Auschwitz-I, le 8 juillet 1942. Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oswiecim, Pologne. Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Marcel Bessot naît le 8 juin 1920 à Paris 10e (75), fils d’Auguste Bessot, qui est, ou sera, appariteur à l’Hôtel de ville de Paris, et de Germaine Haranger. Marcel a trois frères plus jeunes : Maurice, âgé de 20 ans en juillet 1942, Henri, né le 19 novembre 1923 à Saint-Maxent (Somme), et Roger, 15 ans en 1942.

Célibataire, Marcel Bessot est domicilié chez ses parents au 6, rue Larrey à Paris 5e, dans une cité ouvrière réservée aux familles nombreuses.

Jusqu’à son arrestation, il est employé municipal de la Ville de Paris comme cantonnier auxiliaire.

Le 20 décembre 1940, Marcel Bessot est arrêté par des agents de la préfecture de police avec un jeune apprenti ajusteur de 16 ans alors qu’il colle des “papillons” communistes. Placé sous mandat de dépôt le lendemain, il est inculpé d’infraction au décret du 26 septembre 1939 et mis à la disposition du Parquet de la Seine.

Le samedi 15 mars 1941, la 15e chambre du Tribunal correctionnel de la Seine le condamne à six mois d’emprisonnement. Son père, fonctionnaire bien noté  qui, selon la police, est dévoué à la politique du Maréchal Pétain, a été convoqué à l’audience comme civilement responsable.

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er. Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage. (montage photographique)

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage.
(montage photographique)

Marcel Bessot fait appel. À une date restant à préciser, la Cour d’appel de Paris le confirme le premier jugement.

Cependant, Marcel Bessot semble avoir été libéré le jour du jugement « après avoir signé l’acte de désaveu du Parti communiste et s’être engagé sur l’honneur à cesser dans l’avenir toute activité politique subversive ». Étroitement surveillé par la première section des Renseignements généraux, il semble cesser toute activité. Le 22 octobre 1941 et le 19 mars 1942, des perquisitions effectuées à son domicile restent infructueuses.

Il trouve alors un emploi à la librairie-papeterie sise 48, rue d’Assas, à Paris 6e.

Le 28 avril 1942, il est de nouveau arrêté, à son domicile, lors d’une grande vague d’arrestations (397 personnes) organisée par « les autorités d’occupation » dans le département de la Seine, avec le concours de la police française, et visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin ayant précédemment fait l’objet d’une procédure judiciaire, avec ou sans condamnation, notamment de jeunes mineurs ayant été remis à leur famille.

Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Enregistré sous le matricule 3928, Marcel Bessot est assigné pendant un temps au bâtiment C5.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C. Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942. Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C.
Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.
Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Marcel Bessot est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Marcel Bessot est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45241 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée [1]).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Marcel Bessot est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.
Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Du 9 septembre au 11 décembre, il est affecté au Kommando de la serrurerie (Schlosserei).Marcel Bessot meurt à Auschwitz le 29 décembre 1942, selon une copie du registre de la morgue (Leichenhalle) relevée clandestinement par la résistance polonaise interne du camp, et où est inscrit le matricule n° 45241 (ce local de regroupement temporaire des cadavres est situé au sous-sol du Block 28). Il a vingt-deux ans.

Le 20 août 1944, après avoir été pris par les troupes allemandes lors des combats pour la libération de Paris dans le 5e arrondissement, son frère Henri – 20 ans – est fusillé dans les jardins du Palais du Luxembourg.

Marcel Bessot est homologué comme “Déporté politique”.

Notes :

[1] Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été reconnue (son nom orthographié “Besson”) par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin Après Auschwitz, n°21 de mai-juin 1948).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 371 et 395.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen.
- Archives de Paris : archives judiciaires, jugement du 15 mars 1941 (D1u6-3733).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), APPo, site du Pré-Saint-Gervais ; cartons “occupation allemande” (BA ?) ; dossier individuel au cabinet du préfet (1w0533-14165).
- Archives Départementales du Val-de-Marne (AD 94), Créteil : prison de Fresnes, détenus libérés le 6-5-41 (511W 13).
- Bureau d’information sur les anciens prisonniers, relevé dans les archives du Musée d’Auschwitz-Birkenau (01-2009).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 30-11-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.