Jean “Robert” PHILIPPOT – (45980 ?)

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Robert Philippot en 1936. © Assemblée nationale.

Robert Philippot en 1936.
© Assemblée nationale.

Jean, dit “Robert” (son deuxième prénom), Philippot naît le 14 mars 1889 à Castets [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Gironde), sur la Garonne à l’est de Langon, fils de François Philippot, marin, et de Marie Barrau (mariés le 11 mai 1883).

Pendant un temps, Robert Philippot travaille comme garçon de café.

Le 30 mars 1908, il s’engage volontairement pour trois ans comme soldat de 2e classe au 9e régiment d’infanterie, 26e bataillon du génie, en garnison à Marmande (Lot-et-Garonne – 47). Le 28 septembre, il est nommé soldat-musicien. Le 4 août 1909, il se rengage pour deux ans comme 2e sapeur-télégraphiste au 26e bataillon du Génie et arrive au corps le 22 août. Le jour même, il embarque à Port-Vendre pour débarquer à Alger le lendemain. Il revient en métropole du 14 juillet au 27 septembre 1910. Le 2 mars 1911, il est rapatrié d’Algérie. Le 12 juin suivant, il est affecté au 24e bataillon de sapeurs, au Mont-Valérien, qu’il rejoint deux jours plus tard. Le 1er mars 1913, il passe dans la disponibilité de l’armée active (démobilisé), titulaire d’un certificat de bonne conduite.

Il entre comme facteur dans l’administration des Postes, télégraphes et téléphones (PTT).

Le 16 octobre 1913 à Saint-Laurent (47), il se marie avec Claire Clarius. Ils auront trois enfants.

En novembre 1913, le couple habite Monclar, près de Marmande (47). Fin janvier 1914, il demeure à Feugarolles, commune limitrophe de Saint-Laurent (47).

Rappelé à l’activité militaire par le décret de mobilisation générale du 1er août 1914, Robert Philippot rejoint son unité le 1er septembre. Le 28 juillet 1915, il est nommé caporal par le chef du service télégraphique de première ligne du D.A.L. Le 1er janvier 1917, il est nommé sergent. Du 30 novembre 1918 au 17 mars 1919, il intègre l’Armée d’Orient (participe à la campagne de Salonique). Le 1er juin 1919, il est mis en congé illimité de démobilisation par le dépôt du génie de la 17e région (basé à Toulouse) et se retire à Saint-Laurent, (voie) de Savardac ?) En 1923, il sera élu président de l’Association Républicaine des Anciens Combattants (ARAC) pour le Lot-et-Garonne.

Robert Philippot est postier ambulant, puis, après sa démobilisation, facteur rural à Saint-Laurent, sur la rive de la Garonne en face de Port-Sainte-Marie, ville à tradition socialiste.

Vue sur Saint-Laurent, de l’autre côté du fleuve, depuis Port-Sainte-Marie. Carte postale voyagée en 1916. Coll. Mémoire Vive.

Vue sur Saint-Laurent et son église – de l’autre côté du fleuve – depuis Port-Sainte-Marie.
Carte postale voyagée en 1916. Coll. Mémoire Vive.

Ses qualités d’orateur dans les réunions publiques inquiètent la préfecture et l’administration qui tentent de l’éloigner d’un département sensible à la propagande communiste.
Admis à l’examen de facteur receveur, il vient d’être affecté au bureau de Feugarolles quand commence « l’affaire Philippot » : accusé d’avoir déclaré dans une réunion publique qu’en « cas de mobilisation, non seulement je ne partirais pas, mais je ferais mon possible pour empêcher les autres de partir », il est traduit devant le conseil de discipline, sa hiérarchie demandant la mise en disponibilité. Contestant le mot à mot de la phrase, Philippot réaffirme sa haine de la guerre en évoquant les cinquante-trois mois passés au front. Le conseil de discipline le sanctionne par un changement de résidence sans diminution de traitement.
Le 16 juillet 1923, il est muté au Havre (Seine-Inférieure / Seine-Maritime). Le Parti communiste et la CGTU lancent une campagne de protestation. Dans un premier temps, Philippot semble accepter son déplacement, car il a deux enfants à charge. En novembre 1923, après avoir quitté le département, il prend un congé illimité et revient à Saint-Laurent où il s’associe à un marchand de porcs.

De novembre 1923 au 28 décembre 1924, Philippot devient secrétaire de la Fédération communiste du Lot-et-Garonne. Il assure le secrétariat du rayon départemental de 1931 à 1934.

En décembre 1934 et par la suite, la famille est domiciliée à Port-Sainte-Marie (47).

Robert Philippot est candidat à toutes les élections législatives, cantonales et municipales de l’entre-deux-guerres. En octobre 1934, il est élu conseiller général du canton de Port-Sainte-Marie, et conseiller municipal en mai suivant. En 1935, il est désigné comme secrétaire de la Fédération départementale des élus du Front populaire. Lors des élections législatives de mai-juin 1936, il emporte la triangulaire du deuxième tour dans la circonscription d’Agen aux dépens du candidat radical socialiste qui avait obtenu le même nombre de voix au 1er tour. Au Palais-Bourbon, il participe aux commissions des PTT, de la marine marchande et des boissons.

La Chambre des députés, la salle des séances. Carte postale non datée, coll. Mémoire Vive.

La Chambre des députés, la salle des séances.
Carte postale non datée, coll. Mémoire Vive.

Localement, il est le fondateur du club de basket “l’Émulation sportive” (BCPL actuel) et le créateur de la fête départementale du PCF à Feugarolles, où elle s’est toujours tenue depuis la Libération.

Le 26 septembre 1939, le Gouvernement Daladier dissout par décret le Parti communiste français en raison de son soutien au pacte germano-soviétique du 23 août, de son approbation de l’entrée des troupes soviétiques en Pologne le 17 septembre et enfin de l’adoption le 21 septembre par son Comité central d’une résolution intitulée “Il faut faire la Paix”.

Le 28 septembre, le groupe parlementaire communiste change de nom et de programme pour maintenir son activité à la Chambre des députés, devenant le Groupe ouvrier et paysan français (GOPF).

Le même jour, l’URSS et l’Allemagne signent un traité de frontières et d’amitié organisant le partage de la Pologne, accompagné d’une déclaration dans laquelle les gouvernements soviétique et allemand s’engagent à faire des efforts pour « mettre fin à l’état de guerre qui existe entre l’Allemagne d’une part, la France et l’Angleterre d’autre part ».

Le 1er octobre, sous les signatures d’Arthur Ramette et Florimond Bonte, respectivement président et secrétaire général du groupe, et au nom de ses 43 députés, le GOPF adresse au président de la Chambre des députés, Édouard Herriot, une lettre demandant l’organisation d’une délibération du Parlement sur « les propositions de paix qui vont être faites à la France » grâce « aux initiatives diplomatiques de l’URSS ».

Le 4 octobre, les sessions extraordinaires du Sénat et de la Chambre des députés sont clôturées par décret, ce qui lève automatiquement l’immunité parlementaire protégeant les députés.

Dès le lendemain, 5 octobre, le commissaire du gouvernement du 3e tribunal militaire, ouvre une instruction contre Arthur Ramette et Florimond Bonte, respectivement président et secrétaire général du GOPF, et « tous autres que l’information fera connaître », pour infraction au décret de dissolution des organisations communistes. L’enquête devra notamment répondre à la question : la constitution du Groupe ouvrier et paysan français est-elle une infraction à l’article 1 du décret-loi du 26 septembre 1939 qui proscrit toute activité ayant pour objet de propager les mots d’ordre de la IIIe Internationale ? Le même jour, l’officier juge d’instruction délivre des mandats d’arrêts contre les deux responsables du groupe et convoque comme témoins ses autres membres. À la suite des premières auditions, du refus de plusieurs députés de répondre à ses convocations et enfin de la fuite de Ramette et de Bonte, le magistrat instructeur délivre cinquante nouveaux mandats d’arrêt dans le but d’inculper tous les membres du GOPF.

Le 8 octobre, Robert Philippot est arrêté. Le 11 octobre, cinquante-et-un députés sont inculpés. Mais Philippot est laissé en liberté pour raisons de santé : une paralysie consécutive à une polynévrite qui l’a touché à la mi-mai. Afin de rester à la disposition de la justice militaire, on peut supposer qu’il doive rester à Paris ; si oui, où loge-t-il alors ? Le 20 octobre au matin, il se rend au Palais Bourbon.

Selon Jean Maitron, Robert Philippot démissionne du groupe parlementaire le 16 janvier 1940, date à laquelle il voit pour la dernière fois quelqu’un de sa famille. Le lendemain, il est écroué à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e), dans l’attente du procès.

Le 20 janvier, le Sénat et la Chambre des députés votent la loi de déchéance des députés communistes ; la commission parlementaire chargée d’étudier les différents cas date de février 1940 le reniement de Robert Philippot, excluant la prise en compte de celui-ci par la procédure judiciaire (Jean Maitron).

Le 5 février, au terme de son enquête, le juge d’instruction militaire renvoie quarante-quatre députés communistes du GOPF devant le tribunal et prononce un non-lieu pour les sept autres inculpés.

Le procès s’ouvre le 20 mars devant le 3e tribunal militaire permanent de Paris : trente-cinq députés communistes sont présents, neuf sont en fuite. Au cours de leur audition, les détenus déclarent approuver les termes de la lettre adressée au président Herriot, en précisant toutefois, pour la grande majorité d’entre eux, n’en avoir eu connaissance qu’après sa diffusion.

Procès des députés communistes. Une partie des prévenus. Photographie d’audience publiée dans Match le 28 mars 1940. Droits réservés.

Procès des députés communistes. Une partie des prévenus. Photographie d’audience publiée dans Match le 28 mars 1940. Droits réservés.

Le 3 avril, dernier jour du procès, François Billoux prononce une déclaration politique au nom du groupe parlementaire. Robert Philippot (comme quatre autres ex-députés dont Renaud Jean, l’autre député du Lot-et-Garonne), refuse de s’y associer. Il est néanmoins condamné à 4000 F d’amende, cinq ans de privation de ses droits civiques et politiques, et quatre ans de prison assortis d’un sursis. Malgré cette mesure, il n’est pas libéré : le jour même, le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1939.

Robert Philippot est alors conduit au camp de Baillet (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), au Nord de Paris, ouvert en septembre 1939 dans l’ancien parc de loisirs des métallos CGT, où trois cents hommes sont internés, principalement des élus et des militants communistes.

Le château de Baillet. Carte postale colorisée, collection Mémoire Vive.

Le château de Baillet. Carte postale colorisée, collection Mémoire Vive.

Le 30 avril 1940, il est parmi les 282 élus et militants communistes venant de la Région parisienne – en particulier de Baillet – qui arrivent au fort de la Pierre Levée à l’Ile d’Yeu (Vendée), escortés par 81 soldats français.

Le 10 mai, les internés de l’île d’Yeu apprennent qu’Hitler passe à l’offensive contre la France. À l’issue d’une réunion secrète des dirigeants syndicaux et des députés, Julien Racamond est chargé de rédiger une lettre au Président du Conseil. Tenus informés, tous les internés communistes approuvent cette initiative. La lettre est signée, en leur nom, par cinq dirigeants syndicaux et six députés dont Robert Philippot, Renaud Jean, Julien Racamond… :
« Les militants soussignés, condamnés à rester au camp de la Pierre Levée du Fort de l’Île de Yeu, tiennent à préciser, dans la présente déclaration, leur position en face des évènements actuels. Ils se refusent tout d’abord à considérer que la mesure administrative prise à leur encontre soit considérée comme étant de nature à les séparer de la communauté française. Ils rappellent qu’ils se sont toujours montrés comme des ennemis résolus de l’hitlérisme, dont ils ont dès le début combattu les projets criminels et les agressions contre les peuples libres. Ils sont plus que jamais convaincus qu’une paix durable ne saurait être établie dans le monde, sans la totale destruction de ce fléau moderne. Ils estiment que cet acte de salubrité internationale nécessite l’union de tous les hommes et de tous les peuples décidés à défendre leur singularité. Au moment où l’intensité de l’agression hitlérienne redouble, où elle étend ses ravages dans les pays voisins de la France et menace notre territoire, ils affirment avec plus de force encore que le peuple des villes et des campagnes, des usines, de l’armée doit être uni devant le péril et le devoir. C’est pourquoi, les soussignés se déclarent prêts à œuvrer partout où il leur sera possible de le faire pour servir cette unité nationale indispensable. »

Le gouvernement restant sourd à cet appel des internés, ces derniers adressent une lettre à Georges Mandel, Ministre de l’Intérieur, le 22 mai, où ils se plaignent de n’avoir pas eu de réponse du Président du Conseil. Le 24 mai, au nom des internés du fort de la Pierre Levée, Julien Racamond et Renaud Jean effectuent une démarche auprès du commandement du fort afin de rappeler la teneur de la lettre qu’ils ont adressée au gouvernement.

Le 10 juin, apprenant l’entrée en guerre de l’Italie aux côtés de l’Allemagne contre la France, les internés envoient aussitôt, avec les mêmes onze signataires, à l’adresse du Président du Conseil, un télégramme resté sans réponse : « Nous demandons instamment la possibilité immédiate de servir la France suivant âge, capacité physique et professionnelle et de partager travail, responsabilités et danger dans une communauté française unie. »

Les internés sont soumis à des conditions particulièrement inhumaines, un régime de droit commun accentué : des chambres de 12 lits pour 34, pas d’eau, pas de sacs de couchage, mais des paillasses, une seule couverture chacun. Pas de sortie sauf sur les remparts du fort et pas de visites à cause de l’éloignement. Une commission d’hygiène et de sécurité décrit leurs conditions de détention en ces termes : « L’absence d’installations hygiéniques élémentaires, l’insuffisance de la protection sanitaire, la sous-alimentation, l’absence de chauffage, la pollution de l’eau, l’état lamentable des WC, l’absence de désinfection et la présence de rats, ont créé une situation critique extrêmement grave… »

Le député-maire de Nantes, Auguste Pageot, s’émeut de l’état de santé des internés. Il signale en particulier l’état de santé dans lequel se trouve Robert Philippot et demande pour celui-ci un réaménagement de ses conditions d’internement : l’ancien député du Lot-et-Garonne souffre d’une grave maladie incurable et a perdu 12 kilos dans les premières semaines de sa détention. Dans l’enquête alors déclenchée, un rapport médical sommaire conclut que le séjour du dénommé Philippot se déroule à l’île d’Yeu dans des conditions qui semblent favorables !

Après la débâcle, l’île est occupée par l’armée allemande le 4 juillet 1940.

Mais les internés sont particulièrement insoumis : deux évadés le 7 août 1940 (malgré la présence de 156 militaires dont 75 soldats allemands), fraternisation avec leurs gardiens français, projet d’évasion collective pris très au sérieux par le préfet de la Vendée.

Les autorités allemandes et la délégation du pouvoir de Pétain à Paris sont informés de cette situation. Le 14 août 1940, le Feldkommandant et de Brinon, délégué général du gouvernement de Vichy, tiennent une réunion à l’Hôtel Majestic à Paris, qui se conclut par des décisions aussitôt mises en œuvre : le 16 ou le 17 août, la police allemande se rend à l’île d’Yeu pour prendre en charge les internés. En gare de Poitiers, elle prélève sur le groupe quinze députés, conseillers généraux, maires et responsables syndicaux conduits en voitures cellulaires à la Maison d’arrêt de la Santé, à Paris 14e : Robert Philippot, Jules Auffret, Auguste Béchard, Pierre Braud, Félix Brun, Maurice Chevalier, Pierre Dadot, Jean Duclos, Maurice Gardette, Renaud Jean, Arnaud Laurent, Julien Racamond, Henry Raynaud, Daniel Renoult et Auguste Touchard.

En même temps, il est demandé au préfet de la Vendée de prendre des mesures pour transférer les 265 autres internés en zone non occupé afin de les remettre directement entre les mains du gouvernement de Pétain. Ceux-ci sont conduits sous haute surveillance au camp d’internement de Riom-ès-Montagnes (Cantal).

Le 11 octobre, le préfet de police de Paris signe un nouvel arrêté ordonnant l’internement administratif de Robert Philippot. Celui-ci est conduit au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé au début du mois d’octobre 1940 dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt afin d’y enfermer des hommes connus de la police pour avoir été militants communistes avant-guerre.

Deux jours plus tard, Robert Philippot écrit au directeur du camp afin que celui-ci transmette aux « autorités compétentes » la demande de son transfert dans un centre de séjour surveillé (CCS) de la zone non occupée assez proche de son domicile ; il sait que les autres anciens internés de l’île de Ré sont alors à Riom. L’ex-député communiste d’Alès, Auguste Béchard, effectue la même démarche en parallèle. Le 7 novembre, les Renseignements généraux rendent leur avis : « La demande [formulée par les deux internés] doit, semble-t-il être rejetée, en raison notamment des nombreuses évasions qui se sont produites dans des centres de séjour surveillé établis en zone libre. »

Le 4 décembre, Robert Philippot fait partie d’un groupe d’une centaine d’internés « choisis parmi les plus dangereux » transférés, par mesure préventive ou disciplinaire (?), à la Maison centrale de Fontevraud-L’Abbaye [2], près de Saumur (Maine-et-Loire) ; leur transport s’effectue en car et sous escorte. Les détenus sont enfermés dans une grande salle commune de la Centrale. Le 20 janvier 1941, sans être informés de leur destination, la même centaine d’internés est conduite à la gare de Saumur où les attentent deux wagons de voyageurs à destination de Paris-Austerlitz. À leur arrivée, ils sont conduits à la gare de l’Est. Ils y rejoignent 69 autres militants communistes en attente de transfert.

Ce nouveau convoi les amène à la gare de Clairvaux (Aube) d’où ils sont conduits – par rotation de vingt détenus dans un unique fourgon cellulaire – à la Maison centrale de Clairvaux. Une fois arrivés, la direction les contraint à échanger leurs vêtements civils contre la tenue carcérale, dont un tour de cou bleu (“cravate”) et un béret. Ceux qui refusent sont enfermés une nuit en cellule (“mitard”), tandis que la plupart sont assignés à des dortoirs. Rejoints par d’autres, ils sont bientôt 300 internés politiques.

Le 28 mars 1941, ayant appris que cinq internés ont été libérés, Robert Philippot écrit de nouveau au préfet de police pour solliciter sa libération, arguant qu’une enquête montrerait qu’il a été dans l’impossibilité d’avoir une quelconque activité publique depuis la survenue de sa maladie en mai 1939. Afin d’appuyer cette demande, il n’évoque aucun reniement de son engagement communiste. Interrogés, les RG remettent leur avis le 5 avril : cette mise en liberté « ne semble pas opportune ». Le 6 mai, le préfet de police envoie une conclusion identique au préfet de l’Aube.

Entre temps, vers le 25 avril, certains cadres politiques de Clairvaux sont séparés de leurs camarades et placés par cellules de deux dans un autre bâtiment, dont Philippot, Jules Auffret, Jules Crapier, Eugène Hénaff, Fernand Grenier, Maurice Ténine… Le 12 mai, ils sont réintégrés dans le groupe.

Le 14 mai, quatre-vingt-dix des internés de Clairvaux sont transférés au camp de Choisel à Châteaubriant (Loire-Atlantique), parmi lesquels plusieurs seront fusillés le 22 octobre. Robert Philippot est de ceux qui restent à Clairvaux et qui doivent bientôt partager les nouveaux locaux qui leur sont assignés dans le quartier Nord avec quelques “indésirables” (internés de “droit commun”).

Robert Philippot n’appose pas sa signature sur la lettre de Marcel Gitton adressée à des « camarades sujets à être libérés », comme le font 22 ex-élus communistes. Le 16 juin, les signataires sont transférés en liberté surveillée sur parole à Rumilly-lès-Vaudes, petite localité située à environ 20 kilomètres de Troyes, où il y a une maison forestière nommée Le Haut-Tuileau.

Robert Philippot n’est pas non plus co-signataire de la Lettre ouverte aux ouvriers communistes publiée dans le journal L’Oeuvre du samedi 6 septembre 1941, toujours à l’initiative de Marcel Gitton et signée par de nombreux ex-élus communistes.

Le 23 septembre, J.-P. Ingrand, préfet délégué du ministre de l’Intérieur dans les Territoires occupés (à Paris), demande au préfet de l’Aube de retirer de Clairvaux les internés administratifs qui y sont « hébergés » (sic !) ; ordre rapidement exécuté. Le jour-même, le commissaire de police de Troyes vient informer les internés politiques qu’ils sont dorénavant considérés comme otages par les autorités allemandes. Il demande à trois anciens élus – Racamond, Philippot et Le Bigot – d’organiser la séparation des internés en deux groupes pour leur transfert, vers les camps de Gaillon et de Rouillé ; concours que ceux-ci refusent. Sollicité par le commissaire sur le choix possible pour lui d’un lieu d’internement, Robert Philippot réitère sa demande d’un CCS proche du centre du pays, « de façon à mieux correspondre avec sa famille qui est en zone libre », selon le témoignage de Henri Hannhart qui n’évoque aucun ostracisme de ses camarades à l’égard de l’ancien député.

Le 24 septembre, Robert Philippot fait partie des 85 détenus de Clairvaux transférés au camp français de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne), via Paris. À Orléans, où le train stationne le lendemain matin, l’ex-député centralise l’argent des détenus qui achètent un supplément de boisson et de nourriture. Ils arrivent en gare de Rouillé à 23 h 15.

Le 7 février, le commandant du centre procède à l’appel d’internés désignés pour être transférés deux jours plus tard dans un autre lieu d’internement « pas loin de Paris » et qui doivent préparer leur paquetage.

Le 9 février 1942, Robert Philippot est parmi les 52 « communistes » (dont 36 seront déportés avec lui) remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits par des Feldgendarmes à la gare de Poitiers. Enfermés dans deux wagons à bestiaux, ils sont transférés – via Paris – au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Il est possible qu‘ils soient alors assignés à un bâtiment vide du quartier C de l’ancienne caserne (« camp juif »). De ce camp, à la fin juin 1942, Robert Philippot adresse une lettre à sa femme, lui annonçant le mariage d’une de ses filles.

Entre fin avril et fin juin 1942, il a été sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

transportaquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Robert Philippot est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45980, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Robert Philippot meurt à Auschwitz le 25 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [3].

Le 27 avril 1943, sa déportation vers l’Est est indiquée à la radio anglaise (BBC) par Fernand Grenier.

Son nom figure sur une plaque au siège du Conseil général du Lot-et-Garonne (Agen) sur le monuments aux morts des deux Guerres mondiales de Port-Sainte-Marie, placé contre la mairie ; sur une plaque au siège du Conseil départemental du Lot-et-Garonne à Agen ; sur le Monument commémoratif départemental de la Déportation 1939-1945, place du village de Lacapelle-Biron (337 personnes) ; sur le Monument commémoratif dans l’enceinte de l’Assemblée Nationale, à Paris 7e, “Aux députés, aux anciens députés morts pour la patrie 1939-1945, aux fonctionnaires” (40 personnes).

Après la guerre, le conseil municipal de Port-Sainte-Marie donne le nom de Robert Philippot à l’avenue menant à la gare ferroviaire. Celui de Saint-Laurent, où il a également résidé, donne son nom à la rue parallèle à la Garonne.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 14-12-1997).

Notes :

[1] Castets : le 13 juillet 1957, la commune de Castets devient Castets-en-Dorthe.

[2] Fontevraud-L’Abbaye, souvent orthographié Fontevrault-L’Abbaye au 19e siècle.

[3] L’avis officiel de l’état civil français a initialement daté son décès du 21 février 1942, une erreur relevée par sa famille et modifié par l’état civil : « décédé en août 1942 à Birkenau (Allemagne) ».

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 356 et 416. (MO 208, 209, 273)
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : très nombreux documents fournis par sa fille (lettre 16/01/1992) et son gendre (9 /10/1992) – Maire de Port-Sainte-Marie (M. Ricard – 15/01/1992) : état-civil complet.
- Dictionnaire biographique du Mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, tome 38, p. 218, notice de J. Maitron) – Photo double page photographique du journal MATCH du 28 mars 1940 montrant « les députés communistes déchus devant le Tribunal militaire » et où figure J. Philippot – Fernand Grenier : émission “Honneur et patrie”, cité dans Ici, Londres , les voix de la liberté, sous la direction de J.-L. Crémieux-Brilhac – Communication de M. Hugues Philippot, son fils (1993), confirmant l’internement de son père à l’île d’Yeu, avec le Docteur Renard (date ?).
- Auguste Brunet, Si c’était à refaire … La résistance en Vendée, éditions Le Temps des Cerises, Paris 2004, sur le site de l’Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant.
- Archives départementales de Gironde (AD 33), site internet du conseil général, archives en ligne ; registre des matricules militaires, bureau de Bordeaux, classe 1909, matricules de 3501 à 4000 (cote 1 R 1416), matricule 3516 (vues 33-35/881).
- Henri Hannhart, Un épisode des années 40, Matricule : F 45652 (les intérêts de certains ont fait le malheur des autres), trois cahiers dactylographiés par son fils Claude (qui en a pris connaissance après le décès de sa mère).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), site du Pré-Saint-Gervais : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374), liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397) ; carton “PC” n°VII, note du 20 décembre 1940 sur le CSS d’Aincourt ; dossier individuel des RG (77 W 1455-16347) ; dossier individuel du cabinet du préfet (1 W 741-72387).
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 924 (24679/1942).
- Site Mémorial GenWeb, relevés de Christian Dumas (2008-2014) et de Claude Richard (2011).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 6-06-2018)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

Henri PHILIPPART – 45979

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Henri, Eugène, Louis, Philippard (parfois orthographié Philippart) naît le 22 mars 1909 à l’« hospice » de Lisieux (Calvados – 14), 2 rue de Paris (devenu hôpital Henri Chéron), fils d’Alfred Éléonor Philipppard, 30 ans, dresseur de chevaux, et de Célestine, Albertine, Lefrançois, 20 ans, chemisière, mariés à Beuzeville (Eure) où celle-ci est née, et domiciliés au 28, place Victor-Hugo à Lisieux. Ils y habitent encore en avril 1914, au n° 64. Après Henri, ses parents auront trois autres enfants : d’abord Yvonne Léontine Choulotte, née le 22 mars 1911, et Louise Georgette Émilienne, née le 8 avril 1912, toutes deux à Lisieux…

Le 25 août 1914, à la suite du décret de mobilisation générale, Alfred Philippard est rappelé à l’activité militaire et rejoint le 20e régiment territorial d’infanterie à Lisieux. Il passe (?) au 319e régiment d’infanterie. Le 7 juin 1915, à Écurie, près de Neuville-Saint-Vaast (Pas-de-Calais), lors d’un assaut dans le secteur du “Labyrinthe”, il est porté disparu (il sera déclaré décédé à cette date par jugement du tribunal civil de Lisieux le 1er décembre 1920).

Le 11 février 1916, naît Georges Victor Albert, frère d’Henri.

Le 6 septembre 1918, les quatre enfants Philipppard sont adoptés par la Nation par jugement du même tribunal.

Au moment de son arrestation, Henri Philippart est domicilié au 49, rue Albert-Fracasse à Deauville (14). Marié et père de deux enfants, il est jardinier.

Dans la nuit du 1er au 2 mai 1942, il est arrêté à son domicile par la police française ; il figure comme “communiste” sur une liste d’arrestations exigées par la Feldkommandantur 723 de Caen à la suite du deuxième déraillement d’un train de permissionnaires allemands à Moult-Argences (Airan) [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1].

Le 4 mai, il est emmené au “petit lycée” de Caen, rejoindre les autres otages du Calvados. Le soir, même, il fait partie du groupe de détenus transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Ils y arrivent le lendemain, 5 mai en soirée.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C, qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C,
qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Entre fin avril et fin juin 1942, Henri Philippart est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Henri Philippart est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45979 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Henri Philippard est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Là, il est assigné au Block 13.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».  « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ». « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Le 22 juillet, il est admis à l’hôpital d’Auschwitz, dans le Block 20, celui des maladies contagieuses. Il en sort le 3 août.

Henri Philippard meurt à Auschwitz le 12 août 1942, selon le registre d’appel quotidien (Stärkebuch) et l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (14-12-1997).

Le 26 août 1987, à Caen, est inaugurée une stèle apposée par la municipalité sur la façade de l’ex-Petit Lycée, côté esplanade Jean-Marie-Louvel, en hommage aux otages déportés le 6 juillet 1942, à la demande de David Badache, rescapé caennais du convoi.

Le nom d’Henri Philippart est inscrit sur la plaque commémorative dévoilée le 19 décembre 2008 sur le pignon de l’ex-Petit Lycée de Caen côté avenue Albert-Sorel afin de rendre hommage à tous les otages calvadosiens déportés suite à la répression de mai 1942.

© Photo Mémoire Vive.

© Photo Mémoire Vive.

Notes :

[1] Le double déraillement d’Airan et les otages du Calvados : Dans la nuit du 15 au 16 avril 1942, le train quotidien Maastricht-Cherbourg transportant des permissionnaires de la Wehrmacht déraille à 17 kilomètres de Caen, à l’est de la gare de Moult-Argence, à la hauteur du village d’Airan, suite au déboulonnement d’un rail par un groupe de résistance. On compte 28 morts et 19 blessés allemands.

La locomotive du premier train ayant déraillé le 16 avril 1942. Collection R. Commault/Mémorial de Caen. In De Caen à Auschwitz, éditions Cahiers du Temps, juin 2001, page 11.

La locomotive du premier train ayant déraillé le 16 avril 1942.
Collection R. Commault/Mémorial de Caen.
In De Caen à Auschwitz, éditions Cahiers du Temps, juin 2001, page 11.

L’armée d’occupation met en œuvre des mesures de représailles importantes, prévoyant des exécutions massives d’otages et des déportations. Le préfet du Calvados obtient un sursis en attendant les conclusions de l’enquête de police. Mais, faute de résultats, 24 otages choisis comme Juifs et/ou communistes sont fusillés le 30 avril, dont deux à Caen.

Dans la nuit du 30 avril au 1er mai, un deuxième déraillement a lieu, au même endroit et par le même procédé. Un rapport allemand signale 10 morts et 22 blessés parmi les soldats. Ces deux déraillements sont au nombre des actions les plus meurtrières commises en France contre l’armée d’occupation.

Au soir du deuxième attentat – à partir de listes de communistes et de juifs (130 noms sur le département) transmises au préfet par le Feldkommandant – commence une vague d’arrestations, opérées par la police et la gendarmerie françaises avec quelques Feldgendarmes. Dans la nuit du 1er au 2 mai et le jour suivant, 84 hommes au moins sont arrêtés dans le Calvados et conduits en différents lieux de détention. Pour le commandement militaire allemand, ceux qui sont maintenu en détention ont le statut d’otage.

Tous les hommes désignés n’ayant pu être arrêtés, une autre vague d’arrestations, moins importante, a lieu les 7 et 8 mai. Le préfet du Calvados ayant cette fois-ci refusé son concours, ces arrestations d’otages sont essentiellement opérées par la Wehrmacht (Feldgendarmes).

Au total plus de la moitié des détenus de ce début mai sont, ou ont été, adhérents du Parti communiste. Un quart est désigné comme Juif (la qualité de résistant de certains n’est pas connue ou privilégiée par les autorités). Des auteurs d’actes patriotiques, proches du gaullisme, sont également touchés par la deuxième série d’arrestations.

Tous passent par le “petit lycée” de Caen, contigu à l’ancien lycée Malherbe, alors siège de la Feldkommandantur 723 (devenu depuis Hôtel de Ville), où ils sont rapidement interrogés.

Caen. Le Petit Lycée. Carte postale éditée dans les années 1900. Collection Mémoire Vive.

Caen. Le Petit Lycée. Carte postale éditée dans les années 1900.
Collection Mémoire Vive.

Le 4 mai, 48 détenus arrêtés dans la première rafle sont transférés en train au camp de police allemande de Compiègne-Royallieu ; puis d’autres, moins nombreux, jusqu’au 9 mai (19 ce jour-là). Les 8 et 9 mai, 28 otages communistes sont fusillés, au Mont-Valérien (Seine / Hauts-de-Seine) pour la plupart (trois à Caen). Le 14 mai, onze otages communistes sont encore fusillés à Caen.

La plus grande partie des otages du Calvados transférés à Compiègne sera déportée à Auschwitz le 6 juillet 1942 : 57 politiques et 23 Juifs (près de la moitié des otages juifs du convoi).

Sources :

- De Caen à Auschwitz, par le collège Paul Verlaine d’Evrecy, le lycée Malherbe de Caen et l’association Mémoire Vive, éditions Cahiers du Temps, Cabourg (14390), juin 2001, notice par Claudine Cardon-Hamet page 125.
- Cl. Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74 et 75, 362 et 416.
- Jean Quellien, Résistance et sabotages en Normandie, Le Maastricht-Chebourg déraille à Airan, éditions Charles Corlet, Condé-sur-Noireau, réédition 2004, pages 132 (n° 51) et 138.
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach), archives : liste du Block n° 20, hôpital d’Auschwitz-I.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 924 (19781/1942), orthographié « Philippard ».

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 28-07-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

Jean PHILIBERT – (45978 ?)

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Jean, Henri, Philibert naît le 17 décembre 1892 à Romans-sur-Isère (Drôme), à l’hospice de la ville, fils de Mélanie Philibert, 26 ans, domestique.

Considérant son âge, il devrait avoir été mobilisé au cours de la guerre 1914-1918 (à vérifier…).

Le 25 février 1919 à Puteaux [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Hauts-de-Seine – 92), Jean Philibert se marie avec Anne Pinon.

Le 15 janvier 1921, il est nommé concierge titulaire à la ville de Puteaux.

Le 27 juin 1925 à Puteaux, Jean Philibert se marie avec Louise Hinault, née le 20 janvier 1899 à Trégeux (Côtes-du-Nord / Côtes-d’Armor). Ils ont deux enfants : Ginette, née le 18 juillet 1926 à Paris 8e, et Serge, né le 2 juin 1932 à Paris 18e.

Le 21 avril 1926, il est nommé cantonnier titulaire à la ville d’Ivry-sur-Seine (Seine / Val-de-Marne – 94).

Le 1er août de la même année, il est nommé cantonnier à la ville de Clichy-la-Garenne [2] (92), exerçant les fonctions de concierge de l’école Paul-Bert au 3, rue Gobert (devenue rue du Docteur-Calmette). Louise, son épouse, intègre le personnel communal de Clichy en 1929, comme femme de service.

Jean Philibert est un militant communiste.

Le 6 décembre 1940, il est arrêté une première fois à Clichy par la police française pour « reconstitution de ligue dissoute » (le Parti communiste a été interdit à l’automne 1939), en même temps qu’Alexandre Antonini (à vérifier !).

Le 24 juin 1941 [3], alors qu’il est presque aveugle, il est de nouveau arrêté et interné le 27 juin au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), Frontstalag 122 – Polizeihaftlager. Enregistré sous le matricule 386, il fait partie des militants qui inaugurent ce camp de police.

Le camp vu depuis le mirador central. Les “politiques français” étaient dans le secteur constitué par la ligne de bâtiments de gauche (“camp communiste”) Photo Hutin, Compiègne, carte postale. Droits réservés.

Le camp vu depuis le mirador central.
Les “politiques français” étaient dans le secteur constitué par la ligne de bâtiments de gauche (“camp communiste”)
Photo Hutin, Compiègne, carte postale. Droits réservés.

Le 5 janvier 1942, le maire (ou le président de la délégation spéciale ?) prend un arrêté qui le relève de ses fonctions, avec effet rétroactif au premier juillet 1941.

Entre fin avril et fin juin 1942, Jean Philibert est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Jean Philibert est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I), peut-être sous le numéro 45978, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Jean Philibert.

Il meurt à Auschwitz le 14 octobre 1942,  selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Sa fille Ginette est embauchée le 1er octobre 1943 à la mairie de Clichy, comme employée aux écritures. Elle en part le 7 avril 1945.

Jean Philibert est homologué comme “Déporté politique” en 1954. La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (14-12-1997).

Une cellule du PCF de Clichy a pris son nom.

Notes :

[1] Puteaux : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne” (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Clichy-la-Garenne : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[3] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – arrestations et perquisitions à leur domicile – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante. En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, administré par la Wehrmacht, réservé à la détention des “ennemis actifs du Reich” et qui ouvre en tant que camp de police. Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. Fin août, 200 d’entre eux font déjà partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 381 et 416.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier central) – Témoignage de René Petitjean, de Clichy – Archives municipales de Clichy.
- Archives communales de Romans-sur-Isère, archives en ligne : état civil, registre des naissances de l’année 1892, acte n°402 (cote E109, vue 206/236).
- Archives communales de Clichy : listes électorales, archives de la section locale de la FNDIRP.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 924 (36108/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 11-06-2011)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

François PEYRONIN – (45977 ?)

PEYRONIN-tombola

Francis, Georges, Peyronin naît le 21 novembre 1907 au 16 rue Liancourt à Paris 14e, fils de Joseph Francis Peyronin, 21 ans, chaudronnier, et d’Eugénie Maréchal, 20 ans, raffineuse, son épouse, domiciliés au 72 rue de Patay (Paris 13e). Parmi les quatre témoins pour la déclaration du nouveau-né à l’état civil… trois sages femmes.

Du 8 octobre 1908 au 25 septembre 1910, son père effectue son service militaire au 102e régiment d’infanterie. Le 3 août 1914, il est rappelé à l’activité militaire par le décret de mobilisation générale, passant au 355e R.I. Le 20 septembre suivant, il est “porté disparu” sur le plateau de Nouvron (Aisne). Déclaré tué à l’ennemi, il est inhumé le 23 octobre sur le plateau de Berny ou Berry. Les combats du 17 au 20 septembre ont occasionné 75 tués connus, 484 blessé et 231 disparus, dont au moins une soixantaine de prisonniers des 17e et 19e compagnies). Le 19 mars 1916, un « secours de 150 » (?] est accordé à sa veuve.

Le 16 juin 1920, Francis Peyronin est adopté par la Nation en vertu d’un jugement rendu par le Tribunal civil de la Seine.

Il commence à travailler comme confiseur.

Le conseil de révision le classe dans la 5e partie de la liste de recrutement de l’année 1927 pour « faiblesse ». Incorporé à compter du 10 mai 1928, il « arrive au corps » le 22 mai. Mais, le 15 juin suivant, la commission de réforme du 30e corps d’armée le réforme définitivement pour « Néphrectomie droite (suite de traumatisme), crises convulsives d’ordre névropathique … ». Il est renvoyé dans ses foyers deux jours plus tard.

Le 1er mars 1930 à Ivry-sur-Seine [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Val-de-Marne – 94), Francis Peyronin épouse Marcelle Émilienne Diot, née le 7 avril 1914. Ils ont trois enfants : Georges né le 24 février 1930, Raymonde, née le 2 juillet 1932, et Francis, né le 14 août 1934.

Domicilié un temps au 11, rue du Bocage à Ivry, il déclare habiter au 59, rue de Paris en 1932. Il est alors cocher-livreur.

Il demeure au 63, rue de Paris au moment de son arrestation.

Par arrêté municipal du 22 novembre 1935, François Peyronin est embauché comme monteur de marché temporaire à la ville d’Ivry. Par arrêté municipal du 1er mars 1939, il devient charretier.

Le 8 janvier 1940, dans la période de mobilisation générale, la 3e commission de réforme de la Seine le maintien réformé définitivement n° 2 pour  le même motif qu’en 1928.

François Peyronin est arrêté par la police française une première fois en 1939, puis une deuxième fois le 12 février 1940, pour « apposition de tracts » (inculpé d’infraction au décret du 29-07-1939). Il est aussitôt révoqué de ses fonctions par la Délégation spéciale désignée à place de la municipalité élue : « considérant que Mr Peyronin a fait l’objet d’un mandat d’arrêt, qu’il y a lieu, en conséquence, de le suspendre de ses fonctions de charretier… ».

Le 14 février, la 4e [?] chambre du Tribunal correctionnel de la Seine le condamne à deux ans de prison, 1000 francs d’amende et cinq ans d’IDC (interdiction des droits civiques ?) et il est écroué à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (94). Le 11 avril, la Cour d’appel de Paris confirme cette condamnation. Dès le lendemain, il se pourvoit en cassation. Il est libéré de Fresnes le 26 juin 1940 par les « autorités allemandes ».

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Sous l’occupation, François Peyronin est considéré par les Renseignements Généraux comme un « meneur particulièrement actif ».

Le 1er mai 1941, il est signalé comme ayant tenté d’organiser un arrêt de travail sur le chantier du fort d’Ivry pour protester contre la non récupération d’heures travaillées.

Le 26 juin, François Peyronin est appréhendé (probablement à son domicile) dans le cadre d’une vague d’arrestations visant 92 militants ouvriers de Paris et de la “petite couronne”. Le préfet de police a signé les arrêtés ordonnant leur internement administratif, mais les opérations sont menées en concertation avec l’occupant. En effet, pendant quelques jours, les hommes arrêtés dans ces conditions sont conduits à l’hôtel Matignon, puis aussitôt livrés aux « autorités d’occupation » qui les rassemblent au Fort de Romainville (HL 122), sur la commune des Lilas (Seine / Seine-Saint-Denis). Considérés comme étant en transit, ils ne sont pas enregistrés sur les registres du camp.

Dans les jours qui suivent (le 27 juin, le 1er juillet…) ils sont conduits à la gare du Bourget où des trains les transportent à Compiègne (Oise) [2]. François Peyronin a probablement suivi le parcours de ces hommes finalement internés au camp allemand de Royallieu, administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager) [3].

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le 10 février 1942, il y est retrouvé par Pierre Rigaud, d’Ivry-sur-Seine, qui vient d’être transféré depuis le camp français de Choiseul à Châteaubriant (Loire-Inférieure / Loire-Atlantique).

Le vendredi 6 mars, Pierre Rigaud écrit dans son journal personnel : « De nouvelles arrivées d’internés sont signalées. Le bâtiment A8 se complète. Je rends visite avec Peyronin à nos amis Boyer, Vanzuppe, Le Bigot, Perrotet, Paupy, Graindorge, arrivés hier de Gaillon. On parle de ce qu’était le régime à Gaillon, de ceux qui y sont restés : Sémard, Houet, etc. Le changement de vie pour nos camarades est encore plus considérable que pour nous. Plusieurs chambres d’“anciens” invitent les nouveaux arrivants à un repas. Nous devons en avoir deux de la Marne. Le problème de l’installation de nos camarades est difficile à résoudre. Rien dans leurs chambres nues, délabrées, sales. On a bien du mal à leur procurer lits et couvertures. On leur promets des planches pour leurs paquetages. Quand les auront-ils ? » Il note qu’un colis est arrivé pour lui et qu’il pourra aller le chercher à la distribution du jour suivant…

Le soir même, Pierre Rigaud, Corentin Cariou et Léopold Réchossière apprennent qu’ils doivent être fusillés le lendemain. Ils sont enfermés pour la nuit dans des cellules séparées de la prison interne du camp.

Le lendemain matin 7 mars, ils sont transportés jusqu’à la Butte-aux-Zouaves à Moulin-sous-Touvent, dans la forêt de Carlepont (à une trentaine de km du camp) et fusillés comme otages en représailles de l’attentat du 1er mars contre une sentinelle allemand rue de Tanger à Paris 19e.

Entre fin avril et fin juin 1942, François Peyronin est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée (suivant un ordre de Hitler) en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée d’occupation.

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, François Peyronin est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45977, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté François Peyronin.

Il meurt à Auschwitz le 18 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [4], alors qu’a lieu une grande sélection des “inaptes au travail” à l’intérieur du camp au cours de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement gazés [5]). (aucun des quatorze “45000” ivryens n’est revenu)

La mention “Mort en déportation” est apposée sur les actes de décès (J.O. du 14-12-1997).

Une plaque à son nom a été apposée sur son lieu de domicile ; la rue du Bocage ayant été dénommée rue René Robin (matricule n° 46064 à Auschwitz) le 27 juillet 1945 par le conseil municipal d’Ivry-sur-Seine. En 2025, la façade d’immeuble du n° 11 apparaît rénovée : aucune plaque n’est visible…

Son nom est également inscrit, parmi les déportés, sur la plaque dédiée « À la mémoire des employés de la ville d’Ivry-sur-Seine morts pour la France, 1939-1945 », apposée sur un pilier du hall de la mairie.

Dans le hall de la mairie d’Ivry…

Dans le hall de la mairie d’Ivry…

Sources :

- Archives municipales d’Ivry-sur-Seine, dossier individuel rassemblé par Michèle Rault, conservatrice, à partir de différentes sources.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection Mémoires, 2005, pages 73, 150 et 153, 388 et 416.
- Sachso, Amicale d’Orianenburg-Sachsenhausen, Au cœur du système concentrationnaire nazi,Collection Terre Humaine, Minuit/Plon, réédition Pocket, mai 2005, page 36 (sur les arrestations du 26 juin 1941).
- Gérard Bouaziz, La France torturée, collection L’enfer nazi, édité par la FNDIRP, avril 1979, page 262 (sur les arrestations du 27 juin 1941).
- Pierre Rigaud, Journal d’un otage français, 1941-1942, édité par Louis Poulhès, éditions Atlande, Neuilly, janvier 2025, page 361.
- Musée de la Résistance nationale (MRN) Champigny-sur-Marne (94) : carton “Association nationale des familles de fusillés et massacrés”, fichier des familles (4009) ; fiche de police de Francis Peyronin au commissariat d’Ivry-sur-Seine.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, liste des internés communistes (BA 2397), chemise “liste des personnes se livrant à une activité de propagande” (BA 2447).
- Archives Départementales du Val-de-Marne : prison de Fresnes, dossiers individuels des détenus (2Y5 753) : libérés par l’autorité allemande en juin 1940 (mandat de dépôt-ordre d’écrou).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 923 (31666/1942).
- Association Mémoire et création numérique, site Les plaques commémoratives, sources de mémoire.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 1-04-2025)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes)qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Ivry-sur-Seine : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Arrestations de la fin juin 1941 dans le département de la Seine, trois témoignages :

Jean Lyraud (déporté au KL Sachsenhausen le 24 janvier 1943). Le 26 juin, à 5 heures du matin, il est réveillé par des policiers français : « Veuillez nous suivre au poste avec une couverture et deux jours de vivres. » Un autobus le prend bientôt avec trois autres personnes arrêtées. Le véhicule fait le tour des commissariats de Montreuil et du XIe arrondissement. Un crochet à l’hôtel Matignon, qui abrite alors la police de Pétain, puis c’est le transport jusqu’aux portes du Fort de Romainville où les prisonniers sont remis aux autorités allemandes. Avec ses compagnons, jean Lyraud passe la nuit dans les casemates transformées en cachots. « Le lendemain 27 juin dans l’après-midi, nous embarquons en gare du Bourget dans des wagons spéciaux pour Compiègne. Nos gardes ont le revolver au poing et le fusil chargé, prêts à faire feu. Dans la soirée nous arrivons au camp. Quelques jours après, d’autres contingents de la région parisienne nous rejoignent. »

Henri Pasdeloup (déporté à Sachsenhausen le 24 janvier 1943), cheminot de Saint-Mihiel (Meuse), est arrêté le 23 juin 1941 par la Gestapo qui le conduit à la prison de la ville. Le 27 juin, avec d’autres détenus emmenés à bord de deux cars Citroën, il arrive devant le camp de Royallieu vers 16 h 30 : « À l’arrivée face au camp, nos gardiens nous font descendre. Alignement sur la route, comptages et recomptages. En rangs par trois nous passons les barbelés… À 19 heures, environ 400 prisonniers en provenance de la région parisienne entrent en chantant L’Internationale… Le lendemain 28 juin, réveil à 7 heures : contrôle d’identité, toise, matricule. J’ai le numéro 556. Pour notre groupe de la Meuse, cela va de 542 à 564. Ceux de la région parisienne, bien qu’arrivés après nous, sont immatriculés avant… »

Henri Rollin : «  Le 27 juin 1941, vers 6 heures de matin, ma femme et moi nous sommes réveillés par un coup de sonnette. Trois inspecteurs de la police française viennent nous arrêter ; perquisition rapide sans résultat (nous avions la veille au soir distribué les derniers tracts que nous avions). Nous arrivons à l’hôtel Matignon où nous trouvons de nombreux cars et camions, résultat d’une rafle dans toute la région parisienne. Nous sommes remis par la police française aux autorités allemandes. Au moment de ma remise aux Allemands, j’ai aperçu qu’on leur donnait une petite fiche portant mon nom et la mention «  communiste  », soulignée à l’encre rouge. Nous subissons un court interrogatoire d’identité… Attente… Vers la fin de l’après-midi, départ en car. Arrivée au fort Romainville, fouille, identité. Départ de Romainville le 1er juillet, au matin, par train spécial et bondé au Bourget, arrivée l’après-midi à Compiègne. Le lendemain, même cérémonie, refouille et identité, ensuite la vie de camp… »

[3] L’ “ Aktion Theoderich ” : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante.

En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht.

Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. Fin août, 200 d’entre eux font déjà partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

[4] Différence de date de décès avec celle inscrite au Journal Officiel : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – s’appuyant sur le ministère des Anciens combattants qui avait collecté le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ.

Concernant Francis Peyronin, c’est le 31 décembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès (24-9-1946). Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

[5] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.

 

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

René PETITJEAN – 45976

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

René, Henri, Petitjean naît le 1er septembre 1900 à Vincelles (Yonne), fils d’Athanase Petitjean, 38 ans, chef cantonnier aux Ponts-et-Chaussées, et de Marie Jouard, 41 ans, alors sans profession, domiciliés Route Nationale. René à un frère, Honoré Eugène, né le 18 octobre 1886 à Venoy, où leur père était alors vigneron. En 1901, Charles Jouard, le père de Marie, âgé de 69 ans habite alors avec eux. Après avoir accompli son service militaire (1906-1908), son frère est d’abord parti vivre à La Fère (Aisne). En 1911, ses parents sont installés rue de l’Abreuvoir et la mère de famille est devenue cabaretière (marchande de vins en 1921).

Le 14 janvier 1913, son frère Honoré se marie à Meaux avec Blanche Oré. En juillet suivant, il habite au 2 rue Nicolas-Rotet à Paris 13e. D’août 1914 à avril 1919, il est mobilisé à la 5e section de Commis et ouvriers militaires d’administration à Nuits-sous-Ravières (Yonne), jusqu’à être promu adjudant.

Le 17 mars 1920, René Petijean est appelé à accomplir son service militaire comme soldat de 2e classe aux 1er groupe d’aérostation. Le 16 novembre suivant, il est nommé soldat de 1re classe. Le 16 février 1921, il est nommé caporal. Le 4 mars 1922, il est renvoyé dans ses foyers, titulaire d’un certificat de bonne conduite.

Le 3 juin 1922 à Vincelles, René Petitjean se marie avec Lucie Hubert. En mars 1923, ils sont domiciliés au 11 rue Abel-Lovelaque (Paris 13e). Mais le couple divorce le 17 juin 1925.

En janvier 1926, René Petitjean habite au 12, rue Lahire (Paris 13e).

Le 30 septembre 1926 à Paris 13e, René Petitjean épouse en secondes noces Marthe Clémence Rochette, née le 14 novembre 1893 à Paris 7e. Ils habitent alors tous deux au 12, rue Lahire, où Marthe exploite un commerce de mode. Ils auront deux enfants : Danièle, née le 10 mars 1930, et Didier, né le 10 avril 1931.

À partir du début octobre 1930, le couple revient au 11 rue Abel-Lovelaque (Paris 13e).

René Petitjean est alors tourneur sur métaux dans une usine de l’arrondissement.

À partir de 1931, il est adhérent de l’Union syndicale des travailleurs de la Métallurgie, voiture, aviation, maréchalerie et parties similaires (CGTU) et militant du Parti communiste, membre du 4e rayon de la région parisienne. Il est également adhérent à la 13e section de la Fédération des locataires. Il est déjà connu des Renseignements généraux de la préfecture de police.

En mai 1932, René Petitjean se présente aux élections législatives dans la 1re circonscription du 13e arrondissement au titre du « Commerce et de l’Artisanat ». Selon les Renseignements généraux, sa candidature de dernière heure n’a d’autre but que de favoriser celle de Pierre Sémard, qui se présente au nom du Parti communiste, au détriment de Louis Gélis, conseiller municipal communiste du quartier de la Maison Blanche, exclu en 1929 et membre fondateur du Parti ouvrier-paysan (POP), lequel sera élu.

Au cours de l’année 1934, René Petitjean est inscrit sur les listes électorales de Clichy-la-Garenne [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Hauts-de-Seine). Cette année-là et jusqu’au moment de son arrestation, il est domicilié au 63, rue de Neuilly à Clichy, adresse où il tient une petite épicerie avec son épouse. Lui-même se déclare comme commerçant.
En février 1940, la commission de réforme de la Seine le classe “service auxiliaire” pour forte myopie et obésité (il avait déjà été “réformé définitif n° 2 dès le 21 juillet 1937 pour les mêmes motifs).

Sous l’occupation, la police française (Renseignements généraux) le considère comme un « propagandiste révolutionnaire ».

Le soir du 14 octobre 1940, René Petitjean est arrêté à son domicile par les services du commissariat de police de Clichy qui procèdent à des perquisitions chez divers habitants « à la suite de renseignements recueillis relatifs aux affichages de papillons et distributions de tracts subversifs dans [la] circonscription ». Cinq autres militants sont pris dans la même affaire, dont Eugène Guillaume, Henri Mathiaud et son frère Raymond. Le rapport adressé par le commissaire au directeur de la police judiciaire dès le lendemain indique qu’aucun paquet de tracts n’a été trouvé chez Petitjean « qui ne paraît pas être un distributeur, mais qui n’en est pas moins très actif ». Tous sont inculpés pour infraction au décret du 26 septembre 1939 (« reconstitution de ligue dissoute » et interdiction de la propagande communiste) et conduits au Dépôt, à disposition du procureur de la République.

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er. Tribunal correctionnel, un des porches du rez-de-chaussée. (montage photographique)

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du rez-de-chaussée.
(montage photographique)

Le 17 octobre 1940, les six inculpés comparaissent devant la 12e chambre du tribunal correctionnel de la Seine. René Petitjean est condamné à quatre mois d’emprisonnement (plusieurs documents de police ultérieurs mentionnent de manière erronée le 16 janvier 1941 comme date de cette condamnation). Tous les militants se pourvoient en appel auprès du Procureur de la République. René Petitjean est ensuite écroué à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e).

À l’expiration de sa peine, René Petitjean n’est pas libéré : le 16 janvier, le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1939. Le lendemain, René Petitjean fait partie des 24 militants communistes conduits au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé en octobre 1940 dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt.

© AD 78.

© AD 78.

Le 7 avril, René Patijean est extrait du camp pour comparaître au Palais de Justice de Paris devant la 10e chambre des appels de police correctionnelle, qui confirme sa peine dès le lendemain, 8 avril. À l’issue de l’audience, il est reconduit au Dépôt.

Le 18 avril 1941, Marthe Petitjean écrit au préfet de la Seine pour solliciter la mise en liberté de son mari : « … je tiens seule une petite boutique d’épicerie aux revenus modestes et […] seule il m’est impossible d’assurer et la vente et le ravitaillement en denrées soit aux Halles soit auprès des divers fournisseurs. J’ai en outre deux enfants âgés de 10 et 9 ans dont je dois m’occuper et […] je vais me trouver dans la pénible obligation de fermer ma boutique qui constitue ma seule source de revenus […]. »

Le même jour, René Petijean écrit au préfet de police pour solliciter sa libération. « Au cours d’une perquisition à mon domicile, j’ai été trouvé détenteur de 4 imprimés divers et opuscules. Or ces objets avaient été introduits dans ma boutique (ancienne boucherie chevaline) par une grille extérieure faisant office de fermeture par laquelle les facteurs me font parvenir mon courrier. Je me réservais de prendre connaissance de ce courrier et je n’aurais pas manqué de détruire ces imprimés […] seul le manque de temps m’[en] a empêché… ».

Le 21 avril, René Petijean est ramené à Aincourt.

Le 4 mai, les RG rédigent un « blanc » selon lequel « la libération de Petitjean ne saurait être envisagée actuellement ».

L’administration du camp d’Aincourt lit systématiquement la correspondance des détenus et y relève toutes les informations concernant leur état d’esprit à titre individuel ou collectif. Le 12 juillet 1941, après l’invasion de l’URSS par le Reich, le directeur du CSS d’Aincourt adresse un rapport au préfet de Seine-et-Oise avec plusieurs extraits des lettres interceptées en lui faisant « connaître que, depuis la guerre germano-soviétique, [il] communique tous les matins, à Laurent Darnar, la presse parisienne. Ce dernier fait un extrait succinct et objectif des informations que[le directeur fait] afficher ensuite à l’intérieur du Centre. Ce procédé représente l’avantage de [lui] éviter toute critique personnelle dans la rédaction de ce communiqué et a fini de discréditer complètement l’interné Laurent Darnar aux yeux de ses anciens camarades… ». Le 26 juillet, le préfet de Seine-et-Oise écrit à Joseph Darnand, ministre secrétaire d’État à l’Intérieur, pour lui transmettre « les réactions suscitées par ce communiqué ». René Petitjean, de Clichy, a écrit : « …Les évènements vont vite : seront-nous libérés par des étrangers, puisque les Français, eux, ne veulent pas nous libérer ? »

Le 6 septembre 1941, René Petitjean est parmi les 150 détenus d’Aincourt (dont 106 de la Seine) transférés au camp français (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne), pour l’ouverture de celui-ci ; « dans des baraquements en bois, où les Allemands viennent prendre des otages », écrit-il.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le 22 mai 1942, il fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). René Petitjean fait partie de ceux qui sont « parqués » la veille de ce départ après « visite médicale et sélection ».

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C, qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C,
qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Les Clichois sont dans le même wagon – où ont dû monter 45 hommes -, autour d’Alexandre Antonini, conseiller municipal dont l’influence est grande et qui réussit à calmer les plus impressionnables.

TransportAquarelle

Tous jettent une lettre sur la voie ferrée et, selon René Petitjean, deux d’entre elles seulement ne parviendront pas à leurs destinataires. Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures, puis repart à la nuit tombée. Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif

Le 8 juillet 1942, René Petitjean est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45976 (ce matricule sera tatoué sur son bras gauche quelques mois plus tard).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. Pendant un temps, René Petitjean est affecté au très meurtrier Kommando du Kanal.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, René Petitjean est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Il estime qu’il quitte l’enfer pour le purgatoire.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Affecté au Block 28, René Petitjean travaille dans plusieurs Kommandos et notamment à la serrurerie (Schlosserei), avec Raymond Montégut et Auguste Monjauvis.

« Dysenterie. – J’attrape la dysenterie un mois après l’arrivée au block 22. J’ai beaucoup de fièvre et ne mange que très peu. Jeu perds du poids et deviens très faible. Je vais au W.C. jusqu’au sang. Je ne peux rester debout et, comme les appels durent plusieurs heures, je me couche dans les rangs, caché par mes camarades. Je me relève aussitôt qu’un chef apparaît pour l’appel. Je vais à la selle dix ou douze fois par jour, et, pendant l’appel, l’accès au block est interdit. Un jour, je ne peux plus me retenir, je vais dans un block en construction pour faire mes besoins. J’y reste peu de temps et reviens juste au moment de l’appel : ce fut ce qui me sauva. Il manquait un homme. Il fut découvert : il venait d’uriner dans le même block d’où je revenais. Il est frappé à coups de schlague jusqu’à ce qu’il tombe à terre, frappé dans les organes génitaux. Il résiste, il ne veut pas mourir. Voyant cela, ses bourreaux le noient dans un wagonnet rempli d’eau qui servait à la construction du block. »

Après l’hécatombe, René Petitjean fait partie du petit groupe de rescapés “45000” se retrouvent régulièrement, parmi lesquels Georges Brumm, Fernand Devaux, André Faudry, Mickey Guilbert, Robert Lambotte, Guy Lecrux, Roger Pélissou, Robert Rossé.

En juillet 1943, comme les autres détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”), il reçoit l’autorisation d’écrire (en allemand et sous la censure) à sa famille et d’annoncer qu’il peut recevoir des colis.

À la mi-août 1943, René Petitjean est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) au premier étage du Block 11, la prison du camp, pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 - où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues - et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”. Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 – où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues –
et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”.
Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 12 décembre 1943, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blocks et Kommandos d’origine.

Le 3 août 1944, René Petitjean est parmi les trois-quarts des “45000” présents à Auschwitz qui sont de nouveau placés en “quarantaine”, au Block 10, en préalable à un transfert.

Le 29 août 1944, il est parmi les trente “45000” transférés [2] dans un convoi disciplinaire de 807 détenus (incluant de nombreux “Prominenten” polonais). Les partants sont témoins de l’arrivée d’un convoi du génocide. « … Nous embarquons à Birkenau. Le long d’un quai stationne un convoi de femmes et d’enfants parqués dans des wagons à claire-voie, à deux étages, wagons conçus et destinés à des transports de porcs et de moutons. Les occupants sont allégés dans l’impossibilité de s’assoir, en plein soleil avec une soif terrible. On voit des morts et des agonisants… »

À leur arrivée au KL Sachsenhausen, dans la ville d’Oranienbourg, au Nord-Ouest de Berlin, et jusqu’au 25 septembre, les trente sont assignés au Block 66. Avec René Maquenhen et Auguste Monjauvis, René Petitjean est affecté au Kommando Siemens Stadt, à 12 kilomètres de Berlin, petit camp de quatre Blocks dont les 700 à 800 détenus – sous-alimentés – fabriquent des téléphones dans une usine moderne que l’aviation alliée bombarde trois fois par jour. Les trois camarades s’efforcent de réduire leur propre rendement.

En avril 1945, lorsque les camps sont évacués, commence une “Marche de la Mort” : 240 km vers le Nord-Ouest, jusqu’au château de Traumark, où René Petitjean vit – avec Roger Maquenhen et Henri Mathiaud, de Clichy – ce qu’il décrit comme « des moments rocambolesques » [3]. Les SS ayant fuit, ils sont libérés le 2 mai 1945 par les troupes soviétiques, qui les remettent aux Américains : hébergés dans la caserne Adolf Hitler de Schwerin, ils sont « traités comme des prisonniers ».

Le 24 mai, ils rentrent en France en passant par la Belgique, « en wagons à bestiaux, comme au départ ».

La gare de l’Est à Paris, point d’arrivée de nombreux rapatriés d’Allemagne, dont des déportés rescapés. Des familles y ont guetté en vain le retour de leur proche. Carte postale d’après guerre. Collection Mémoire Vive.

La gare de l’Est à Paris, point d’arrivée de nombreux rapatriés d’Allemagne, dont des déportés rescapés.
Des familles y ont guetté en vain le retour de leur proche.
Carte postale d’après guerre. Collection Mémoire Vive.

Le 12 juin, depuis Vincelles où il est probablement en convalescence dans sa famille, René Petitjean écrit à un camarade de Clichy déporté qu’il a appris la création d’un comité d’Auschwitz dont il ignore l’adresse mais qu’il juge nécessaire pour informer les familles, lui-même étant très sollicité pour ce faire (on lui doit de connaître le sort d’un certain nombre de Clichois). Il précise qu’il a écrit à Madame Antonini et s’inquiète pour Henri Mathiaud : « Est-ce que ça va mieux chez lui ? ».

JPEG - 140.6 ko
Le 8 octobre (1945), René Petitjean écrit à l’épouse de Georges Varenne pour confirmer la disparition de celui-ci à Birkenau, en
même temps que celle de Norbert Debries, de Vincelles (Yonne).
Musée de la Résistance Nationale (Champigny-sur-Marne – 94).
Fonds Georges Varenne. Droits réservés.

René Petitjean devient secrétaire ou vice-président de la section locale de Clichy de la FNDIRP.

Décrit comme « un homme de caractère, très courageux », il tient à témoigner et le fait à plusieurs reprises : en 1946, pour le livre édité par l’Amicale d’Auschwitz, Témoignages sur Auschwitz (chapitre 1942, les hommes à Auschwitz, pages 31 à 46), dans Le Patriote résistant (journal de la FNDIRP) en janvier 1965.

Le 28 novembre 1953 à Ézanville (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), René Petitjean se marie une deuxième fois avec Lucie Hubert, sa première épouse.

JPEG - 67.2 ko
René Petitjean au Havre en 1960,
lors d’une réunion de “45000”
et de “31000”. Droits réservés.

Il est le premier à répondre à l’appel lancé par Roger Arnould pour reconstituer l’histoire de son convoi.

René Petitjean décède le 31 décembre 1976 à Ézanville, peu après leur rencontre.

Notes :

[1] Clichy-la-Garenne : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Les trente d’Auschwitz vers Sachso (ordre des matricules, noms de G à P) : Georges Gourdon (45622), Henri Hannhart (45652), Germain Houard (45667), Louis Jouvin (45697), Jacques Jung (45699), Ben-Ali Lahousine (45715), Marceau Lannoy (45727), Louis Lecoq (45753), Guy Lecrux (45756), Maurice Le Gal (45767), Gabriel Lejard (45772), Charles Lelandais (45774), Pierre Lelogeais (45775), Charles Limousin (45796), Victor Louarn (45805), René Maquenhen (45826), Georges Marin (45834), Jean Henri Marti (45842), Maurice Martin (45845), Henri Mathiaud (45860), Lucien Matté (45863), Emmanuel Michel (45878), Auguste Monjauvis (45887), Louis Mougeot (45907), Daniel Nagliouk (45918), Émile Obel (45933), Maurice Ostorero (45941), Giobbe Pasini (45949), René Petijean (45976) et Germain Pierron (45985).

[3] L’évacuation, racontée par René Petitjean : « C’est l’évacuation ! Des groupes de cinq cents à huit cents sont formés sur la grand-place, et notre groupe part sur les grandes routes d’Allemagne, à pied, avec une couverture. Nous marchons, les premiers jours, allégrement. Nous couchons dans les taillis, les bois, les fossés par tous les temps. Les nuits sont froides et détrempent nos couvertures ; nos couches par temps de pluie sont intenables. Lorsqu’on peut avoir des branchages et des feuilles, c’est mieux qu’à même le sol. Nous repartons souvent sans manger. Nous mangeons quelques feuilles d’arbres, tendres et vertes, mais les étapes sont longues, nous sommes harassés de fatigue. La faim oblige à chaparder des pommes de terre ou rutabagas lorsqu’on passe près de silos sur le bord de la route, des épis de blé ou de seigle dont nous extrairons les grains que nous ferons cuire à la halte prochaine. Mais, attention, les S.S. sont sans pitié, ils tirent sur les Häftlingen que nous sommes [Haeftling ou Häftling : détenu et, par extension, déporté dans le vocabulaire concentrationnaire].

Nous touchons cinq pommes de terre ce jour pour calmer notre faim. On parle beaucoup de colis de la Croix-Rouge qui est dans les parages et nous sommes harassés par la marche, mais il faut quand même aller. Les S.S., derrière notre colonne, nous poussent.

Les Russes sont derrière. Ils avancent vite, avec leurs motorisés. Beaucoup de camarades, à bout, abandonnent, se laissent glisser à terre, sur le bas côté de la route ; sans pitié, c’est le coup fatal

Fusillé à la mitraillette. Le revolver de l’officier claque derrière la nuque. Toutes les colonnes voient ce sort réservé aux faibles, aux malades, aux blessés. Des centaines, des milliers de corps jalonnent les routes, visages tuméfiés, contractés, dont le sang coule de la petite plaie. Les étapes successives de jour et même de nuit maintenant nous affaiblissent. Nous portons les malades, les blessés aux pieds ; nous nous secourons dans la limite de nos forces, malgré tout, des camarades français abandonnent cette marche forcée, désespérée, sachant comme elle se termine.

Nous traversons Newripen, Wittstock, et les Russes nous poursuivent. Les S.S. nous brutalisent à coups de crosse, à coups de poing. Il faut avancer vite ; nous venons de couvrir 45 kilomètres, et pas un arrêt. Les cadavres s’échelonnent, tout homme qui s’arrête, qui ne peut marcher, est un homme mort. Les silos de pommes de terre ont aussi leurs morts, ceux qui ne voulaient pas mourir de faim.
Enfin, un arrêt qui nous comble de joie ! Nous cantonnons dans une ferme. Nous allons pouvoir nous reposer sur un bon lit de paille, que je m’apprêtais à faire pour moi et mes amis, mais je suis arrêté par un
 S.S. qui me met un coup de poing en plein visage. Mon nez saigne et j’ai un œil au beurre noir ; ça ne fait rien.

Le commandant fait dire par le Dolmetscher (traducteur) : «  Vous n’avez pas eu à manger hier, ce soir vous aurez un kilo de pommes de terre chacun »  !

Un gîte et à manger ! C’est vraiment trop nous combler, nous autres bagnards. Chacun se pourlèche en préparant sa couche moelleuse et captivante. Que d’invectives pour faire reculer le voisin qui empiète le terrain. Il y a si peu de place pour tous. Hélas ! que d’efforts superflus ! Un agent de liaison arrive en moto, tout poussiéreux et en sueur. Il est 9 heures du soir. Un commandement rauque s’élève : «  Antreten  » (rassemblement) ! Il faut partir, et vite… Les «  Rouskis  » sont là, tout près, à vingt kilomètres.

Adieu, lit et pommes de terre ! Et nous voilà de nouveau, cette fois, non plus sur la route, mais à travers chemins de terre, à travers champs, prés, bois, taillis, poussés, battus, mais avec cet ultime espoir qui nous réchauffe le cour. «  Ils  » sont là, derrière, «  Ils  » viennent, qu’ Ils » viennent vite avant que d’autres ne tombent !

Nous allons plus lentement, simulons des efforts. On s’engueule entre nous :
– Tu vas trop vite, hé, ballot !
– Ta gueule, toi, j’marche moins vite que toi !

Eux, ces messieurs les «  Schleus  », sont agités, nerveux, mauvais. Les voitures à bras que nous traînons ne vont pas assez vite à leur gré. Le commandant nous fait arrêter pour que chaque S.S. reprenne son sac sur le dos. Les voitures n’avancent pas plus vite. Doucement, les «  potes » sont derrière et il est minuit. C’est le 1er mai. On avance difficilement dans les trous et les bosses des champs par cette nuit noire, sans lune. On ne voit pas à 4 mètres devant soi. On marche par petits groupes de cinquante à quatre-vingts. Défense de parler.

Les jantes crissent dans les ornières. Les bras sont tendus, mais les forces « contraires ». Les voitures s’embourbent, nous n’avançons plus qu’à peine et un sourire inonde de joie notre visage ; mais un coup de crosse dans le visage nous rappelle à l’ordre, dent cassée, et ce maudit nez qui saigne encore. C’est une vache ! Mais « Ils » viennent, « Ils  » sont derrière, pas très loin, et les tirs s’opèrent devant nous, sur la gauche. On nous fait stopper. On revient sur nos pas. Les S.S. ne savent plus quoi faire, car des lueurs de flammes jaillissent des lance-flammes, sans doute encore loin. Les S.S. parlent entre eux. Nous essayons vainement de surprendre leurs dialogues. Nous voyons que toutes les colonnes s’arrêtent derrière nous. Les avions survolent au petit jour. Nous attendons dans un bois, près d’un pont de pierre du chemin de fer.

Après trois heures de repos, nous repartons. Le commandant de notre groupe ne sait plus quoi faire. Nous marchons toujours vers le nord. »

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 16, 359, 381 et 416.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Hauts-de-Seine nord (2005), citant : Témoignages de René Maquenhen, Pierre Monjault – Correspondance avec Roger Arnould, déporté à Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP – Sachso, ouvrage de l’Amicale des anciens déportés de Sachsenhausen, p. 252, 254, 502 – Archives municipales de Clichy – État civil de la mairie de Vincelles.
- René Petijean, in Témoignages sur Auschwitz, ouvrage collectif, Édition de l’Amicale des déportés d’Auschwitz, FNDIRP, Paris 16e, 4e trim. 1946, pages 31 à 46.
- Roger Arnould, Les témoins de la nuit, volume de la tétralogie L’enfer nazi publiée par la FNDIRP, 2e édition avril 1979, pages 51, 55 et 161.
- Archives départementales de l’Yonne, archives en ligne : registre d’état civil de Vincelles NMD 1900-1904 (5 Mi 1356/ 2), année 1900, acte n°5 (vue 4/131).
- Archives communales de Clichy : listes électorales, archives de la section locale de la FNDIRP, matrices de taxe professionnelle.
- Archives de Paris : archives du tribunal correctionnel de la Seine, rôle du greffe du 15 novembre 1940 au 20 janvier 1941 (D1u6-5851).
- Archives départementales des Yvelines et de l’ancien département de Seine-et-Oise (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt ; cotes 1W71, 1W76 : (pas de dossier individuel ?).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement…  (BA 2374) ; liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397) ; archives des renseignements généraux (77W1544), dossier de Petitjean René (42160).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : liste XLI-42, n° 147.
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Louis Eudier (45523), “Notre combat de classe et de patriotes, 1934-1945”, au Havre, page 47, cite un témoignage de René Petitjean dans Le Patriote Résistant.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 22-04-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

Isidore PETAT – 45974

JPEG - 46.5 ko
Musée de la Résistance
de Blois. Cliché ARMREL.

Isidore, Louis, Petat naît le 18 novembre 1892 à Dun-le-Poëlier (Indre – 36), fils de Henri Petat, 38 ans, vigneron, cultivateur, et de Marie Louise Depins, 28 ans, son épouse. Isidore a un frère plus âgé : Charles, né le 13 juin 1887. Au recensement de 1901, leur père est déclaré comme maçon.

Isidore Petat commence à travailler comme serrurier.

Le 10 octobre 1913, il est incorporé au 1er ou au 14e régiment d’artillerie comme canonnier de 2e classe afin d’y commencer son service militaire.

Il est encore sous les drapeaux quand la guerre est déclarée, début août 1914.
Le 1er juin 1916 – alors passé au 37e RA -, il est cité à l’ordre du régiment : « … excellent soldat ayant constamment fait preuve de dévouement dans ses fonctions de téléphoniste, le 27 mai 1915, la batterie étant très violemment bombardée, s’est porté spontanément à la réfection des lignes ».
Le 20 octobre 1916, il est cité à l’ordre de la 12e Division (3e et 4e groupe du 37e d’artillerie) : « se dépensant sans compter de jour et de nuit malgré des pertes considérables pour donner à l’infanterie du secteur d’attaque l’appui le plus vigilant et le plus efficace ». Le 28 août 1919, il est mis en congé de démobilisation par le 33e RA et se retire à Dun-le-Poëlier.

En décembre 1921, l’armée l’affecte comme réserviste au 1er groupe d’ouvriers d’aviation, pour être employé au magasin d’aviation n° 3 à Romorantin (Loir-et-Cher), où il est peut-être ajusteur de précision.

Entre février 1923 et juin 1929, il habite rue de la Halle à Romorantin.

Le 17 décembre 1930, à Dun-le-Poëlier, âgé de 38 ans, Isidore Petat épouse Anne Louise Senigon, née le 27 mai 1896 à Dun.

Au moment de son arrestation, il est domicilié à Pruniers-en-Sologne, à 6 km de Romorantin ; mais sur son acte de décès est mentionné le 185, faubourg de Blois à Romorantin (nouvelle adresse de sa veuve ?).

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Pruniers-en-Sologne. Le village et le pont sur la Sauldre. Carte postale colorisée, envoyée en 1953. Coll. Mémoire Vive.

Pruniers-en-Sologne. Le village et le pont sur la Sauldre.
Carte postale colorisée, envoyée en 1953. Coll. Mémoire Vive.

Isidore Petat est ouvrier mécanicien dans une « usine d’aviation » (à l’entrepôt de l’armée de l’Air 304 de Pruniers ? à vérifier…).

Le 30 avril 1942, à Romorantin, cinq résistants communistes sont découverts par des soldats allemandsalors qu’ils distribuent des tracts. Armés, ils ne se laissent pas arrêter et blessent les soldats dont l’un succombe à ses blessures. Les mesures de représailles prévoient l’exécution immédiate de dix communistes, Juifs et de proches des auteurs présumés. Vingt autres personnes doivent être exécutées si au bout de huit jours les « malfaiteurs » ne sont pas arrêtés. Des rafles sont opérées dans la ville et dans le département afin de pouvoir « transférer d’autres personnes vers l’Est, dans les camps de travaux forcés. »

Le lendemain 1er mai, Isidore Petat est arrêté par la Feldgendarmerie et la gendarmerie française ; il est pris comme otage avec cinq Romorantinais qui seront déportés avec lui. Il est interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

[/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C. Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942. Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C.
Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.
Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Le 11 juin, le préfet du Loir-et-Cher informe le maire Romorantin que « à la suite de ses pressantes interventions, les Autorités Allemandes viennent (de) lui donner l’assurance qu’elles envisageaient la libération de la presque totalité des personnes arrêtées dans le Loir-et-Cher au lendemain de l’agression de Romorantin. »

Entre fin avril et fin juin 1942, Isidore Petat est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Isidore Petat est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45974 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

[/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Isidore Petat est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

[/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Le 16 juillet, sa famille reçoit l’avis imprimé envoyé par l’administration militaire de Royallieu pour l’informer qu’il a été transféré dans un autre camp et qu’elle sera prévenue ultérieurement de sa nouvelle adresse.

Le 23 juillet, le “Kommandeur” (sic) Westphal, chef de la Sicheirheitspolizei d’Orléans, fait connaître au préfet du Loir-et-Cher, J.F. Bussières, que Moïse Bodin, D. Pesson, G. Crochet. I. Petat et A. Roguet ont été transférés le 6 juillet « en vue de leur emploi comme travailleurs dans un camp en Allemagne », transfert « ordonné par le bureau central de Paris sans qu’un accord ait pu ou ait dû avoir lieu avec les bureaux de Province. De ce fait, les promesses (…) ont été faites dans l’ignorance de ces événements » en même temps qu’était « énoncée l’ordonnance relative à la libération de tous les détenus emprisonnés à la suite de l’attentat de Romorantin. »

Le 31 juillet, le préfet s’adresse au « chef du gouvernement, ministre secrétaire d’État à l’Intérieur » à Vichy, exprimant qu’il est « d’autant plus regrettable qu’une pareille confusion se soit produite que, pour un certain nombre de personnes envoyées en Allemagne, j’avais reçu l’avis de libération et que je l’avais communiqué à leur famille. Il me semble difficile d’admettre que des otages dont l’arrestation n’a été due qu’au hasard, soient victimes à nouveau par suite du manque de coordination existant entre deux services allemands. Une promesse a été faite. Une ordonnance de libération a été prise. La promesse doit être tenue et l’ordonnance exécutée. C’est pourquoi je vous demande d’intervenir (…) pour que les personnes (…) envoyées dans des camps de travail en Allemagne soient effectivement et définitivement libérées. »

À une date inconnue, Isidore Petat est admis au Block n°20 de l’ “hôpital” des détenus.

Il meurt à Auschwitz-I le 17 novembre 1942, selon un relevé du registre de la morgue d’Auschwitz-I (Leichenhalle) réalisé clandestinement par le groupe de résistance polonais des détenus (n° 16) [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1].

Le 6 février 1943, le maire de Romorantin s’adresse au délégué du ministre de l’Intérieur dans les territoires occupés, Jean-Pierre Ingrand, pour demander que soit recherché le camp d’Allemagne où « résident » les six Romorantinais déportés en juillet.

Le 20 décembre 1943, le préfet informe le maire de Romorantin de ses démarches « afin que les familles des otages déportés en Allemagne (…) puissent avoir des nouvelles de leurs parents » et de la réponse du SD d’Orléans : « les otages de Romorantin ont été conduits dans un camp Allemand où la correspondance entre détenus et leurs parents est interdite. » Le préfet assure « que cette affaire n’est pas perdue de vue et que, tant sur le plan local que national, toute occasion est mise à profit pour tenter de nouvelles démarches et essayer de mettre fin à cette pénible situation. »

Isidore Petat est déclaré “mort pour la France” (13-06-1946).

Son nom est inscrit sur les Monuments aux morts de Romorantin-Lantenay, situés quai de l’île Marin et dans le vieux cimetière.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (14-12-1997).

Sa veuve décède à Romorantin-Lanthenay le 3 octobre 1980.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 364 et 416.
- Archives départementales de l’Indre (AD36), site internet, archives en ligne : registre matricules du recrutement militaire, classe 1912, bureau de Châteauroux (R 2465), matricule 1379 (vue 592/789).
- Mémorial de la déportation politique dans l’Indre, FNDIRP.
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : XLIII-89 (télégramme non daté du Militärbefehlshaber in Frankreich (MbF), signé par Carl Heinrich von Stülpnagel.
- Archives communales de Romorantin (acte de décès, correspondance du maire et du préfet, listes…).
- Archives départementales du Loir-et-Cher, fiche d’arrestation d’Isidore Petat, dossier 889 (cote 1375 W 64), fichier alphabétique des déportés du CRSGM (cote 56 J 5).
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; Totenbucher (registre de la morgue).
- Site Mémorial GenWeb, 41-Romorantin, relevés de Sandrine-Fleur Curtil (2002) et Éric Reimond (08-2006).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 25-11-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ.

Concernant Isidore Petat, c’est le 15 octobre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès.

Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

Étienne PESSOT – 45973

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Étienne, Guillaume, Pessot naît le 14 mars 1914 à Paris 14e, chez une sage-femme (dans une maternité ?) au 4 passage des Thermopyles, fils de Guillaume Pessot, 30 ans, tanneur, et Pauline Beuvelet, 24 ans, chapelière, domiciliés au 199 rue de Bagneux à Montrouge (Seine / Hauts-de-Seine). Tous deux seront décédés avant son conseil de révision : Pauline, le 31 octobre 1917 au 96 rue Didot à Paris 14e. Quand il est encore mineur, Étienne Pessot a pour tutrice Madame Veuve Pessot, domiciliée au 4 avenue des Panoramas à Cachan (Seine / Val-de-Marne).

Pendant un temps, il habite au 122 bis rue de la Tombe-Issoire (Paris 14e).

Il commence à travailler comme manœuvre.

Le 24 avril 1934, il rejoint le 16e bataillon de chasseurs à pied auquel il est affecté afin d’y accomplir son service militaire. Mais, le 16 mai suivant, la commission de réforme de Saint-Avold le classe “service auxiliaire” pour « conjonctivite chronique bilatérale, trouble de la transparence cornéenne par séquelle d’une kératose conjonctivite photophobie ».

En avril 1935, il est domicilié au 77 rue de Bagneux à Montrouge [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Hauts-de-Seine).

Le 21 août 1937, à Montrouge, Étienne Pessot se marie avec Henriette Cécile Léonie Billiamattes.  Ils n’auront pas d’enfant.

Étienne Pessot est plombier-couvreur.

Du 4 au 24 octobre 1936, l’armée l’appelle à effectuer une période d’exercices au titre de la réserve, à l’issue de laquelle il reçoit le “certificat de bonne conduite”.

En mars 1939, il habite au 20 rue du Docteur Hénouille à Cachan [1] (Seine / Val-de-Marne – 94).

Le 1er septembre 1939, rappelé à l’activité militaire par le décret de mobilisation générale, il est affecté au 217e R.R.T., 2e compagnie, arrivant au corps deux semaines plus tard. Le 1er janvier 1940, il est affecté au dépôt de Cie 21. Le 14 mars 1940, il est affecté au dépôt d’infanterie 213. Le 8 août 1940, il est démobilisé à Aire-sur-l’Adour (Landes).

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 16, rue de Provigné (Provigny ?) à Cachan.

Le 1er mai 1941, Étienne Pessot est arrêté boulevard de la Vanne, à Cachan, en même temps que Georges Coudert, par des gendarmes de la brigade de Cachan alors qu’ils déposent des tracts « À bas Pétain » dans les boîtes aux lettres et tracent des inscriptions communistes sur la voie publique (également dans la rue de L’Haÿ). Tous deux sont conduits au dépôt de la préfecture de police sur l’île de la Cité (Paris 1er). Inculpés d’infraction au décret du 26-09-1939, ils sont écroués le lendemain à la Maison d’arrêt de la Santé, Paris 14e. Le 3 mai, la 12e chambre du Tribunal correctionnel de la Seine condamne Étienne Pessot à huit mois de prison.

Le 26 mai, il est transféré à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (94) ; n° d’écrou “ correction homme” 8126. Le 7 juillet, la Cour d’appel de Paris confirme sa condamnation.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 2 novembre, à l’expiration de sa peine, Étienne Pessot n’est pas libéré : le préfet de police de Paris signe un arrêté ordonnant son internement administratif.

Le 10 novembre, Étienne Pessot fait partie d’un groupe de 58 militants communistes transférés au « centre de séjour surveillé » (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne).

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le 22 mai 1942, il fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Étienne Pessot est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45973 (ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Étienne Pessot est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

En juillet 1943, la plupart des détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”) reçoivent l’autorisation d’écrire – en allemand et sous la censure – à leur famille et d’annoncer qu’ils peuvent recevoir des colis (à vérifier le concernant…).

À la mi-août, Étienne Pessot est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) et mis en “quarantaine” au premier étage du Block 11, la prison du camp. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 - où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues - et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”. Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 – où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues –
et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”.
Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 12 décembre, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blocks et Kommandos d’origine.

Le 3 août 1944, Étienne Pessot est parmi les trois-quarts des “45000” présents à Auschwitz qui sont de nouveau placés en “quarantaine” en préalable à un transfert.

Le 28 août 1944, Étienne Pessot est dans le petit groupe de trente-et-un détenus dont vingt-neuf “45000” transférés au KL [2] Flossenbürg (Haut-Palatinat bavarois, proche de la frontière tchèque), et enregistrés dans ce camp le 31 août (matricule 19880).

En janvier 1945, il est transféré au Kommando de Leitmeritz (Litomerice) – armements, huiles minérales, constructions Richard, usine Elsabe – avec Georges Hanse et Camille Salesse.

Étienne Pessot est probablement libéré dans ce sous-camp.

L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation. Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945. Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation.
Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945.
Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

Le 1er septembre 1945, à Cachan, Étienne Pessot se marie avec aimée Marcelle Coudert.

Le 8 février 1982, Étienne Pessot décède à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), âgé de 68 ans.

Notes :

[1] Montrouge et Cachan : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 346 et 347, 359, 387 et 416.
- Archives Départementales du Val-de-Marne (AD 94), Créteil : établissement pénitentiaire de Fresnes, registre d’écrou n° 151, “correction hommes” du 20 avril au 7 juillet 1941 (2742w18) ; dossier des détenus “libérés” du 1er au 13-11-1941 (511w25).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), site du Pré-Saint-Gervais ; cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; registre de main-courante du commissariat de la circonscription de Gentilly du 27 octobre 1940 au 8 août 1941 (CB.96.48)..
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI-42, n° 146.
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 3-04-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

Daniel PESSON – 45972

JPEG - 53.1 ko
Musée de la Résistance 
de Blois. Cliché ARMREL.

Daniel Pesson naît le 25 février 1903 à Gièvres (Loir-et-Cher – 41), fils de Louis Pesson, cultivateur, et de Séraphine Chollet, cultivatrice, son épouse. Un certain Clovis Pesson est tué au cours de la guerre 1914-1918 : est-ce un parent ? (à vérifier…)

À une date restant à préciser, Daniel Pesson épouse Silvine Legilles ; ils ont deux enfants. Au moment de son arrestation, il est domicilié à la Basse Roche, quartier (?) de Romorantin (41).

Daniel Pesson est charretier chez Benoist-Bourgeois, entreprise de vidange à la Haute-Roche.

En avril 1941, il est arrêté avec son patron et tout le personnel de l’entreprise, dont Moïse Bodin ; les conditions de sa libération restent à préciser. C’est peut-être à partir de ce moment-là qu‘il exerce le métier d’agriculteur (journalier), déclaré au moment de son arrestation.

Le 30 avril 1942, à Romorantin, cinq résistants communistes sont découverts par des soldats allemandsalors qu’ils distribuent des tracts. Armés, ils ne se laissent pas arrêter et blessent les soldats dont un sous-officier qui succombe à ses blessures. Les mesures de représailles prévoient l’exécution immédiate de dix communistes, Juifs et de proches des auteurs présumés. Vingt autres personnes doivent être exécutées si au bout de huit jours les « malfaiteurs » ne sont pas arrêtés. Des rafles ont lieu afin de pouvoir « transférer d’autres personnes vers l’Est, dans les camps de travaux forcés. » Un barrage est érigé autour de la ville.

Le lendemain 1er mai, Daniel Pesson est arrêté à son domicile – devant son épouse – par laFeldgendarmerie et la gendarmerie française ; il est pris comme otage avec quatre autres Romorantinais et un habitant de Pruniers qui seront déportés avec lui. Il est interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

JPEG - 128.9 ko

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Daniel Pesson est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45972 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

JPEG - 77.1 ko
Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz. 
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés aux travail dans différentsKommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Daniel Pesson est dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.

JPEG - 327.8 ko
Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ». 
« Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre » 
Carte postale. Collection mémoire Vive.

Le 16 juillet, sa famille reçoit l’avis imprimé envoyé par l’administration militaire de Royallieu pourl’informer qu’il a été transféré dans un autre camp et qu’elle sera prévenue ultérieurement de sa nouvelle adresse.

Le 23 juillet, le “Kommandeur” (sic) Westphal, chef de la Sicheirheitspolizei d’Orléans, fait connaître au préfet du Loir-et-Cher, J.F. Bussières, que Moïse Bodin, D. Pesson, G. Crochet. I. Petat et A. Roguet ont été transférés le 6 juillet « en vue de leur emploi comme travailleurs dans un camp en Allemagne », transfert « ordonné par le bureau central de Paris sans qu’un accord ait pu ou ait dû avoir lieu avec lesbureaux de Province. De ce fait, les promesses (…) ont été faites dans l’ignorance de ces événements » en même temps qu’était « énoncée l’ordonnance relative à la libération de tous les détenus emprisonnés à la suite de l’attentat de Romorantin. »

Le 31 juillet, le préfet s’adresse au « chef du gouvernement, ministre secrétaire d’État à l’Intérieur » à Vichy, exprimant qu’il est « d’autant plus regrettable qu’une pareille confusion se soit produite que, pour un certain nombre de personnes envoyée en Allemagne, j’avais reçu l’avis de libération et que je l’avais communiqué à leur famille. Il me semble difficile d’admettre que des otages dont l’arrestation n’a été due qu’au hasard, soient victimes à nouveau par suite du manque de coordination existant entre deux services allemands. Une promesse a été faite. Une ordonnance de libération a été prise. La promesse doit être tenue et l’ordonnance exécutée. C’est pourquoi je vous demande d’intervenir (…) pour que les personnes (…) envoyées dans des camps de travail en Allemagne soient effectivement et définitivement libérées. »

Daniel Pesson meurt à l’ “hôpital” [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] d’Auschwitz (Block 28a) le 16 août 1942, d’après les registres du camp [2] ; cinq semaines après l’arrivée de son convoi.

Le 6 février 1943, le maire de Romorantin s’adresse au ministre de l’Intérieur, Ingrand, pour que soit recherché le camp d’Allemagne où « résident » les six romorantinais déportés en juillet.

Le 20 décembre 1943, le préfet informe le maire de Romorantin de ses démarches « afin que les familles des otages déportés en Allemagne (…) puissent avoir des nouvelles de leurs parents » et de la réponse duSD d’Orléans : « les otages de Romorantin ont été conduits dans un camp Allemand où la correspondance entre détenus et leurs parents est interdite. » Le préfet assure « que cette affaire n’est pas perdue de vue et que, tant sur le plan local que national, toute occasion est mise à profit pour tenter de nouvelles démarches et essayer de mettre fin à cette pénible situation. »

Le 4 octobre 1945, le nom de Daniel Pesson figure sur une « liste des personnes qui ont été déportées en Allemagne et dont on est sans nouvelles actuellement » établie en mairie.

Il est déclaré “Mort pour la France” (4-02-1947). Son nom est inscrit sur les Monuments aux morts de Romorantin-Lantenay, situés quai de l’île Marin et dans le vieux cimetière.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 14-12-1997).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 365 et 416. 
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : XLIII-89 (télégramme non daté du Militärbefehlshaber in Frankreich (MbF), signé par Carl Heinrich von Stülpnagel). 
- Archives communales de Romorantin et Archives du Musée de Sologne (acte de décès). 
- Archives départementales du Loir-et-Cher, fiche d’arrestation de Daniel Pesson, dossier 889 (cote 1375 W 64), fichier alphabétique des déportés du CRSGM (cote 56 J 5). 
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 1, cahier photos pages 92* et 93** (liste des prisonniers morts sur le registre d’appel), 120* (registre de la morgue relevé par la Résistance) ; tome 3, page 920 (21288/1942). 
- Site Mémorial GenWeb, 41-Romorantin, relevés de Sandrine-Fleur Curtil (2002) et Eric Reimond (08-2006).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 16-02-2010)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] L’ « hôpital » d’Auschwitz : en allemand Krakenbau (KB) ou Häftlingskrakenbau (HKB), hôpital des détenus. Dans Si c’est un Homme, Primo Lévi utilise l’abréviation “KB”. Mais les « 31000 » et Charlotte Delbo ont connu et utilisé le terme “Revier” : « abréviation de Krakenrevier, quartier des malades dans une enceinte militaire. Nous ne traduisons pas ce mot que les Français prononçaient «  révir  », car ce n’est ni hôpital, ni ambulance, ni infirmerie. C’est un lieu infect où les malades pourrissaient sur trois étages. », Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1967, p. 24.

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ.

Concernant Daniel Pesson c’est le 15 septembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès.

Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

Pierre PESCHARD – (45971 ?)

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Pierre, Marcel, Serreau naît le 12 octobre 1906 à Paris 14e, au 25, rue Gazan, fils de Blanche Serreau 32 ans, giletière, domiciliée au 31, rue Saint-Placide, et de père non dénommé. Le 14 septembre 1910, l’enfant est reconnu par René Athanase Peschard, 34 ans, menuisier, domicilié au 26, avenue d’Orléans.

Pendant un temps, Pierre Peschard habite chez ses parents au 136, rue Broca. À l’automne 1930, il loge au 9, rue des Gobelins. Il est devenu menuisier, comme son père.

Le 29 novembre 1930, à la mairie du 13e arrondissement, Pierre Peschard se marie avec Albertine Petitot, née le 19 mars 1905 à Paris 6e, mécanicienne, habitant avec sa mère, veuve, au 42, rue du Château-des-Rentiers.

Le 2 octobre 1931, Pierre Peschard est embauché par une compagnie de chemin de fer qui fusionnera au sein de la SNCF début 1938 [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1].Au moment de son arrestation, il est domicilié au 3, passage Vallet [2] à Paris 13e, à l’angle de la rue Pinel. Il est marié.

Pierre Peschard est militant communiste et responsable syndical CGT.

Carte syndicale CGT, Fédération des chemins de fer.  Collection Mémoire Vive.

Carte syndicale CGT, Fédération des chemins de fer.
Collection Mémoire Vive.

Le début de l’occupation le trouve affecté au chemin de fer de petite ceinture. En août 1940, il fait partie de la soixantaine de militants du 13e arrondissement qui recomposent la section clandestine du PC.

La police française le considère comme un « militant communiste notoire, (ayant) pris une part importante dans le développement de la propagande clandestine ».

Au moment de son arrestation, Pierre Peschard est affecté comme menuisier, aide-ouvrier, aux ateliers SNCF de Saint-Ouen les docks.

Le 28 mai 1941, il est arrêté, inculpé d’infraction au décret du 26 septembre 1939 (propagande communiste clandestine) et conduit avec trois autres militants au dépôt de la préfecture de police (Conciergerie, sous-sol du Palais de Justice, île de la Cité) à la disposition du procureur de la République.

Le 21 septembre, la section de Paris du Tribunal d’État l’acquitte. Mais il n’est pas libéré : le 23 septembre, le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1939. Pendant un temps, il est détenu au dépôt.

Le 9 octobre 1941, il est parmi les 60 militants communistes (40 détenus venant du dépôt, 20 venant de la caserne des Tourelles) transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne) ; départ gare d’Austerlitz à 8 h 25, arrivée à Rouillé à 18 h 56.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le 9 février 1942, Marcel Peschard est parmi les cinquante-deux « communistes » (dont trente-six seront déportés avec lui) remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits par des Feldgendarmes à la gare de Poitiers. Enfermés dans deux wagons à bestiaux, ils sont transférés – via Paris – au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures puis repart à la nuit tombée : Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Marcel Peschard est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45971 ; plausible selon les listes reconstituées, ce numéro est également celui d’un détenu enregistré à la morgue à la date de son décès (la photo d’immatriculation correspondant à ce numéro n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage actuellement connu ne permet de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Marcel Peschard.

Il meurt à Auschwitz le 29 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) et une copie du registre de la morgue (Leichenhalle) relevée clandestinement par la résistance polonaise interne du camp, sur laquelle est “listé” le matricule n° 45971 [3]. Ce jour-là, sous prétexte d’enrayer une épidémie de typhus dans le camp principal, le nouveau médecin SS de la garnison, Kurt Uhlenbroock, ordonne d’effectuer une sélection dans les Blocks de l’hôpital, notamment le Block 20. 746 détenus atteints du typhus et convalescents sélectionnés dans la cour fermée séparant les Blocks 20 et 21 sont chargés dans deux grands camions bâchés qui les transportent par rotation jusqu’aux chambres à gaz de Birkenau. Il s’agit de la première grande opération d’extermination des détenus malades. La désinfection du Block 20 dure dix jours ; du 29 août au 8 septembre, le registre du Block ne comporte aucune inscription.

Après leur retour de déportation, les rescapés du convoi qui attestent de son décès sont Henri Marti, de Paris 5e, et Auguste Monjauvis, de Paris 13e.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 14-12-1997).

Après la guerre, une plaque commémorative est apposée sur le bâtiment où il habitait au moment de son arrestation. À une date restant à préciser, celui-ci a été démoli et la plaque n’a pas été réinstallée sur la façade de l’immeuble qui l’a remplacé.

Notes :

[1] La SNCF : Société nationale des chemins de fer français. À sa création, suite à une convention validée par le décret-loi du 31 août 1937, c’est une société anonyme d’économie mixte, créée pour une durée de 45 ans, dont l’État possède 51 % du capital.

[2] Le passage Vallet : voie classée en 1935, du nom d’un propriétaire.

[3] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant de Pierre Peschard, c’est 6 novembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 372 et 416.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier central) – Témoignage d’Auguste Monjauvis et de Henri Marti.
- Louis Chaput, Auguste et Lucien Monjauvis (entre autres), Le 13e arrondissement de Paris, du Front Populaire à la Libération, les éditeurs français réunis, Paris 1977, pages 95 et 111.
- Comité du 13e arrondissement de l’ANACR, La résistance dans le treizième arrondissement de Paris, imprimé par l’École Estienne en 1977, page 89.
- Archives de Paris, site internet, archives en ligne : état civil du 14e arrondissement, registre des naissances, année 1906 (14N 395), acte n° 8889 (vue 28/31).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374), liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397) ; dossier individuel du cabinet du préfet (1 W 736-27464).
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Auschwitz, camp de concentration et d’extermination (version française), ouvrage collectif sous la direction de Franciszek Piper et Teresa Swiebocka, éd. du Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oswiecim 1993-1998, p. 175
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 920 (25672/1942).
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Service d’information sur les anciens détenus (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) : liste de la morgue (« Leichenhalle »).
- Base de données des archives historiques SNCF ; service central du personnel, agents déportés déclarés décédés en Allemagne (en 1947), de A à Q (0110LM0108).
- Cheminots victimes de la répression 1940-1945, mémorial, ouvrage collectif sous la direction de Thomas Fontaine, éd. Perrin/SNCF, Paris, mars 2017, pages 1162-1163.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 20-01-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

René PERROTTET – 45970

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Vers 1938 (extrait, voir ci-dessous). Collection Frédérique Robert. Droits réservés.

Vers 1938 (extrait, voir ci-dessous).
Collection Frédérique Robert.
Droits réservés.

René, François, Perrottet naît le 20 mai 1921 au domicile de ses parents, Georges Perrottet 21 ans, livreur (puis mortaiseur), et de Germaine Frings (ou Frengs), son épouse, 21 ans, couturière à domicile, demeurant au 9, rue Julie à Paris 14e. Un des deux témoins est François Frings, cocher.

Fils cadet, René Perrottet a eu treize frères et sœurs : Paul, l’aîné, puis – après René – Geneviève, Raymond, décédé à 4 ans, Madeleine décédée à 18 mois, Lucien, Christiane, Ghislaine, Huguette, Yolande, Henri, Micheline, Daniel et Solange.

En 1936, la famille habite au 26, avenue Victor-Hugo à Cachan [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Val-de-Marne – 94), dans la cité-jardin [2]. Le père est au chômage. Son frère aîné Paul, 21 ans, est tôlier chez Bernadet à Bourg-la-Reine [1] (Seine / Hauts-de-Seine).

René Perrottet, entre sa sœur Geneviève, 16 ans, et leur mère, Germaine. Collection Frédérique Robert. Droits réservés.

René Perrottet, entre sa sœur Geneviève, 16 ans, et leur mère,
Germaine. Collection Frédérique Robert. Droits réservés.

René Perrottet est imprimeur typographe, adhérent au Syndicat CGT du Livre et du Papier de janvier 1937 à septembre 1939, mais sans y exercer aucune fonction.

Militant actif des Jeunesses communistes, il est diffuseur de L’Avant-Garde et de L’Humanité avant guerre.

Après l’interdiction du Parti communiste, il reste actif dans la clandestinité.

À partir du 27 septembre 1939, René Perrottet vit « maritalement » avec Raymonde L., née le 29 mars 1920 à Paris 14e, qu’il a probablement connue à la Cité-Jardin ; les parents de René sont hostiles à leur relation.

Le 26 janvier 1940, il est interpellé par la police devant la Chambre des Députés au cours d’une manifestation du Comité mondial des femmes contre la guerre, puis relaxé « après les vérifications d’usage » ; peut-être y accompagnait-il son amie…

En juin 1940, son frère aîné, Paul, est fait prisonnier de guerre, puis interné en Allemagne, ce qui réduit considérablement les ressources de la famille.

Le 8 août 1940, à la suite d’une dénonciation, le commissaire de police de la circonscription de Gentilly effectue une perquisition au domicile familial des Perrottet, où René habite toujours et où sont trouvés 83 tracts communistes qu’on lui avait remis pour qu’il les distribue. Arrêté, René est envoyé au Dépôt le jour même (Raymonde L. étant mise hors de cause). Inculpé d’infraction à l’ordonnance allemande du 20 juin 1940 (avis affiché le 14 août ?), il est « mis sous mandat allemand » et écroué au quartier allemand (?) de la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e).

Le 15 octobre, alors qu’il est censé être libéré, René Perrottet est appréhendé par la police française et inculpé d’infraction au décret du 26 septembre 1939. Le 22 octobre, il est placé sous mandat de dépôt.

Le 8 février 1941, lors d’une audience au cours de laquelle sont jugés 48 militants et militantes communistes (dit « procès des cinquante ») – dont dix-sept futurs “45000” – la chambre des mineurs (15e) du Tribunal correctionnel de la Seine condamne René Perrottet à quatre mois d’emprisonnement. Celui-ci considère que le Président a tenu compte de sa situation familiale. Néanmoins, comme les autres condamnés, il fera appel de la sentence le 28 février.

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er. Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage. (montage photographique)

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage.
(montage photographique)

Bien que la détention préventive qu’il a déjà effectué dépasse largement la peine à laquelle il vient d’être condamné, René Perrottet n’est pas libéré : le lendemain du verdict, 9 février, il est « transféré à la préfecture de Police » où le chef de la brigade spéciale des renseignements généraux lui signifie qu’il va être dirigé vers un « camp de concentration surveillé ». Effectivement, le préfet de police signe l’arrêté ordonnant son “internement administratif” en application du décret du 18 novembre 1939. En attendant un transfert, René Perrottet est renvoyé à la Santé, 3e division, cellule n° 55.

Le 25 février, il écrit au préfet de police pour solliciter sa libération, estimant avoir purgé sa peine et expliquant que son salaire est nécessaire pour subvenir aux besoins de sa nombreuse famille.

Deux jours plus tard, le 27 février, il fait partie des douze internés administratifs (dont sept futurs “45000”) transférés à la Maison centrale de Clairvaux (Aube), désignée comme lieu d’internement, où ils en rejoignent d’autres : ils sont bientôt 300 détenus politiques. René Perrottet est enregistré sous le numéro d’écrou 226.

Clairvaux. La Maison centrale. Carte postale. Collection M. Vive.

Clairvaux. La Maison centrale. Carte postale. Collection M. Vive.

Dans un questionnaire individuel rempli à Clairvaux, il désigne Raymonde L. comme « personne à prévenir en cas d’accident », et comme « personne avec qui le détenu désire correspondre », en tant que « femme » (épouse) et en tant qu’« autre personne ».

Le 8 avril, avec Marcel Andréas, Marcel Boyer, Louis Guidou, Robert Lambotte et Jules Vanzuppe, René Perrottet est un des huit internés de Clairvaux conduits à la Santé (la préfecture de police n’en étant pas avisée), en préalable à leur passage devant la cour d’Appel de Paris. Le lendemain, celle-ci confirme sa peine. Il est prévu qu’il soit ramené à Clairvaux, mais le quartier de la centrale utilisé comme centre d’internement étant « complet », il reste interné à la Santé (14e division, cellule n° 4).

Le 4 mai, il écrit au directeur de la prison pour solliciter sa libération.

Le 1er juillet 1941, il écrit au directeur de la police judiciaire pour demander qu’un droit de visite soit accordé à son amie Raymonde L., qui se l’est vu refuser jusqu’ici, n’ayant pas le même nom de famille et aucun enfant de lui. Une note en réponse du 20 juillet indique « Il n’y a pas lieu […] d’accorder la visite sollicitée ».

René Perrottet est ramené à Clairvaux le 9 septembre.

Deux semaines plus tard, le 25 septembre 1941, il fait partie d’un groupe d’internés transférés au “centre d’internement administratif” (CIA) de Gaillon (Eure), un château Renaissance isolé sur un promontoire surplombant la Seine et transformé en centre de détention au 19e siècle, puis en caserne ; il est assigné au bâtiment F (aile Est du pavillon Colbert [3]), 2e étage, chambre 6, lit 76.

Le château de Gaillon. Les internés sont assignés au pavillon Colbert, le haut bâtiment transversal de l’arrière plan (qui a perdu sa toiture après la guerre). Carte postale envoyée en 1955. Collection Mémoire Vive.

Le château de Gaillon. Les internés sont assignés au pavillon Colbert,
le haut bâtiment transversal de l’arrière plan (qui a perdu sa toiture après la guerre).
Carte postale envoyée en 1955. Collection Mémoire Vive.

Selon une note de la police datée du 18 février 1942, son nom figure sur une liste de 43 « militants particulièrement convaincus, susceptibles de jouer un rôle important dans l’éventualité d’un mouvement insurrectionnel et pour lesquels le Parti semble décidé à tout mettre en œuvre afin de faciliter leur évasion ».

Le 5 mars 1942, René Perrottet est parmi les 16 internés administratifs de Gaillon (dont 9 futurs “45000”) remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci, pris en charge par la Feldgendarmerie et conduits en autocar au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Enregistré sous le matricule n° 3700, René Perrottet est assigné au bâtiment A8, chambre 13.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ; à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8. Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ;
à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8.
Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Le vendredi 6 mars, Pierre Rigaud, d’Ivry-sur-Seine, écrit dans son journal personnel : « De nouvelles arrivées d’internés sont signalées. Le bâtiment A8 se complète. Je rends visite avec Peyronin à nos amis Boyer, Vanzuppe, Le Bigot, Perrotet, Paupy, Graindorge, arrivés hier de Gaillon. On parle de ce qu’était le régime à Gaillon, de ceux qui y sont restés : Sémard, Houet, etc. Le changement de vie pour nos camarades est encore plus considérable que pour nous. Plusieurs chambres d’“anciens” invitent les nouveaux arrivants à un repas. Nous devons en avoir deux de la Marne. Le problème de l’installation de nos camarades est difficile à résoudre. Rien dans leurs chambres nues, délabrées, sales. On a bien du mal à leur procurer lits et couvertures. On leur promets des planches pour leurs paquetages. Quand les auront-ils ? » Il note qu’un colis est arrivé pour lui et qu’il pourra aller le chercher à la distribution du jour suivant…

Le soir même, Pierre Rigaud, Corentin Cariou et Léopold Réchossière apprennent qu’ils doivent être fusillés le lendemain. Ils sont enfermés pour la nuit dans des cellules séparées de la prison interne du camp.

Le lendemain matin 7 mars, ils sont transportés jusqu’à la Butte-aux-Zouaves à Moulin-sous-Touvent, dans la forêt de Carlepont (à une trentaine de km du camp) et fusillés comme otages en représailles de l’attentat du 1er mars contre une sentinelle allemand rue de Tanger à Paris 19e.

Le 21 avril, le service Vpol 2 du Kommandant von Gross-Paris s’adresse au service V ju du Militärbefehlshaber in Frankreich (MbF) pour lui proposer une liste de trente otages en représailles d’un attentat contre le train 906 (« SF-Zug 906 » ?) ; parmi ceux-ci, René Perrottet, Jean Berthout (lequel ?), Pierre Bourneix, Georges Guinchan, André Tollet… (il semble qu’aucun des autres n’ait été fusillé au Mont-Valérien).

Entre fin avril et fin juin 1942, René Perrottet est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne – située sur la commue de Margny – et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, René Perrottet est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45970 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, René Perrottet est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».  « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ». « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

À une date inconnue, René Perrottet est admis au Block 20 (maladies contagieuses) de l’hôpital [4].

René Perrottet meurt à Auschwitz le 16 août 1942, d’après plusieurs registres du camp, cinq semaines après l’arrivée du convoi. Il a 21 ans.

En février 1946, en s’appuyant sur les témoignages de Marcel Lambotte et d’Eugène Garnier, Madeleine Dechavassine (“31639”), secrétaire de l’Amicale d’Auschwitz et des camps de Haute-Silésie, signe un certificat attestant du décès de René Perrottet, que ses deux camarades de déportation estiment avoir eu lieu « début 1943 ».

L’acte officiel de décès est dressé administrativement le 8 juin 1948 pour être transcrit sur les registres d’état civil.

Le 11 février 1949, la Commission départementale de contrôle de la Seine le classe dans la catégorie “déporté politique”.

Le 23 mai 1956 au plus tard, la date de sa mort et son matricule sont connus avec certitude grâce à la photocopie d’un « état des effectifs journaliers d’Auschwitz ».

En novembre 1956, son père reçoit sa carte de déporté politique, n° 1.1.75.10575.

En janvier 1957, le ministère des Anciens combattants et victimes de guerre fait enfin apposer la mention “Mort pour la France” en marge des actes d’état civil de René Perrottet. À cette occasion, son père demande au maire de Cachan, Jacques Carat, que le nom de son fils soit ajouté sur le monument dédié aux FFI de la commune, parmi les « morts en déportation ». Le 18 novembre 1945, sur la pointe séparant l’avenue de la Division Leclerc et l’avenue Vatier à Cachan, avait été inauguré un monument – représentant en haut-relief un homme portant brassard et brandissant un pistolet – d’abord dédié « Aux héros F.F.I . de (la commune) tués en combat le 21 août 1944 » dont les douze noms sont gravés sur le bas du monument, qui forme stèle. Puis, sous un trait horizontal incisé dans la pierre, il y avait trois noms au-dessus de l’inscription « fusillés par les Allemands ». À la suite de la demande de son père, c’est là que le nom de René a d’abord été ajouté par erreur. Enfin, au-dessus de l’inscription « morts en déportation », de part et d’autre d’un petit bas-relief représentant deux tanks, on trouvait trois autres noms, dont celui de Yannic Mahé.

© Mémoire-Vive, 10-2021.

© Mémoire-Vive, 10-2021.

© Mémoire-Vive, 10-2021.

© Mémoire-Vive, 10-2021.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 8-03-1997).

Le 25 août 2017, Frédérique Robert, nièce de René Perrottet, participe à la cérémonie commémorative de la libération de Paris et de sa banlieue, au cours de laquelle le monument aux FFI est dévoilé après sa restauration et l’inscription en bonne place du nom de René.

Le samedi 26 mai 2018 à 11 h, le conseil municipal de Cachan et le conseil citoyen du quartier Ouest-Sud dévoilent une plaque à la mémoire de René Perrottet, apposée au 185 rue Aristide Briand, à proximité du centre de Protection maternelle et infantile.

Notes :

[1] Cachan et Bourg-la-Reine : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] La cité-jardin de Cachan fut réalisée à partir de 1921 sur un terrain de 6 hectares par l’architecte Louis Feine, à l’initiative d’Henri Sellier, le créateur de l’office d’habitations à bon marché (HBM) du département de la Seine. Une première tranche (1921-1922) comprenait 151 logements pour familles nombreuses en 53 pavillons ; une seconde tranche, réalisée en 1923-1924, comptait 123 logements en 25 pavillons ; enfin en 1928-1930 furent élevés en bordure de la Nationale quatre immeubles de 4 étages pour 54 logements, ainsi qu’un dispensaire et un magasin coopératif. À la fin des années 1920 la cité abrite 1675 habitants, chaque famille disposant d’un jardin de 150 à 250 m2. La densité d’occupation de l’espace ayant été jugée trop faible par l’office H.L.M. après 1945, la cité est détruite de 1961 à 1963 au profit d’immeubles. Ne subsistent, à l’extrémité nord-ouest, que les pavillons abritant le dispensaire et la crèche. (source : site Patrimoine de France)

[3] Château de Gaillon. Le pavillon Colbert, sur la terrasse du jardin haut, a été dessiné par Jules-Hardoin Mansard vers 1700 pour l’archevêque Jacques-Nicolas Colbert, second fils du ministre de Louis XIV.

[4] L’hôpital d’Auschwitz : en allemand Krakenbau (KB) ou Häftlingskrakenbau (HKB), hôpital des détenus. Dans Si c’est un Homme, Primo Lévi utilise l’abréviation “KB”. Mais les « 31000 » et Charlotte Delbo ont connu et utilisé le terme « Revier » : « abréviation de Krakenrevier, quartier des malades dans une enceinte militaire. Nous ne traduisons pas ce mot que les Français prononçaient « révir », car ce n’est ni hôpital, ni ambulance, ni infirmerie. C’est un lieu infect où les malades pourrissaient sur trois étages. », Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1967, p. 24.

Sources :

- Ville de Cachan, service des archives et de la documentation : courriers pour l’inscription de René Perrottet sur le monument aux FFI, brochure (ou encart ?) “Cachan été 1944, mémoires en liberté” (date ?).
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 387 et 416.
- Frédérique Robert, nièce de René Perrottet, fille de sa sœur Geneviève (messages 02-2012, 11-2014, 10-2021).
- Pierre Rigaud, Journal d’un otage français, 1941-1942, édité par Louis Poulhès, éditions Atlande, Neuilly, janvier 2025 ; page 392.
- Archives nationales : correspondance de la Chancellerie sur des procès pour propagande et activité communistes (BB18 7042).
- Archives départementale de Paris : archives judiciaires, registre du greffe du tribunal correctionnel de la Seine, 14 janvier-12 février 1941 (D1U6 3719), jugement du samedi 8 février 1941.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande” : (BA 2373), camps d’internement… (2374), liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397) ; dossier individuel de René Perrottet aux RG, n° 51263 (77W1567), consulté par Frédérique Robert.
- Archives départementales de l’Eure, Évreux : archives du camp de Gaillon (89W4, 89W11 et 89W14) ; recherches de Ginette Petiot (message 08-2012).
- Archives départementales de l’Aube, Troyes : archives de la Maison centrale de Clairvaux, dossier individuel de René Perrottet (cote ?), recherches de David Ling, transmises à Frédérique Robert (message 03-2015).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLV-31.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 1, cahier photos pages 92, 93 et 94, tome 3, page 920 (21622/1942).
- Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, direction des patrimoines de la mémoire et des archives (DPMA), Caen : dossier de René Perrottet (21 P 524.670), recherches de Ginette Petiot (message 09-2012).
- Association Mémoire et création numérique, site Les plaques commémoratives, sources de mémoire (aujourd’hui désactivé – nov. 2013).
- http://www.museedelaresistanceenligne.org/media6849-Aux-heros-FFI-de-Cachan-tues-au-combat-le-21-aout-1944#fiche-tab.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 4-04-2025)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

Go to Top