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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Georges, Jean, Capliez naît le 1er décembre 1920 chez une sage-femme officiant au 18 rue Crozatier à Paris 12e, fils d’Henri Capliez, 27 ans, ajusteur, et de Marthe Duc, 27 ans, lingère, son épouse, domiciliés au 13 rue des Pavillons à Puteaux [1] (Seine / Hauts-de-Seine).

Au moment de son arrestation, il est domicilié chez ses parents, dans les HBM du 4, rue Cartault à Puteaux. Il est célibataire (il a 19 ans).

Puteaux. Groupe Nord des HBM de la rue Cartault. Carte postale oblitérée en 1934. Coll. Mémoire Vive.

Puteaux. Groupe Nord des HBM de la rue Cartault.
Carte postale oblitérée en 1934. Coll. Mémoire Vive.

Georges Capliez est ajusteur, comme son père.

Le 11 septembre 1940, Georges Capliez, Pierre Bourneix fils, René Maroteaux et trois autres jeunes militants communistes de Suresnes et Puteaux sont arrêtés par la police française et écroués à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e) pour « propagande communiste clandestine ». Ils sont probablement libérés peu de temps après sur décision des autorités allemandes.

Le 9 novembre, sur instruction des Renseignements généraux, le préfet de police de Paris signe un arrêté ordonnant l’internement administratif de Georges Capliez, au motif : « a été arrêté pour distribution de tracts, continue son activité ». Le jour même, celui-ci est arrêté par des agents du commissariat de la circonscription de Puteaux, en même temps qu’Auguste Archen et Pierre Bourneix, parmi 66 suspects d’activité communiste de la Seine, et conduit au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé en octobre 1940 dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt.

Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930. Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche. Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930.
Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche.
Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Conçus à l’origine pour 150 malades, les locaux sont rapidement surpeuplés : en décembre 1940, on compte 524 présents, 600 en janvier 1941, et jusqu’à 667 au début de juin. Pour cette raison, Georges Capliez est assigné, avec Pierre Bourneix, au “dortoir des jeunes” (“DJ”), ancien réfectoire réaffecté à cet usage.

Sanatorium de la Bucaille à Aincourt. Une salle de réfectoire. Peut-être celle du bâtiment où se trouvent les communistes internés et qui - vidé de ses tables - deviendra le dortoir des jeunes. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Sanatorium de la Bucaille à Aincourt. Une salle de réfectoire. Peut-être celle du bâtiment où se trouvent les communistes internés
et qui – vidé de ses tables – deviendra le dortoir des jeunes.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 25 février 1941, le commissaire spécial directeur du camp complète le formulaire individuel de “Révision trimestrielle” du dossier de Georges Capliez : rubrique “Conduite au centre”, « A été puni d’un jour de cellule pour chants révolutionnaires » ; rubrique “Avis sur l’éventualité d’une mesure de libération”, « Membre des Jeunesses communistes – devrait être dirigé sur un camp de Jeunesse plus que sur un camp de concentration » (en l’occurrence, un centre d’internement français).

Le 23 avril 1942, Georges Capliez fait partie d’un groupe de 60 détenus – liste nominative de A à Ch – transférés au camp français (CSS) de Voves (Eure-et-Loir), où il est enregistré sous le matricule n° 126.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943. © Musée de la Résistance Nationale, Champigny, fonds de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943.
© Musée de la Résistance Nationale, Champigny, fonds de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.

Le 10 mai 1942, il fait partie des 81 internés remis aux “autorités d’occupation” à la demande de celles-ci et transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C. Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942. Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C.
Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.
Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Georges Capliez est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45327, selon les listes reconstituées (la photo d’immatriculation correspondant à ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp) ; Georges Capliez se déclare alors sans religion (Glaubenslos). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Georges Capliez.

Il meurt à Auschwitz le 20 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher), qui indique pour cause mensongère de sa mort « insuffisance cardiaque » (Herzmuskelschwäche). Il a 21 ans.
(aucun des douze “45000” de Puteaux n’a survécu)

Notes :

[1] Puteaux : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes industrielles de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert effectif en janvier 1968).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 383 et 398.
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt, cotes 1W76, fiche individuelle (1W80) et notice individuelle (1W98).
- Comité du souvenir du camp de Voves, liste établie à partir des registres du camp conservés aux Archives départementales d’Eure-et-Loir.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “Occupation allemande”, liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 158 (23113/1942).
- Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, direction des patrimoines de la mémoire et des archives (DPMA), Caen : copies de pages du Sterbebücher provenant du Musée d’Auschwitz et transmises au ministères des ACVG par le Service international de recherches à Arolsen à partir du 14 février 1967, carton de A à F (26 p 840).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 7-10-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.