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Coll. Christiane Lesage.
D.R.

Pierre Gazelot naît le 30 août 1913 à Bar-le-Duc (Meuse – 55), fils de Jules Gazelot et de Maria Hélène Fridrich, son épouse, dans une famille de six enfants dont il est le cadet. Parmi ses frères, Marc, Charles, né le 16 avril 1911 à Foug (Meurthe-et-Moselle).

Après ses études primaires, Pierre Gazelot suit une formation d’infirmier.

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Au cours de son service militaire, vers 1923.
Collection Christiane Lesage. D.R.

Le 9 décembre 1939 à Saint-Dizier (Haute-Marne – 52), âgé de 26 ans, il se marie avec Andrée, Yvonne, Renard, née à Saint-Dizier le 25 juillet 1907. Ils ont une fille, Christiane, née le 30 septembre 1940, neuf mois avant l’arrestation de son père.

Au moment de l’arrestation du chef de famille, celle-ci est domiciliée au 26, petite route de Marnaval à Saint-Dizier.

À partir du 5 avril 1939, Pierre Gazelot est employé comme infirmier à l’hôpital psychiatrique de la ville :« la maison de santé ».

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Saint-Dizier, la Maison de santé après-guerre.
Carte Postale. Collection Mémoire Vive.

Il est adhérent du Parti communiste, militant avec Georges Fontaine, Henri Queruel, Louis Petit et Yves Thomas ; leurs épouses se rencontrent et les enfants jouent ensemble.

Mobilisé après la déclaration de guerre de septembre 1939, Pierre Gazelot rentre à Saint-Dizier une fois démobilisé (août 1940 ?). Son frère Marc, mobilisé au 19e régiment d’artillerie divisionnaire, a été tué au combat le 14 mai 1940 à Soulme, province de Namur (Belgique), lors de l’offensive allemande ; “Mort pour la France [1]”.

Sous l’occupation, Pierre Gazelot est actif au sein du Parti communiste clandestin, participant à des distributions de tracts, au sabotage de câbles téléphoniques dans le bois des Trois-Fontaines et de rames de matériel roulant SNCF. Un membre de son groupe est en contact avec Marcel Mugnier, responsable départemental du Front National.

Au cours de l’été 1941, la police allemande (Feldgendarmerie ?) se rend à son domicile pour l’appréhender, mais il est absent. Informé par son épouse, il refuse de fuir, afin de ne pas mettre ses proches en danger.

Le 12 août 1941 – comme Henri Queruel, Louis Petit et Georges Savary, de Saint-Dizier -, il est arrêté à son domicile par la police allemande, qui perquisitionne la maison en présence de sa femme et de leur enfant. Les quatre hommes sont conduits à la Kommandantur de Saint-Dizier, avenue de la République, pour y être interrogés. Ils y sont gardé vingt-quatre heures avant d’être amenés à la Maison d’arrêt de Chaumont (52), où ils restent un dizaine de jours.

Tous les quatre sont ensuite transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Louis Petit en sera libéré vers septembre 1942. Georges Savary sera déporté six mois après ses compagnons.

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La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers
bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan, sur l’autre rive de l’Oise,
l’usine qui fut la cible de plusieurs bombardements
avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Pierre Gazelot est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Les deux wagons à bestiaux
du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise
d’où sont partis les convois de déportation. Cliché M.V.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Pierre Gazelot est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45584, selon les listes reconstituées (retrouvée, sa photo d’immatriculation a été identifiée par sa fille).

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Pierre Gazelot.On ignore la date exacte de sa mort à Auschwitz ; probablement avant la mi-mars 1943 [2]. Selon le témoignage d’un rescapé non identifié, il est battu à mort par un kapo.

Ayant été déporté au KL Sachsenhausen le 24 janvier 1943, Georges Savary y rencontre Paul Mougeot, de Poisson (52), qui y est transféré dans le convoi du 29 août 1944. Celui-ci lui apprend la mort de Pierre Gazelot et d’Henri Queruel à Auschwitz. Le 10 octobre, au lendemain de cette conversation, Louis Mougeot est pris dans un transport vers un autre camp, Treibnitz (il mourra au KL Flossenbürg le 10 mars 1945).

Le 30 juillet 1946, sur un feuillet à en-tête de la FNDIRP, Henri Gorgue, rescapé du convoi, certifie que Pierre Gazelot est décédé à Auschwitz à une date qu’il estime être « fin 1942 ». Auparavant, André Faudry a fait la même déclaration.

Le nom de Pierre Gazelot est inscrit sur la plaque dédiée « aux déportés politiques, aux déportés du travail et aux victimes civiles de la guerre 1939-1945 » apposée dans le hall de l’Hôtel de Ville de Saint-Dizier.

Le 16 juin 1947, par arrêté ministériel, la mention “Mort pour la France” est apposée en marge des registres d’état civil. Le 23 décembre 1993, Pierre Gazelot est déclaré “Mort en déportation”.

Par un arrêté en date du 16 août 1949, il est homologué au grade de sergent dans la Résistance intérieure française (R.I.F.).

En octobre 1957, sa veuve, Andrée Gazelot, reçoit pour lui le titre de “déporté politique” (carte n° 11541093).

Notes :

[1] Marc Gazelot : son nom est inscrit sur le Monument aux morts de Saint-Dizier, près de la gare).

[2] La date de décès inscrite sur les actes d’état civil : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. Concernant Pierre Gazelot, c’est le 15 décembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 367 et 405.
- Mémorial de la Shoah, Paris, site internet, archives du Centre de documentation juive contemporaine, doc. IV-198.
- Club Mémoires 52, Déportés et internés de Haute-Marne, Bettancourt-la-Ferrée, avril 2005, p. 22.
- Christiane Lesage, sa fille, courrier, copie d’une coupure de presse (sans titre) du 22 novembre 1947 (01-2008) ; messages 01 et 06-2013.
- Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen, dossier de Pierre Gazelot (21 P 454 420), recherches de Ginette Petiot (message 01-2013).
- Site Mémorial GenWeb, relevé de Raymond Jacquot, 2004.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 29-09-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.