Photo anthropométrique prise le 15 juillet 1942
par le service de l’identité judiciaire.
© Archives de la Préfecture de Police (APP), Paris.

Une jeunesse marquée par la guerre et la montée du fascisme

Vittoria DAUBEUF, née Nenni, dite « Viva », est née à Ancône le 31 octobre 1915. C’est l’une des quatre filles de Pietro Nenni, dirigeant du parti socialiste italien et journaliste socialiste. A sa naissance son père est mobilisé.

Vittoria passe son enfance à Milan jusqu’à l’exil de son père.

En 1928, la famille se réfugie en France et Victoria fait ses études secondaires à Paris.

Elle se marie en 1937 avec un Français, Henri Daubeuf, imprimeur.

L’arrestation

En 1942 son mari est sollicité par les communistes pour imprimer journaux et brochures clandestins.

Le 18 juin 1942, nombre d’imprimeurs sont arrêtés dont Henri Daubeuf. Vittoria est laissée en liberté.

Elle aurait dû fuir, ce qu’on lui conseille.

Mais Vittoria n’abandonne pas son mari, elle va chaque jour à la préfecture de police, où il est en garde à vue dans les locaux des Renseignements généraux. C’est au cours d’une de ces visites qu’elle est arrêtée à son tour.

Elle est enfermée au dépôt jusqu’au 10 août 1942, comme son mari et les hommes de la même affaire .

Le 10 août, les hommes quittent le dépôt, puis ce sont les femmes pour le fort de Romainville.

Le lendemain matin, les hommes sont emmenés au Mont-Valérien pour être fusillés le 11 août 1942.

Photo anthropométrique prise le 14 juillet 1942
par le service de l’identité judiciaire.
© Archives de la Préfecture de Police (APP), Paris.

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Photographiée à Auschwitz-I, le 3 février 1943.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Vittoria meurt à Auschwitz-Birkenau des suites d’un violent typhus malgré un combat courageux contre la maladie.

Charlotte Delbo témoigne :

« Je l’ai vue le 15 juillet 1943. Elle semblait bien. Ses cheveux, rasés six mois auparavant, avaient repoussé en grosses boucles. Quelqu’un lui avait procuré un peigne fin : elle le passait sans cesse dans ses cheveux et tuait les poux, un par un, sur le peigne, avec ses ongles qui avaient poussé long depuis qu’elle ne travaillait plus aux champs. Je lui ai annoncé que les alliés avaient débarqué à Nettuno (nous l’avions appris par un journal allemand que nous avions volé dans la poche d’un SS à Raisko). « Mon père va bientôt rentrer chez lui. Comme il doit être heureux ! » (en fait Pietro Nenni, arrêté en France, était alors en prison en Italie). Puis, de la même voix, elle s’est mise à me raconter que sa sœur était venue la voir, qu’on faisait des préparatifs pour la renvoyer en France, que sa sœur l’attendait. Elle délirait, à froid. C’est le délire du typhus. »

Elle est morte le lendemain selon les Death Books from Auschwitz.

Pietro Nenni a appris la mort de Vittoria par le secrétaire au Saint-Siège, Monseigneur Montini en 1944.

L’acte de décès du camp d’Auschwitz a été remis à Nenni en 1956 par Souslov. Cet acte de décès donne pour date 16 juillet 1943 et pour cause : influenza.

Sources :

- Charlotte Delbo, Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1965 (réédition 1998), page 78.