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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

André Amarot naît le 23 mars 1902 à Sornac, à 20 km d’Ussel (Corrèze), chez ses parents, Pierre Amarot, 48 ans, et Marie, Françoise, Lecadet, son épouse, 41 ans, petits agriculteurs domiciliés aux Valettes, une ferme en location. Cette famille de onze enfants est durement éprouvée par la guerre de 1914-1918 : deux fils tués, deux revenus grièvement blessés. André Amarot a un frère, Émile, le 21 avril 1905, domicilié à Vitry en 1945 et travaillant comme manœuvre.

Au moment de son arrestation, André Amarot est domicilié au 37, avenue du Rocher [1] à Vitry-sur-Seine [2] (Seine / Val-de-Marne) ; près de la gare.

Officiellement célibataire, sans enfant, il a une compagne : Marthe Fargeix, veuve Merlot, née le 12 décembre 1912 à Ivry-sur-Seine (94) ; pourtant, lors de son procès, il est déclaré marié.

André Amarot est ouvrier paveur dans une entreprise travaillant pour la ville (sur les listes électorales de 1945, il est inscrit comme teinturier).

Adhérent du Parti communiste, il milite dans la cellule du Port à l’Anglais. Il est membre des Amis de l’URSS.

Lors d’une perquisition après la dissolution du Parti communiste probablement, la police trouve son nom sur une liste de la permanence du 11, place de l’Église à Vitry (11, rue Darnétal ?).

Le 10 mai 1941, André Amarot est arrêté pour distribution et/ou possession de tracts. Probablement inculpé d’infraction au décret du 26 septembre 1939 (interdiction de la propagande communiste), il est placé sous mandat de dépôt le lendemain et écroué à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e).

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er. Tribunal correctionnel, un des porches du rez-de-chaussée. (montage photographique)

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du rez-de-chaussée.
(montage photographique)

Le 16 mai 1941, il comparaît – seul – devant la 12e chambre du tribunal correctionnel de la Seine qui le condamne à trois (ou quatre ?) mois de prison. Il est transféré à l’établissement pénitentiaire de Fresnes [1] (Seine / Val-de-Marne).

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

À une date restant à préciser, il est transféré à la Maison centrale de Poissy (Seine-et-Oise / Val-d’Oise).

Au deuxième plan, la Maison centrale de Poissy vers 1916.  Carte postale. Collection Mémoire Vive

Au deuxième plan, la Maison centrale de Poissy vers 1916.
Carte postale. Collection Mémoire Vive

Le 12 juillet, en « exécution de la note préfectorale » du 14 novembre 1940, le directeur de la prison transmet au bureau politique du cabinet du préfet de Seine-et-Oise 21 notices de détenus de la Seine devant être libérés à l’expiration de leur peine au cours du mois suivant. Le 26 juillet, le préfet de Seine-et-Oise transmet le dossier au préfet de police de Paris, direction des services des Renseignements généraux.

Le 19 août, André Amarot est relaxé. Cependant, la police française le considère toujours comme un « agent actif de la propagande communiste clandestine ».

Le 19 septembre, André Amarot est arrêté chez lui à six heures du matin par des inspecteurs des Renseignements généraux. Le jour-même, le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1939. André Amarot est aussitôt conduit au dépôt de la préfecture de police (la Conciergerie, sous-sol du Palais de Justice, île de la Cité) en attendant son transfert dans un camp ; en même temps que Léon Lecomte et Camille Delattre, également libérés de Poissy au mois d’août précédent.

Le 9 octobre, André Amarot fait partie des 60 militants communistes (40 détenus venant du dépôt, 20 venant de la caserne des Tourelles) transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne) ; départ gare d’Austerlitz à 8 h 25, arrivée à Rouillé à 18 h 56. Dans ce camp, il est question d’une visite de sa compagne (lettre de Roger Mauger du 27 février 1942).

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le 22 mai 1942, André Amarot fait partie d’un groupe de 148 internés de la Seine (pour la plupart déportés avec lui) remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 -Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin, André Amarot est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, André Amarot est enregistré à Auschwitz sous le numéro 45168 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau -, une moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I). Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté André Amarot.Il meurt à Auschwitz le 17 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

(aucun des treize “45000” de Vitry n’est revenu).

Son frère Émile est prisonnier de guerre en Allemagne pendant trois ans. Il a un neveu (son nom ?), lui aussi prisonnier de guerre, qui est fusillé en Allemagne à la fin du conflit.

Une plaque commémorative a été apposée sur la façade de l’ancien domicile d’André Amarot.

Son nom est inscrit sur le monument « À la mémoire de Vitriotes et des Vitriots exterminés dans les camps nazis » situé place des Martyrs de la Déportation à Vitry.

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Une plaque dédiée aux “45000” vitriots a été apposée
au dos du monument. Elle est parfois masquée par la végétation.
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La plaque apposée pour le 50e anniversaire de la libération
des camps (avril 1995).

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 28-05-1987).

Notes :

[1] Avenue du Rocher : le 30 juillet 1945, le Conseil municipal de Vitry-sur-Seine la nomme avenue Pierre-Brossolette.

[2] Vitry-sur-Seine et Fresnes : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

Sources :

- Informations collectées par José Martin (frère d’Angel Martin) pour Roger Arnould (FNDIRP), 1973.
- Archives départementales de la Corrèze, archives en ligne : état civil de Sornac, registre des naissances de l’année 1902, acte n°11 (2E 261-11, vue 205/588).
- 1939-1945, La Résistance à Vitry, Ville de Vitry-sur-Seine, 1992, page 21.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 389 et 393.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374), liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397) ; registre des consignés provisoires au Dépôt, mai 1941-mars 1942 (C C 2-1).
- Musée de la Résistance Nationale, Champigny-sur-Marne : fiche de police d’André Amarot au commissariat d’Ivry-sur-Seine.
- Archives de Paris : archives du tribunal correctionnel de la Seine, rôle du greffe du 31 mai au 3 septembre 1941( D1u6-5856).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt (1W69).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI-42, n° 20.
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Archives communales de Vitry-sur-Seine : listes électorales de 1945.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 24 (31146/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 14-04-2019)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.