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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Clément Brioude(s) naît le 16 août 1904 à Paris 15e, fils de Camille Brioude(s) et Élise Martini. L’administration française orthographiera généralement  son nom « Brioude ».

Le 2 juillet 1920, le tribunal pour enfant et adolescent de la Seine l’astreint à une « colonie pénitentiaire » jusqu’à sa majorité jusqu’à sa majorité (civile probablement, soit 21 ans ; à Mettray, en Indre-et-Loire, ou à Belle-Île-en-Mer ?), pour vol.

Clément Brioude subit huit condamnations successives, dont cinq pour vol qualifiés et tentatives, avec des séjours en prison.

Au moment de son arrestation, il est domicilié à Bagneux [1] (Seine / Hauts-de-Seine).

Le 29 décembre 1941, la 13e chambre du tribunal correctionnel de la Seine le condamne à trois mois d’emprisonnement pour « défense » (?) et tentative de vol. Le 31 janvier 1942, à l’expiration de sa peine, il est « libéré » de la maison d’arrêt de Fresnes (Seine / Val-de-Marne). En fait, il est probablement conduit au Dépôt. Le directeur de la police judiciaire, signe une note indiquant que Clément Brioude(s) est célibataire et n’exerce aucune profession, et concluant : « Cet individu est dangereux pour la sécurité publique ». Le 31 janvier 1942, le préfet de police signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1930 et de la loi du 3 septembre 1940 ; Clément Brioude « est astreint à résider pendant une durée indéterminée dans un centre de séjour surveillé ».

Le 5 mai suivant, Clément Brioude fait partie des 14 internés administratifs de la police judiciaire (dont au moins onze futurs “45000”) qui sont conduits avec 37 communistes à la gare du Nord, « à la disposition des autorités allemandes et dirigés sur Compiègne par le train de 5h50 » pour être internés au camp de Royallieu (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine cde Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler). Clément Brioude(s) fait partie des quelques hommes du convoi déportés comme “associaux”.

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Clément Brioude(s) est enregistré au camp-souche d’Auschwitz (Auschwitz- I) sous le numéro 45303 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée [2]).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photo), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la “solution finale” (le génocide des Juifs européens), ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau – Clément Brioude(s) est dans la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers utilisant certains ouvriers qualifiés.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».  « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ». « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

En juillet 1943, comme les autres détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”), il reçoit l’autorisation d’écrire (en allemand et sous la censure) à sa famille et d’annoncer qu’il peut recevoir des colis.

À la mi-août, il est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) au premier étage du Block11, la prison du camp, pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 - où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur des femmes détenues - et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”. Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 – où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur
des femmes détenues – et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”.
Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 12 décembre, à la suite de la visite du nouveau commandant du camp, le SS-ObersturmbannführerArthur Liebehenschel, et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blocks et Kommandos d’origine.

À la fin de l’été 1944, Clément Brioude(s)est parmi les trente-six “45000” qui restent à Auschwitz, alors que les autres sont transférés vers d’autres camps.

Entre le 18 et le 25 janvier 1945, lors de l’évacuation d’Auschwitz, il est parmi les vingt “45000” incorporés dans les colonnes de détenus dirigées vers le KL [3] Mauthausen. Il y est enregistré sous le matricule 116 593.

Clément Brioude(s) meurt à Mauthausen le 19 avril 1945.

Son nom (orthographié « Brioude ») est inscrit parmi les déportés sur le Monument aux morts de Bagneux, rue de la Mairie.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 353.
- Archives de la préfecture de police (de la Seine), site du Pré-Saint-Gervais ; cartons “occupation allemande”, internés au camp de Vaujours… – Tourelles (BA 1837) ; cabinet du préfet sous l’occupation ( 1 W 337), dossier de Brioude Clément (22250).
- Site Mémorial GenWeb, 92-Bagneux, relevé de François Le Plus (08-2004).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 5-06-2017)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Bagneux : jusqu’en juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”.

[2] Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été reconnue par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin « Après Auschwitz« , n°21 de mai-juin 1948).

[3] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.