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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Jean Beudou naît le 22 avril 1907 à Bordeaux (Gironde – 33), chez ses parents, Joseph Beudou, 40 ans, employé d’octroi, et Bernarde Cérézuèle, 37 ans, domiciliés au 60, cours Cicé (?).

Il devient ébéniste. En 1935, il habite avec ses parents au 101, rue Émile Combe.

Le 29 juin 1935 à Talence (33), Jean Beudou, âgé de 28 ans, épouse Marie Georgette Gellibert, née le 24 avril 1910 à Saugnac-et-Muret (Landes), couturière, domiciliée avec ses parents, cultivateurs, à Belin (33). Ils auront un fils, Christian Bernard, né le 27 janvier 1936 à Talence.

Au moment de son arrestation, Jean Beudou est domicilié au 103, rue des Visitandines à Talence, quartier de La Taillade.

En mars 1940, pendant la drôle de guerre, Jean Beudou est arrêté pour propagande communiste et incarcéré au Fort du Hâ à Bordeaux. En novembre suivant, à la suite d’un jugement, il est remis en liberté (circonstances restant à préciser…).

Bordeaux. La rue du Palais-de-Justice et le Fort du Ha. Carte postale oblitérée en 1904. Collection de Jean-Paul Dauris.

Bordeaux. La rue du Palais-de-Justice et le Fort du Ha. Carte postale oblitérée en 1904. Collection de Jean-Paul Dauris.

Fin mars-début avril 1941, il est arrêté à son domicile puis interné au camp français de Mérignac (33).

En mai 1942, Jean Beudou est transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Enregistré sous le matricule n° 3872, il est assigné au bâtiment A1. Le dernier courrier qu’il adresse à son épouse depuis ce camp est daté du 27 mai 1942.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ; à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8. Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ;
à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8.
Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Jean Beudou est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Jean Beudou est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45242 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Jean Beudou.

Il meurt à Auschwitz le 22 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) ; la cause mensongère indiquée pour sa mort est « accident vasculaire cérébral » (Gehirnschlag).

Le 7 mars 1946, Gabriel Torralba, de Chambéry-Villenave-d’Ornon, rescapé du convoi, rédige et signe une attestation certifiant que Jean Bedou est décédé au camp d’Auschwitz « dans le courant du mois d’août 1942 », ce qui est exact. Deux semaines plus tard, le 22 mars, Raymond Montégut, de Châtellerault, autre rescapé rédige et signe une attestation formulée dans les mêmes termes.

Le 31 août 1946, l’officier de l’état civil alors en fonction au ministère des anciens combattants et victimes de guerre (ACVG) dresse l’acte de décès officiel de Jean Bedou « sur la base des éléments d’information figurant au dossier du de cujus, qui nous a été présenté ce même jour » (probablement les témoignages de Torralba et Montégut), et en fixant la date au 15 août 1942, soit à la moitié de ce mois.

Le 7 avril 1947, Marie Georgette Beudou remplit un formulaire du ministère des ACVG pour demander l’inscription de la mention “Mort pour la France” sur l’acte de décès d’un déporté politique. Celle-ci est inscrite le 3 septembre suivant sur le registre de la mairie de Talence.

Le nom de Jean Bedou est inscrit sur le monument au morts, dans le cimetière communal de Talence.

Le 26 décembre 1953, Marie Georgette Beudou – en qualité de « veuve du déporté » – complète et signe un formulaire du ministère des ACVG pour demander l’attribution du titre de déporté politique à son mari à titre posthume (elle ne tente pas de demander le titre de déporté résistant). À la rubrique IV, “Renseignements relatifs à l’arrestation et l’exécution, l’internement ou la déportation”, elle inscrit : « Convoqué par Poinsot le 1er avril 1941 » ; citant comme “personnes impliquées dans la même affaire”, Jean Mette (arrêté le 15 février 1941, fusillé comme otage à Souges le 24 octobre suivant), René Balix (?) et Marcel Penast (?) ; à vérifier… À la rubrique V, “Renseignements relatifs au motif de l’exécution, de l’internement ou de la déportation”, elle inscrit : « Attitude antiallemande. Arrestation après le sabotage du transformateur du poste électrique de Pessac ». Le 2 mai 1955, le ministère accorde le titre de déporté politique à Jean Bedou et envoie la carte DP n° 1122.0342 à sa veuve.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 9-09-1987) ; la date exacte n’est toujours pas mentionnée, à savoir le 22 août 1942 au lieu du 15 août.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 364 et 395.
- Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, direction des patrimoines de la mémoire et des archives (DPMA), Caen : copies de pages du Sterbebücher provenant du Musée d’Auschwitz et transmises au ministères des ACVG par le Service international de recherches à Arolsen à partir du 14 février 1967, carton de A à F (26 p 840) ; dossier individuel (21 P 425 378), recherches de Ginette Petiot le 24 janvier 2017.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 83 (23739/1942).
- Site Mémorial GenWeb, relevé de Pascale Beaudon (2002).

MÉMOIRE VIVE

( dernière mise à jour, le 30-04-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.