Henri MATHIAUD – 45860

 

Henri, Octave, Mathiaud naît le 6 août 1909 à Clichy-la-Garenne [1] (Seine / Hauts-de-Seine – 92), chez ses parents Henri, Michel, Mathiaud, 29 ans, journalier, et Marie Rose Béal, son épouse, 34 ans, domiciliés au 34, rue Petit. Henri aura deux frères plus jeunes nés à Clichy, Raymond, né le 16 septembre 1912, et Marcel, né le 19 juillet 1914.

Henri Mathiaud est inscrit en 1931 sur les listes électorales de Clichy, domicilié au 3, passage Paillé en 1932 et 1933.

Le 29 octobre 1932 à Levallois-Perret (92), il se marie avec Simone Lagrange. Ils auront deux enfants : Andrée, née le 15 octobre 1933, et Michel, né le 6 juillet 1936.

En 1936 (liste électorale) et jusqu’au moment de son arrestation, Henri Mathiaud est domicilié au 29, passage du Puits-Bertin à Clichy, comme son frère cadet Raymond.

Henri Mathiaud est ajusteur.

Il est adhérent du Parti communiste.

Le 14 octobre 1940, Henri Mathiaud est arrêté à son domicile avec son frère Raymond. Quatre autres militants sont pris dans la même affaire de distribution de tracts, dont René Petitjean. Tous sont inculpés d’ « infraction au décret du 26 septembre 1939 » (interdiction de la propagande communiste). Henri Mathiaud est écroué le 16 octobre à la Maison d’arrêt de la Santé, à Paris 14e.

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Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du rez-de-chaussée.
(montage photographique)

Le 17 octobre 1940, tous comparaissent devant la 12e chambre du tribunal correctionnel de la Seine. Probablement condamnés à des peines d’emprisonnement, ils se pourvoient en appel auprès du Procureur de la République.

Le 10 mars 1941, la Cour d’appel de Paris condamne les deux frères à six mois de prison, peine couvrant probablement leur détention préventive. Le 17 mars, Henri Mathiaud est conduit à la Maison d’arrêt de Fresnes (Seine / Val-de-Marne) ; sans doute pour sa levée d’écrou. Mais il n’est pas libéré : le lendemain, le préfet de police (de Paris) signe un arrêté ordonnant l’internement administratif des deux frères, considérés chacun comme « meneur communiste actif ».

Le 7 avril, Henri et Raymond Mathiaud sont conduits au “centre de séjour surveillé” d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé en octobre 1940 dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt.

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Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930.
Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche. Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 6 septembre, les frères Mathiaud font partie d’un groupe d’une centaine de détenus transférés au “centre d’internement administratif” (CIA) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne), pour l’ouverture de celui-ci.

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Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”,
vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne),
Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le 13 septembre, un des deux frères Mathiaud écrit à Berthuc, de Clichy-sous-Bois, resté à Aincourt, pour donner des nouvelles des transférés. Ce nommé Mathiaud espère que son épouse, qui avait été autorisée à lui rendre visite le jour même du départ, a été prévenue à temps afin de ne pas faire inutilement le déplacement.

Le 24 novembre, Henri Mathiaud est « privé de correspondance » pendant huit jours pour avoir justifié sa présence dans le secteur administratif du camp par « une excuse qui s’est révélée inexacte ».

Le 22 mai 1942, Henri Mathiaud fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Selon plusieurs témoignages (Gaston Aubert, Fernand Devaux, René Petitjean), son frère aussi est interné à Compiègne.

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La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers
bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan, sur l’autre rive de l’Oise,
l’usine qui fut la cible de plusieurs bombardements
avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Henri Mathiaud est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures, puis repart à la nuit tombée. Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Henri Mathiaud est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45860 (ce matricule sera tatoué sur son bras gauche quelques mois plus tard).

Après l’enregistrement, les arrivants sont rassemblés pour la plupart dans les Blocks 19 et 20 du camp-souche où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, au cours duquel ils déclarent leur profession, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau, Henri Mathiaud est dans la moitié du convoi qui est ramenée à Auschwitz-I après l’appel du soir.

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Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».
« Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive.

Il travaille un temps dans le même Kommando que Robert Blais, d’Ivry-sur-Seine.

En juillet 1943, comme les autres détenus politiques français d’Auschwitz (essentiellement les quelques 135 à 140 survivants des “45000”), il reçoit l’autorisation d’écrire (en allemand et sous la censure) à sa famille et d’annoncer qu’il peut recevoir des colis.

À la mi-août 1943, il est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) et mis en “quarantaine” au premier étage du Block 11, la prison du camp, pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

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Auschwitz-I. Le premier étage du Block 11, avec ses fenêtres
partiellement obstruées. Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Le 12 décembre 1943, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blocks et Kommandos d’origine.

Selon le témoignage de Robert Chazine (déporté à Auschwitz), il est transféré à Monowitz (Kommando Soznowitz) en avril 1944, puis ramené à Auschwitz deux mois plus tard.

Le 3 août 1944, Henri Mathiaud est parmi les trois-quarts des “45000” présents à Auschwitz qui sont de nouveau placés en “quarantaine”, au Block 10, en préalable à un transfert.

Le 29 août 1944, il est parmi les trente “45000” intégrés [2] dans un convoi disciplinaire de 807 détenus (incluant de nombreux “prominenten” polonais) transférés au KL Sachsenhausen, dans la ville d’Oranienbourg, au Nord-Ouest de Berlin. Comme trois autres “45000”, il est affecté au Kommando Siemens Stadt, usine moderne fabriquant du matériel électrique à 12 kilomètres de Berlin, puis ramené à Sachsenhausen quand le front se rapproche.

Le 21 avril 1945, le camp de Sachsenhausen est évacué vers le Nord-ouest en direction de la mer Baltique. Après une marche de 240 km, Henri Mathiaud se retrouve – avec René Maquenhen et René Petitjean – dans la région de Schwerin, au château de Traumark, où l’escorte SS s’enfuit à l’approche des armées soviétiques.

Le 2 mai 1945, les troupes soviétiques libèrent les déportés, puis les remettent aux Américains, qui les « enferment » dans la caserne Adolf Hitler de Schwerin.

Le 23 mai, ils sont rapatriés en France, via Valenciennes, en wagons à bestiaux. Henri Mathiaud rentre à Clichy le jour même.

Mais son épouse a quitté le domicile conjugal (le couple divorcera le 10 juin 1948).

Le 27 mai 1945, Henri Mathiaud écrit à Marguerite Blais d’Ivry-sur-Seine pour lui annoncer la mort de son mari Robert et de son beau-frère Raymond. Il se déclare également certain du décès de Marcel Sallenave, un autre Ivryen.

Cet été-là (?), il part avec ses enfants au château de Varzy, centre de vacances (“colonie”) de la commune que celle-ci met à disposition des rapatriés convalescents. Pendant deux ans au moins, lui et ses enfants bénéficient de la solidarité à l’égard des déportés et de leurs familles.

Henri Mathiaud rejoint la section de Clichy de la FNDIRP comme responsable de la commission des fêtes.

Le 29 janvier 1949 à Clichy, il épouse Louise Riaux.

Homologué comme “Déporté politique”, Henri Mathiaud décède le 21 juin 1960, à Paris (13e). Il a 51 ans.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 380 et 418.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Hauts-de-Seine nord (2005), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier national et dossier statut) – Archives municipales de Clichy – Lettre de Robert Chazine (7/1/1991) – Témoignages de René Maquenhen et de René Petitjean, de Clichy, sur la vie à Traumark et la libération (voir ces noms).
- Henri Hannart, Un épisode des années 40, Matricule : F 45652 (les intérêts de certains ont fait le malheur des autres), trois cahiers dactylographiés par son fils Claude, notamment une liste page 23.
- Archives communales de Clichy-la-Garenne : acte de naissance, listes électorales, archives de la section locale de la FNDIRP.
- Archives de Paris, archives du tribunal correctionnel de la Seine, rôle du greffe du 15 novembre 1940 au 20 janvier 1941, cote D1u6-5851.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris) ; cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux ; centre de séjour surveillé d’Aincourt ; cote 1W70.
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI-42, n° 128.
- Archives départementales de la Vienne (AD 86), Poitier ; camp de Rouillé (cote 109W75).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 1-10-2013)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Clichy-la-Garenne : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Les trente d’Auschwitz vers Sachso : (ordre des matricules, noms de G à P) Georges Gourdon (45622), Henri Hannhart (45652), Germain Houard (45667), Louis Jouvin (45697), Jacques Jung(45699), Ben-Ali Lahousine (45715), Marceau Lannoy (45727), Louis Lecoq (45753), Guy Lecrux(45756), Maurice Legal (45767), Gabriel Lejard (45772), Charles Lelandais (45774), Pierre Lelogeais(45775), Charles Limousin (45796), Victor Louarn (45805), René Maquenhen (45826), Georges Marin(45834), Jean Henri Marti (45842), Maurice Martin (45845), Henri Mathiaud (45860), Lucien Matté(45863), Emmanuel Michel (45878), Auguste Monjauvis (45887), Louis Mougeot (45907), Daniel Nagliouk (45918), Émile Obel (45933), Maurice Ostorero (45941), Giobbe Pasini (45949), René Petijean(45976) et Germain Pierron (45985).

Clément MATHERON – (45859 ?)

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Tentative de retouche
sur la seule photo connue
de Clément Matheron, extraite
d’une fiche de Compiègne
(voir ci-dessous). Coll. Jean Matheron. Droits réservés.

Clément, Narcisse, Émile, Matheron naît le 12 novembre 1923 à Romainville 

[1] (Seine / Seine-Saint-Denis – 93), fils d’Hilarion et de ?.

À une date restant à préciser, son père achète un terrain dans un lotissement qui vient de se créer sur le territoire de la commune de Goussainville. Quand sa maison y est construite, le quartier n’est pas déservi par des rues goudronnées, mais seulement par des chemins de terre qui deviennent boueux quand il pleut : Hilarion Matheron met des bottes en caoutchouc pour marcher jusqu’à la gare, puis enfile des chaussures avant de monter dans le train qui le mène à la capitale pour y travailler.

Son père et ses frères sont des militants communistes.

Au moment de son arrestation, Clément Matheron est domicilié chez ses parents au 19, rue Henri-Vuillemin à Goussainville [2] (Val-d’Oise – 95). Il est célibataire (il n’a que 17 ans et demi).

Sous l’occupation, il travaille sur différents chantiers de terrassement pour une entreprise de Creil.

Avec ses camarades des Jeunesses communistes de Goussainville, notamment Robert Peltier [3], Clément Matheron édite des tracts dans une grotte (carrière ou champignonnière désaffectée ?) près de Louvres (commune mitoyenne) et organise un début de résistance armée dans le nord de la région parisienne.

Le 28 août 1941, Clément Matheron est arrêté sur son lieu de travail, un chantier de Chantilly, par les « Autorités allemandes » pour être interrogé sur un attentat opéré à Orry-la-Ville.

« Relâché après 48 heures, il [est] de nouveau arrêté quelques jours après à son domicile par des gendarmes français de Goussainville, remis aux Autorités d’occupation écroué à la prison du Cherche-Midi » à Paris. Il ne subit alors pas d’interrogatoire et n’est pas déféré devant un tribunal.

Le 16 septembre 1941 son frère Lucien, 20 ans, est fusillé au Mont-Valérien avec neuf autres otages, en représailles d’attentats commis à Paris contre des membres de l’armée allemande les 6, 10 et 11 septembre ; sur l’avis affiché sur les murs le jour même, Lucien Matheron est le premier de la liste.

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Le frère de Clément est fusillé…

Le 4 mars 1942, Clément Matheron est conduit à la préfecture de Police de Paris « par ordre des autorités d’occupation qui le représentent comme “un communiste extrêmement actif et dangereux” ayant été impliqué dans une affaire de sabotage et ordonnent qu’il soit interné dans un centre de séjour surveillé ». Le jour même, le directeur des Renseignements généraux, Lucien Rotté, écrit au préfet de Seine-et-Oise pour l’informer qu’il a « prononcé », à la demande de l’occupant, l’internement administratif du nommé Matheron qui « a été écroué au Dépôt de la Préfecture de Police en attendant son internement dans un centre de séjour surveillé ».

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« Pour le préfet de police… ». AD 78.

Le 16 avril, Clément Matheron fait partie d’un groupe de détenus transférés au “centre de séjour surveillé” de Voves (Eure-et-Loir), où il est enregistré sous le matricule n° 71 (le camp d’Aincourt est en phase d’évacuation vers celui-ci…).

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943. © Musée de la Résistance Nationale, Champigny, fonds de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943.
© Musée de la Résistance Nationale, Champigny, fonds de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.

Le 10 mai, Clément Matheron est parmi les 81 détenus remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), Frontstalag 122 –Polizeihaftlager, gardé par la Wehrmacht.

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Fiche d’un dossier médical établie pour le camp de Compiègne.
Les agrafes métalliques ont déchiré le papier photographique,
puis ont rouillé. Collection Jean Matheron. Droits réservés.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Clément Matheron est enregistré à Auschwitz ; peut-être sous le numéro 45859, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé). D’après le témoignage de Georges Dudal, après l’appel du soir, Clément Matheron est violemment frappé derrière la tête par le Blockältester du Block 19 qui entend montrer aux nouveaux arrivants« comment on tue un homme ». Il reste inanimé sur le sol ; ses camarades le perdent de vue et le considèrent comme mort.Cependant, d’après les registres du camp, Clément Matheron meurt à Auschwitz le 19 septembre 1942, alors qu’a lieu une grande sélection des “inaptes au travail” à la suite de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement gazés [4]). Il a 19 ans.

Il est déclaré “Mort pour la France”. La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 25-02-1995).

Après la guerre, le conseil municipal de Goussainville dénomme rue Clément Matheron une voie de la commune (une autre rue porte le nom de son frère Lucien).

Notes :

[1] Romainville : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Goussainville : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine-et-Oise (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[3] Robert Peltier, 20 ans, participe à une des opérations menées par le groupe de Gilbert Brustlein et sera fusillé le 9 mars 1942 au Mont-Valérien à la suite du procès de la Chambre des Députés.

[4] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 89-90, 111, 150 et 153, 390 et 413.
- Musée de la Résistance nationale (MRN) Champigny-sur-Marne (94), carton “Association nationale de des familles de fusillés et massacrés”, fichier des victimes.
- Comité du souvenir du camp de Voves, liste établie à partir des registres du camp conservés aux Archives départementales d’Eure-et-Loir.
- Boris Dänzer-Kantof, historien, message (12-04-2005).
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “occupation allemande” : BA 2374 (camps d’internement…).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 788 (31872/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 17-11-2014)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

Robert MASSIQUAT – (45858 ?)

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Robert, Nicolas, Massiquat naît le 3 avril 1920 à Ivry-sur-Seine 

[1] (Seine / Val-de-marne), au 1 rue Gagnée, fils de Maurice Massiquat, 27 ans, maçon, et de Madeleine Boineau, 26 ans, journalière.

Mobilisé au cours de la guerre 1914-1918, son père est blessé au combat (il décède vers 1954 d’une gangrène à la jambe).

Robert Massiquat est adopté par la Nation en vertu d’un jugement rendu par le tribunal de Corbeil le 27 septembre 1932.

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 144, avenue Roger-Salengro à Bondy [1] (Seine / Seine-Saint-Denis) ; peut-être un hôtel près de la gare. Il est célibataire (il a 20 ans…).

Il est mouleur ou tourneur sur métaux (dans quelle entreprise ?).

Le 4 août 1940, Robert Massiquat est arrêté à la suite d’une distribution de tracts à Bondy.

Le 22 octobre, il est placé sous mandat de dépôt ou d’écrou.

Le 8 février 1941, lors d’une audience au cours de laquelle sont jugés 48 militants et militantes communistes (dit « procès des cinquante »), dont dix-sept futurs “45000”, la chambre des mineurs (15e) du tribunal correctionnel de la Seine condamne Rober Massiquat à huit mois d’emprisonnement pour pour infraction au décret du 26 septembre 1939 (« propagande communiste »).

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er. Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage. (montage photographique)

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage.
(montage photographique)

Bien que sa peine soit partiellement ou entièrement couverte par la détention préventive qu’il a déjà effectué, il n’est pas libéré : dès le lendemain, – sur instruction des Renseignements généraux – le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en tant que « militant communiste actif ».

Le 27 février suivant, il fait partie d’un groupe de 48 internés administratifs – dont Guy Môquet, Maurice Ténine et seize futurs “45000” – transférés à la Maison centrale de Clairvaux (Aube) où ils en rejoignent d’autres : 187 détenus politiques s’y trouvent alors rassemblés.

Clairvaux. La Maison centrale. Carte postale. Collection M. Vive.

Clairvaux. La Maison centrale. Carte postale. Collection M. Vive.

Le 31 mars, avec Francis Née, Eugène Omphalius, Albert Rosse et Thomas Sanchez, Robert Massiquat est un des sept internés de Clairvaux conduits à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e), en préalable à leur passage devant la Cour d’appel de Paris.

Le 9 avril, celle-ci examine la situation de cinquante condamnés pour activité communiste. Elle réduit la peine (déjà effectuée) de Robert Massiquat à six mois de prison. Il est prévu qu’il soit ramené à Clairvaux, mais le quartier de la centrale utilisé comme centre d’internement étant « complet » il reste interné à la Santé pendant un temps.

En septembre, Robert Massiquat fait partie d’un groupe d’internés de la Santé transférés au “centre d’internement administratif” (CIA) de Gaillon (Eure), un château Renaissance isolé sur un promontoire surplombant la vallée de la Seine et transformé en centre de détention au 19e siècle.

Le château de Gaillon. Les internés sont assignés au pavillon Colbert, le haut bâtiment transversal de l’arrière plan (qui a perdu sa toiture après la guerre). Carte postale envoyée en 1955. Collection Mémoire Vive.

Le château de Gaillon. Les internés sont assignés au pavillon Colbert,
le haut bâtiment transversal de l’arrière plan (qui a perdu sa toiture après la guerre).
Carte postale envoyée en 1955. Collection Mémoire Vive.

L’adresse familiale qu’il déclare alors est le 156, rue des Coquelicots à Montfermeil…

Selon une note de la police (RG ?) datée du 18 février 1942, il figure sur une liste de 43 «  militants particulièrement convaincus, susceptibles de jouer un rôle important dans l’éventualité d’un mouvement insurrectionnel et pour lesquels le Parti semble décidé à tout mettre en œuvre afin de faciliter leur évasion », et qui sont pour la plupart internés au camp de Gaillon.

Le 4 mai 1942, Robert Massiquat fait partie d’un groupe de détenus transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Voves (Eure-et-Loir). Enregistré sous le matricule n° 301, il n’y reste que deux semaines.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943. © Musée de la Résistance Nationale, Champigny, fonds de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943.
© Musée de la Résistance Nationale, Champigny, fonds de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.

Le 20 mai, il fait partie d’un groupe de 28 internés que viennent chercher des gendarmes français. Pensant qu’on les emmène pour être fusillés, les partants chantent La Marseillaise. En fait, remis aux “autorités d’occupation” à la demande de celles-ci, ils sont conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, Robert Massiquat est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Robert Massiquat est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45858, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire – au cours duquel Robert Massiquat se déclare sans religion (Glaubenslos) -, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a été affecté Robert Massiquat.

Il meurt à Auschwitz le 18 septembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher), alors qu’a lieu une grande sélection des “inaptes au travail” à l’intérieur du camp à la suite de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement tués d’une piqûre intracardiaque de phénol ou gazés [2]). Il a 22 ans.

La mention “mort en déportation” est portée sur les actes de décès (J.O. n° 48 du 25-02-1995).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 153, 384 et 413.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2373 et 2374) ; liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397).
- Archives nationales : correspondance de la Chancellerie sur des procès pour propagande et activité communistes (BB18 7043).
- Archives de Paris : archives judiciaires, registre du greffe du tribunal correctionnel de la Seine, 14 janvier-12 février 1941.
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt, cotes 1W77, 1W152 (dossier de Thomas Sanchez ; le nom de Robert Massiquat figure sur une note de police parce que ses parents habitent Montfermeil (Seine-et-Oise).
- Comité du souvenir du camp de Voves, liste établie à partir des registres du camp conservés aux Archives départementales d’Eure-et-Loir.
- Témoignage de Dominique Ghelfi (daté 1946), Contre l’oubli, brochure éditée par la mairie de Villejuif en février 1996, page 61. D. Ghelfi, n’ayant pas été sélectionné pour le convoi du 6 juillet, a assisté au départ de ses camarades. Lui-même a été déporté à Buchenwald en janvier 1944 (rescapé).
- Message de Pascal Massiquat, son petit-cousin (04-2008).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 787 (31550/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 5-02-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Ivry-sur-Seine et Bondy : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail”. Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés montent dans des camions qui les conduisent à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.

Julien MASSÉ – (45857 ?)

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Julien, François, Marie, Massé naît le 10 août 1921 au Kremlin-Bicêtre 

[1] (Seine / Val-de-Marne – 94), de parents venus du Finistère : François Massé, 25 ans, employé à la Compagnie de l’Air (ou Compagnie des Eaux ?) à Arcueil, et Marie Vaillant, 27 ans. Julien Massé a deux frères et une sœur plus jeunes : Charlemagne, né en 1927, Simone, née en 1928, et François, né en 1930.

Le 8 avril 1915, son père a été mobilisé dans un régiment d’infanterie, avant de passer à l’infanterie coloniale au Maroc en février 1918 ; il sera membre de l’Association républicaine des anciens combattants (ARAC). Démobilisé le 24 septembre 1919, il est venu très rapidement en région parisienne : le 6 décembre suivant, il résidait en hôtel au 156, avenue de Fontainebleau au Kremlin-Bicêtre (94).

En mars 1922, la famille habite au 70, rue de la Pompe à Villejuif (94). En juillet 1927, elle est installée au 17, voie Boieldieu à Vitry-sur-Seine [1] (94), dans un petit pavillon dont les parents sont propriétaires

Au moment de son arrestation, Julien Massé habite toujours chez eux.

Célibataire, il est manœuvre, employé chez Morin (?), au 128, rue d’Alésia à Paris 14e.

En 1935, il adhère aux Jeunesses communistes (JC), militant dans le groupe du coteau des Malassis.

En 1938, il est adhérent à l’aéroclub des Aiglons d’Ivry, dont le siège est au 40, rue Marat à Ivry-sur-Seine. Son père est alors cantonnier dans cette commune.

De septembre 1939 à fin avril 1941, Julien Massé travaillerait dans une usine de tréfilerie de la banlieue sud.

Après l’interdiction des organisations communistes et sous l’occupation, il reste actif au sein des JC clandestines. En mars et avril 1941, il participe à la distribution de tracts et au collage de papillons à Vitry.

Le 1er mai 1941, il est interpellé par des agents du commissariat de la circonscription d’Ivry-sur-Seine, comme Jean Hernando, à la suite de l’arrestation de Maurice Coulin fils (17 ans) et de deux camarades pris la nuit précédente en train de peindre des « inscriptions sur les murs des immeubles de la localité » : « Thorez au pouvoir, Vive l’URSS, À bas Laval, etc. », afin de marquer la journée revendicative. Julien Massé y a participé « en traçant au goudron des inscriptions communistes sur les murs de clôture du stade municipal » (un registre de Voves n’évoque qu’un « flagrant délit de collage de papillons »). Inculpés d’infraction au décret-loi du 26-9-1939, onze jeunes sont conduits au Dépôt et déférés au Parquet de la Seine. Le 3 mai, Julien Massé est écroué à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e).

Tous les mardis, il y pris en charge par un visiteur de prison, conseiller honoraire à la Cour d’Appel, âgé de 80 ans, qui se donne pour mission de le convaincre qu’il « devrait expier la faute affreuse qu’il avait commise par inexpérience et que, en brave garçon, il devait reconnaître ses torts et redevenir un bon français ».

Le 23 janvier 1942, la Section spéciale de la Cour d’appel de Paris le condamne à treize mois de prison et cent francs d’amende. Il est transféré à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (94), où un autre visiteur de prison prend le relais.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 25 février, à l’expiration de sa peine, largement accomplie en détention préventive, il n’est pas libéré, étant « consigné PP pour AA », c’est-à-dire interné dans la grande salle du dépôt de la préfecture de police, la Conciergerie, sous le Palais de Justice, à la disposition des autorités allemandes, en exécution de la note allemande du 15 septembre 1941 du général Schaumburg, commandant des forces militaires en France.

Le 26 mars, le préfet de police signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1939, en même temps que celui de Jean Hernando.

Le même jour, son premier visiteur de prison écrit au directeur du Dépôt pour demander que son protégé ne soit pas transféré : « Je demande qu’on écrase pas cette mèche qui a encore une étincelle et peut revenir à la Lumière. Qu’on le surveille, soit, mais qu’on ne le désespère pas ! »

Le 16 avril, Julien Massé et Jean Hernando sont transférés au “centre de séjour surveillé” de Voves, à vingt kilomètres au sud-est de Chartres (Eure-et-Loir) ; Julien Massé y est enregistré sous le matricule 83.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943. © Musée de la Résistance Nationale, Champigny, fonds de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943.
© Musée de la Résistance Nationale, Champigny, fonds de l’Amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.

Le 10 mai, il fait partie des 81 détenus remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C.     L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin, Julien Massé est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Julien Massé est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45857, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule n’a pas été retrouvée).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a été affecté Julien Massé.

Il meurt à Auschwitz le 3 octobre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) ; il a 21 ans.

(aucun des treize “45000” de Vitry n’est revenu).

En novembre 1945, François Massé est convoqué comme témoin dans la procédure d’épuration visant un des inspecteurs ayant arrêté son fils.

Le 18 novembre 1949, le décès de Julien Massé est transcrit sur les registres d’état civil de la mairie de Vitry, avec la mention “Mort pour la France”.

La mention “mort en déportation” est portée sur ses actes de décès (J.O. du 11-01-1995).

Son nom est inscrit sur le monument « À la mémoire de Vitriotes et des Vitriots exterminés dans les camps nazis » situé place des Martyrs de la Déportation à Vitry ; deuxième nom de la colonne de droite.

Une plaque dédiée aux “45000” vitriots a été apposée au dos du monument. Elle est parfois masquée par la végétation.

Une plaque dédiée aux “45000” vitriots a été apposée
au dos du monument. Elle est parfois masquée par la végétation.

La plaque apposée pour le 50e anniversaire de la libération des camps (avril 1995).

La plaque apposée pour le 50e anniversaire de la libération des camps (avril 1995).

Notes :

[1] Le Kremlin-Bicêtre, Villejuif et Vitry-sur-Seine : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

Sources :

- 1939-1945, La Résistance à Vitry, Ville de Vitry-sur-Seine, 1992, page 19.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 390 et 413.
- Archives communales de Vitry-sur-Seine : listes de recensement de 1936.
- Musée de la Résistance Nationale, Champigny-sur-Marne : fiche de police de Julien Massé au commissariat de circonscription d’Ivry-sur-Seine.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), site du Pré-Saint-Gervais : dossier individuel des renseignements généraux (77 W 1649-78624).
- Comité du souvenir du camp de Voves : liste établie à partir des registres du camp conservés aux Archives départementales d’Eure-et-Loir.
- Archives départementales du Val-de-Marne, Créteil : Maison d’arrêt de Fresnes, détenus libérés du 21 au 31 janvier 1942 (511w 30).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 787 (34416/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 25-05-2018)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

René MASBLANC – (45856 ?)

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

René, Julien, Masblanc naît le 5 avril 1908 à Champsanglard (Creuse – 23), fils de Jean Masblanc, 30 ans, jardinier, et de Marie-Emma Petit, 21 ans, son épouse, couturière, domiciliés au lieu-dit Lasvy. René a – au moins – deux frères, Georges Paul, né le 25 septembre 1910, et Marcel Charles, né le 12 décembre 1911.

Le 31 décembre 1933, à Bussière-Dunoise (23), René Masblanc se marie avec Lucienne Parot, née le 21 juillet 1908 à Chilleurs-au-Bois (Loiret). Ils n’auront pas d’enfant.

Au moment de son arrestation, René Masblanc est domicilié au 55, rue Claude-Terrasse à Paris 16e, à l’angle du boulevard Murat.

Il est tourneur sur métaux aux usines Renault de Boulogne-Billancourt.

Boulogne-Billancourt, place Jules-Guesde, entrée des usines Renault. Collection Mémoire Vive.

Boulogne-Billancourt, place Jules-Guesde, entrée des usines Renault. Collection Mémoire Vive.

Au cours de la période de guerre entre septembre 1939 et juin 1940, il est mobilisé dans le Génie.

Le 15 juin 1941, René Masblanc est arrêté par les services du commissariat du quartier d’Auteuil pour des « propos alarmistes » tenus dans une file d’attente au marché, avenue de Versailles. Au cours de son interrogatoire, il reconnaît avoir dit : « C’est dégoûtant, le gouvernement veut nous jeter dans la guerre : on n’avait pas à s’occuper de la Syrie, les Allemands étaient déjà dedans, tout le monde le sait. » Un gardien de la paix ramène à son épouse un filet à provisions et ses cartes d’alimentation.

Le 16 juin 1941, la 12e ou 14e chambre du tribunal correctionnel de la Seine condamne René Masblanc à 48 heures de prison avec sursis. Mais, le procureur de la République fait appel et, le 15 septembre suivant, la Cour d’Appel de Paris le condamne à quatre jours de prison pour infraction au décret-loi du 26 septembre 1939. Il est écroué à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e), puis y reste interné. Le 4 novembre, il est transféré au dépôt de la Préfecture de police (au sous-sol de la Conciergerie, île de la Cité). Le 6 novembre, le préfet de police signe l’arrêté officialisant son internement administratif.

Le 3 janvier 1942, René Masblanc fait partie d’un groupe de 38 internés politiques (parmi eux, 16 futurs “45000”) et 12 « indésirables » (droit commun) extraits du dépôt et transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé (Vienne). Les détenus sont conduits en car, sous escorte, jusqu’à la gare d’Austerlitz où les attend un wagon de voyageurs réservé (10 compartiments ; départ 7h55 – arrivée 18h51).

Le 22 mai 1942, il fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, René Masblanc est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandises d’où sont partis les convois de déportation. © Cliché M.V.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandises
d’où sont partis les convois de déportation. © Cliché M.V.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, René Masblanc est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45856, selon les listes reconstituées (la photo d’immatriculation du détenu portant ce matricule n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau -, une moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I). Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté René Masblanc.

Il meurt à Auschwitz le 28 octobre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Le 29 avril 1946, Lucienne Masblanc remplit une fiche de renseignements, sur laquelle elle est en mesure de préciser que son mari a été déporté à Auschwitz le 6 juillet 1942. Le lendemain, elle fait certifier conforme une copie de l’assignation de René Masblanc à comparaître devant la chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel de Paris le 15 septembre 1941, document qui ne mentionne cependant que des « propos alarmistes ».

Le 27 août suivant, René Petitjean, de Clichy, rescapé du convoi, complète et signe un formulaire à en-tête de l’Amicale d’Auschwitz (FNDIRP) par lequel il certifie que René Masblanc est décédé au camp d’Auschwitz à la date de « février 1943 ».

En octobre, Lucienne Masblanc remplit un formulaire du ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre (ACVG) de demande de régularisation de l’état civil d’un “non-rentré”. Le 22 octobre, le ministère établit officiellement l’acte de disparition de René Masblanc. Le 26 octobre, Lucienne Masblanc complète un formulaire de demande d’inscription de la mention “mort pour la France” sur l’acte de décès d’un déporté politique.

Le 29 octobre, Henri Gorgue, de Romainville, autre rescapé du convoi, complète et signe à son tour un formulaire à en-tête de l’Amicale d’Auschwitz par lequel il certifie que René Masblanc est décédé à Auschwitz, mais en indiquant la date de « décembre 1942 ». Il signe une déclaration identique sur un deuxième formulaire le 21 novembre suivant.

Le 23 novembre, l’officier de l’état civil alors en fonction au ministère des ACVG dresse l’acte de décès officiel de René Masblanc « sur la base des éléments d’information figurant au dossier du de cujus, qui nous a été présenté ce même jour » (probablement le témoignage de Henri Gorgue) et en fixant la date au 15 décembre 1942, soit au milieu du mois.

Le 21 mars 1947, Lucienne Masblanc écrit au ministre des ACVG pour solliciter que la mention “Mort pour la France” soit ajoutée à l’acte de décès de son mari, celle-ci ayant été initialement refusée au motif que « seuls peuvent y prétendre ceux qui ont appartenu soit à un centre de Résistance, soit au Parti communiste ». Elle pense que, bien que son mari n’ait appartenu officiellement ni à l’un ni à l’autre, les circonstances qui ont amené sa déportation et son décès peuvent lui donner droit à ce titre posthume. Les sentiments patriotiques de son mari ne pouvant être mis en doute, celui-ci « ne peut, en aucun cas, être assimilé aux travailleurs volontaires décédés en Allemagne, puisqu’il fut bien déporté par les autorités d’occupation en raison de ses sentiments anti-allemands ».

À l’appui des démarches administratives suivantes, elle présente une nouvelle copie de l’assignation de René Masblanc à comparaître devant Cour d’appel en septembre 1941. Le 9 février 1948, une note du “service contrôle” de la préfecture de la Seine précise que sa condamnation avait alors été motivée par « une réflexion désobligeante sur les Allemands et sur le régime de Vichy ». Le 4 mars suivant, le préfet de la Seine rend un avis favorable à l’attribution de la mention “Mort pour la France”, qui est apposée en juin sur le registre des décès de la mairie du 16e arrondissement.

En octobre 1952, Jean Masblanc, père de René, âgé de 74 ans, qui habite toujours à Champsanglard, complète et signe un formulaire du ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre de demande d’attribution du titre de déporté résistant pour son fils. À la rubrique “circonstances”, il complète par « Propos contre l’armée d’occupation » ; à la rubrique “motif de la condamnation” par un tribunal, il indique « Démoralisation des civils ». Le 26 juin 1953, la Commission départementale de la Creuse des ACVG rend un avis défavorable à l’attribution du titre de déporté résistant ; même refus de la commission de la Seine le 6 janvier 1955. Le 9 septembre suivant, la commission nationale rend également un avis défavorable, suivie par le ministère qui prononce un rejet de la demande, estimant « non établie » la matérialité de l’acte de résistance invoqué.

Le 8 novembre 1955, la Commission nationale des déportés et internés politiques rend un avis favorable à l’attribution du titre de “déporté politique”, suivi par la décision du ministère du 22 novembre, notifiée deux semaines plus tard au demandeur : Jean Masblanc reçoit la carte n° 1108.18217 établie au nom de son fils.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 373 et 413.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier central).
- Archives départementales de la Creuse, site internet du Conseil départemental, archives en ligne : registre des naissances des Champsanglard, années 1903-1913 (4E 58/17*), année 1908, acte n° 4 (vue 28/42), année 1910, acte n° 3 (vue 33/42), année 1911, acte n° 13 (vue 36/42).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; dossier individuel du cabinet du préfet (1 W 700-23544).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI-42, n° 127.
- Archives départementales de la Vienne ; camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 786 (37823/1942).
- Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, Caen ; dossier de Masblanc René (21 P 513.861), recherches et relecture de Ginette Petiot (messages 01-2019.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 16-01-2018)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

Raoul MARY – (45855 ?)

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Raoul, Émile, Louis, MARY naît le 4 septembre 1913 à Petit-Quevilly, agglomération de Rouen (Seine-Inférieure / Seine-Maritime 

[1] – 76).

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 64, rue des Capucins, à Rouen.

Marié avec Suzanne, ils ont une fille. Il est le beau-frère de Jean Creignou et Raymond Mouret.

De 1935 à 1937, Raoul Mary est employé de bureau, aux Service régional des Assurances Sociales pendant deux ans et demi, puis, de 1937 à 1939, à la direction du Port de Rouen (Ponts-et-Chaussées).

Membre des Jeunesses communistes, il est aussi secrétaire de l’Association des Amis de l’URSS.

Lors des élections cantonales d’octobre 1937, le Parti communiste le présente comme candidat au Conseil d’arrondissement dans la circonscription de Bellencombre.

À la suite de la mobilisation de septembre 1939, Raoul Mary est affecté comme brigadier chef comptable dans un état-major militaire.

Son domicile est perquisitionné au moins une fois par la police française.

Arrêté et inculpé en octobre 1940 pour activité communiste, il est acquitté « faute de preuve matérielle de son activité » et libéré le 26 novembre.

Le 21 juin 1941 – comme Raymond Mouret – Raoul Mary est arrêté [2], puis interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne [3] (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Il figure sur la liste des Jeunes communistes de ce camp (n° 1414).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Raoul Mary est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande, en application d’un ordre de Hitler.

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Raoul Mary est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45855 selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Raoul Mary.

Il meurt à Auschwitz le 25 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Il est homologué comme “Déporté politique” en 1955.

Notes :

[1] Seine-Maritime : département dénommé “Seine-Inférieure” jusqu’en janvier 1955.

[2] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est défini le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – arrestations et perquisitions à leur domicile – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante. En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, administré par la Wehrmacht et réservé à la détention des “ennemis actifs du Reich”. Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. Fin août, 200 d’entre eux font déjà partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942

[3] Sous contrôle militaire allemand, le camp de Royallieu a d’abord été un camp de prisonniers de guerre (Frontstalag 122), puis, après l’invasion de l’URSS, un « camp de concentration permanent pour éléments ennemis actifs ». À partir de septembre 1941, on y prélève – comme dans les autres camps et prisons de zone occupée – des otages à fusiller. À partir du 12 décembre 1941, un secteur du sous-camp C est réservé aux Juifs destinés à être déportés à titre de représailles. Le camp des Juifs est supprimé le 6 juillet 1942, après le départ de la plupart de ses internés dans le convoi transportant les otages communistes vers Auschwitz. Les derniers détenus juifs sont transférés au camp de Drancy (Seine / Seine-Saint-Denis).

[4] Dossier de Brinon : ancien journaliste et “ultra” de la collaboration, Fernand (de) Brinon était Délégué général du gouvernement de Vichy auprès des autorités militaires allemandes d’occupation. Quand des requêtes étaient formulées par les familles des détenus auprès de l’administration française, la Délégation générale les transmettait à la Commission d’armistice (bipartite), après enquête de la police ou de la gendarmerie pour s’assurer des conditions d’arrestation et de l’honorabilité du détenu. Une lettre était ensuite adressée aux familles sous couvert de l’organisme qui en avait fait la demande : elle leur annonçait que l’intervention avait eu lieu et leur faisait part de la réponse fournie par les autorités allemandes. Ainsi, un très grand nombre de fiches de la Délégation générale portent le nom de “45000” ; surtout après le départ du convoi, le 6 juillet 1942, et l’absence de nouvelles résultant de leur statut “NN”. La plupart de ces fiches se trouvent dans les dossiers d’état civil des déportés conservés au BAVCC (anciennement archives du secrétariat d’État aux Anciens Combattants).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 377 et 413.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Haute-Normandie (2000), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen – Dossier de Brinon [4].
- Site Gallica, Bibliothèque Nationale de France, L’Humanité n° 14164 du mercredi 29 septembre 1937, page 4, “vingtième liste (suite)…”.
- Archives départementales de Seine-Maritime, Rouen, site de l’Hôtel du Département, cabinet du préfet 1940-1946, individus arrêtés par les autorités de Vichy ou par les autorités d’occupation, dossiers individuels de Lh à Q (cote 51 W 419), recherches conduites avec Catherine Voranger, petite-fille de Louis Jouvin (“45697”).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 785 (24683/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 24-08-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Charles MARY – 45854

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Charles Mary naît le 24 mars 1911 à Sainte-Marie-aux-Chênes (Moselle), fils de Pierre Mary et Pierre Jeanne Masson.

De 1932 au 25 mars 1933, il effectue son service militaire comme tirailleur marocain à Fez (Maroc).

Le 19 septembre 1935 à Pierson (?), Charles Mary se marie avec Tersina Para. Ils ont un enfant.

Au moment de son arrestation, il est domicilié à Auboué (Meurthe-et-Moselle – 54) ; son adresse reste à préciser.

Auboué. Vue sur l’usine. Carte postale oblitérée en 1950. Coll. Mémoire Vive.

Auboué. Vue sur l’usine. Carte postale oblitérée en 1950. Coll. Mémoire Vive.

Charles Mary est mineur de fer (wattman) à la mine d’Auboué et membre du bureau syndical CGT de la Fédération du sous-sol de 1936 à 1939, photographié parmi ses membres en 1937.

Pendant la “drôle de guerre”, il est mobilisé comme caporal au 128e régiment d’infanterie (dans une forteresse ?). Fait prisonnier le 23 juin 1940, il obtient un « congé de captivité » le 5 août.

Le 15 juillet 1941, au lendemain de l’importante démonstration patriotique organisée le jour de la fête nationale à Auboué par les Jeunesses communistes clandestines (pavoisement tricolore, slogans peints sur les murs…), Charles Mary fait partie des militants communistes connus avant guerre qui sont appréhendés par la police française pour interrogatoire, puis relâchés dans la journée, faute de preuve.

Dans la nuit du 4 au 5 février 1942, un groupe de résistance communiste mène une action de sabotage contre le transformateur électrique de l’usine sidérurgique d’Auboué qui alimente également dix-sept mines de fer du Pays de Briey. Visant une des sources d’acier de l’industrie de guerre allemande (Hitler lui-même s’en préoccupe), l’opération déclenche dans le département plusieurs vagues d’arrestations pour enquête et représailles qui concerneront des dizaines de futurs “45000”.

Charles Mary fait partie des personnes arrêtées par la Feldgendarmerie dans la nuit du 19 au 20 février ; dans un rapport, le préfet de la région de Nancy utilise le mot « rafle ». Sur les quinze personnes arrêtés à Auboué ce jour-là, Charles Mary est le seul a ne pas être libéré et à rejoindre les autres otages.

Le 23 février, il fait partie d’un groupe d’otages transférés par la police allemande au centre de séjour surveillé d’Écrouves, près de Toul (54), en attente « d’être dirigés sur un autre camp sous contrôle allemand en France ou en Allemagne ».

Et, effectivement, le 5 mars, Charles Mary est parmi les trente-neuf détenus transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C. Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.     L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C.
Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Charles Mary est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45854 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Charles Mary est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Pendant un temps, il est assigné au Block 4, avec Jean Mahon, Gustave Martin, Emmanuel Michel et Raymond Monnot.

Le 31 juillet, Charles Mary est admis à l’hôpital (KB) du camp.

Il meurt à Auschwitz le 2 décembre 1942, selon une copie du registre de la morgue (Leichenhalle) relevée clandestinement par la résistance polonaise interne du camp, et où est inscrit le matricule n° 45854 (le local en question est situé au sous-sol du Block 28).

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Collection Denis Martin – ARMREL.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74, 367 et 413.
- Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 117.
- Jean-Claude et Yves Magrinelli, Antifascisme et parti communiste en Meurthe-et-Moselle, 1920-1945, Jarville, avril 1985, pages 102, 234-235, 246, 345.
- Archives Départementales de Meurthe-et-Moselle, Nancy : cotes W1304/23 et WM 312 ; fiches du centre de séjour surveillé d’Écrouves (ordre 927 W) ; recherches de Daniel et Jean-Marie Dusselier.
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Service d’information sur les anciens détenus (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; page 77 du registre du Block 4.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 25-11-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

Henri MARY – 45853

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Henri Émile Mary naît le 28 août 1903 à Champs-sur-Marne (Seine-et-Marne – 77), fils d’Eugène Mary, 28 ans, et de Louis Briat, 24 ans, tous deux chocolatiers chez Meunier. Henri restera fils unique.

En 1906, la famille est domiciliée au 49 rue de la Marne, à Champs.

Le 6 août 1914, son père rejoint le 13e régiment d’artillerie de campagne comme 2e canonnier servant. Le 19 février 1916, il passe au 12e régiment d’artillerie. Il est “aux armées” à partir du 1er avril 1917. Le 5 février 1919, il est mis en congé illimité de démobilisation et se retire à Champs. 27 rue de Malenoue (?).

Henri commence à travailler comme plombier-couvreur.

Le 2 septembre 1922 à Champs, Henri Mary se marie avec Marcelle Émilienne Convert, née le 25 mars 1901 à Champs (21 ans), paqueteuse, dont les parents sont également chocolatiers.

En 1926, le jeune couple habite à proximité des parents d’Henri (un logement mitoyen dans la même maison ?).

En 1935 et jusqu’au moment de son arrestation, Henri Mary est domicilié au 36, rue Dagobert à Clichy-la-Garenne

[1] (Seine / Hauts-de-Seine – 92). Au printemps 1936, Marcelle est mécanicienne chez Hotchkiss à Levallois-Perret.

Métallurgiste (tôlier chaudronnier ; dans quelle entreprise ?), Henri Mary est un militant communiste.

Le 26 juin 1941, il est arrêté à Clichy par les polices française et allemande [2] et interné le lendemain au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122. Enregistré sous le matricule 453, il fait partie des militants qui inaugurent ce camp de police (Polizeihaftlager).

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Henri Mary est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Henri Mary est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45853 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Henri Mary est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

À des dates restant à préciser, il est admis au Block de chirurgie, puis au Block 28 de l’hôpital du camp.

Henri Mary meurt à Auschwitz le 17 janvier 1943, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Il est homologué comme “Déporté politique” en 1954.

Notes :

[1] Clichy-la-Garenne : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – arrestations et perquisitions à leur domicile – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante. En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, administré par la Wehrmacht, réservé à la détention des “ennemis actifs du Reich” et qui ouvre en tant que camp de police. Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. Fin août, 200 d’entre eux font déjà partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 381 et 413.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Hauts-de-Seine nord (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier central) – Témoignage de René Petitjean – Archives municipales de Clichy.
- Archives communales de Clichy : listes électorales, archives de la section locale de la FNDIRP.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 785 (2431/1943).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 8-09-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

Marcel MARTY – (45852 ?)

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

, fils de Pierre Marty et de Charlotte Forestier.

Il est métallurgiste, ajusteur-mécanicien. Pendant un temps, il habite au 20, rue Baudry-Lacantinerie (?).

De la classe 1921, il n’est incorporé que le 11 mars 1923 après avoir été recalé par le Conseil de révision pour faiblesse et insuffisante respiratoire. Après avoir accompli son service militaire au 50e régiment d’infanterie, il est renvoyé dans ses foyers le 7 mai 1924, titulaire d’un certificat de bonne conduite. (1 R 1675-4692 matr.)

Le 19 septembre 1922, il se marie avec Odette Fravier. ils ont deux enfants, âgés de 17 et 18 ans en 1941.

Il commence à travailler à l’usine Motobloc à Bordeaux, puis à l’usine Ford dans cette ville.

Puis il travaille à l’usine Ford d’Asnières, où il a sans doute obtenu une mutation. Pendant onze ans, il travaille comme régleur-rectifieur à l’usine Timken (société anonyme française Timlien, toujours à Asnières. Il est est “affecté spécial” lors de la mobilisation. En dernier lieu, il travaille aux Établissements Waller, M. Mouton, sis au 24, avenue de la Porte de Villiers, à Paris 17e.

En octobre 1927, la famille s’installe au 3, impasse Descours à Asnières

[1] (Seine / Hauts-de-Seine – 92). En juillet 1930, ils habitent au 13, rue Novion (?).

En octobre 1932 et jusqu’au moment de son arrestation, Marcel Marty est domicilié au 105, quai d’Asnières, à Asnières.

C’est un militant communiste.

En juin 1941, le commissaire de police de la circonscription d’Asnières propose son arrestation à la préfecture de police pour « participation à la propagande clandestine ».

Le 26 juin, Marcel Marty est arrêté à son domicile par des policiers d’Asnières sur arrêté du préfet de police pris en application du décret du 18 novembre 1939, comme des dizaines de suspects communistes de Seine qui sont aussitôt conduits dans la cour de l’Hôtel (de) Matignon, sis au 57 rue de Varenne à Paris 7e, – alors siège de la Geheime Feldpolizei (GFP) [2] – pour y être « mis à la disposition des autorités d’occupation » [3]. Tous sont ensuite regroupés au Fort de Romainville (sur la commune des Lilas – 93), élément du Frontstalag 122. Considérés comme étant en transit, ils ne sont pas enregistrés sur les registres du camp et transférés le lendemain au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager) [4]. Enregistré sous le matricule 288, Marcel Marty fait partie des premiers internés de Paris et sa banlieue qui inaugurent ce camp de “police”.

Le 4 juillet, Odette Marty écrit au directeur des Renseignements généraux pour lui demander des renseignements concernant l’arrestation de son mari ; une fiche de police n’est établie à son nom qu’à cette date.

Dans ses mémoires, Georges Cogniot mentionne un nommé Marcel Marty, « électricien » qui aurait joué un grand rôle dans l’évasion des 19 communistes dans la nuit du 21 au 22 juin 1942.Entre fin avril et fin juin 1942, Marcel Marty est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Marcel Marty est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I), peut-être sous le numéro 45852, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Il meurt à Auschwitz le 4 novembre 1942, d’après  l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Déclaré “Mort pour la France” (23-10-1947), il est homologué comme “Déporté politique”.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 29-01-2001) ; « décédé le 18 juillet 1944 à Magdeburg (Allemagne) » (? ?).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 380 et 413.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Hauts-de-Seine nord (2005), citant : Etat-civil d’Asnières – Archives du monde combattant, Caen (fichier national).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; dossier individuel du cabinet du préfet (1 W 59-26786) ; dossier individuel des Renseignements généraux (77 W 1690-89786).
- Georges Cogniot, Parti pris, tome 1 : D’une guerre mondiale à l’autre, éditions sociales, 4e trim. 1976, page 487.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 785 (38757/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 28-05-2009)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Asnières : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] L’ “ Aktion Theoderich ” : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante.

En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich,plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht.

Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. Fin août, 200 d’entre eux font déjà partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

Marcel MARTY – (45851 ?)

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Probablement photographié au camp de Rouillé. DAVCC.

Marcel, Ferdinand, Marty naît le 28 décembre 1895 à Puteaux

[1] (Seine / Hauts-de-Seine – 92), chez son père, Ferdinand, Gustave, Marty, 29 ans, journalier, domicilié au 103, rue Voltaire, de mère alors « non dénommée » (Adrienne Parent).

Il commence à travailler comme peintre en bâtiment.

Le 10 novembre 1914 à Nanterre, Marcel Marty épouse Gabrielle Rosalie Marie Reverdy, née le 29 juillet 1896 à Saint-Nazaire (Loire-Inférieure / Loire-Atlantique), couturière, orpheline (sous l’autorité d’un tuteur et d’un conseil de famille).

Pendant un temps, la famille vit au 24, rue des Rosiers avec le père de Marcel. Celui-ci est alors également peintre en bâtiment,

De la classe 1915, Marcel Marty est incorporé le 19 décembre 1914 comme soldat de 2e classe au 24e régiment d’infanterie. Il part aux armées le 30 mai 1915.

Le 3 septembre 1915, son épouse donne naissance à leur fille, Gabrielle Marcelle Andrée.

Le 20 mars 1916, Marcel Marty passe au 1er régiment de zouaves. Le 6 juin suivant, il passe au 4e régiment de tirailleurs et retourne au front.
Le 17 avril 1917, à Marovilliers, il est blessé par un éclat d’obus à la jambe gauche. Il semble avoir été soigné pendant un an.
Le 2 mai 1918, la commission de réforme d’Avignon le déclare inapte pour deux mois en raison d’une névrite sciatique gauche consécutive à une blessure de guerre. Le 25 juillet suivant, la même commission le déclare apte à faire campagne, puis le 8 août, le déclare inapte à l’infanterie et l’affecte au 62e régiment d’artillerie DCA. À la même date, la 4e commission de réforme de la Seine – on peut supposer qu’il est rentré chez lui –  le propose pour une pension temporaire d’invalidité de 30 % pour « paralysie sciatique interne gauche avec reliquat de R.D. (?) partielle, fatigabilité à la marche ». Simultanément, il est « rayé des contrôles » de l’armée active (cessation de son état militaire). Le 17 septembre 1919, il est officiellement démobilisé par le 22e régiment d’artillerie et se retire chez son père au 24 rue des Rosiers à Nanterre, titulaire d’un certificat de bonne conduite. En novembre 1920, la 6e commission de la Seine constatera… « Paralysie des branches terminales du sciatique gauche avec hypo., légère claudication, limitation de la flexion, hypoesthésie dorsale, paresthésie plantaire, amyotrophie 2 cm à la cuisse et jambe ». En mars 1924, la 4e commission de la Seine lui accordera une pension permanente d’invalidité de 10 %. Marcel Marty est titulaire de la Croix de guerre.

Le 9 mars 1922, son épouse décède à leur domicile, âgée de 26 ans. Leur fille a 6 ans et demi.

Le 28 mars 1925 à Nanterre, Marcel Marty se marie avec Jeanne Lovergeon (ou Lauvergeon), née le 15 décembre 1903 à Mesves-sur-Loire (Nièvre), ouvrière sur machine. Ils ont deux autres enfants, Charles, né le 28 janvier 1925, et – peut-être – Jacqueline Colette, née le 14 août 1926 (?).

Au moment de son arrestation, Marcel Marty est domicilié depuis plusieurs années au 93, rue des Rosiers à Nanterre [1] (92).

Toujours peintre en bâtiment, il est employé, jusqu’à la veille de son arrestation, par l’entreprise Lajoinie de Neuilly-sur-Seine sur son chantier du camp de La Folie à Nanterre.

C’est un militant communiste.

Au début de l’occupation, la police française le considère comme comme un « meneur communiste très actif et dangereux »

Le 26 octobre 1940, Marcel Marty est arrêté à Nanterre, « en flagrant délit de propagande communiste » (distribution de tracts), selon un document de police ; ou à son domicile à 6 heures du matin, selon son épouse.

Le 9 novembre, Marcel Marty est interné administrativement au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé au début du mois d’octobre 1940 dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt afin d’y enfermer des hommes connus de la police pour avoir été militants communistes ou syndicalistes avant-guerre.

Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930. Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche. Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930.
Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche.
Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 6 septembre 1941, il est parmi les 150 détenus d’Aincourt (dont 106 de la Seine) transférés au camp français (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne), pour l’ouverture de celui-ci.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le 22 mai 1942, il fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C. Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942. Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C.
Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.
Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Marcel Marty est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le 8 juillet 1942, Marcel Marty est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I), peut-être sous le numéro 45851, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Marcel Marty.

Il meurt à Auschwitz le 2 novembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) ; la cause mensongère indiquée pour sa mort mentionnée est « dégénérescence du muscle cardiaque » (Herzmuskeldegeneration).Le 16 mars 1946, le bureau national des recherches du ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre (ACVG) établit un certificat officialisant le fait que le déporté Marcel Marty « n’a pas été rapatrié à ce jour ».

Le 30 mars, au nom de l’Amicale d’Auschwitz, Jean Rouault – rescapé du même convoi -, signe une attestation certifiant « sur l’honneur » le décès de Marcel Marty à Auschwitz, qu’il estime avoir eu lieu au cours du mois d’octobre 1942. Le 30 avril, Camille Salesse – autre rescapé -, signe un formulaire identique en indiquant la date du 12 octobre 1942.

Le 12 novembre, Jeanne Marty rempli un formulaire de demande d’inscription de la mention “Mort pour la France” sur l’acte de décès d’un déporté.

Le 27 décembre, l’officier d’état civil du ministère des ACVG dresse l’acte de décès officiel de Marcel Marty « sur la base des éléments d’information figurant au dossier », dont la date mentionnée par Camille Salesse.

Marcel Marty est déclaré “Mort pour la France” (26-06-1947).

Le 13 mars 1950, sa veuve rempli un formulaire de demande d’attribution du titre de “Déporté résistant”.

Le 17 décembre 1953, la Commission nationale des Déportés et internés de la Résistance prononce un avis défavorable à l’attribution de ce statut.

Le 26 mars 1954, suite à cet avis, le ministre des ACVG refuse d’accorder le titre de “Déporté résistant” à Marcel Marty, ne lui attribue que celui de “Déporté politique” (carte n° 1101 10636).

Le 14 juin suivant, Jeanne Marty écrit au ministre pour protester contre ce refus qu’elle estime infondé (« inique ») et demander un réexamen de ses droits par voie de recours gracieux.

Le 20 octobre, une réponse sans appel énumère les critères de la décision : « L’article R.286 du Code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre déclare que le titre de Déporté résistant est attribué, à la condition expresse que la cause déterminante de la déportation soit un des actes qualifiés de résistance à l’ennemi définis à l’article R.287 dudit Code.

Or, il appert d’un document du dossier que Monsieur Marty a été arrêté le 9 novembre 1940 par la police française pour infraction au décret-loi du 26 septembre 1939 destiné à réprimer les activité politiques clandestines nuisibles à la sécurité intérieure de l’État. [sic !]

Au demeurant, les tracts distribués par Monsieur Marty ne pouvaient, étant donné la date de l’arrestation, émaner d’organisation reconnues au titre des F.F.C. [Forces françaises combattantes], des F.F.I. [Forces françaises de l’Intérieur] ou de la R.I.F. [Résistance intérieure française], ainsi que l’exige l’alinéa a) du 4e paragraphe d’article R.287 du Code précité.

J’ajoute que vous vous réclamez de son appartenance au Mouvement Front national [2], mais ledit mouvement n’existait pas au 9 novembre 1940 ». Ainsi est rejeté l’attestation de cette organisation, datée du 2 novembre 1950, qui exposait que « Monsieur Marty entra dans la Résistance dès l’occupation et son activité contribua, pour sa part, à la formation du Front national” ».

Le nom de Marcel Marty est inscrit (sans prénom) parmi les déportés sur le Monument aux morts de Nanterre, parc des Anciennes Mairies.

Notes :

[1] Puteaux et Nanterre : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Front national de lutte pour la liberté et l’indépendance de la France : mouvement de Résistance constitué en mai 1941 à l’initiative du PCF clandestin (sans aucun lien avec l’organisation politique créée en 1972, dite “FN”, jusqu’à son changement d’appellation le 1er juin 2018).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 383 et 413.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Hauts-de-Seine nord (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen – Mairie de Nanterre : acte de décès (27-12-1946) ; liste de déportés politiques.
- Archives départementales des Hauts-de-Seine (AD 92), site internet du conseil général, archives en ligne : registre des naissances de Puteaux, année 1895 (E NUM PUT N1895), acte n° 512 (vue 130/140).
- Archives de Paris : registres des matricules du recrutement militaire, classe 1915, 2e bureau de la Seine, volume 5501-6000 (D4R1 1858), n° 5888.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”  (BA ?) ; dossier individuel du cabinet du préfet (1 W 59-26786) ; dossier individuel des Renseignements généraux (77 W 1690-89786).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt ; révision trimestrielle (1w74), (1w76),  notice individuelle (1w138).
- Mémorial de la Shoah, Paris, Archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI 42, n° 126.
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 784.
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Service d’information sur les anciens détenus (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; acte de décès (38668/1942).
- Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, Caen : dossier de Marcel Marty (21 P 513 697), recherches de Ginette Petiot (message 11-2012).
- Site Mémorial GenWeb, 92-Nanterre, relevé de Gilles Gauthier (12-2005).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 10-10-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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