reste secrétaire général du syndicat des métaux et continue à militer malgré les pressions constantes de la préfecture. Finalement, le syndicat est dissout et, quand il se reconstitue en décembre 1939, sa nouvelle direction refuse le retour de G. Lejard.

Le 28 décembre 1939, la police municipale de Dijon effectue à son domicile une perquisition qui se révèle infructueuse.

Le 28 mars 1940, Gabriel Lejard fait l’objet d’un rapport de surveillance ; les mesures d’internement ne lui sont pas appliquées « en raison de bons renseignements recueillis sur son compte. »

Ayant été rayé de l’“affectation spéciale”, il est affecté au dépôt d’artillerie n° 8 le 2 février 1940, arrivant au corps le 16 mai. Après la défaite, il est démobilisé le 1er août. .

De retour dans Dijon occupée, il adhère immédiatement aux groupes clandestins formés par les cheminots et les métallurgistes pour confectionner de faux papiers, récupérer des armes.

Le 22 février 1941, après la réception d’une lettre anonyme de dénonciation, le Préfet demande une enquête à son sujet. Le rapport de l’inspecteur de police rédigé le 25 mars indique que les « investigations n’ont pu montrer de façon certaine que Lejard manifestait ses opinions communistes par paroles,distribution de tracts ou par réunions avec des anciens camarades du parti communiste », mais ajoute « toutefois la surveillance continue à s’exercer ». Un nouveau rapport daté du 4 juin indique cependant que Gabriel Lejard « a conservé des amitiés auprès des adhérents [du syndicat], qui étaient également inscrits au parti communiste » et que les « surveillances seront continuées ».

Il est alors domicilié au 10, rue du Creux d’Enfer à Dijon.

Le 22 juin 1941, Gabriel Lejard est arrêté par les Allemands [1]. Il est rapidement transféré au camp de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 -Polizeihaftlager). Il y est détenu plus d’un an.

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Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne,
futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ;
à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8.
Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Les 14 déportés de Côte-d’Or se regroupent dans le même wagon. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Les deux wagons à bestiaux
du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise
d’où sont partis les convois de déportation. Cliché M.V.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Gabriel Lejard est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45772 (ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différentsKommandos.

Gabriel Lejard est affecté un moment à la sablière, aux côtés de Roger Kinsbourg (46287), ancien maire-adjoint de Metz replié à Chenove (21) qui lui dit : « Gaby, je suis perdu. Si tu rentres, indique bien à ma famille comment je suis mort. » ; R. Kinsbourg meurt le 27 juillet.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Gabriel Lejard est dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.

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Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».
« Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive.

Là, Gabriel Lejard est assigné au Block 17 et de nouveau affecté à une sablière (Krisgrube), puis dans unKommando de terrassement. En octobre, il est aux côtés de Paul Charton – son dernier camarade proche – quand celui-ci est sélectionné pour la chambre à gaz à cause d’une cheville enflée [2]. Il côtoie égalementPierre Longhi, ancien maire-adjoint de Montreuil (93). En novembre, il reste seul de la cinquantaine de Français entrés avec lui au Block 17.

Affecté à des Kommandos qui ne lui permettent pas d’augmenter sa ration alimentaire par le troc, Gaby Lejard bénéficie de la solidarité organisée par Yannick Mahé, qui dépose des pains à la portée de sa colonne de détenus.

Le 22 octobre, dans un courrier à caractère urgent, le Préfet délégué de la Côte- d’Or demande au Commissaire central de Dijon que celui-ci lui fasse connaître si l’intéressé a été libéré et, dans la négative, de lui préciser quelles sont les personnes à charge, leur situation matérielle et son avis sur l’opportunité de leur attribuer une aide financière.

En juillet 1943, la plupart des détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”) reçoivent l’autorisation d’écrire – en allemand et sous la censure – à leur famille et d’annoncer qu’ils peuvent recevoir des colis (à vérifier le concernant…).

À la mi-août 1943, Gabriel Lejard est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) au premier étage du Block 11, la prison du camp, pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

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Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 – où se pratiquaient
les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues –
et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage
de la “quarantaine”. Au fond, le mur des fusillés.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 12 décembre, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blockset Kommandos d’origine.

Le 3 août 1944, Gabriel Lejard est parmi les trois-quarts des “45000” présents à Auschwitz qui sont de nouveau placés en “quarantaine” en préalable à un transfert.

Le 29 août, il est parmi les trente “45000” [3] intégrés dans un convoi disciplinaire de 807 détenus (incluant de nombreux “Prominenten” polonais) transférés au KL [4] Sachsenhausen, dans la ville d’Oranienbourg, au Nord-Ouest de Berlin. À leur arrivée, et jusqu’au 25 septembre, les trente sont affectés au Block 66.

Début octobre, Gabriel Lejard est parmi les huit “45000” transférés avec d’autres détenus à Kochendorf dans le Bade-Würtemberg (Kommando de Natzweiler-Struthof), dans une ancienne mine de sel aménagée en usine souterraine pour la construction des V2.

Fin mars 1945, les mêmes hommes sont dans une colonne de 1500 détenus évacués à marche forcée jusqu’à Augsbourg, puis en train de wagons découverts jusqu’au KL Dachau, où 200 survivants arrivent le 8 avril. Le camp est libéré par l’armée américaine le 29 avril.

Le 16 mai, Gabriel Lejard est rapatrié avec Louis Eudier (45523), du Havre (connu avant-guerre dans des congrès de métallos CGT), dans des camions de l’armée Leclerc qui rentrent en France via Strasbourg.

Sa fille Jeanine, née le 31 août 1927, qui a commencé à l’accompagner dans la lutte clandestine, entre en 1942 dans les Forces Unies de la Jeunesse Patriotiques, puis aux FTPF. Elle adhère au Parti Communiste. Elle devient agent de liaison régional puis national FTPF et est promue au grade de lieutenant. Recherchée après différentes missions, elle est envoyée dans la région bordelaise.

Arrêtée le 2 juin 1944 dans un hôtel de la rue de Châlon à Paris, lors d’une mission dans la capitale, elle ne livre pas un mot malgré la torture. Elle est transférée au Fort du Hâ, à Bordeaux.

Le 9 août, elle est déportée depuis Bordeaux dans le convoi appelé “Le train fantôme”, du fait de son parcours exceptionnellement chaotique, contournant le Massif Central par le Sud et passant à Dijon le 23 août. Le transport arrive finalement le 28 août au KL Dachau où restent les 548 hommes, tandis que les 64 femmes sont conduites au KL Ravensbrück le 30 août. Enregistrée dans la série matricule 62400, Jeanine Lejard y décède le 15 avril 1945, à quelques jours de la libération du camp. Elle est nommée chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume et son nom est donné à une caserne (?) de Dijon. En 1998, une plaque commémorative est apposée sur la façade de la maison où elle a vécu avec ses parents, au 10 rue du Creux-d’Enfer.

À son retour, Gabriel Lejard est réintégré à la Commission administrative de l’Union départementale CGT et reprend immédiatement la direction du syndicat des Métaux. Nommé membre du secrétariat fédéral du PCF, il abandonne cette charge en janvier 1946 lorsqu’il devint secrétaire général de l’UD-CGT, fonction qu’il exerce encore en 1970.

Le samedi 5 juin 1948, dans le journal communiste L’Avenir de la Côte-d’Or, il signe un article « En souvenir de mes camarades de misère, et pour rafraîchir la mémoire à ceux qui ont déjà oublié ». Il y présente les clichés anthropométriques retrouvés de cinq de ses treize camarades du département, prises le 8 juillet 1942 : Jean Bouscand, Adrien Burghard, Louis Chaussard, Julien Faradon et Ernest Repiquet. « Photos qui resteront le dernier souvenir de nos camarades pour leurs familles et nous, et devant lesquelles nous nous recueillerons et prendrons l’engagement de continuer la lutte pour laquelle ils sont tombés, contre les survivances du fascisme et les menaces qui pèsent sur l’indépendance de la France. »

Il témoigne à Valenciennes, au procès de deux kapos, un Français et un Polonais, « qui maltraitaient les déportés dans les mines de sel de Kochendorf », et qui sont condamnés à mort et fusillés (date ?).

Il obtient la carte de déporté Résistant (n° 1-016-02288) et est fait officier de la Légion d’honneur en 1983.

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Droits réservés.

Gabriel Lejard décède le 2 novembre 1988. Il est inhumé au cimetière de Barges (21).

Le 19 novembre 2004, le Conseil municipal de Dijon inaugure (?) le square Gabriel Lejard, situé à proximité de son ancien domicile.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 11, 73, 119 et 120, 129, 133, 150, 153, 155, 173, 214 et 215, 242, 248, 262, 306 et 307, 318, 345, 348 et 349, 358, 363 et 411.
- Louis Eudier (45523), Notre combat de classe et de patriotes, 1934-1945, imprimerie Duboc, Le Havre, sans date (1977 ?), page 124.
- P. Lévêque, notice in Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, Éditions de l’Atelier/ Éditions Ouvrières, version CD-rom 3.61, 1990-1997, citant :L’Avenir de la Côte-d’Or, 21 juillet 1945 – Interview de Gabriel Lejard.
- Albert Ouzoulias, Les bataillons de la jeunesse, éditions sociales, réédition 1997, pages 223 et 224.
- Jérôme Hamel, Thomas Fontaine, Fondation pour la Mémoire de la Déportation, Livre-Mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression…, 1940-1945, Éditions Tirésias, Paris 2004, I.261, tome 3, pages 55, 56 et ?.
- Dijon, notre ville, magazine d’informations municipales, n° 165, novembre 2004.
- État civil de la mairie de Barges (Côte-d’Or).
- Archives départementales de Côte-d’Or, site internet, archives en ligne : recensement de Barges, 1896-1936 ; fonds : cote 1630 W, article 252 : « arrestations par les autorités d’occupation en raison de leur passé et activité politique », et article 244, cotes 6J61 à 62 : fiches individuelles des déportés de Côte-d’Or, don de Pierre Gounand, historien ; registre des matricules militaires, bureau de recrutement de Dijon, classe 1921 (cote R2568-0038), n° 33 (vue 38/578).
- Ministère de la Défense, site SGA / Mémoire des hommes, morts pour la France 1914-1918.
- Site de l’Amicale des vétérans du PCF de Côte-d’Or.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le le 20-05-2015)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante.

En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht.

Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. 131 d’entre eux, arrêtés entre le 21 et le 30 juin, font partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

[2] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Les détenus d’Auschwitz-Isélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.

[3] Les trente d’Auschwitz vers Sachso : (ordre des matricules, noms de G à P) Georges Gourdon(45622), Henri Hannhart (45652), Germain Houard (45667), Louis Jouvin (45697), Jacques Jung(45699), Ben-Ali Lahousine (45715), Marceau Lannoy (45727), Louis Lecoq (45753), Guy Lecrux(45756), Maurice Legal (45767), Gabriel Lejard (45772), Charles Lelandais (45774), Pierre Lelogeais(45775), Charles Limousin (45796), Victor Louarn (45805), René Maquenhen (45826), Georges Marin(45834), Jean Henri Marti (45842), Maurice Martin (45845), Henri Mathiaud (45860), Lucien Matté(45863), Emmanuel Michel (45878), Auguste Monjauvis (45887), Louis Mougeot (45907), Daniel Nagliouk (45918), Émile Obel (45933), Maurice Ostorero (45941), Giobbe Pasini (45949), René Petijean(45976) et Germain Pierron (45985).

[4] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.