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Musée de la Résistance 
de Blois, cliché ARMREL.

Joseph, François, Filloux naît le 22 mars 1899 à Villefranche-sur-Cher, à 6 km de Romorantin (Loir-et-Cher – 41), chez ses parents, François, Ambroise, Filloux, 37 ans, vigneron, et Françoise Beaulande, 31 ans, son épouse, habitant au lieu-dit Riou. Les témoins pour l’inscription du nouveau-né à l’état civil sont un autre vigneron et un sabotier. Son père s’est remarié après le décès de sa première épouse, avec laquelle il avait déjà eu un garçon, Mathieu, son demi-frère.

Pendant un temps, Joseph Filloux travaille comme cultivateur (probablement vigneron).

Le 16 avril 1918, il est incorporé au 95e régiment d’infanterie. Le 12 septembre, son unité part « aux armées ». Sa campagne contre l’Allemagne est comptabilisée jusqu’au 23 octobre 1919. Le 21 mars 1921, il est renvoyé dans ses foyers, titulaire d’un certificat de bonne conduite. Du 5 mai au 30 juin 1921, il est rappelé au 113e R.I. par « application de l’article 33 » [?].

En juin 1921, Joseph Filloux a quatre dents fracturées par « coups de tête de cheval » et doit porter une prothèse dentaire.

Le 3 octobre 1921, à Villefranche-sur-Cher, il se marie avec Marthe Maubert. Ils auront un fils, André, né le 22 novembre 1924 à Villefranche.

Au moment de son arrestation, Joseph Filloux est toujours domicilié dans cette commune.

Pendant une période, il est employé des Postes et Télégraphes à Romorantin, avec Roger Morand (fusillé à Orléans), et Marcel Renaud.

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Romorantin. La Poste (à droite), au-dessus de la Sauldre. 
Carte postale non datée. Collection Mémoire Vive.

Le 30 avril 1942, à Romorantin, cinq résistants communistes sont découverts par des soldats allemands alors qu’ils distribuent des tracts. Armés, ils ne se laissent pas arrêter et blessent les soldats dont un sous-officier qui succombe à ses blessures. Les mesures de représailles prévoient l’exécution immédiate de dix communistes, Juifs et de proches des auteurs présumés. Vingt autres personnes doivent être exécutées si au bout de huit jours les « malfaiteurs » ne sont pas arrêtés. Des rafles sont opérées dans la ville et dans le département afin de pouvoir « transférer d’autres personnes vers l’Est, dans les camps de travaux forcés. »

Le lendemain 1er mai, Joseph Filloux arrêté comme otage avec son fils et son frère Mathieu. D’abord détenus à Orléans, ils sont transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, Joseph Filloux est sélectionné avec son fils et son frère parmi plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Joseph Filloux est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45540 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée [1]).

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942. 
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 
Oświęcim, Pologne. 
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

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Portail du sous-camp de Birkenau, secteur B-Ia, semblable 
à celui du secteur B-Ib par lequel sont passés tous les “45000”.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés aux travail dans différentsKommandos.

Le 13 juillet – après les cinq premiers jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Joseph et André Filloux sont dans la moitié des membres du convoi qui reste dans ce camp en construction choisi pour mettre en œuvre la “solution finale” (contexte plus meurtrier). André est assigné au Block 12 (avec son père ?).

André Filloux ayant contracté la dysenterie, le Pfleger (infirmier) de son Block ordonne son transfert au Block des contagieux. Joseph Filloux, ne voulant pas abandonner son fils, y entre avec lui, malgré les tentatives de leurs camarades pour l’en dissuader. Le fait est resté dans la mémoire de Henri Peiffer, de Villerupt (54), qui les a vu partir : « Le père était de petite taille, le fils 1 m 70 environ ».

Joseph Filloux meurt à Birkenau le 17 août 1942, selon les registres du camp.

Son frère Mathieu meurt après lui le 21 octobre. Son fils André – le plus jeune déporté du convoi, à 18 ans – meurt le 4 décembre.

Après la guerre, le Conseil municipal de Villefranche-sur-Cher donne les noms de Joseph et André Filloux à une rue de la commune.

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Cliché ARMREL (voir Sources).

Le nom de Joseph Filloux est inscrit sur un plaque commémorative située dans le hall de la Poste de Romorantin-Lanthenay « À nos camarades des PTT victimes de leur devoir ». Les trois Filloux ont une place commune dans le carré des « corps restitués aux familles » de Villefranche-sur-Cher.

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Cliché ARMREL (voir Sources).

Leurs noms sont inscrits sur le monument « À la mémoire des victimes civiles de la guerre 1939-1945 »,sur la route nationale n°76, près de la gare, parmi les cinq « Morts à Auschwitz ».

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Cliché ARMREL (voir Sources).

Sources :

- Son nom (orthographié « FICOUX ») et son matricule (avec une erreur : « 45441 ») figurent sur la Liste officielle n°3 des décédés des camps de concentration d’après les archives de Pologne, éditée le 26 septembre 1946 par le ministère des anciens combattants et victimes de guerre, page 60. 
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 81, 140 et 141, 365 et 404. 
- Archives départementales du Loir-et-Cher (AD 41), fiche d’arrestation de Joseph et André Filloux, dossier 889 (cote 1375 W 64), fichier alphabétique des déportés du CRSGM (cote 56 J 5) ; site internet du conseil général, archives en ligne ; registres des naissances de Villefranche-sur-Cher 1863-1902 (cote 1 MIEC 280 R1), année 1899, acte n° 7 (vue 562/610) ; registre des matricules militaires, bureau de recrutement de Blois, classe 1919 (cote 2 MI 48/R157), matricule 1939 (vue 585/672). 
- Mémorial de la Shoah, Paris, site internet, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : XLIII-89 (télégramme non daté du Militärbefehlshaber in Frankreich (MbF), signé par Carl Heinrich von Stülpnagel). 
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 287 (21351/1942). 
- Association de Recherche pour la Mémoire de la Résistance en Eure-et-Loir (ARMREL) : photographies. 
- Site Mémorial GenWeb, 41-Villefranche-sur-Cher et Romorantin, relevés de Monique Diot Oury (2007) et Christine Fabre-Helynck (11-2004). 
- Site Les plaques commémoratives, sources de mémoire (aujourd’hui désactivé – nov. 2013), photographie de Jean-Jacques Guilloteau.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 15-09-2014)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été reconnue par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin Après Auschwitz, n°21 de mai-juin 1948).