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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz, le 8 juillet 1942. 
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 
Oświęcim, Pologne. 
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Adrien, Jean-Baptiste, Gentil naît le 10 août 1916 à Rouen (Seine-Maritime [1] – 76).

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 103, rue Albert-Thomas, au Petit-Quevilly, à l’ouest de Rouen, dans la boucle de la Seine (76). Il est célibataire.

Il est ouvrier dans une usine de papier-carton.

Membre des Jeunesses communistes, il est l’un des dirigeants de la Commission exécutive de l’Union départementale CGT (1938/39).

Dans la nuit du 21 au 22 octobre 1941, Adrien Gentil est arrêté à son domicile pour « activités communistes », par des policiers allemands et français, lors de la grande rafle de Rouen et de sa banlieue [2].

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Rouen. La caserne Hatry dans les années 1920. 
Collection Mémoire Vive. Droits réservés

Il fait partie des hommes rassemblés à la caserne Hatry de Rouen, puis transférés le 30 octobre au camp allemand de Royallieu à Compiègne [3] (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag122 – Polizeihaftlager) ; matricule 2079.

Dans un message sorti clandestinement, un camarade de Maromme, Marcel Lecour, demande de faire prévenir certaines personnes, parmi lesquelles M. Gentil, « que le membre de leur famille absent est en bonne santé et arrivé ce jour à Compiègne ».

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande, en application d’un ordre de Hitler.

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Adrien Gentil est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45588, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule – floue par “bougé” – a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartisdans les Blocks 19 et 20. Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après les cinq premiers jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Adrien Gentil est dans la moitié des membres du convoi qui reste dans ce camp en construction choisi pour mettre en œuvre la “solution finale”. Le contexte y est plus meurtrier.

Il disparaît à Birkenau en janvier 1943, selon Robert Gaillard, du Petit-Quevilly, qui l’a vu mourir (acte de décès du 11 juillet 1947).

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Stèle en hommage aux Déportés apposée sur le monument 
aux morts de Petit Quevilly situé dans le cimetière communal. 
Photo Mémoire Vive. D.R.

Déclaré “Mort pour la France”, il est homologué comme “Déporté politique” en 1954.

À une date restant à préciser, le conseil municipal de Petit-Quevilly donne le nom d’Adrien Gentil à une rue de la commune.

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Cliché Mémoire Vive. D.R.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 376 et 405. 
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Haute-Normandie (2000), citant : listes établies par Louis Eudier (45523) et par Louis Jouvin (45697) – Liste établie par la CGT – Liste des jeunes communistes (JC) du camp de Compiègne – Témoignage de Robert Gaillard (45565), du Petit-Quevilly – Questionnaire de Lucien Ducastel (45491) 20/1/1988 – Mairie du Petit-Quevilly (6/ 1992) : acte de décès n° 492 registre 64, dossier n° 51506 – Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen. 
- Thèse de Stéphane Courtois, historien, annexe 10. 
- Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, tome 29, p. 280.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 21-08-2012)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Seine-Maritime : département dénommé “Seine-Inférieure” jusqu’en janvier 1955.

[2] Le “brûlot de Rouen” et la rafle d’octobre 1941 : l’arrestation massive de plusieurs dizaines (*) de militants politiques et syndicaux – ou soupçonnés tels – dans un large périmètre autour de Rouen a suivi de peu le déraillement d’un train de matériel militaire allemand sur la ligne Rouen-Le Havre, dans le tunnel de Pavilly, à 1500 m de la gare de Malaunay, le 19 octobre 1941 ; ce sabotage étant l’un des objectifs visés par le “brûlot” de Rouen (groupe mobile de la résistance communiste).

Néanmoins, les fiches d’otages des “45000” appréhendés dans cette période mentionnent que ces arrestations mettaient en application un ordre du Commandant de la région militaire A, daté du 14 octobre 1941. Ainsi, entre le 17 et le 25 octobre, il y eut le même type de rafles de “communistes” dans sept autres départements de la zone occupée. Il est probable que ces arrestations aient été ordonnées pour assurer la saisie de communistes destinés à être placés sur les listes d’otages de cette région militaire. Tous les hommesappréhendés furent, en effet, remis aux allemands qui les transférèrent à Compiègne entre le 19 et le 30 octobre 1941.

44 des otages arrêtés ces jours-là dans le secteur de Rouen furent déportés dans le convoi du 6 juillet 1942. Beaucoup furent fusillés au titre de représailles dans les semaines qui suivirent.

(*) 150 selon 30 ans de luttes, brochure éditée en 1964 par la fédération du Parti Communiste de Seine-Maritime.

[3] Sous contrôle militaire allemand, le camp de Royallieu a d’abord été un camp de prisonniers de guerre (Frontstalag 122), puis, après l’invasion de l’URSS, un « camp de concentration permanent pour éléments ennemis actifs ». À partir de septembre 1941, on y prélève – comme dans les autres camps et prisons de zone occupée – des otages à fusiller. À partir du 12 décembre 1941, un secteur du sous-camp “C” est réservé aux Juifs destinés à être déportés à titre de représailles. Le camp des Juifs est supprimé le 6 juillet 1942, après le départ de la plupart de ses internés dans le convoi transportant les otages communistes vers Auschwitz. Les derniers détenus juifs sont transférés au camp de Drancy (Seine-Saint-Denis – 93).