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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Alfred, Pierre, Chapat naît le 12 octobre 1906 à Dore-l’Église (Puy-de-Dôme).

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 14, rue Désiré-Préaux à Montreuil-sous-Bois [1] (Seine / Seine-Saint-Denis). Il est célibataire et travaille comme magasinier des établissements Pernod.

Militant communiste, Alfred Chapat est secrétaire de la cellule de son entreprise et membre de la section de Montreuil de la région Paris-Est du PCF.

Sous l’occupation, les Renseignements Généraux le considèrent comme un « militant communiste actif » : le 26 octobre 1940, le préfet de police de Paris signe un arrêté ordonnant son internement administratif, mais celui-ci est sans objet puisque Alfred Chapat est déjà en détention provisoire sous le coup d’une instruction.

Le 19 ou le 20 octobre, il a été arrêté par les services du commissariat de police de Montreuil suite à une distribution de tracts communistes avec plusieurs autres militants de Montreuil dont Georges Brumm et Georges Gallot (ce dernier étant rapidement relaxé).

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Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du rez-de-chaussée.
(montage photographique)

Le 23 octobre, il fait partie des quatre hommes qui comparaissent devant la 12e chambre du Tribunal correctionnel de la Seine. Alfred Chapat est condamné à dix mois d’emprisonnement et ses co-accusés à huit mois chacun pour infraction au décret du 26 septembre 1939 (« reconstitution de ligue dissoute »). Une note de police indique une comparution devant la 10e chambre correctionnelle le 17 décembre 1940, mais il s’agit probablement d’une confusion, car c’est la date à laquelle Georges Brumm voit sa condamnation confirmée par un jugement de la Cour d’appel de Paris.

Probablement écroué à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e) le temps de l’instruction, Alfred Chapat est ensuite transféré à la Maison centrale de Poissy (Yvelines – 78).

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Au deuxième plan, la Maison centrale de Poissy vers 1916.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 21 mai 1941, en « exécution des notes préfectorales des 14 novembre 1940 et 18 février 1941 », le directeur de la prison transmet au bureau politique du cabinet du préfet de Seine-et-Oise quatre notices de détenus de la Seine devant être libérés à l’expiration de leur peine au cours du mois suivant, dont Alfred Chapat et François Dallet. Le 29 mai, le préfet de Seine-et-Oise transmet ce dossier au préfet de police de Paris, direction des services des Renseignements généraux.

Dès le 8 juin, le préfet de police envoie au préfet de Seine-et-Oise les ampliations d’arrêtés d’internement administratif concernant deux de ces détenus prochainement libérables de Poissy : Alfred Chapat et François Dallet. Le document concernant Alfred Chapat porte déjà la date légale de sa libération, prévue deux semaines plus tard. Le 14 juin, le préfet de Seine-et-Oise écrit au directeur de la prison pour le « prier de bien vouloir conserver provisoirement à la Maison centrale de Poissy les [deux] militants communistes », faute de place au centre de séjour surveillé d’Aincourt, alors saturé. Le 24 juin, après avoir signé l’arrêté d’internement le concernant, Alfred Chapat est maintenu en détention à Poissy.

Le 28 novembre, il fait partie d’un groupe de neuf internés transférés de Poissy au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne – 86). Parmi eux, quatre autres futurs “45000” : Raymond Langlois, Pierre Marin, Marcel Nouvian et Eugène Thédé.

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Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”,
vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne),
Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le 9 décembre, le préfet de Seine-et-Oise écrit au “Conseiller supérieur d’administration de guerre” de la Feldkommandantur de Saint-Cloud comme suite à ses instructions du 13 novembre, afin de lui transmettre les avis de transfert des neuf hommes.

À Rouillé, Alfred Chapat retrouve Georges Brumm, qui est passé par le camp français d’Aincourt.

Le 22 mai 1942, Alfred Chapat fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 124 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduit au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, Alfred Chapat est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

transportaquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Alfred Chapat est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I), peut-être sous le numéro 45351 selon les listes reconstituées (la photo d’immatriculation du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pas été identifiée avec certitude).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a été affecté Alfred Chapat.

Il meurt à Auschwitz le 1er septembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp [2].

Il est homologué comme “Déporté politique”.

Le nom d’Alfred Chapat est parmi les 58 inscrits sur la stèle commémorative apposée devant le siège de la section du PCF, au 10, rue Victor-Hugo, pour rendre « Honneurs aux communistes de Montreuil tombés pour une France libre forte et heureuse ».

© Mémoire Vive.

© Mémoire Vive.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 20-11-1987).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 385 et 398.
- Cl. Cardon-Hamet, notice in 60e anniversaire du départ du convoi des 45000, brochure répertoriant les “45000” de Seine-Saint-Denis, éditée par la Ville de Montreuil et le Musée d’Histoire vivante, 2002, page 23, citant : Daniel Tamanini de la FNDIRP (lettre du 23-04-1989).
- Archives nationales, correspondance de la Chancellerie sur des procès pour propagande et activité communistes, BB18 7035 (BL 2047).
- Archives de Paris, registre du greffe du tribunal correctionnel de la Seine (D1u6 5849).
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “occupation allemande” : camps d’internement… (BA 2374) ; liste des internés communistes (BA 2397).
- Archives départementales des Yvelines et de l’ancien département de Seine-et-Oise (AD 78), Montigny-le-Bretonneux, centre de séjour surveillé d’Aincourt ; (1W77), dossier individuel (1W99).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : liste XLI-42, n°50.
- Archives départementales de la Vienne, camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 164 (26567/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 23-10-2015)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Montreuil-sous-Bois : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ.

Concernant Alfred Chapat, c’est le 15 décembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès.

Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.