Charles JACQUET – (45681 ?)

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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Charles, Victor, Jacquet naît le 2 décembre 1893 à Lyon 2e (Rhône), à l’hospice de la Charité, fils de Jeanne Jacquet, 16 ans, cuisinière, domiciliée rue des Champs (? peu lisible).

Pendant un temps, Charles Jacquet est « garçon de culture ».

Mobilisé le 5 septembre 1914 comme soldat de 2e classe au 149e régiment d’infanterie, il arrive au corps dix jours plus tard. Le 25 juin 1915, il est nommé soldat de 1ère classe. Le 6 avril 1916, il est cité à l’ordre de son régiment : « Très bon soldat, courageux, méprisant le danger, agent de liaison ayant assuré les communications pendant la période du 1er au 5 avril 1916, sous un violent bombardement ininterrompu. Toujours prêt à marcher dans les circonstances les plus difficiles. Bel exemple pour ses camarades » ; peut-être dans le secteur du fort de Vaux (région de Verdun). Le 26 septembre suivant, il est de nouveau cité : « Agent de liaison, s‘est fait remarquer par son courage et son sang froid au cours de l’attaque du 4 septembre 1916. Est allé chercher sous un feu violent deux soldats blessés et les a ramenés dans nos lignes. Soldat toujours prêt pour les missions dangereuses », peut-être lors de l’assaut français sur Soyécourt (Somme). Il reçoit la Croix de guerre, avec deux étoiles de bronze.

La Croix de guerre 1914-1918 avec étoile de bronze. © MV

La Croix de guerre 1914-1918
avec étoile de bronze.
© MV

Le 28 mai 1917, il est nommé caporal. Un an plus tard, le 29 mai 1918, il est porté disparu : il a été fait prisonnier, probablement lors de l’offensive allemande sur l’Aisne qui bouscule les lignes françaises au Chemin des Dames (35 000 prisonniers !) ; secteur de Cuiry-House, de la croupe de Cercueil, des lisières de Lesges, et de la cote 140. Charles Jacquet est détenu à Eclasheim (Elsheim ?). Le 4 décembre 1918, il est rapatrié sur Paris. Le 8 août 1919, il est envoyé en congé illimité de démobilisation.

Le 2 mars 1918 à Paris 6e, Charles Jacquet se marie avec Élise Telhiez. En août 1919, il est domicilié au 9, rue de la Ferronnerie, dans cet arrondissement.

En décembre 1921, il demeure à Rozières-en-Haye (Meurthe-et-Moselle – 54)

Au moment de son arrestation, Charles Jacquet est domicilié à Pompey, au nord de Nancy (54), connue pour son aciérie ; son adresse reste à préciser.

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Pompey. Les aciéries en hiver. Carte postale (années 1900).
Collection Mémoire Vive.

Sa profession reste à préciser, mais il est secrétaire du syndicat CGT de l’usine de Pompey de 1936 à 1942.

Le 15 novembre 1938, au congrès national de la CGT réuni à Nantes, il est un des six délégués de Meurthe-et-Moselle, représentant la fédération des Métaux, avec Joseph Schneider et Julien Rebourg, père de Marceau Rebourg.

En 1938, Charles Jacquet est licencié avec d’autres membres du bureau du syndicat des métaux de Pompey après l’échec de la grève du 30 novembre décidée par une conférence nationale de la CGT pour protester contre l’application des décrets Daladier-Reynaud revenant sur des acquis du Front populaire.

Il quitte le Parti communiste après la signature du pacte germano-soviétique en août 1939.

Le 17 avril 1942, il est arrêté à son domicile par la Felgendarmerie et conduit à la prison Charles III de Nancy (secteur allemand ?).

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Nancy. La prison Charles III. Carte postale écrite en août 1915.
Collection Mémoire Vive.

À une date restant à préciser, il est transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

transportaquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Charles Jacquet est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45681 selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage connu ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Charles Jacquet.

Il meurt à Auschwitz le 2 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher)

[1], qui indique pour cause mensongère de sa mort « pneumonie » (Lungenentzündung).

Sur le Monument aux morts de Pompey, un nommé Jacquet V. est inscrit comme « victime civile » : est-ce lui ou un parent ? Deux Jacquet sont tués en 1914-1918 : s’agit-il de parents ?

La mention “Mort en déportation” est apposée sur l’acte de décès de Charles Jacquet (J.O. du 16-07-1994).

Notes :

[1] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant de Charles Jacquet, c’est la période de juillet à septembre 1942 qui a été initialement retenue pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

 

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74, 127 et 128, 368 et 408.
- Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 117.
- Jean-Claude et Yves Magrinelli, Antifascisme et parti communiste en Meurthe-et-Moselle, 1920-1945, Jarville, avril 1985, pages 118 et 119, 122, 349.
- Étienne Kagan, Le Maitron en ligne, dictionnaire du mouvement ouvrier, mouvement social, site internet de l’Université Paris 1.
- Archives de la Ville de Lyon, site internet, archives en ligne, registre des naissances du 2e arrondissement, année 1893 (cote 2E1672), 4 décembre, acte n° 3032 (vue 96/156).
- Archives départementales du Rhône (AD 69), site internet du Conseil général, archives en ligne, registre des matricules militaires de 1913, bureau de Lyon centre (cote 1 RP 1199), n° 1690 (vue 362/973).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 492 (26859/1942).
- Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, direction des patrimoines de la mémoire et des archives (DPMA), Caen : copies de pages du Sterbebücher provenant du Musée d’Auschwitz et transmises à partir du 14 février 1967 au ministère des anciens combattants et victimes de guerre par le Service international de recherches à Arolsen, carton de G à K (26 p 841), acte n° 26859/1942.
- Site Mémorial GenWeb, relevé de Michel Jacquot et Martine Mangeolle (10-2006).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 3-05-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

René JACKY – (45680 ?)

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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

René, César, Jacky naît le 13 novembre 1894 au Havre (Seine-Maritime 

[1]), chez ses parents, Georges Jacky, 30 ans, employé de chemin de fer, lui-même natif du Havre, et Marie Ozenne, 30 ans, domiciliés au 90, rue Demidoff.

Pendant un temps, il travaille comme voilier (métier consistant à tailler ou coudre ensemble les laizes des voiles, d’y fixer leurs renforts, ralingues ou garnitures, et à raccommoder ces voiles ; éventuellement dans l’atelier de voilerie d’un arsenal).

Le 18 décembre 1914, René Jacky est incorporé au 46e régiment d’infanterie. Le 24 mai 1915, il passe au 282e R.I. Le 25 septembre, il est cité à l’ordre de la brigade : « Employé comme agent de liaison auprès du commandant de compagnie, a toujours fait preuve, d’entrain, de bravoure dans l’accomplissement des missions qui lui ont été confiées dans des circonstances très difficiles ». Il reçoit la Croix de guerre avec étoile de bronze.

La Croix de guerre 1914-1918 avec étoile de bronze. © MV

La Croix de guerre 1914-1918
avec étoile de bronze.
© MV

Le 1er octobre 1915, René Jacky est nommé caporal. Le 1er juin 1916, il passe au 204e R.I. Le 23 mars 1918, il est fait prisonnier à Chauny (Aisne). Il est interné à Giessen, dans le centre du land de Hesse. Le 21 décembre 1918, il est rapatrié en France. Le 25 janvier 1919, il passe au 129e R.I.  Le 1er mai, il est nommé sergent.

Le 23 août 1919 à Paris 11e, alors qu’il est encore sous les drapeaux, René Jacky se marie avec Renée Marcq, née le 18 janvier 1900 à Paris 12e, employée de commerce.

Le 9 septembre suivant, il est démobilisé. René et Renée auront deux enfants : André, né le 17 juin 1923, et Monique, née le 10 juillet 1940.

Le 2 octobre 1919, René Jacky est embauché par la Compagnie des Chemins de fer de l’État, qui fusionnera avec d’autres au sein de la SNCF début 1938 [2]. En août 1927, l’armée le classe affecté spécial comme facteur du matériel à la Garenne-Bezon.

Le 29 juin 1928, il participe à une manifestation de fonctionnaires à la gare Saint-Lazare.

Au moment de l’arrestation du chef de famille, celle-ci est domiciliée dans un immeuble HBM (habitations à bon marché) au 21, avenue Henri-Martin à Nanterre [3] (Seine / Hauts-de-Seine).

Nanterre. L’avenue Henri Martin et « Le Collectif ». Carte postale voyagée en avril 1944. Coll. Mémoire Vive.

Nanterre. L’avenue Henri Martin et « Le Collectif ». Carte postale voyagée en avril 1944. Coll. Mémoire Vive.

En 1934, René Jacky est facteur enregistrant à la gare Saint-Lazare, syndiqué CGT.

Carte syndicale CGT, Fédération des chemins de fer.  Collection Mémoire Vive.

Carte syndicale CGT, Fédération des chemins de fer.
Collection Mémoire Vive.

En mai 1935, il est sous-chef de gare à la Garenne-Colombes.

La gare de la Garenne-Colombes. Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

La gare de la Garenne-Colombes. Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

Sympathisant communiste, il est élu conseiller municipal de Nanterre le 12 mai 1935, sur la liste dirigée par les communistes Pierre Brandy et Raymond Barbet.

Nanterre. La mairie et son parc dans les années 1920. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Nanterre. La mairie et son parc dans les années 1920. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

L’assemblée municipale désigne René Jacky comme délégué sénatorial en 1935 et 1938.

Il devient trésorier du Patronage laïque de Nanterre.

C’est sans doute par erreur que son nom est omis dans la liste des conseillers déchus par le Conseil de préfecture le 29 février 1940, car il n’est pas cité non plus parmi ceux qui se désolidarisèrent du Parti communiste.

En novembre 1940, il est commis de 1ère classe aux litiges.

Après l’interdiction du Parti communiste, il est considéré par les Renseignements Généraux comme un « meneur particulièrement actif ».

Le 26 juin 1941, René Jacky est appréhendé à son domicile par des policiers du commissariat de Puteaux, dans le cadre d’une vague d’arrestations ciblées visant 92 militants ouvriers du département de la Seine, dont François Delcroix, de Nanterre. Le préfet de police de Paris a signé les arrêtés ordonnant leur internement administratif, mais ces opérations sont menées en concertation avec l’occupant [4] : le jour même, tous sont conduits à l’Hôtel Matignon pour être livrés aux autorités d’occupation qui les rassemblent ensuite au Fort de Romainville (HL 122), sur la commune des Lilas (Seine / Seine-Saint-Denis). Le lendemain, ils sont transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager) [5].

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, René Jacky est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le 8 juillet 1942, René Jacky est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45680, selon les listes reconstituées (la photo d’immatriculation correspondant à ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau -, une moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I). Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté René Jacky.

Il meurt à Auschwitz le 23 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [4] ; la cause mensongère qui y est inscrite est une « affection de la valvule cardiaque » (Herzklappenfehler).

Déclaré “Mort pour la France”, il est homologué comme “Déporté politique”. Son nom est inscrit (sans prénom) parmi les déportés sur le Monument aux morts de Nanterre, parc des Anciennes Mairies. La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 16-07-1994).

Sources :

 [1] Seine-Maritime : département dénommé “Seine-Inférieure” jusqu’en janvier 1955.
[2] La SNCF : Société nationale des chemins de fer français. À sa création, suite à une convention validée par le décret-loi du 31 août 1937, c’est une société anonyme d’économie mixte, créée pour une durée de 45 ans, dont l’État possède 51 % du capital.

[3] Nanterre : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[4] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est défini le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante. En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht. Au total (bilan au 31 juillet), 1300 hommes environ y seront internés à la suite de cette action. Effectuant un tri a posteriori, les Allemands en libéreront plusieurs dizaines. 131 d’entre eux, arrêtés entre le 21 et le 30 juin, seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

[5] Arrestations de la fin juin 1941 dans le département de la Seine, trois témoignages :
Jean Lyraud (déporté à Sachsenhausen le 24 janvier 1943). Le 26 juin, à 5 heures du matin, il est réveillé par des policiers français : « Veuillez nous suivre au poste avec une couverture et deux jours de vivres. » Un autobus le prend bientôt avec trois autres personnes arrêtées. Le véhicule fait le tour des commissariats de Montreuil et du 11e arrondissement. Un crochet à l’hôtel Matignon, qui abrite alors la police de Pétain, puis c’est le transport jusqu’aux portes du Fort de Romainville où les prisonniers sont remis aux autorités allemandes. Avec ses compagnons, Jean Lyraud passe la nuit dans les casemates transformées en cachots. « Le lendemain 27 juin dans l’après-midi, nous embarquons en gare du Bourget dans des wagons spéciaux pour Compiègne. Nos gardes ont le revolver au poing et le fusil chargé, prêts à faire feu. Dans la soirée nous arrivons au camp. Quelques jours après, d’autres contingents de la région parisienne nous rejoignent. »
Henri Pasdeloup (déporté à Sachsenhausen le 24 janvier 1943), cheminot de Saint-Mihiel (Meuse), est arrêté le 23 juin 1941 par la Gestapo qui le conduit à la prison de la ville. Le 27 juin, avec d’autres détenus emmenés à bord de deux cars Citroën, il arrive devant le camp de Royallieu vers 16 h 30 : « À l’arrivée face au camp, nos gardiens nous font descendre. Alignement sur la route, comptages et recomptages. En rangs par trois nous passons les barbelés… À 19 heures, environ 400 prisonniers en provenance de la région parisienne entrent en chantant L’Internationale… Le lendemain 28 juin, réveil à 7 heures : contrôle d’identité, toise, matricule. J’ai le numéro 556. Pour notre groupe de la Meuse, cela va de 542 à 564. Ceux de la région parisienne, bien qu’arrivés après nous, sont immatriculés avant… »
Henri Rollin : « Le 27 juin 1941, vers 6 heures de matin, ma femme et moi nous sommes réveillés par un coup de sonnette. Trois inspecteurs de la police française viennent nous arrêter ; perquisition rapide sans résultat (nous avions la veille au soir distribué les derniers tracts que nous avions). Nous arrivons à l’hôtel Matignon où nous trouvons de nombreux cars et camions, résultat d’une rafle dans toute la région parisienne. Nous sommes remis par la police française aux autorités allemandes. Au moment de ma remise aux Allemands, j’ai aperçu qu’on leur donnait une petite fiche portant mon nom et la mention « communiste », soulignée à l’encre rouge. Nous subissons un court interrogatoire d’identité… Attente… Vers la fin de l’après-midi, départ en car. Arrivée au fort Romainville, fouille, identité. Départ de Romainville le 1er juillet, au matin, par train spécial et bondé au Bourget, arrivée l’après-midi à Compiègne. Le lendemain, même cérémonie, refouille et identité, ensuite la vie de camp… »

[6] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. Concernant René Jacky, c’est « le 11 juillet 1942 à Auschwitz (Pologne) et non le 6 juillet 1942 à Compiègne (Oise) » qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :
- Claude Pennetier, notice dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, dirigé par Jean Maitron, tome 31, page 95.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 73, 127 et 128, 383 et 408.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Hauts-de-Seine nord (2005), citant : Mairie de Nanterre, le registre d’état civil porte la mention “Mort au camp de Compiègne, le 6 juillet 1942” avec la mention marginale “décédé en août 1942 à Auschwitz” ; liste de déportés politiques.
- Sachso, Au cœur du système concentrationnaire nazi, Amicale d’Orianenburg-Sachsenhausen, collection Terre Humaine, Minuit/Plon, réédition Pocket, mai 2005, page 36 (sur les arrestations du 26 juin 1941)..
- Gérard Bouaziz, La France torturée, collection L’enfer nazi, édité par la FNDIRP, avril 1979, page 262 (sur les arrestations du 27 juin 1941
- Cheminots victimes de la répression 1940-1945, mémorial, ouvrage collectif sous la direction de Thomas Fontaine, éd. Perrin/SNCF, Paris, mars 2017, pages 798-799.
- Archives départementales de la Seine-Maritime (AD 76), site internet du conseil départemental, archives en ligne : registre des naissances du Havre, année 1894 (4E 12496), acte n° 3423 (vue 386/587) ; registre matricule du recrutement militaire, bureau du Havre, classe 1914 (1 R 3361), matricule 2167.
- Archives de la préfecture de police Seine / Paris), site du Pré-Saint-Gervais : cartons “occupation allemande” , liste des internés communistes (BA 2397) ; cartons “activité communiste sous l’occupation ”, carton V, chemise Liste des conseillers municipaux communistes de banlieue déchus ; dossier individuel des Renseignement généraux (77 w 1528-43347).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 491.
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Service d’information sur les anciens détenus (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; acte de décès du camp (24321/1942).
- Base de données des archives historiques SNCF ; service central du personnel, agents déportés déclarés décédés en Allemagne (en 1947), de A à Q (0110LM0108).
- Site Mémorial GenWeb, 92-Nanterre, relevé de Gilles Gauthier (12-2005).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 25-04-2018)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

Émile ISIDOR – (45679 ?)

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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Émile Gustave Léon Isidor naît le 30 juin 1907 au Torquesne (Calvados – 14), à l’Ouest de la route Pont-l’Évêque-Lisieux, chez ses parents, Isidor Gustave Léon Émile, 35 ans, journalier, et Célestine Marie Masson, 33 ans, son épouse.

Le 3 décembre 1911, sa mère, alors domiciliée à Formentin (14), décède prématurément à l’hôpital de Pont-l’Évêque (14).

Le 25 mars 1912, à Drubec (14), son père, âgé de 40 ans, se remarie avec Victorine Adeline Brière, 49 ans, journalière. Il s’installe avec elle dans cette petite commune, route de Bonnebosq. Il y revient après avoir été mobilisé dans l’infanterie territoriale au cours de la Première Guerre mondiale. Mais, au recensement de 1921 – Émile a alors 14 ans -, aucun enfant n’est déclaré au foyer du couple.

Début 1931, Émile Isidor est « ouvrier des P.T.T. » (Postes, télégraphes et téléphones) et habite au 64 rue d’Auge à Caen (14).

Le 16 janvier de cette année à Caen, âgé lui-même de 23 ans, il épouse Raymonde H., 18 ans, vivant avec ses parents à la même adresse. Ils ont un enfant.

Émile Isidor est agent des lignes des PTT.

Le 29 juin 1939, le tribunal civil de Caen rend un jugement prononçant le divorce d’avec son épouse, « à la requête et au profit du mari ».

Au moment de son arrestation, Émile Isidor est domicilié au 15, rue Saint-Sauveur à Caen (14).

Dans la nuit du 1er au 2 mai 1942, il est arrêté à son domicile par la police française. Il figure comme “communiste” sur une liste d’arrestations exigées par la Feldkommandantur 723 de Caen à la suite du déraillement de Moult-Argences (Airan) 

[1]. Il est détenu à la Maison centrale de la Maladrerie à Caen. Le 3 mai, remis aux autorités d’occupation, il est conduit au “petit lycée” de Caen où sont rassemblés les otages du Calvados.

Le 4 mai au soir, il fait partie du groupe de détenus conduits à la gare de marchandises de Caen pour être transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Ils y arrivent le lendemain, 5 mai en soirée.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C, qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C,
qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Entre fin avril et fin juin 1942, Émile Isidor est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Émile Isidor est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I), peut-être sous le numéro 45679, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Émile Isidor est dans la moitié des déportés du convoi sélectionnés pour rester dans ce sous-camp, alors que les autres sont ramenés à Auschwitz-I (selon un témoignage à préciser).

Portail du secteur B-Ib du sous-camp de Birkenau par lequel sont passés tous les “45000”. © Mémoire Vive 2015.

Portail du secteur B-Ib du sous-camp de Birkenau par lequel sont passés tous les “45000”. © Mémoire Vive 2015.

 Il meurt à Birkenau le 25 août 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).
Le 26 août 1987, à Caen, à la demande de David Badache, rescapé caennais du convoi (matr. 46267), est inaugurée une stèle apposée par la municipalité sur la façade de l’ex-Petit Lycée, côté esplanade Jean-Marie Louvel, en hommage aux otages déportés le 6 juillet 1942.Le nom d’Émile Isidor est inscrit sur la plaque commémorative dévoilée le 19 décembre 2008 sur le pignon de l’ex-Petit Lycée de Caen, côté avenue Albert Sorel, afin de rendre hommage à tous les otages calvadosiens déportés suite à la répression de mai 1942.

© Photo Mémoire Vive.

© Photo Mémoire Vive.

Notes :

[1] Le double déraillement d’Airan et les otages du Calvados : Dans la nuit du 15 au 16 avril 1942, le train quotidien Maastricht-Cherbourg transportant des permissionnaires de la Wehrmacht déraille à 17 kilomètres de Caen, à l’est de la gare de Moult-Argence, à la hauteur du village d’Airan, suite au déboulonnement d’un rail par un groupe de résistance. On compte 28 morts et 19 blessés allemands.

La locomotive du premier train ayant déraillé le 16 avril 1942. Collection R. Commault/Mémorial de Caen. In De Caen à Auschwitz, éditions Cahiers du Temps, juin 2001, page 11.

La locomotive du premier train ayant déraillé le 16 avril 1942.
Collection R. Commault/Mémorial de Caen.
In De Caen à Auschwitz, éditions Cahiers du Temps, juin 2001, page 11.

L’armée d’occupation met en œuvre des mesures de représailles importantes, prévoyant des exécutions massives d’otages et des déportations. Le préfet du Calvados obtient un sursis en attendant les conclusions de l’enquête de police. Mais, faute de résultats, 24 otages choisis comme Juifs et/ou communistes sont fusillés le 30 avril, dont deux à Caen.

Dans la nuit du 30 avril au 1er mai, un deuxième déraillement a lieu, au même endroit et par le même procédé. Un rapport allemand signale 10 morts et 22 blessés parmi les soldats. Ces deux déraillements sont au nombre des actions les plus meurtrières commises en France contre l’armée d’occupation.

Au soir du deuxième attentat – à partir de listes de communistes et de juifs (130 noms sur le département) transmises au préfet par le Feldkommandant – commence une vague d’arrestations, opérées par la police et la gendarmerie françaises avec quelques Feldgendarmes. Dans la nuit du 1er au 2 mai et le jour suivant, 84 hommes au moins sont arrêtés dans le Calvados et conduits en différents lieux de détention. Pour lecommandement militaire allemand, ceux qui sont maintenu en détention ont le statut d’otage.

Tous les hommes désignés n’ayant pu être arrêtés, une autre vague d’arrestations, moins importante, a lieu les 7 et 8 mai. Le préfet du Calvados ayant cette fois-ci refusé son concours, ces arrestations d’otages sont essentiellement opérées par la Wehrmacht (Feldgendarmes).

Au total plus de la moitié des détenus de ce début mai sont, ou ont été, adhérents du Parti communiste. Un quart est désigné comme Juif (la qualité de résistant de certains n’est pas connue ou privilégiée par les autorités). Des auteurs d’actes patriotiques, proches du gaullisme, sont également touchés par la deuxième série d’arrestations.

Tous passent par le “petit lycée”, contigu à l’ancien lycée Malherbe de Caen, alors siège de la Feldkommandantur 723 (devenu depuis Hôtel de Ville), où ils sont rapidement interrogés.

Caen. Le Petit Lycée. Carte postale éditée dans les années 1900. Collection Mémoire Vive.

Caen. Le Petit Lycée. Carte postale éditée dans les années 1900.
Collection Mémoire Vive.

Le 4 mai, 48 détenus arrêtés dans la première rafle sont transférés en train au camp de police allemande de Compiègne-Royallieu ; puis d’autres, moins nombreux, jusqu’au 9 mai (19 ce jour-là).

Les 8 et 9 mai, 28 otages communistes sont fusillés au Mont-Valérien, sur la commune de Suresnes (Seine / Hauts-de-Seine), pour la plupart (trois à Caen). Le 14 mai, onze otages communistes sont encore fusillés à Caen.

La plus grande partie des otages du Calvados transférés à Compiègne sera déportée à Auschwitz le 6 juillet 1942 : 57 politiques et 23 Juifs (près de la moitié des otages juifs du convoi).

Sources :

- De Caen à Auschwitz, par le collège Paul Verlaine d’Evrecy, le lycée Malherbe de Caen et l’association Mémoire Vive, éditions Cahiers du Temps, Cabourg (14390), juin 2001, pages 63 et 65 ; notice de Claudine Cardon-Hamet page 123.
- Cl. Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74 et 75, 361 et 408.
- Jean Quellien, Résistance et sabotages en Normandie, Le Maastricht-Chebourg déraille à Airan, éditions Charles Corlet, Condé-sur-Noireau, réédition 2004, listes pages 129 (n° 31) et 138.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 485 (24922/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 4-09-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

André INDICTOR – 46284

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Droits réservés.

Abraham, dit André, Indictor ou Indiktor naît le 17 février 1893, à Nikolaew (Russie). Il obtient la nationalité française.

En 1938, il arrive à Caen (Calvados – 14) avec sa famille. Marié, il est père de deux enfants : René et Claudine.

Au moment de son arrestation, André Indictor est domicilié au 3, rue de Verdun à Caen.

André Indictor est coiffeur aux Galeries Lafayette de Caen, emploi qu’il partage avec son fils René, 17 ans.

JPEG - 147.4 ko     Les Galeries Lafayettes de Caen, au pied de l’immeuble Beauséjour,     place Foch, derrière le Monument aux Morts de 1914-1918,     et à côté le la Feldkommandantur 723, installée dans     l’Hôtel Malherbe. Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

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Les Galeries Lafayettes de Caen, au pied de l’immeuble Beauséjour, place Foch, derrière le Monument aux Morts de 1914-1918,
et à côté le la Feldkommandantur 723, installée dans l’Hôtel Malherbe. Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

On ne lui connaît pas d’activités politiques ou syndicales selon son fils René, qui ajoute que son père parlait de nombreuses langues.

En mai 1940, le directeur du grand magasin organise l’exode de ses employés et la famille Indiktor se retrouve à Nantes (Loire-Atlantique). Après l’armistice, la famille revient à Caen.

En octobre 1940, lors du recensement des Juifs, Abraham Indictor se déclare comme tel, considérant qu’il est connu comme membre de la Défense passive, mais son fils René s’y refuse, raison pour laquelle il sera ignoré des listes de recensement

Le 1er mai 1942, André Indictor est arrêté par la police allemande, comme otage juif à la suite du déraillement d’un train de permissionnaires allemands à Moult-Argences (Airan) 

[1].

René Indictor peut visiter son père au Petit-Lycée. Il tente de le convaincre, lui et Raphaël Pecker, de tenter une évasion.

Le 4 mai, André Indictor fait partie du groupe de détenus conduits à la gare de marchandise de Caen pour être transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Ils y arrivent le lendemain, 5 mai en soirée.

À partir du 5 juin (mais peut-être avant), probablement avec l’appui du Docteur Raphaël Pecker, André Indictor est désigné comme infirmier, faisant également fonction de cuisinier des médecins, et loge dans une des petites chambres de l’infirmerie du “camp juif”.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Le docteur Abraham Drucker – resté à Compiègne – signale sa présence dans le convoi (lettre du 15 février 1946).

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Sa famille reçoit une carte du camp datée du 16 juillet : probablement la carte imprimée en allemand et envoyée à plusieurs familles indiquant : « Par décision de nos services, le détenu susnommé a été transféré dans un camp pour y travailler. Sa destination étant inconnue, il vous faudra attendre pour avoir de ses nouvelles. »

Le 8 juillet 1942, André Indictor est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46284, selon les listes reconstituées (aucune photo de détenu de ce convoi n’a été retrouvée après le matricule 46172).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

André Indictor meurt à Auschwitz le 10 août 1942, selon trois registres tenus par l’administration SS du camp ; un mois après son arrivée, le même jour que dix-neuf autres “45000”.

La mention « Mort pour la France » est portée sur les registres d’état civil.

Après l’arrestation de son père, René Indictor quitte Caen et passe en zone non occupée, franchissant leligne de démarcation à Hagetmau (Pyrénées-Atlantiques). Il rejoint Marseille puis Lyon, avant de se fixer à Annecy (Haute-Savoie). Sa mère et sa sœur Claudine le rejoignent quelques mois plus tard. Il reprend son métier de coiffeur, mais sous une fausse identité, avec de faux papiers. Mais son âge le rattrape : en février 1943, il est requis pour le Service du travail obligatoire (STO). Refusant de s’y soumettre, il rejoint un maquis à La-Roche-sur-Foron (Haute-Savoie). Arrêté en février 1944, un hasard le fait libérer. En août 1944, il participe à la libération d’Annecy.

Le Mémorial de la Shoah. À gauche, dans son état en 2011, le panneau du Mur des noms pour les déportés de l’année 1942 avec les « noms modifiés et identifiés depuis l’achèvement du mur » (janvier 2005). De nombreux otages juifs du convoi du 6 juillet 1942 y ont été ajoutés ensuite… Photo Mémoire Vive.

Le Mémorial de la Shoah. À gauche, dans son état en 2011, le panneau du Mur des noms pour les déportés
de l’année 1942 avec les « noms modifiés et identifiés depuis l’achèvement du mur » (janvier 2005).
De nombreux otages juifs du convoi du 6 juillet 1942 y ont été ajoutés ensuite… Photo Mémoire Vive.

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Inscrit sur le Mur des noms…

Notes :

[1] Le double déraillement d’Airan et les otages du Calvados : Dans la nuit du 15 au 16 avril 1942, le train quotidien Maastricht-Cherbourg transportant des permissionnaires de la Wehrmacht déraille à 17 kilomètres de Caen, à l’est de la gare de Moult-Argence, à la hauteur du village d’Airan, suite au déboulonnement d’un rail par un groupe de résistance. On compte 28 morts et 19 blessés allemands.

La locomotive du premier train ayant déraillé le 16 avril 1942. Collection R. Commault/Mémorial de Caen. In De Caen à Auschwitz, éditions Cahiers du Temps, juin 2001, page 11.

La locomotive du premier train ayant déraillé le 16 avril 1942.
Collection R. Commault/Mémorial de Caen.
In De Caen à Auschwitz, éditions Cahiers du Temps, juin 2001, page 11.

L’armée d’occupation met en œuvre des mesures de représailles importantes, prévoyant des exécutions massives d’otages et des déportations. Le préfet du Calvados obtient un sursis en attendant les conclusions de l’enquête de police. Mais, faute de résultats, 24 otages choisis comme Juifs et/ou communistes sont fusillés le 30 avril, dont deux à Caen.

Dans la nuit du 30 avril au 1er mai, un deuxième déraillement a lieu, au même endroit et par le même procédé. Un rapport allemand signale 10 morts et 22 blessés parmi les soldats. Ces deux déraillements sont au nombre des actions les plus meurtrières commises en France contre l’armée d’occupation.

Au soir du deuxième attentat – à partir de listes de communistes et de juifs (130 noms sur le département) transmises au préfet par le Feldkommandant – commence une vague d’arrestations, opérées par la police et la gendarmerie françaises avec quelques Feldgendarmes. Dans la nuit du 1er au 2 mai et le jour suivant, 84 hommes au moins sont arrêtés dans le Calvados et conduits en différents lieux de détention. Pour le commandement militaire allemand, ceux qui sont maintenu en détention ont le statut d’otage.

Tous les hommes désignés n’ayant pu être arrêtés, une autre vague d’arrestations, moins importante, a lieu les 7 et 8 mai. Le préfet du Calvados ayant cette fois-ci refusé son concours, ces arrestations d’otages sont essentiellement opérées par la Wehrmacht (Feldgendarmes).

Au total plus de la moitié des détenus de ce début mai sont, ou ont été, adhérents du Parti communiste. Un quart est désigné comme Juif (la qualité de résistant de certains n’est pas connue ou privilégiée par les autorités). Des auteurs d’actes patriotiques, proches du gaullisme, sont également touchés par la deuxième série d’arrestations.

Tous passent par le “petit lycée”, contigu à l’ancien lycée Malherbe (devenu depuis Hôtel de Ville), où ils sont rapidement interrogés.

Caen. Le Petit Lycée. Carte postale éditée dans les années 1900. Collection Mémoire Vive.

Caen. Le Petit Lycée. Carte postale éditée dans les années 1900.
Collection Mémoire Vive.

Le 4 mai, 48 détenus arrêtés dans la première rafle sont transférés en train au camp de police allemande de Compiègne-Royallieu ; puis d’autres, moins nombreux, jusqu’au 9 mai (19 ce jour-là).

Les 8 et 9 mai, 28 otages communistes sont fusillés, au Mont-Valérien (Seine / Hauts-de-Seine) pour la plupart (trois à Caen). Le 14 mai, onze otages communistes sont encore fusillés à Caen.

La plus grande partie des otages du Calvados transférés à Compiègne sera déportée à Auschwitz le 6 juillet 1942 : 57 politiques et 23 Juifs (près de la moitié des otages juifs du convoi).

Sources :

- De Caen à Auschwitz, par le collège Paul Verlaine d’Evrecy, le lycée Malherbe de Caen et l’associationMémoire Vive, éditions Cahiers du Temps, Cabourg (14390), juin 2001, pages 52, 53, notice de Claudine Cardon-Hamet page 123.
- Cl. Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74 et 75, 361 et 408.
- Jean Quellien (1992), sur le site non officiel de Beaucoudray, peut-être extrait de son livre Résistance et sabotages en Normandie, paru pour la première fois aux éditions Corlet en 1992.
- Benjamin Schatzman, Journal d’un interné, Compiègne-Drancy-Pithiviers, préfacé par Serge Klarsfeld, éditions Fayard, avril 2006, pages 287 et 288, 662.
- Yves Lecouturier, Shoah en Normandie, 1940-1944, éditions Cheminements, Le-Coudray-Macouard (Maine-et-Loire), mai 2004, pages 115-118, 140, 210-212, liste p. 245.
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; registre d’appel avec la liste des détenus décédés (Verstorben Häftlinge) ; il y est inscrit comme Juif, sans autre précision, mais avec ses nom et prénomfrançais.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 484 (19359/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 1-12-2011)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

Camille IMPÉRIAL – 45678

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Vers 1933…
Collection Lucette Bénézeth.
Droits réservés.

Camille Impérial naît le 14 janvier 1896 à Paris 14e (75), fils de Philomène Impérial, 21 ans (?), domestique (mère célibataire ?). Placé à l’Assistance publique, il est élevé dans une famille d’accueil à Thésée (Loir-et-Cher – 41), dans la région des cépages de Touraine. Il considère comme sa sœur, Alice Morand, enfant de l’Assistante publique accueillie sous le même toit

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Vers 1933, tout le monde se retrouve pour la photo : assis
au premier rang, Camille, Lucie, Lucette, le père de la famille
d’accueil et Alice. Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

De la classe 1916, Camille Impérial est affecté au 173e Régiment d’Infanterie, 3e compagnie. Le 5 janvier 1917, avec son régiment, il est cité à l’ordre de l’Armée ; il a droit au port de la fourragère aux couleurs du ruban de la Croix de guerre.

Le 22 février 1922 à Pouillé – village voisin et limitrophe de Thésée sur la rive sud du Cher -, il se marie avec Lucie Lévy, elle-même enfant de l’Assistante publique.

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Camille et Lucie sous le pont du Cher, dans les années 1930.
Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

Ils auront une fille, Lucette, née le 22 janvier 1932.

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Camille, Lucie et Lucette, vers 1933.
Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

Camille Impérial est maçon et charpentier. Sérieux et travailleur, son métier lui permet d’acquérir quelques arpents de vigne et un terrain, situé route de Tours, à une centaine de mètres de la place de l’église de Thésée, sur lequel il se construit lui-même une maison. Il s’établit comme artisan quelques années avant la guerre.

Thésée et le Cher. Carte postale colorisée. Collection Mémoire Vive.

Thésée et le Cher. Carte postale colorisée. Collection Mémoire Vive.

Son univers s’organise autour de sa famille, quelques amis, le jardin, la pêche, la chasse et ses chiens ; sonmeilleur ami de chasse est fervent catholique et défend des idées politiques opposées aux siennes.

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Photographiés le même jour que les photos ci-dessus, Camille
avec sa “presque sœur”, Alice, et la fille de celle-ci, Thérèse.
Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

Le 7 septembre 1939, Camille Impérial est rappelé comme réserviste et affecté à la 452e Compagnie du Train (des équipages), partant aux Armées le 16 septembre. Il n’est pas fait prisonnier de guerre et retourne dans ses foyers.

Après l’invasion allemande, le Cher matérialise la ligne de démarcation entre la zone Nord, occupée, et la zone Sud, dite “libre”.

Thésée. Le pont sur le Cher, en direction de Pouillé, où Camille impérial s’est marié (voir deuxième photo ci-dessus). Photo Mémoire Vive, mars 2011.

Thésée. Le pont sur le Cher, en direction de Pouillé, où Camille impérial s’est marié
(voir deuxième photo ci-dessus). Photo Mémoire Vive, mars 2011.

Le 30 avril 1942, à Romorantin (41), cinq résistants communistes sont découverts par des soldats allemands alors qu’ils distribuent des tracts. Armés, ils ne se laissent pas arrêter et blessent les soldats dont un sous-officier qui succombe à ses blessures. Les mesures de représailles prévoient l’exécution immédiate de dix communistes, Juifs et de proches des auteurs présumés. Vingt autres personnes doivent être exécutées si au bout de huit jours les « malfaiteurs » ne sont pas arrêtés. Un barrage est érigé autour de la ville.

Des rafles sont opérées dans la ville et dans le département afin de pouvoir « transférer d’autres personnes vers l’Est, dans les camps de travaux forcés. »

Dans la nuit du 1er au 2 mai, à 2 heures du matin, Camille Impérial est arrêté chez lui par des gendarmes français avec d’autres habitants de Thésée (dont Céleste Serreau).

D’abord détenus à Orléans, ils sont transférés comme otages au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Un angle du camp de Royallieu vu depuis le mirador central dont l’ombre se profile sur le sol. Le renfoncement à droite dans la palissade correspond à l’entrée du Frontstalag 122.

Un angle du camp de Royallieu vu depuis le mirador central dont l’ombre se profile sur le sol.
Le renfoncement à droite dans la palissade correspond à l’entrée du Frontstalag 122.

Avant la fin juin 1942, Camille Impérial est définitivement sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Camille Impérial est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45678 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée 

[1]).

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Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Camille Impérial est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Le 1er août, il est présent au Block 20 de l’hôpital d’Auschwitz-I, chambrée (« Stube ») n° 4. Le 10 août, il est inscrit dans la colonne des sortants.

Camille Impérial meurt à Auschwitz le 19 août 1942, du typhus, selon plusieurs registres tenus par l’administration SS du camp.

Après son arrestation, Lucie, son épouse reste domiciliée dans leur maison. Elle doit alors effectuer des ménages pour élever correctement leur fille. Après la guerre, Lucette entre à l’école normale d’instituteurs de Blois. Mais elle préfère arrêter ses études pour commencer à travailler. Prise aux PTT sur concours, elle est affectée à Strasbourg en 1952.

Lucie Impérial demeure à Thésée jusqu’à son décès, en 1970. Elle est inhumée dans le cimetière communal. Ensuite, sa maison est louée à Thérèse, la fille d’Alice – l’amie d’enfance de Camille -, que celui-ci considérait comme sa nièce. Thérèse et son mari, René Pinard, l’habitent pendant cinq ans.

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Alice, devant la maison bâtie par Camille Impérial.
Collection Lucette Bénézeth. Droits réservés.

Le nom de Camille Impérial est inscrit sur le monument aux morts de Thésée, situé dans le cimetière communal, sur une plaque mentionnant quatre déportés dont trois “45000” (avec Serge Marteau et Céleste Serreau) [2].

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Le monument aux morts de Thésée.
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Derrière les médaillons de Poilus,
une plaque avec les quatre déportés de Thésée
(à droite).

Notes :

[1] Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été reconnue par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin Après Auschwitz, n°21 de mai-juin 1948).

[2] Le quatrième déporté de Thésée est Désiré Marteau, né à Amboise (Indre-et-Loire) le 27 décembre 1897, déporté dans le transport de 1583 hommes parti de Compiègne le 27 janvier 1944 et arrivé au KLBuchenwald le 29 janvier (mat. 44354), affecté à Dora, au Kommando d’Ellrich où il succombe le 28 janvier 1945. C’est le convoi de Jorge Semprun (Le Grand Voyage, Gallimard, Paris 1963), de David Rousset et de Paul Rassinier… André Sellier, Livre Mémorial de la FMD, I. 173, tome 2, pages 94-95, 137.

Sources :

- Son nom (prénom orthographié « Zamin ») et son matricule (avec une erreur : « 45418 ») figurent sur laListe officielle n°3 des décédés des camps de concentration d’après les archives de Pologne, éditée le 26 septembre 1946 par le ministère des anciens combattants et victimes de guerre, page 60.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 365 et 408.
- Message de Roger Bénézeth (11-2012) ; témoignage, transcription du livret militaire de Camille Impérial, conservé par sa fille Lucette Impérial, épouse Bénézet.
- Archives départementales du Loir-et-Cher, fiche d’arrestation de Camille Impérial, dossier 889 (cote 1375 W 64), fichier alphabétique des déportés du CRSGM (cote 56 J 5).
- Mémorial de la Shoah, Paris, site internet, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : XLIII-89 (télégramme, non daté, du Militärbefehlshaber in Frankreich (MbF), signé par Carl Heinrich von Stülpnagel.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 484 (22400/1942).
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; acte de décès au camp, page 86 d’un registre du Block20.
- Site Mémorial GenWeb, 41-Thésée, relevé de Sandrine Fleur-Curtil (2005).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 15-01-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Alexandre HUREL – 45677

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Alexandre Hurel

Alexandre, Élie, Hurel naît le 26 juin 1890 à Paris 10e – 265 faubourg-Saint-Martin (vers la place de Stalingrad) -, fils d’Alexandre, Eugène, Hurel, 21 ans, couvreur-plombier, et de Marguerite Philiberte dite « Berthe » Campmas, 21 ans (née à Lyon le 11 août 1870, fille de François Campmas, ciseleur sur métaux -c’est lui qui a forgé les croix de la basilique de Fourvière ainsi que les grilles de la crypte- et de Marguerite Guillermet), couturière puis lingère, non mariés à l’époque, domiciliés au 11 bis, rue de Nemours.

Alexandre Hurel est mobilisé au cours de la guerre 1914-1918 : Médaille militaire, Croix de guerre et quatre citations.

Le 30 octobre (?) 1913 à Lons-le-Saunier (Jura – 39), il se marie avec Jeanne Dominique, née en 1894 à Lons-le-S. Ils ont un enfant, âgé de 27 ans au début de 1941 (…peut-être Lucienne).

En 1936, il habite avec son épouse au domicile de ses parents au 18 (ou au 113 ?), rue Brulard à Fresnes

[2] (Val-de-Marne – 94). Lui se déclare comme plombier à Paris, entreprise « Clous au soleil » – comme son père -, elle comme chapelière chez Marquet à Paris. Au moment de son arrestation, il sera déclaré comme fondeur (dans quelle entreprise ?).

Un de ses derniers employeurs sera pourtant Le Petit écho de la mode, au 3, rue Gasan à Paris 12e.

Le 4 juillet 1937, à l’issue d’élections partielles, Alexandre Hurel est élu conseiller municipal de Fresnes sur la liste du Parti communiste, dirigée par Maurice Catinat.

Le 11 décembre 193(9 ?), il est également élu au Conseil d’administration de la Caisse des écoles de Fresnes.

Le 5 octobre 1939, comme pour la plupart des villes de la “banlieue rouge », le conseil municipal de Fresnes est “suspendu” par décret du président de la République (sur proposition du ministre de l’Intérieur) et remplacé par une Délégation spéciale nommée par le préfet.

Le 3 février 1940, le conseil de préfecture de la Seine déchoit Alexandre Hurel de son mandat pour fidélité au Parti communiste, ainsi que 21 autres élus municipaux de Fresnes.

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Le Populaire, quotidien édité par la SFIO,
édition du 17 février 1940.
Archives de la préfecture de police, Paris.

Lors de sa séance du 8 mai, la délégation spéciale propose au préfet de «  provoquer la constatation de la déchéance » de six membres du C.A. de la Caisse des écoles qu’elle désigne, parmi lesquels Louis Villeminot et Alexandre Hurel.

Sous l’occupation, la police française le considère comme un « propagandiste actif ».

Le 5 octobre 1940, Alexandre Hurel est arrêté, comme onze autres élus et trois membres du PC de Fresnes, lors de la grande vague d’arrestations organisée dans les départements de la Seine et de la Seine-et-Oise par les préfets du gouvernement de Pétain contre des hommes connus avant guerre pour être des responsables communistes (élus, cadres du PC et de la CGT) ; action menée avec l’accord de l’occupant. Après avoir été regroupés en différents lieux, 182 militants de la Seine sont conduits le jour-même en internement administratif au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé à cette occasion dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt.

 

Aincourt. Le sanatorium de la Bucaille. Au premier plan,  le pavillon qui fut transformé en camp d’internement.  Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

Aincourt. Le sanatorium de la Bucaille. Au premier plan, le pavillon qui fut transformé en camp d’internement.
Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

Conçus à l’origine pour 150 malades, les locaux sont rapidement surpeuplés : en décembre 1940, on compte 524 présents, 600 en janvier 1941, et jusqu’à 667 au début de juin.

Le 25 février 1941, sur le formulaire de « Révision trimestrielle du dossier » d’Alexandre Hurel, à la rubrique « Avis sur l’éventualité d’une mesure de libération », le commissaire spécial, directeur du camp, ne formule pas explicitement son avis mais constate que cet interné « est resté communiste certain dont l’internement n’a pas modifié les opinions », tout en lui reconnaissant une « attitude correcte » et en indiquant son implication de soldat en 1914-1918.

Le 29 mars 1941, quinze épouses d’internés Fresnois – dont Jeanne Hurel et la mère de son mari – adressent une lettre commune au préfet de la Seine afin d’être autorisées à leur rendre visite avec leurs enfants ; « attendu que les prisonniers de droit commun (criminels, voleurs) ont droit à des visites, nous ne pouvons comprendre que nos maris et pères, étant des hommes honnêtes, n’y ont pas droit. » Le 11 avril, le chef de cabinet du préfet demande au commissaire de police de la circonscription de Choisy-le-Roi d’ « avertir les pétitionnaires, en la personne de Mme Soupion » (probablement à l’origine de la lettre) que « le règlement intérieur du camp (interdit) les visites aux détenus. »

À Aincourt, des incidents l’opposent aux “gittonistes” du Parti ouvrier et populaire français (POPF).

Le 24 juin, Alexandre Hurel fait partie d’une trentaine de « meneurs indésirables » écroués à la Maison d’arrêt de Rambouillet (Seine-et-Oise / Yvelines), à la suite d’ « actes d’indiscipline » collectifs. Ils y conservent le statut d’internés administratifs. Dans une cellule de trois, Alexandre Hurel se trouve avec Fernand Salmon et René Guiboiseau.

Le 27 septembre, il fait partie des 23 militants communistes de la Seine transférés au “centre d’internement administratif” (CIA) de Gaillon (Eure), un château Renaissance isolé sur un promontoire surplombant la Seine et transformé en centre de détention au 19e siècle, puis en caserne.

 

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Le camp de Gaillon, ancien château de l’évêque de Rouen.
Carte postale d’après-guerre. Collection Mémoire Vive.

Le 4 mai 1942, il fait partie d’un groupe de détenus transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Voves (Eure-et-Loir). Enregistré sous le matricule n° 291, il n’y reste que deux semaines. Le 20 mai, il fait partie d’un groupe de 28 détenus que viennent chercher des gendarmes français. Pensant qu’on les emmène pour être fusillés, les partants chantent La Marseillaise. En fait, remis aux “autorités d’occupation” à la demande de celles-ci, ils sont conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, Alexandre Hurel est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Alexandre Hurel est enregistré à Auschwitz sous le numéro 45677 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a été affecté Alexandre Hurel.

Il meurt à Auschwitz le 2 novembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp.

Le 30 septembre 1944, lors de l’assemblée plénière du Comité local de libération de Fresnes, il est encore considéré comme « conseiller déporté en Allemagne » (supposé vivant… ?).

Son nom est inscrit sur le monument aux morts de Fresnes, à l’intérieur du cimetière, parmi les “déportés politiques et fusillés”, et sur la plaque apposée à l’extérieur de la mairie le 11 novembre 1945 : « Hommage du conseil municipal et de la population de Fresnes à leurs conseillers municipaux victimes de la barbarie Nazie ».

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 15-09-1991).

Sources :

- Claude Pennetier, notice dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, Éditions de l’Atelier/Éditions Ouvrières, 1990-1997, CD-rom (citant : Arch. Dép. Seine, DM3 ; versement 10451/76/1 ; listes électorales et nominatives – État civil de Paris Xe arr. et de Lons-le-Saunier – Renseignements recueillis par Nadia Michel-Ténine et Nathalie Viet-Depaule).
- Françoise Wasserman, Juliette Spire et Henri Israël, 1939-1944, Fresnes dans la tourmente, ouvrage édité par l’Écomusée de Fresnes à la suite de l’exposition présentée du 18-10-1994 au 8-05-1995, pages 14, 18 et 19, 50, 120.
- Témoignage de Dominique Ghelfi (daté 1946), Contre l’oubli, brochure éditée par la mairie de Villejuif en février 1996, page 61. D. Ghelfi, n’ayant pas été sélectionné pour le convoi du 6 juillet, a assisté au départ de ses camarades. Lui-même a été déporté à Buchenwald en janvier 1944 (rescapé).
- Claudine Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, Éditions Graphein, Paris 2000, cahier photo entre les pages 128 et 129, journal Front Rouge.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 356, 388 et 408.
- Archives départementales de Paris, site internet, archives en ligne ; registre des naissances du 10e arrondissement à la date du 29-06-1890 (V4E 6320), acte n°3047 (vue 24/31).
- Archives communales de Fresnes (recensement de 1936, liste de candidats aux élections de 1937, listes de déportés…), recherches conduites par Dominique Couderc (03-2007).
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “occupation allemande” : BA ? (…).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux ; centre de séjour surveillé d’Aincourt, cotes 1w71, 1w74 (révision trimestrielle).
- Comité du souvenir du camp de Voves, liste établie à partir des registres du camp conservés aux Archives départementales d’Eure-et-Loir.
- Site internet Mémorial GenWeb.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 480 (38454/1942).
- Claire Vergobbi, petite-fille Campmas.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 19-07-2014)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Fresnes : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

Henri HUREAU – (45676 ?)

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IDENTIFICATION INCERTAINE
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Henri, Jean-Baptiste, Hureau naît le 16 juin 1893 à Béthencourt (Nord – 59), , chez ses parents, Jean-Baptiste Hureau, 36 ans, cuiseur de sucre (Delangre à Caudry), et Victoire Legrand, 29 ans, son épouse, domiciliés au lieu-dit La Folie. Les témoins pour la déclaration du nouveau-né à l’état-civil sont un surveillant et un ouvrier de la sucrerie.

En 1913, Henri Bureau habite au 149, rue du Chauffeur à Valenciennes (59) et travaille comme frappeur. Ses deux parents sont alors décédés.

Le 19 août de cette année, à la mairie de Valenciennes, il s’engage volontairement pour cinq ans (terme fixe) comme soldat de 2e classe au 1er régiment d’infanterie coloniale à Cherbourg (Manche). Il rejoint le corps huit jours plus tard. Peut-être est-ce alors qu’il se fait tatouer sur l’avant-bras droit un cœur traversé d’un poignard « H H ».

La Première Guerre mondiale est déclarée le 2 août 1914, alors que Henri Hureau est toujours “sous les drapeaux”.

Le 22 août, lors de la batailles des Frontières, il est fait prisonnier dans les alentours du village de Rossignol, en Gaume (extrémité sud-ouest de la Belgique), qui voit la quasi destruction d’une des divisions du corps colonial français (5000 prisonniers) ; les estimations pour la seule journée du 22 sont de 25 000 ou 27 000 Français tués : « C’est ainsi que la journée du 22 août 1914 apparaît comme la plus meurtrière de toute la Première Guerre mondiale pour l’armée française ».

Henri Hureau est interné à München (?, Munich).

Le 3 janvier 1919, il est rapatrié en France. Le 5 mars, il est affecté au 21e régiment d’infanterie coloniale. Le 2 août, il est envoyé en congé illimité de démobilisation. Et se retire à Denain (Nord).

En mai 1920, il habite au 95, rue Grande-Rue à Maisons-Alfort

[1] (Seine / Val-de-Marne – 94)

Le 24 mai 1920 à Voutezac (Corrèze – 19), Henri Hureau se marie avec Marie Buffière, née le 24 juillet 1899 à Juillac (19), sans profession. Ils auront deux enfants, dont Robert, né le 27 avril 1921 à Saint-Maurice [1] (94).

En mai 1921, la famille habite au 9, rue des Bretons à Maisons-Alfort.

En 1930, la famille est domiciliée au 130, rue Grande-Rue à Maisons-Alfort). Au moment de son arrestation, Henri Hureau est domicilié au 130, rue Jean-Jaurès (la même rue sous un nouveau nom ?).

Métallurgiste, il travaille comme polisseur dans les usines Renault de Boulogne-Billancourt ; sa femme est journalière chez Dupont, à Paris.

Boulogne-Billancourt, place Jules-Guesde, entrée des usines Renault. Collection Mémoire Vive.

Boulogne-Billancourt, place Jules-Guesde, entrée des usines Renault. Collection Mémoire Vive.

Henri Hureau est adhérent à l’Union générale de la Métallurgie, voitures, aviation, maréchalerie et parties similaires de la région parisienne.

Plus tard, leur fils Robert sera comptable chez Bachelet (?).

Le 12 mai 1935, Henri Hureau est élu conseiller municipal communiste de Maisons-Alfort sur la liste d’Albert Vassart [2]. L’assemblée municipale le désigne pour être délégué aux élections sénatoriales en 1935 et 1938.

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Maisons-Alfort, la mairie.
Carte postale colorisée (années 1900 ?).
Collection Mémoire Vive.

Le 4 octobre 1939, le Président de la République – Albert Lebrun -, par décret et « sur la proposition du ministre de l’intérieur, suspend jusqu’à cessation des hostilités les Conseils municipaux » de 27 communes de la banlieue parisienne à majorité communiste, dont celui de Maisons-Alfort, et les remplace par des Délégations spéciales composées de notables désignés.

Le 16 mars 1940, le conseil de préfecture de la Seine déchoit Henri Hureau de son mandat pour appartenance au Parti communiste.

Sous l’occupation, la police française le considère comme un « militant communiste très actif ».

Le 10 décembre 1940, son domicile est perquisitionné sans résultat.

Le 20 janvier 1941, le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1939, en même temps que celui de 65 autres militants communistes de la Seine. Tous sont probablement arrêtés ce jour-là, comme Henri Hureau, appréhendé à son domicile. Le jour-même, celui-ci fait partie d’un groupe de 69 militants communistes conduits à la gare de l’Est où ils sont rejoints par une centaine d’autres venant de la Maison centrale de Fontevraud-L’Abbaye [3], près de Saumur (Maine-et-Loire). Le train les amène à la gare de Clairvaux (Aube) d’où ils sont conduits – par rotation de vingt détenus dans un unique fourgon cellulaire – à la Maison centrale de Clairvaux. Une fois arrivés, la direction les contraint à échanger leurs vêtements civils contre la tenue carcérale, dont un tour de cou bleu (“cravate”) et un béret. Ceux qui refusent sont enfermés une nuit en cellule (“mitard”), tandis que la plupart sont assignés à des dortoirs. Rejoints par d’autres, ils sont bientôt 300 internés politiques.

Le 14 mai, une centaine d’entre eux est transférée au camp de Choisel à Châteaubriant (Loire-Atlantique), parmi lesquels plusieurs seront fusillés le 22 octobre. Henri Hureau fait partie de ceux qui restent à Clairvaux, et qui doivent bientôt partager les locaux qui leur sont assignés avec quelques “indésirables” (condamnés de droit commun).

Le 26 septembre, il est parmi la centaine d’internés de Clairvaux transférés en train, via Paris, au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne).

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le 9 février 1942, Henri Hureau est parmi les 52 « communistes » (dont 36 seront déportés avec lui) remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits par des Feldgendarmes à la gare de Poitiers. Enfermés dans deux wagons à bestiaux, ils sont transférés – via Paris – au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 –Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin, Henri Hureau est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandises d’où sont partis les convois de déportation. © Cliché M.V.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandises
d’où sont partis les convois de déportation. © Cliché M.V.

Le 8 juillet, Henri Hureau est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45676, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau -, une moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I). Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Henri Hureau.Il meurt à Auschwitz le 19 septembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [4], alors qu’a lieu une grande sélection des “inaptes au travail” à l’intérieur du camp à la suite de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement gazés [5]).

En novembre 1944, ignorant sa mort, le comité local de libération de Maisons-Alfort fait nommer Henri Hureau à la délégation spéciale (conseil municipal provisoire) ; comme Victor Jardin.

Son fils Robert entre, à son tour, au conseil municipal le 27 juin 1945. Son élection est annulée, mais il est réélu en 1947 et 1le 26 avril 1953. Il quitte la commune en 1956, démissionnant de son mandat le 30 octobre. Il quitte la commune en 1956.

La mention “Mort en déportation” est portée sur les actes de décès de Henri Hureau (arrêté du 10-08-1992 – JO n° 226).

Notes :

[1] Saint-Maurice et Maisons-Alfort : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces commune font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne” (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Militant chevronné du Parti communiste et de la CGTU à partir de 1923, Albert Vassart (1898-1958) est “parachuté” avec succès à Maisons-Alfort, dont il devient le premier maire communiste. A la suite de la signature du pacte germano-soviétique, il prend ses distances avec le PC (novembre 1940). Il est néanmoins arrêté et condamné à cinq ans de prison en tant que communiste. Mais il est libéré en septembre 1941 à la suite de démarches de Marcel Gitton et Henri Barbé (dirigeant du PC exclu en 1932). Il adhère au Parti ouvrier et paysan français (POPF) – collaborationniste – de Gitton et y accepte des responsabilités aux côtés d’une vingtaine d’autres anciens parlementaires et élus communistes. Il fait ensuite équipe avec Barbé et Capron pour obtenir la libération de militants communistes emprisonnés bien qu’en rupture avec leur parti. Le 27 juin 1942, Albert Vassart échappe à une tentative d’élimination devant son domicile.

[3] Fontevraud-L’Abbaye, souvent orthographié Fontevrault-L’Abbaye au 19e siècle.

[4] Concernant la différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ : concernant Henri Hureau, c’est le 15 septembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. La parution au J.O. rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

[5] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.

Sources :

- Archives municipales de Maisons-Alfort, recherches de Madame Loubrieu.
- Claude Pennetier et Nathalie Viet-Depaule, notice dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, Les Éditions de l’Atelier/Les Éditions Ouvrières, 1990-1997, CD-rom, version 3.61 (citant : Arch. Dép. Seine, DM3 ; versement 10451/76/1 ; listes électorales et nominatives – État civil de Béthencourt – Arch. Com. Maisons-Alfort – Renseignements recueillis par Michèle Rault).
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 150 et 153, 388 et 408.
- Archives départementales du Nord, site internet, archives en ligne : registre d’état civil de Béthencourt NMD, années 1893-1902 (3 E 6406), acte n° 34 (vue 11/250) ; registres matricules du recrutement militaire, bureau de Cambrai, classe 1913 (1R 3168), n° 1242 (vue 401/846).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374), liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397) ; dossier individuel du cabinet du préfet (1 W 1063-53055) ; dossier individuel des Renseignements généraux (77 W 1439-13533) ; registre de main-courante du commissariat de la circonscription de Charenton, 1940 (C B 94-11).
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 480 (31919/1942).

MÉMOIRE VIVE (dernière mise à jour, le 27-12-2018)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

Jules HUON – 45675

Jules Huon naît le 20 janvier 1890 à Reims (Marne – 51), chez ses parents, Paul Huon, 28 ans, tisseur, et Françoise Félicité Devise, son épouse, 26 ans, tisseuse, tous deux natifs de Rethel (Ardennes) où ils se sont mariés et domiciliés au 8, rue de Contrai ; un des deux témoins pour l’enregistrement à l’état-civil est Jules, Jean-Baptiste, Huon, 30 ans, matelassier. À sa naissance, Jules a déjà deux frères : Léon (Aristide ?), né en 1881 à Réthel, et Narcisse Alexis, né en 1887 à Reims. Puis naitront Arthémise, née en 1892, Henri, né en 1894, Léon, né en 1896, Clara, née en 1898, et Eugène, né en 1899, tous à Reims. En dernier lieu, la famille habite au 25 ou 55 rue Chanzy.

Le 27 novembre 1902, leur père, âgé de 41 ans, décède prématurément à Reims.

En 1906, Jules vit avec sa mère et sept de ses frères et sœurs au 60, rue Sutaine à Reims ; lui est alors blanchisseur chez Choseau (?).

En 1911, leur mère est remariée avec Émile Alexandre Briot, un veuf (?) de 47 ans, lequel s’est installé chez eux, rue Sutaine, avec sa fille de 18 ans, Amélie (Marie Emmélie Louise).

Le 15 avril 1911 à Reims, Jules Huon épouse Marie Gabrielle Gary, née à Saint-Denis (Seine / Hauts-de-Seine) le 17 décembre 1891. Ils ont deux filles, Paulette, née le 25 août 1910, et Renée, le 5 juin 1913, toutes deux à Reims.

Le 10 octobre 1911, Jules Huon est incorporé comme soldat de deuxième classe au 132e régiment d’infanterie. Le 8 novembre 1913, il est renvoyé dans ses foyers, titulaire d’un certificat de bonne conduite, et se retire au 132 rue de Courlancy à Reims.

Rappelé à l’activité militaire par le décret de mobilisation générale, Jules Huon rejoint son unité le 3 août 1914. Le 23 mai 1916, au Mort Homme, il est blessé par balle à la main droite et évacué sur l’hôpital de secteur n° 24. Le 6 juillet il est dirigé sur à l’hôpital complémentaire annexe n° 6 de Romans-sur-Isère (Drôme – 26), rue Sainte-Marie. Le 17 novembre suivant, il est admis à l’hôpital mixte de Romans. Il en sort le 29 décembre pour entrer au centre de neurologie de Valence (26). Il en sort le 9 février 1917, pour un congé de convalescence. Il rentre au dépôt le 24 février. Le 30 août 1917, il est admis à l’hôpital 72 à Plouguervenel (Côtes-du-Nord / Côtes-d’Armor). Le 10 septembre 1918, il est cité à l’ordre de son régiment : « Brancardier courageux et dévoué. A évacué avec un beau mépris du danger des blessés sous de violents feux de mitrailleuses. » Il reçoit la Croix de guerre avec étoile de bronze. Le 29 octobre, il rentre au dépôt. Le 1er novembre 1918, à Vouziers (Ardennes), il est blessé par balle au mollet droit. Évacué le lendemain à l’ambulance d’Auve (?), il est dirigé le 6 novembre sur l’hôpital temporaire 78 de Clermont-Ferrand. Le 29 décembre, il est cité à l’ordre de la division : « Brancardier d’une bravoure et d’un dévouement magnifique a été grièvement blessé en transportant des blessés sous de violentes rafales de mitrailleuses. » Il reçoit la Croix de guerre avec étoile d’argent. Il sort de l’hôpital le 28 février 1919 pour une convalescence de deux mois. Rentré au dépôt le 24 avril, il est dirigé sur l’hôpital mixte de Guingamp un mois plus tard. Après trente jours de convalescence, il est affecté au 22e régiment de tirailleurs algériens. Le 22 juillet 1919, il est envoyé en congé illimité de démobilisation et se retire à Romans ; habitant au 6 rue Bistour en octobre. Il recevra la Médaille militaire. En juin 1927, la commission de réforme de Metz lui reconnaitra une « gène très légère de la marche par cicatrice faiblement adhérente à la face interne de la jambe droite sans amyotrophie ».

Mobilisé dès le 1er août 1914, lors de la première guerre mondiale, Jules Huon combat notamment à Verdun et rentre dans ses foyers le 22 juillet 1919. Blessé à deux reprises, il est titulaire de la Croix de guerre, de la Médaille militaire, faisant l’objet de deux citations.

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Jules Huon vers 1919.

En septembre 1920, Jules Huon habite de nouveau au 132 rue de Courlancy à Reims. En 1921, il est livreur (colporteur ?) Au Planteur de Caïffa, torréfacteur parisien ayant ouvert une chaîne d’épiceries spécialisées dans la vente de café.

En mars 1923, il déclare comme domicile les établissements Goulet-Turpin

[1] à Crugny, entre Fismes [1] et Reims ; probablement gère-t-il un magasin de détail alimentaire, avec logement à l’étage…

Fin novembre 1928, il déclare habiter route de Vitry, à Reims.

En mars 1933 et jusqu’au moment de sa première arrestation, il est domicilié au 17, rue du Chemin (route) de Bétheny au Petit-Bétheny, quartier nord de Reims.

Entre les deux guerres, Jules Huon est marchand de fruits sur les marchés de la ville (« commerçant »).

Reims, les “nouvelles halles”, halles centrales du Bouligrin, ouvertes au public en octobre 1929, fermées fin août 1988, classées Monument Historique le 9 janvier 1990. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Reims, les “nouvelles halles”, halles centrales du Bouligrin,
ouvertes au public en octobre 1929, fermées fin août 1988,
classées Monument Historique le 9 janvier 1990.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Jules Huon est militant de l’Association républicaine des anciens combattants (ARAC) et sympathisant communiste.

Après le décret de mobilisation générale de septembre 1939, il est rappelé à l’activité militaire dans le service auxiliaire, affecté au dépôt d’infanterie 64. Le 17 septembre, il passe à la 10e compagnie du 68e R.R. Le 2 novembre 1939, il est renvoyé dans ses foyers.

Le 4 décembre 1940, à la suite d’une distribution de tracts, la police française effectue une perquisition à son domicile au cours de laquelle sont saisis des tracts des Jeunesses communistes clandestines, « À bas les camps de travail », et des exemplaires de La Champagne ouvrière et paysanne, organe local du PC qui deviendra La Champagne en novembre 1941. Le 23 décembre, le tribunal correctionnel de Reims le condamne à huit mois d’emprisonnement pour infraction au décret du 26 septembre 1939 (« activité communiste »). Le 14 (ou le 18) janvier 1941, il est transféré à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e). Le 3 février, sa peine est ramenée à six mois par décision de la cour d’appel de Paris. Le 20 avril suivant, à l’expiration de sa peine, il est libéré.

C’est probablement alors que Jules Huon emménage avec son épouse au 11, rue du Fossé Briotin à Reims.

Le 25 février 1942, une manifestation de ménagères réclamant du pain est organisée sur la place de l’Hôtel de ville de Reims et devant la sous-préfecture.

Le lendemain, 26 février, Jules Huon est arrêté par quatre Feldgendarmes, pris comme otage à la suite d’attentats commis contre les troupes d’occupation à Chalon-sur-Saône et Montceau-les-Mines. Appréhendé en même temps que Marcel Gauthier, René Manceau, Félix Reillon, Maurice Roussel, Henri Roy et Roland Soyeux – tous suspectés d’activité communiste clandestine et futurs compagnons de déportation -, Jules Huon est conduit à la Maison d’arrêt de Reims, boulevard Robespierre, où il reste quelques jours, puis à la prison de Châlons-sur-Marne (51).

Le 8 mars, il est transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le 11 mars, le préfet de la Marne semble intervenir en sa faveur auprès des autorités d’occupation, mais se heurte à une fin de non-recevoir.

Le 5 avril 1942, Jules Huon écrit une lettre à sa famille dans laquelle il signale la présence à ses côtés de René Manceau.

Entre fin avril et fin juin 1942, Jules Huon est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Comme la plupart de ses camarades, Jules Huon jette depuis le convoi un message qui parviendra à ses proches par l’intermédiaire d’un cheminot qui l’a trouvé sur les voies : « Nous allons en Allemagne pour travailler – je crois en Silésie – nous ne savons pas dans quelles conditions […]. Sois courageuse […], je reviendrai. »

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Jules Huon est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45675 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée [2]).

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Jules Huon. Néanmoins, André Montagne, rescapé du convoi, estime qu’il a disparu à Birkenau.

Jules Huon meurt à Auschwitz le 30 septembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Le 29 mars 1943, son épouse écrit au maréchal Pétain, chef de l’État français, pour demander sa grâce : « Je suis moi-même malade et voudrais bien revoir mon pauvre cher mari avant de mourir… ».

À la suite d’une démarche de Renée Gravelet (lien de parenté ?), qui engage une demande d’information sur la situation de Jules Huon, celle-ci parvient à l’agence centrale des prisonniers de guerre du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), basé à Genève (Suisse). Le 21 mai 1943, l’organisation transmet cette demande sa “filiale” germanique. Le 7 octobre, la Croix-Rouge allemande s’adresse à son tour au Bureau central de sécurité du Reich (la « Gestapo ») à Berlin. Le 28 octobre, la police répond à la Croix-Rouge allemande en utilisant un formulaire sur lequel il suffit de rayer la mention inutile : « b) pour des raisons de police d’État, aucun renseignement ne peut être donné sur son lieu de séjour ni sur son état de santé. » On ne sait pas si cet avis a été transmis à Madame Gravelet ou à Marie Huon.

Le 26 avril 1946, La Marne ouvrière, organe de l’Union départementale CGT de la Marne, contient un article consacré à Jules Huon dans lequel il est écrit que celui-ci a été arrêté parce que les Allemands le soupçonnaient d’avoir organisé la manifestation des femmes du 25 février 1942.

Le 3 mai 1946, Guy Lecrux, Rémois rescapé du convoi, atteste de la disparition de Jules Huon à Auschwitz-Birkenau, qu’il estime avoir eu lieu avant le mois de novembre 1942. Le 14 mai, André Montagne, autre rescapé, signe une attestation dans laquelle il déclare : « Je puis me porter garant qu’il y est décédé, car, sans pouvoir préciser la date de sa mort, je puis affirmer que Huon Jules ne figurait pas le 13 août 1943 parmi les survivants de notre convoi [rassemblés en “quarantaine”]. Son décès est donc antérieur à cette date ».

En avril 1947, suite à une demande officielle déposée par Madame Huon, la mention « mort pour la France » est apposée en marge des actes d’état civil de Jules Huon.

Le 7 décembre 1949, Le secrétaire d’État aux forces armées, sur proposition de la Commission nationale d’homologation, prononce l’homologation de Jules Huon au grade de sergent au titre de la Résistance intérieure française (RIF).

Le 13 février 1962, Marie Huon signe un formulaire de demande d’attribution du titre de déporté résistant au nom de son mari. Le 25 septembre 1962, la Commission départementale des déportés et internés politiques émet un avis défavorable, « l’intéressé n’ayant pas été arrêté pour un motif qualifié de résistance, mais à la suite d’une manifestation », suivi par la commission nationale le 17 janvier… 1969. Le 6 mai suivant, la demande du titre de déporté résistant est rejetée par le ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre et, le 14 décembre, le chef du bureau des fichiers et de l’état-civil déporté envoie une carte de déporté politique délivrée à « Madame Veuve Huon » (n° 1157.1019).

Une plaque commémorative a été apposée à l’emplacement de son domicile (11, rue du Fossé-Briotin ?) : « …Jules HUON, patriote, mort en déportation en Allemagne… ». Son nom est inscrit sur le monument aux martyrs de la résistance et de la déportation, situé sur les Hautes Promenades à Reims. La mention “Mort en déportation” est portée sur les actes de décès (arrêté 10-08-1992 – J.O. n° 226).

Notes :

[1] Les établissements Goulet-Turpin : société succursaliste fondée à Reims et spécialisée dans le commerce de détail alimentaire. La crise des années 1970 oblige Goulet-Turpin à cesser toute activité. Actuellement, Goulet-Turpin n’existe plus. Source : site internet de Laurent Leroy, https://www.leroy-goulet-turpin.com/ À Crugny, avant 1914, une boutique (succursale n° 99) existait déjà sur la place du village, dans un bâtiment d’un étage qui fut détruit au cours la Première Guerre mondiale.

[2] Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été reconnue par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin Après Auschwitz, n°21 de mai-juin 1948).

Sources :

- Jocelyne et Jean-Pierre Husson, site Scéren, Histoire et mémoires des deux guerres mondiales.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 14, 366 et 408.
- Archives départementales de la Marne (AD 51), site internet, archives en ligne : registre des naissances de Reims, année 1890 (2 E 534/308), acte n° 171 (vue 47/409).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 480 (33716/1942).
- Site internet Mémorial GenWeb, relevé de Claude Richard (2006).
- Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen : dossier de Jules Huon (21 p 466 637), recherches de Ginette Petiot (message 05-2013).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 24-09-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

Adrien HUMBERT – 45674

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Adrien Humbert naît le 28 juin 1921 à Paris 13e.

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 158, avenue Jean-Jaurès à Drancy 

[1], ou à Clichy-sous-Bois [2] (Seine / Seine-Saint-Denis – 93).

Adrien Humbert est charpentier.

Le 22 août 1940, il est arrêté par la police française « pour détention et distribution de tracts communistes ». Il est inculpé pour infraction au décret du 26 septembre 1939 avec quatre autres personnes, mais la procédure s’achève par un non-lieu prononcé le 17 avril 1941.

Le 28 avril 1942, il est arrêté à son domicile, comme otage, lors d’une grande vague d’arrestations (397 personnes) organisée par «  les autorités d’occupation » dans le département de la Seine – avec le concours de la police française – et, visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin. Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

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Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne,
futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ;
à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8.
Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Adrien Humbert est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif. Dans le wagon où se trouve Adrien Humbert, un “mouton” est battu pour ses trahisons ; selon lui, il y laisse la vie.

Le 8 juillet, Adrien Humbert est enregistré à Auschwitz sous le numéro 45674 (ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard). Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Adrien Humbert est dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.

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Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».
« Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive.

Là, il est affecté comme charpentier au chenil (5 à 600 chiens d’attaque) pour réparer les niches. Il réussit à apprivoiser les chiens qui le laissent entrer dans leur enclos et manger les restes de leurs gamelles. Quand viennent les grands froids, un berger allemand accepte même qu’il vienne se réchauffer contre son flanc. Pris à voler des biscuits de chien, le SS responsable du chenil lance sur lui une dizaine de chiens qui ne le mordent pas vraiment. Mais il est renvoyé de ce poste.

En juillet 1943, comme les autres détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”), Adrien Humbert reçoit l’autorisation d’écrire (en allemand et sous la censure) à sa famille et d’annoncer qu’il peut recevoir des colis.

À la mi-août 1943, il est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) au premier étage du Block 11, la prison du camp, pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

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Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 – où se pratiquaient
les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues –
et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage
de la “quarantaine”. Au fond, le mur des fusillés.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 12 décembre, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blocks et Kommandos d’origine.

À la fin de l’été 1944, Adrien Humbert est parmi les trente-six “45000” qui restent à Auschwitz, alors que les autres sont transférés vers d’autres camps.

En janvier 1945, il est parmi les douze “45000” incorporés dans une colonne de détenus évacués vers le KL [3] Gross-Rosen. Ce camp est aussi évacué très rapidement. En plein hiver, Adrien Humbert voyagesur des wagons plats, découverts, pendant plusieurs jours et plusieurs nuits. Il finit le voyage couché sous deux cadavres, abrité sous leurs trois couvertures. Peu de déportés arrivent à débarquer au KL Buchenwald où a abouti le train. Là, il est affecté dans un Kommando proche de Magdebourg.

Devant la poursuite de l’avancée soviétique, ce petit camp est évacué à marche forcée : la colonne partie avec 500 détenus à 17 heures, n’en compte plus que 300 vers minuit. Un SS donne sa serviette à porter à Adrien Humbert. Celui-ci y découvre un sandwich et un flacon d’alcool. Il s’en nourrit, jette la serviette dans le fossé, et se dissimule parmi les autres détenus, tous semblables.

Dans la nuit, entre deux gardiens SS, il se glisse sans bruit dans le fossé et attend que la colonne s’éloigne. Il s’enfuit en courant à travers champs jusqu’au petit jour. Plus tard, dans un village, il voit venir vers lui deux soldats avançant au pas. Il s’évanouit… puis se réveille dans les bras d’un prisonnier de guerre français. Il reste avec le petit groupe : il est sauvé.

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L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation.
Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945.
Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

De sa déportation, il ramène une profonde blessure à la cuisse (ou à la cheville) qui ne cicatrisera jamais.

En 1974, sur un cahier, il rédige un récit non publié de 21 pages : 39 ans après, mémoires d’un déporté.

Adrien Humbert décède le 14 février 1987.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 79, 188 et 189, 242, 305, 311, 321, 312 et 313, 344, 350, 358, 384 et 408.
- Cl. Cardon-Hamet, notice in 60e anniversaire du départ du convoi des 45000, brochure répertoriant les “45000” de Seine-Saint-Denis, éditée par la Ville de Montreuil et le Musée d’Histoire vivante, 2002, page 17.
- Archives de Paris : rôle du greffe du tribunal correctionnel de la Seine, 25 février-31 mai 1941, D1u6 5854.
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “occupation allemande” : BA ? (…).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 30-03-2012)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Drancy : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968). Elle est aussi sinistrement connue pour avoir été le lieu où fut implanté – dans la cité de la Muette inachevée – le camp de regroupement des Juifs (vieillards, enfants…) avant leur transport vers Auschwitz-Birkenau et autres lieux.

[2] Clichy-sous-Bois : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine.

[3] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.

Jean HUGUES – 45673

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Auschwitz, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Jean, Charles, François, Hugues naît le 26 juin 1911 à Paris 14e, fils de Joseph Hugues et de Marie Bassède.

De la classe 1931, il effectue son service militaire au 21e régiment d’infanterie à Chaumont(-en-Bassigny, Haute-Marne).

Le 26 mars 1936, Jean Hugues entre comme machiniste au Théâtre national de l’Opéra (palais Garnier) à Paris 9e.

La salle de l’Opéra de Paris vue depuis la scène. Carte postale colorisée des années 1900, probablement d’après une gravure de la fin du 19e siècle. Coll. Mémoire Vive.

La salle de l’Opéra de Paris vue depuis la scène.
Carte postale colorisée des années 1900, probablement d’après une gravure de la fin du 19e siècle. Coll. Mémoire Vive.

Pendant un temps, il habite au 43, avenue Reille, à Paris 14e.

En 1936, il adhère au Parti communiste, mais reste discret sur son engagement.

Sportif, il pratique à l’Union Athlétique Jean-Jaurès (UAJJ), affiliée à la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT).

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 25, rue Gassendi, à Paris 14e.

Au cours de la Drôle de guerre puis de la campagne de France, il est mobilisé dans un régiment de pionniers. Démobilisé en juillet 1940, il retrouve son emploi à l’Opéra.

Le 19 octobre 1940, à 23 h 15, la nuit étant tombée, Jean Hugues est interpellé sur l’avenue du Maine (Paris 14e), à hauteur de la rue du Château, par deux gardiens de la paix du commissariat du quartier Plaisance, alors qu’il circule à bicyclette. Quand ils fouillent sa musette, les agents trouvent des tracts et des papillons communistes, un cachet en caoutchouc imprimant le symbole de la faucille et du marteau, et un tampon humide. Ramené au poste pour y être interrogé, le militant reconnait qu’au moment de son arrestation il s’apprêtait à coller des papillons qui lui auraient été remis boulevard Raspail (Paris 14e) par une nommée Andrée. Son appartement fait l’objet d’une perquisition au cours de laquelle sont trouvés deux cartes du parti communiste 1939-1940 à son nom, et un lot de brochures et de livres. Le lendemain, 20 octobre, plutôt que pour infraction au décret-loi français du 26 septembre 1939, le commissaire décide d’inculper Jean Hugues pour infraction à l’ordonnance allemande du 20 juin 1940 (« apposition de tracts non visés par la censure ») et de le mettre à la disposition de l’autorité militaire d’occupation. Le machiniste de l’Opéra demande que sa bicyclette, son sac de porteur avec son contenu, un câble antivol, une lampe électrique, une paire de gants et un trousseau de neuf clés, soient restitués à sa mère, employée aux PTT, demeurant au 152, avenue du Maine. Le commissaire de police le fait conduire en premier lieu au dépôt de la préfecture. Peut-être Jean Hugues est-il écroué ensuite à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e). Le 7 novembre, il est remis aux autorités allemandes qui le transfèrent à la prison militaire du Cherche-Midi, réquisitionnée pour leur usage. Il est relâché six semaines plus tard.
Le 3 mai 1941, à Paris 6e, Jean Hugues se marie avec Marguerite Lény, née en septembre 1906, ouvreuse au Théâtre Montparnasse. Ils ont un fils, Jean-Pierre, né le 10 novembre suivant.

Le 28 avril 1942, Jean Hugues est arrêté à son domicile par la police allemande et la police française, comme otage, lors d’une grande vague d’arrestations collectives (397 personnes) organisée par « les autorités d’occupation » dans le département de la Seine, visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin. Avec lui sont arrêtés neuf de ses camarades (dont R. Deslandes), qui seront eux aussi des “45000” : ils sont conduits dès le lendemain au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Entre fin avril et fin juin 1942, Jean Hugues est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises.

Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Son épouse aurait de ses nouvelles à cette date : une message jeté depuis son wagon ?

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Jean Hugues est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45673 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée). Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20. Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés aux travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après les cinq premiers jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – il est dans la moitié des membres du convoi qui reste dans ce camp en construction choisi pour mettre en œuvre la “solution finale” (contexte plus meurtrier).

Le 12 janvier 1943, son nom est inscrit sur un registre de l’infirmerie (Revier 

[1]).

Il meurt à Birkenau le 16 janvier 1943, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

En juillet 1943, un membre de sa famille sollicite les autorités françaises afin d’obtenir des informations sur son sort. La délégation générale du gouvernement français dans les territoires occupés interroge la préfecture de police. On croit alors savoir que sa destination a été la Haute-Silésie.

Il est homologué comme “Déporté politique”.

Notes :

[1] Revier , selon Charlotte Delbo : « abréviation de Krakenrevier, quartier des malades dans une enceinte militaire. Nous ne traduisons pas ce mot que les Français prononçaient révir, car ce n’est ni hôpital, ni ambulance, ni infirmerie. C’est un lieu infect où les malades pourrissaient sur trois étages. ». In Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1967, p. 24. Le terme officiel est pourtant “hôpital” ; en allemand Häftlingskrakenbau (HKB), hôpital des détenus ou Krakenbau (KB). Dans Si c’est un Homme, Primo Lévi utilise l’abréviation “KB”.

 

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 372 et 408.
- Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 521.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : – Témoignages de la famille Deslandes – Témoignage de Madame Andrée Ponty, sœur de G. Ponty – Témoignage de Georges Marin (9/12/1991) – Article de M. Cottard, Revue d’Histoire du 14e, n° 29, p. 72 (fév. 1989) – Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen – Liste partielle du convoi établie par le Musée d’Auschwitz.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), site du Pré-Saint-Gervais : cartons “occupation allemande” (BA ?) ; dossier individuel des Renseignements généraux (77 W 1449-17037) ; main-courant du commissariat de quartier de Plaisance, 18-4-40/10-1-41 (CB.56.42).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 479 (2476/1943).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 9-06-2018)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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