François, Marie, Le Bris naît le 4 février 1903 à Sizun (Finistère – 29), fils de Jean Le Bris et de Jeanne Autret.

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 3, rue Blanqui à Ivry-sur-Seine [1] (Val-de-Marne – 94).

Le 8 décembre 1925, à la mairie du 6e arrondissement de Paris, il épouse Antoinette Chandezon, née le 31 juillet 1903 à Paris 15e (préposée à l’Hospice d’Ivry en 1942).

Ils ont un fils, Jean, né en 1929.

La famille habite un temps à Gentilly, au 162, rue de L’Haÿ (devenue rue Gabriel-Péri – à vérifier…).

François Le Bris est préposé de l’Assistance publique, affecté au service du personnel de l’Hôtel-Dieu, dans l’île de la Cité à Paris.

En janvier 1941, deux inspecteurs de la Brigade spéciale n° 1 (anticommuniste) des renseignements généraux « ayant appris que des éléments des services de Santé, notamment à l’Hôtel-Dieu, avaient conservé des attaches avec le mouvement clandestin et faisaient actuellement preuve d’un certaine activité, [leur] attention a été attirée sur » François Le Bris ; peut-être s’agit-il d’une dénonciation (la police enquêtera en mai 1945).

Le 14 janvier, à l’aube, les policiers se présentent à son domicile. Au cours de la perquisition, quatre tracts communistes, tous d’un modèle différent, sont découverts dans un placard. François Le Bris est aussitôt conduit au siège de la BS1 pour y être interrogé, notamment sur ses contacts avec ses collègues Tuny et Suchet (?).

Le lendemain, à 13 heures, Antoinette Le Bris est arrêtée à son tour à son domicile.

Ce 15 janvier, après interrogatoires et au vu des rapports des inspecteurs, considérant « qu’il est établi par les tracts trouvés [à leur domicile] et par les déclarations même de Le Bris qui avoue ses sympathies pour les doctrines communistes, que les époux Le Bris exerçaient une activité certaines en vue de la diffusion des mots d’ordre de la IIIe Internationale communiste », le commissaire André Cougoule, chef de la brigade spéciale, officier de police judiciaire, les inculpe d’infraction aux articles 1 et 3 du décret du 26 septembre 1939, mais, « attendu que cette activité ne s’est manifestée par aucun acte récent », les laisse libres, à charge pour eux de déférer à toute convocation de Justice, et transmet le dossier au procureur de la République aux fins de droit.

Antoinette Le Bris retrouve son fils chez des amis qui l’ont recueilli, et François Le Bris revient un peu après.

Les renseignements généraux le ficheront néanmoins comme « Militant agissant et actif ».

Le 28 avril 1942, à l’aube, François Le Bris est de nouveau arrêté à son domicile par un policier français et un soldat allemand (peut être un Feldgendarme) lors d’une grande vague d’arrestations (397 personnes) organisée par « les autorités d’occupation » dans le département de la Seine et visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin. Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 -Polizeihaftlager).

François Le Bris est interné le jour même, affecté au bâtiment C1, chambre 9, matricule 4037. Depuis de ce camp, il envoie quatre lettres à son épouse. A. Lemoine, un détenu libéré, domicilié à Nogent-sur-Marne, transmet également de ses nouvelles à celle-ci, en insistant sur le manque de nourriture des détenus.

Entre fin avril et fin juin, François Le Bris est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée (suivant un ordre de Hitler) en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée d’occupation.

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandise. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Dans la période du départ, François Le Bris transmet encore un message à son épouse, daté du 5 juillet.

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Les deux wagons à bestiaux 
du Mémorial de Margny-les-Compiègne, 
installés sur une voie de la gare de marchandise 
d’où sont partis les convois de déportation. Cliché M.V.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, François Le Bris est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I), peut-être sous le numéro 45745, selon les listes reconstituées ; sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée.

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a été affecté François le Bris.

Il meurt à Auschwitz le 25 août 1942 [2], d’après les registres du camp ; un mois et demi après l’arrivée du convoi.

(aucun des quatorze “45000” ivryens n’est revenu).

Le 20 octobre 1943, par un formulaire d’attestation répondant probablement à une demande de renseignement, le commandement allemand du camp de Royallieu indique que François Le Bris « se trouve actuellement dans un camp de travail du Reich ».

Dans une lettre du 3 août 1945, Henri Charlier (“45355”, du Blanc-Mesnil (93) – alors soigné au sanatorium Émile Roux, près d’Évreux (Eure) – répond à la famille de François Le Bris qu’il ne sait rien du sort particulier de celui-ci. Mais il indique que, si ce dernier n’a pas écrit d’Auschwitz, c’est qu’il est mort avant juillet 1943 (Henri Charlier est lui-même décédé en 1952, à 52 ans).

François Le Bris est homologué comme “Déporté politique” et inscrit sur la liste des morts en déportation (18/08/2004).

Après la guerre, le nom de François Le Bris a été donné à la maternité de l’Hôtel-Dieu, son lieu de travail(service qui n’existe plus).

Son fils Jean suit l’école des PTT après la Libération.

Sources :

- Témoignage de Jean Le Bris, son fils, présent lors des deux arrestations (courriels, sept.-déc. 2006, pièce jointe). 
- Archives de la préfecture de police (Paris), site du Pré-Saint-Gervais ; cartons “Occupation allemande” (BA ?) ; dossiers de la BS1 (GB 53), n° 115, « affaire Le Bris », 15–1-1941 (réponses et photocopies adressées à Jean Le Bris). 
- Musée de la Résistance Nationale, Champigny-sur-Marne ; fiche de police de François Le Bris au commissariat d’Ivry-sur-Seine. 
- Ivry, fidèle à la classe ouvrière et à la France, supplément au Travailleur d’Ivry, édité par la section du PCF, à l’occasion du 25e anniversaire de la capitulation allemande ; page 95. 
- Archives municipales d’Ivry-sur-Seine, dossier individuel rassemblé par Michèle Rault, conservatrice, à partir de différentes sources (toutes indiquent 1940 comme date de la première perquisition au domicile du couple). 
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 388 et 410. 
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 133, « Bris Le » (25007/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 7-01-2015)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Ivry-sur-Seine : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite au Journal Officiel : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir lesdocuments administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – s’appuyant sur le ministère des Anciens combattants qui avait collecté le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ : ainsi, concernant François Le Bris, la mention « décédé le 5 juillet 1942 à Compiègne (Oise) » a été fixée par jugement. La parution au J.O. rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts. L’arrêté du 27 décembre 1993 ajoute la mention “Mort en déportation” et corrige par « décédé le 11 juillet 1942 à Auschwitz », afin de prendre en compte la certitude de son départ.