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Vers 1933…
Collection Lucette Bénézeth.
Droits réservés.

Camille Impérial naît le 14 janvier 1896 à Paris 14e (75), fils de Philomène Impérial, 21 ans (?), domestique (mère célibataire ?). Placé à l’Assistance publique, il est élevé dans une famille d’accueil à Thésée (Loir-et-Cher – 41), dans la région des cépages de Touraine. Il considère comme sa sœur, Alice Morand, enfant de l’Assistante publique accueillie sous le même toit

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Vers 1933, tout le monde se retrouve pour la photo : assis
au premier rang, Camille, Lucie, Lucette, le père de la famille
d’accueil et Alice. Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

De la classe 1916, Camille Impérial est affecté au 173e Régiment d’Infanterie, 3e compagnie. Le 5 janvier 1917, avec son régiment, il est cité à l’ordre de l’Armée ; il a droit au port de la fourragère aux couleurs du ruban de la Croix de guerre.

Le 22 février 1922 à Pouillé – village voisin et limitrophe de Thésée sur la rive sud du Cher -, il se marie avec Lucie Lévy, elle-même enfant de l’Assistante publique.

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Camille et Lucie sous le pont du Cher, dans les années 1930.
Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

Ils auront une fille, Lucette, née le 22 janvier 1932.

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Camille, Lucie et Lucette, vers 1933.
Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

Camille Impérial est maçon et charpentier. Sérieux et travailleur, son métier lui permet d’acquérir quelques arpents de vigne et un terrain, situé route de Tours, à une centaine de mètres de la place de l’église de Thésée, sur lequel il se construit lui-même une maison. Il s’établit comme artisan quelques années avant la guerre.

Thésée et le Cher. Carte postale colorisée. Collection Mémoire Vive.

Thésée et le Cher. Carte postale colorisée. Collection Mémoire Vive.

Son univers s’organise autour de sa famille, quelques amis, le jardin, la pêche, la chasse et ses chiens ; sonmeilleur ami de chasse est fervent catholique et défend des idées politiques opposées aux siennes.

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Photographiés le même jour que les photos ci-dessus, Camille
avec sa “presque sœur”, Alice, et la fille de celle-ci, Thérèse.
Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

Le 7 septembre 1939, Camille Impérial est rappelé comme réserviste et affecté à la 452e Compagnie du Train (des équipages), partant aux Armées le 16 septembre. Il n’est pas fait prisonnier de guerre et retourne dans ses foyers.

Après l’invasion allemande, le Cher matérialise la ligne de démarcation entre la zone Nord, occupée, et la zone Sud, dite “libre”.

Thésée. Le pont sur le Cher, en direction de Pouillé, où Camille impérial s’est marié (voir deuxième photo ci-dessus). Photo Mémoire Vive, mars 2011.

Thésée. Le pont sur le Cher, en direction de Pouillé, où Camille impérial s’est marié
(voir deuxième photo ci-dessus). Photo Mémoire Vive, mars 2011.

Le 30 avril 1942, à Romorantin (41), cinq résistants communistes sont découverts par des soldats allemands alors qu’ils distribuent des tracts. Armés, ils ne se laissent pas arrêter et blessent les soldats dont un sous-officier qui succombe à ses blessures. Les mesures de représailles prévoient l’exécution immédiate de dix communistes, Juifs et de proches des auteurs présumés. Vingt autres personnes doivent être exécutées si au bout de huit jours les « malfaiteurs » ne sont pas arrêtés. Un barrage est érigé autour de la ville.

Des rafles sont opérées dans la ville et dans le département afin de pouvoir « transférer d’autres personnes vers l’Est, dans les camps de travaux forcés. »

Dans la nuit du 1er au 2 mai, à 2 heures du matin, Camille Impérial est arrêté chez lui par des gendarmes français avec d’autres habitants de Thésée (dont Céleste Serreau).

D’abord détenus à Orléans, ils sont transférés comme otages au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Un angle du camp de Royallieu vu depuis le mirador central dont l’ombre se profile sur le sol. Le renfoncement à droite dans la palissade correspond à l’entrée du Frontstalag 122.

Un angle du camp de Royallieu vu depuis le mirador central dont l’ombre se profile sur le sol.
Le renfoncement à droite dans la palissade correspond à l’entrée du Frontstalag 122.

Avant la fin juin 1942, Camille Impérial est définitivement sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Camille Impérial est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45678 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée [1]).

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Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Camille Impérial est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Le 1er août, il est présent au Block 20 de l’hôpital d’Auschwitz-I, chambrée (« Stube ») n° 4. Le 10 août, il est inscrit dans la colonne des sortants.

Camille Impérial meurt à Auschwitz le 19 août 1942, du typhus, selon plusieurs registres tenus par l’administration SS du camp.

Après son arrestation, Lucie, son épouse reste domiciliée dans leur maison. Elle doit alors effectuer des ménages pour élever correctement leur fille. Après la guerre, Lucette entre à l’école normale d’instituteurs de Blois. Mais elle préfère arrêter ses études pour commencer à travailler. Prise aux PTT sur concours, elle est affectée à Strasbourg en 1952.

Lucie Impérial demeure à Thésée jusqu’à son décès, en 1970. Elle est inhumée dans le cimetière communal. Ensuite, sa maison est louée à Thérèse, la fille d’Alice – l’amie d’enfance de Camille -, que celui-ci considérait comme sa nièce. Thérèse et son mari, René Pinard, l’habitent pendant cinq ans.

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Alice, devant la maison bâtie par Camille Impérial.
Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

Le nom de Camille Impérial est inscrit sur le monument aux morts de Thésée, situé dans le cimetière communal, sur une plaque mentionnant quatre déportés dont trois “45000” (avec Serge Marteau et Céleste Serreau) [2].

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Le monument aux morts de Thésée.
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Derrière les médaillons de Poilus,
une plaque avec les quatre déportés de Thésée
(à droite).

Notes :

[1] Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été reconnue par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin Après Auschwitz, n°21 de mai-juin 1948).

[2] Le quatrième déporté de Thésée est Désiré Marteau, né à Amboise (Indre-et-Loire) le 27 décembre 1897, déporté dans le transport de 1583 hommes parti de Compiègne le 27 janvier 1944 et arrivé au KLBuchenwald le 29 janvier (mat. 44354), affecté à Dora, au Kommando d’Ellrich où il succombe le 28 janvier 1945. C’est le convoi de Jorge Semprun (Le Grand Voyage, Gallimard, Paris 1963), de David Rousset et de Paul Rassinier… André Sellier, Livre Mémorial de la FMD, I. 173, tome 2, pages 94-95, 137.

Sources :

- Son nom (prénom orthographié « Zamin ») et son matricule (avec une erreur : « 45418 ») figurent sur laListe officielle n°3 des décédés des camps de concentration d’après les archives de Pologne, éditée le 26 septembre 1946 par le ministère des anciens combattants et victimes de guerre, page 60.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 365 et 408.
- Message de Roger Bénézeth (11-2012) ; témoignage, transcription du livret militaire de Camille Impérial, conservé par sa fille Lucette Impérial, épouse Bénézet.
- Archives départementales du Loir-et-Cher, fiche d’arrestation de Camille Impérial, dossier 889 (cote 1375 W 64), fichier alphabétique des déportés du CRSGM (cote 56 J 5).
- Mémorial de la Shoah, Paris, site internet, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : XLIII-89 (télégramme, non daté, du Militärbefehlshaber in Frankreich (MbF), signé par Carl Heinrich von Stülpnagel.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 484 (22400/1942).
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; acte de décès au camp, page 86 d’un registre du Block20.
- Site Mémorial GenWeb, 41-Thésée, relevé de Sandrine Fleur-Curtil (2005).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 15-01-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.