Marcel RENAUD – 46049

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Marcel, Adrien, Billebaut naît le 27 janvier 1899 à Germiny-l’Exempt (Cher), fils de Joséphine Billebaut, 17 ans, couturière, célibataire, et de père non dénommé. Le nouveau-né est présenté au secrétariat de mairie par une domestique de 34 ans. Le 5 novembre 1904, à Germiny-l’Exempt, il est reconnu et légitimé par le mariage avec sa mère d’Alphonse Renaud, 23 ans, cultivateur demeurant à Bessais(-le-Fromental), qui se déclare pour son père. En 1905, sa sœur Denise naît à Donnemarie-en-Montois (77), où la famille est alors domicilée, rue de Champeaux, dans le quartier de la Porte de Melun. Le père est devenu employé de tramway.

Avant guerre, la famille vient habiter à Mouy-sur-Seine (Seine-et-Marne). Marcel commence à travailler comme ouvrier agricole.

Le 20 avril 1918, il est incorporé comme soldat de 2e classe au 95e régiment d’infanterie. Le 21 janvier 1919, il passe au 501e R.I. Le 20 octobre suivant, il passe au 63e régiment d’artillerie. Le 1er janvier 1920, il passe à l’établissement central de D.C.A. de Chartres. Le 26 mars 1921, il est renvoyé dans ses foyers, titulaire d’un certificat de bonne conduite.

Le 29 avril 1922, à Villefranche-sur-Cher, à 6 km de Romorantin (Loir-et-Cher – 41), Marcel Renaud se marie avec Simone Marie Sineau, née le 5 décembre 1900, fille de vignerons. Ils auront un enfant.

En novembre 1922, il déclare habiter à Jouy-le-Châtel (77).

En septembre 1923, il habite rue du Rioux à Villefranche-sur-Cher (41).

Fin août 1928, il est domicilié au 9 rue d’Arras à Paris 5e.

En septembre 1933, il est revenu à Villefranche-sur-Cher.

Au moment de son arrestation, Marcel Renaud est domicilié à Villefranche ; son adresse reste à préciser. Il est alors agent de ligne des Postes et Télégraphes à Romorantin, avec Roger Morand, fusillé à Orléans, et Joseph Filloux.

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Romorantin. La Poste (à droite), au-dessus de la Sauldre. Carte postale non datée. Collection Mémoire Vive.

Romorantin. La Poste (à droite), au-dessus de la Sauldre.
Carte postale non datée. Collection Mémoire Vive.

Le 25 décembre 1941, Marcel Renaud est arrêté à Romorantin pour manifestation anti-allemande (?) et condamné le 15 janvier suivant à huit mois de prison par le tribunal de la Kommandantur. Il est écroué à Orléans.

Le 30 avril 1942, à Romorantin, cinq résistants communistes sont découverts par des soldats allemands alors qu’ils distribuent des tracts. Armés, ils ne se laissent pas arrêter et blessent les soldats, dont l’un succombe à ses blessures. Les mesures de représailles prévoient l’exécution immédiate de dix communistes, Juifs et de proches des auteurs présumés. Vingt autres personnes doivent être exécutées si au bout de huit jours les « malfaiteurs » ne sont pas arrêtés. Des rafles sont opérées dans la ville et dans le département afin de pouvoir « transférer d’autres personnes vers l’Est, dans les camps de travaux forcés. »

Le lendemain 1er mai, Marcel Renaud est désigné comme otage, et bientôt transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

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La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C. Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942. Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C.
Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.
Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Marcel Renaud est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Marcel Renaud est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46049 selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

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© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Marcel Renaud.

Il  meurt à Auschwitz le 17 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Après la guerre, le Conseil municipal de Villefranche-sur-Cher donne le nom de Marcel Renaud à une ruede la commune.

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Cliché ARMREL (voir sources).

Son nom est inscrit sur le monument « À la mémoire des victimes civiles de la guerre 1939-1945 », sur la route nationale n°76, près de la gare, parmi les cinq « Morts à Auschwitz ».

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Cliché ARMREL (voir Sources).

Le nom de Marcel Renaud est également inscrit sur un plaque commémorative situé dans le hall de la Poste de Romorantin-Lanthenay « À nos camarades des PTT victimes de leur devoir ».

Son épouse et son enfant ont déposé une plaque à son nom sur la tombe familiale.

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Cliché ARMREL (voir sources).

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 14-12-1997).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 365 et 418.
- Archives départementales de Seine-et-Marne, archives en ligne : matricules du registre militaire, bureau de Fontainebleau, classe 1919, matricules n° 1 à 500 (1R1487), n° 188, vue 300.
- Archives départementales du Loir-et-Cher : fiche d’arrestation de Marcel Renaud, dossier 889 (1375 W 64), fichier alphabétique des déportés du CRSGM (56 J 5).
- Mémorial de la Shoah, Paris, site internet, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : XLIII-89 (télégramme non daté du Militärbefehlshaber in Frankreich (MbF), signé par CarlHeinrich von Stülpnagel).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 : relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1002 (31055/1942).
- Association de Recherche pour la Mémoire de la Résistance en Eure-et-Loir (ARMREL) : photographies.
- Site Mémorial GenWeb, 41-Romorantin, relevé de Christine Fabre-Helynck (11-2004).
- Site Les plaques commémoratives, sources de mémoire (aujourd’hui désactivé – nov. 2013), photographie de Jean-Jacques Guilloteau.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 10-11-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Georges RENAUD – 46048

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Georges Renaud naît le 13 octobre 1904 à Boulogne-sur-Seine [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Hauts-de-Seine – 92), chez ses parents, Eugène Georges, 27 ans, cocher-livreur, et Edwige Ignolin, son épouse, 23 ans et dix mois, domiciliés au 42, rue du Vieux-Pont-de-Sèvres.

Georges Renaud commence à travailler comme chauffeur, alors domicilié au 60 rue Falguière (Paris 15e). Ses parents sont séparés. Sa mère est devenue concierge au 15 rue Cauchy à Arcueil (Seine / Val-de-Marne).

Le 28 mai 1927, à Paris 15e, Georges Renaud se marie avec Simone Fontaine, 18 ans, née le 4 novembre 1908 à Paris 6e, comptable, dont les parents sont séparés ; elle vit alors avec son père au 15 rue Cauchy à Arcueil.

En 1936, Georges Renaud est domicilié au 12, avenue de Verdun à Montrouge [1] (92).

Georges Renaud est ajusteur. Vers 1937, il est embauché par les établissements Messier, sis au 55, rue Fénélon, à Montrouge.

Au moment de son arrestation, il habite au 155, avenue de la République à Montrouge.

Militant du Parti communiste, il est trésorier de la section de Montrouge.

Le 2 juin 1940, le préfet de police (de Paris) signe un arrêté ordonnant son internement administratif, au motif qu’ « il a mené parmi ses camarades de travail une insidieuse propagande en faveur des mots d’ordre clandestins de l’internationale communiste ». Arrêté le jour même, Georges Renaud est conduit quatre jours plus tard au fort de l’île d’Yeu sans être informé du motif de son arrestation.

Le fort de la Pierre Levée, sur l’île d’Yeu. Vue aérienne d’après-guerre. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le fort de la Pierre Levée, sur l’île d’Yeu. Vue aérienne d’après-guerre.
Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Puis il est transféré au camp de Riom-es-Montagne. Le 14 septembre, « calculant pas les effets de [son] geste » (sic), il quitte le camp pour revenir à Boulogne auprès son épouse, laissée dans un état de santé critique – anémie cérébrale, maladies cardiaque et nerveuse – et sans ressource.

Le 6 novembre 1940, il est arrêté une seconde fois et écroué à la Maison d’arrêt de la Santé, à Paris 14e. Un tribunal le condamne à deux mois d’emprisonnement.

Le 6 janvier, à l’expiration de sa peine, il n’est pas libéré : le préfet de police signe un nouvel arrêté ordonnant son internement administratif. Georges Renaud est conduit au dépôt de la préfecture de police (la Conciergerie, sous le Palais de Justice, île de la Cité), où il reste douze jours.

Le 17 janvier, Georges Renaud fait partie d’un groupe de 24 militants communistes conduits au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Val-d’Oise – 95), créé en octobre 1940 dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt. Pendant un temps, il est assigné à la chambre n° 31.

Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930. Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche. Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930.
Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche.
Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 10 février, puis le 17 juin 1941, il écrit au préfet de police (« …de la Seine », sic) afin de solliciter une mesure de libération, justifiant celle-ci par l’assistance qu’il doit apporter à son épouse malade.

Le 6 septembre 1941, Georges Renaud est parmi les 150 détenus d’Aincourt (dont 106 de la Seine) transférés au camp français (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne), pour l’ouverture de celui-ci.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le 22 mai 1942, il fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, Georges Renaud est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Georges Renaud est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46048 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Georges Renaud.

Il meurt à Auschwitz le 27 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Notes :

[1] Boulogne-sur-Seine (Boulogne-Billancourt à partir de 1926) et Montrouge : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 383 et 418.
- Archives départementales des Hauts-de-Seine (AD 92), site internet du conseil général, archives en ligne : registre des naissances de Boulogne-Billancourt, année 1904 (E NUM BOU N1904), acte n° 795 (vue 112/148).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt ; cotes 1w73, 1w76.
- Mémorial de la Shoah, Paris, Archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI-42, n° 154.
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1002 (25347/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 3-11-2014)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

 

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Charles RENAUD – 46047

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942. 
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 
Oświęcim, Pologne. 
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Charles Renaud naît le 7 avril 1898 à Palinges (Saône-et-Loire – 71), fils de Jean-Baptiste Renaud, 36 ans, tourneur en grès demeurant au Montet, et de Jeanne Chauveau, 30 ans, son épouse.

Pendant un temps, Charles Renaud travaille comme employé de commerce.

La Première Guerre mondiale éclaté début août 1914. Le 27 décembre 1916, à la mairie d’Autun, Charles Renaud, âgé de 18 ans et demi, devance l’appel comme engagé volontaire pour la durée de la guerre Le lendemain, il est incorporé au48e régiment d’artillerie. Le 23 juillet 1917, il passe au 81e régiment d’artillerie lourde, qu’il rejoint deux jours plus tard. Le 9 août suivant, il passe au 84e R.A.L. Le 15 janvier 1918, il est nommé 1er canonnier. Le 17 mai 1919, il passe au 85e R.A.L. Le 1er juin suivant, il passe au 15e escadron du train (des équipages). Dix-huit jours plus tard, il passe au 15e escadron du train et rejoint l’Armée d’Orient. Le 22 août [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][?], il est rapatrié. Le 27 décembre 1919, il est envoyé en congé de démobilisation et se retire à Palinges, titulaire d’un certificat de bonne conduite.

Le 21 octobre 1922, Charles Renaud épouse Marcelle Fradin, née le 9 juin 1902, vendeuse de journaux. Le couple a un enfant : Raymond, né le 15 juillet 1923 à Palinges.

En 1925, Charles Renaud est chaisier. En 1928, il est mineur.

En mai 1928 et jusqu’au moment de son arrestation, Charles Renaud est domicilié au 60, rue de Charolles à Montceau-les-Mines (71), à la Maison [?] Dufour.

Le 5 février 1930, l’armée le classe « affecté spécial » au titre des mines de Blanzy, à Montceau (71). En 1938, l’armée le classe « affecté personnel de renforcement » aux usines Schneider du Creusot (71).

Son dernier métier connu est manœuvre dans les travaux publics, pour l’entreprise Corbières ; déclaré comme ouvrier maçon.

Il est syndiqué à la CGT, adhérent à l‘Association républicaine des anciens combattants (ARAC) et au Parti communiste, où il milite avec Claude Chassepot, de Saint-Vallier, commune limitrophe.

Sous l’occupation, il est actif au sein d’un “triangle” clandestin.

Le 3 décembre 1940, Charles Renaud est arrêté – avec son fils de 17 ans – pour distribution de tractscommunistes : le libraire qui lui a vendu les rames de papier vierge en reconnaît le filigrane pour la police. Après qu’ils aient été interrogés tous les deux, son fils est libéré au bout de 48 heures.

Charles Renaud est jugé et condamné à six mois de détention. Il est écroué dans les Maisons d’arrêt de Chalon-sur-Saône puis de Dijon. Le 3 juin 1941, à l’expiration de sa peine, il est libéré… pour peu de temps.

Le 22 juin 1941, il est arrêté à son domicile par les Allemands [1] et conduit à l’hôtel de Ville de Montceau-les-Mines, où il est bientôt rejoint par son ami Claude Chassepot, mineur de Montceau, arrêté dans les mêmes conditions. Ils ne seront jamais interrogés.

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Montceau-les-Mines, l’Hôtel de Ville et la Poste. 
Carte postale non datée (années 1940 ?), collection MV.

Ensemble, ils sont conduits en voiture à la Maison d’arrêt de Chalon, où ils arrivent à 22 heures. Ils sont enfermés dans la même cellule.

Le 17 juillet – Charles Renaud et Claude Chassepot dans une voiture, trois détenus dans une autre – ils sont amenés, via Beaune, à la Maison d’arrêt de Dijon où ils sont enfermés dans des cellules individuelles. Le lendemain, une escorte de Feldgendarmes les conduit à la gare de Dijon pour prendre un train en direction de Paris. À l’arrivée dans la capitale, leurs gardiens leurs mettent les menottes pour les conduire en métro jusqu’à la gare du Nord. Au sortir de la gare de Compiègne, ils réquisitionnent une camionnette et le petit groupe arrive le 19 juillet au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

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La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers 
bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, 
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. 
À l’arrière plan, sur l’autre rive de l’Oise, 
l’usine qui fut la cible de plusieurs bombardements 
avec “dégâts collatéraux” sur le camp. 
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Pendant deux jours, les nouveaux internés sont gardés dans un coin de bâtiment par une sentinelle. Puis, Charles Renaud est enregistré sous le matricule 1341 (?) et assigné à la chambre 6 du bâtiment A5, avec Claude Chassepot, Paul Girard, de Montchanin, Jean Damichel et Alphonse Mérot, de Chalon-sur-Saône, avec lesquels il constitue un groupe de partage des colis. Ses compagnons le désignent comme chef de chambrée, chargé notamment de la juste répartition des repas.

Charles Renaud peut écrire à ses proches, et son épouse est autorisée à lui rendre une visite. Pendant son temps libre, il taille une chaîne de forçat dans le bois d’un pied de lit et cisèle des couvre-livres dans des morceaux de linoléum.

Le 8 décembre, Jean Damichel est extrait de leur chambre et isolé avec neufs autres détenus dans un bâtiment vide. Ils n’apprendront son exécution comme otage que bien plus tard [2].

Entre fin avril et fin juin 1942, Charles Renaud est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Charles Renaud est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46047 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée) [3] ; il est déclaré comme « Landwirt ».

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20. Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés aux travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Charles Renaud est dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.

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Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ». 
« Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre » 
Carte postale. Collection mémoire Vive.

Selon Camille Nivault (45928, rescapé, qui y est alors hospitalisé pour un phlegmon), Charles Renaud entre au Revier en décembre 1942 pour une otite (mastoïdite), puis en sort après avoir reçu des soins.

Charles Renaud meurt à Auschwitz le 1er mars 1943, d’après les registres du camp.

En août 1943, à la suite de ses propres démarches, son épouse, Marcelle, reçoit la lettre circulaire de la Croix-Rouge indiquant que le convoi a eu Auschwitz pour destination et que certains déportés ont déjà pu correspondre avec leur famille ; mais elle n’en saura pas davantage.

Le 14 août 1942, son fils Raymond, menuisier puis terrassier chez Corbières, membre des Jeunesses communistes, a été arrêté pour transport et distribution de tracts. En avril 1943, il est jugé par le Tribunal spécial de Dijon et condamné à 13 mois de prison. Il est écroué dans les prisons de Chalon-sur-Saône, puis de Dijon. Remis aux autorité d’occupation, il est interné au camp de Compiègne-Royallieu, puis déporté le 17 septembre 1943 au KL [4] Buchenwald. Arrivé le 18, il est enregistré sous le matricule 21448. Assigné au Block 40 avec des détenus politiques allemands chevronnés, il est affecté dans des Kommandos de terrassement, de travail en forêt, puis à la Gustloff-werke, grande usine d’armement qui emploie jusqu’à 3600 détenus. Le 22 février 1944, quand il apprend l’arrivée de déportés politiques français venant d’Auschwitz pour travailler à la DAW, Raymond Renaud va à leur rencontre dans l’espoir d’obtenir des nouvelles de son père. Ce sont Raymond Montégut et Camille Nivault qui lui apprennent la mort de celui-ci.

Dominique Renaud, le frère de Charles Renaud, et Dominique Daumas, leur neveu (fils de leur sœur, Jeanne Daumas, née Renaud), rejoignent le maquis des carrières de Sylla, situé entre Palinges et Martigny-le-Comte, puis s’engagent ensemble comme volontaires dans l’armée de Lattre de Tassigny (Rhin et Danube). Avant de partir, Dominique Renaud dit à sa belle-sœur Marcelle qu’il part « délivrer Charles et Raymond ».

Le 9 décembre 1944, leur unité attaque le village de Rammersmat, dans le canton de Thann, au pied des Vosges (Haut-Rhin – 68). Au cours de l’engagement, Dominique Daumas est grièvement blessé au poumon droit par une balle dum-dum. Témoin de la scène et croyant son neveu mort, le sergent-chef Dominique Renaud se lance à l’assaut de l’ennemi sans précaution et est tué d’une balle dans la tête.

Le 11 avril 1945, le camp de Buchenwald est libéré par une insurrection des détenus à l’approche des troupes alliées. Raymond Renaud passe la frontière française le 8 mai pour arriver à l’hôtel Lutétia à Paris.

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L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation. 
Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945. 
Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

Le 17 mai, Raymond Renaud rentre à Salinges, mais ne parvient pas à dire à sa mère ce qu’il sait du sort de son père. Il ne s’y résoudra qu’en juillet…

La mention “Mort en déportation” est apposée sur l’acte de décès de Charles Renaud (14-12-1997).

Sources :

- Raymond Renaud, son fils, courrier et échange téléphonique (10 et 11-2007) : copies de diversdocuments (familiaux, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau). 
- État civil de la mairie de Palinges. 
- Archives départementales de Saône-et-Loire (AD 71), site internet du conseil général, archives en ligne ; registre des mariages de Palinges 1888 (cote 5E340/19), acte n°14 (vue 8) ; registre des matricules militaires, bureau de recrutement d’Autun, classe 1918 (cote (1 R RM 1914/4). 
- Archives départementales de Côte-d’Or, cote 1630 W, article 252 : « arrestations par les autorités allemandes-correspondances » (liste de Saône-et-Loire). 
- Message internet de Frédérique Daumas, sa petite-nièce (26/1/2005). 
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 73, 370 et 418. 
- Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein-FMD, Paris nov. 2000, page 220. 
- Claude Chassepot, cahier commencé à Royallieu le 22 août 1941, archives du Musée de la Résistance nationale (MRN), Champigny-sur-Marne (94) ; voir ci-dessous… 
- André Jeannet, Mémorial de la Résistance en Saône-et-Loire : biographies des résistants, éditions JPM, Cluny 2005, page 352, citant : Enquête sur la déportation (?) 
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1002 (8709/1943). 
- Fondation pour la Mémoire de la Déportation, Livre-Mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression…, 1940-1945, éditions Tirésias, Paris 2004, I. 136, tome 2, pages 1113-1114, 1145.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour le 17-09-2014)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] L’ « Aktion Theoderich » :

L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le « judéo-bolchevisme ». Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante.

En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht. Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action.

131 d’entre eux, arrêtés entre le 21 et le 30 juin, font partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

[2] L’instituteur Jean Damichel, ancien secrétaire départemental du Parti communiste de Saône-et-Loire, est exécuté le 15 décembre 1941, avec 94 autres personnes, dont Gabriel Péri. Contrairement aux fois précédentes, la liste des fusillés n’est pas publiée et l’incertitude règne pendant plus d’un mois. Puis les informations commencent à percer à la mi-janvier.

[3] Sa photographie d’immatriculation a été reconnue (son nom est alors orthographié « Renault ») par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin “Après Auschwitz”, n°21 de mai-juin 1948). Son fils Raymond a eu connaissance de ce portrait en s’adressant directement au Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau par l’intermédiaire d’amis polonais.

[4] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.

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Jean RENARD – (46046 ?)

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Musée de l’Histoire vivante, Montreuil.

© Musée de l’Histoire vivante, Montreuil.

Jean, Camille, André, Renard naît le 30 octobre 1913 à Montreuil-sous-Bois [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Seine-Saint-Denis), fils de Camille Renard, né le 4 novembre 1874 à Montreuil, et de Marguerite Marchais, née le 8 août 1876 à Cognac (Charente). Son père est mobilisé au cours de la guerre de 1914-1918.

De 1931 à 1936, Jean Renard travaille comme photographe dans l’atelier de son père, installé au 90, avenue de Malakoff à Paris 15e.

Le 10 août 1935, à la mairie de Montreuil, il se marie avec Gabrielle Fougeard, née le 28 juin 1911 à Saint-Hilaire-de-Loulay (Vendée). Ils auront une fille, Nadine, née le 16 décembre 1937 à Montreuil.

Le 15 octobre 1936, Jean Renard est incorporé au 503e régiment de chars de combat afin d’y accomplir son service militaire. Il en est libéré le 1er octobre 1937.

La famille est domiciliée au 9, rue de Rosny à Montreuil, dans un pavillon appartenant au père de Jean et où celui-ci établit son propre atelier d’artisan photographe en mai 1938.

Adhérent au Parti communiste le 1er août 1935, Jean Renard serait secrétaire d’une cellule locale. Il participe aux activités culturelles de l’Université ouvrière de Montreuil. Selon un rapport de police, il s’agirait surtout de s’intégrer à la politique de la direction municipale.

Le 26 août 1939, Jean Renard est mobilisé et rejoint son régiment. Il est « renvoyé dans ses foyers » le 4 août 1940.

Le 5 novembre suivant, il est arrêté par les services du commissariat de la circonscription de Montreuil pour « activités communistes » après avoir été mis en cause par Fernand M., un ajusteur-serrurier père de sept enfants, comme ayant utilisé plusieurs stencils ayant servi à imprimer des tracts clandestins découverts la veille lors d’une perquisition chez celui-ci (plusieurs milliers d’exemplaires imprimés ou ronéotypés) ainsi qu’une machine Ronéo (imprimante). Jean Renard est placé sous mandat de dépôt le jour même.

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er. Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage. (montage photographique)

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage.
(montage photographique)

Le 26 avril 1941, il assigné à comparaître avec douze autres inculpés montreuillois, dont Fernand Vandehove, Marceau Vergua et son accusateur, devant la 15e Chambre du Tribunal correctionnel de la Seine. Celle-ci le condamne à six mois de prison. Cette peine étant couverte par sa détention préventive, Jean Renard est relaxé le lendemain après avoir avoir signé, devant un responsable des Renseignements généraux dans le bureau duquel il a été conduit, un engagement « de ne plus [se] livrer à aucune activité communiste ».

Fin février 1942, il sollicite auprès de la direction du Commerce et du Travail de la préfecture de police, l’autorisation de transférer son atelier artisanal de photographe au 10, rue Saint-Marc, à Paris 2e.

Le 28 avril, Jean Renard est arrêté à son domicile, comme otage, lors d’une grande vague d’arrestations (397 personnes) organisée par « les autorités d’occupation » dans le département de la Seine, au prétexte de « mesures de sécurité prises pour le maintien de l’ordre intérieur » visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin. Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Lors de son arrestation, les Allemands remettent sa carte d’alimentation et les tickets correspondants aux Renseignements généraux qui les font parvenir à la mairie de Montreuil trois jours plus tard.

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Jean Renard est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le 8 juillet 1942, Jean Renard est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46046 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp) ; Jean Renard ne “triche” pas sur sa profession et se déclare comme photographe. Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Jean Renard est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Pendant un temps, il est affecté au Block 19a.

Le 8 septembre 1942, il est admis au bâtiment des maladies contagieuses (Block 20) de l’hôpital des détenus du “camp souche”, comme Jean Tarnus et Alphonse Doucet.

Le Block 20 en 1962. © archives du Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau.

Le Block 20 en 1962. © archives du Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau.

C’est là qu’il meurt le 13 septembre 1942, selon plusieurs registres du camp. La cause, probablement mensongère, donnée pour sa mort est « diarrhée due au typhus » (Darmkatarrh bei Fleckfieber).

À la fin de l’été 1943, un membre de sa famille s’est adressé aux autorités françaises afin de connaître son sort, ainsi qu’en atteste une demande de renseignements sur les motifs de son arrestation adressée le 22 septembre au préfet de police par les services de la Délégation générale du gouvernement français dans les territoires occupés, dirigée par François (de) Brinon.

Jean Renard est homologué comme “Déporté politique”.

Son nom est parmi les 58 inscrits sur la stèle commémorative apposée sur la façade du siège de la section du PCF, au 10, rue Victor-Hugo, afin de rendre « Honneurs aux communistes de Montreuil tombés pour une France libre forte et heureuse ».

Après-guerre, Gabrielle, sa veuve, continue à faire fonctionner le studio photographique sous l’enseigne « Jan Renard », réalisant à son tour des prises du vue et reportages pour la municipalité de Montreuil (témoignage d’Annick Odru).

Notes :

[1] Montreuil-sous-Bois : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 385 et 418.
- Cl. Cardon-Hamet, notice in 60e anniversaire du départ du convoi des 45000, brochure répertoriant les “45000” de Seine-Saint-Denis, éditée par la Ville de Montreuil et le Musée d’Histoire vivante, 2002, page 30, citant : Daniel Tamanini, de la FNDIRP de Montreuil (lettre du 23-4-1989).
- Archives de Paris : archives du tribunal correctionnel de la Seine, jugement du samedi 26 avril 1941 (D1u6-3744).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande” (BA ?) ; dossier individuel des RG (77 W 164-75511).
- Musée de la Résistance nationale (MRN) Champigny-sur-Marne (94), carton “Association nationale de des familles de fusillés et massacrés”, fichier des victimes (4310).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1002 (30327/1942).
- Archives du Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau (Archiwum Państwowego Muzeum Auschwitz-Birkenau – APMAB), Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) : registre du Block 20 ; copie du registre de la morgue ; acte de décès n° 30327/1942.
- Musée de la Résistance nationale (MRN) Champigny-sur-Marne (94) : carton “Association nationale de des familles de fusillés et massacrés”, fichier des victimes (4310).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 18-02-2025)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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André RENARD – 46045

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

André, Julien, Renard naît le 16 juin 1908 à Dijon (Côte-d’Or – 21), de Claude Renard, 23 ans, menuisier, demeurant à Dijon 19 rue Parmentier, et de Marie Chevalier, son épouse, 22 ans, ouvrière.

Le 17 août 1932, André Renard épouse Angèle Bonvallot, née en 1909 à Dijon, vendeuse aux Magasins Modernes. Au moment de son arrestation, celle-ci est employée au journal Le Progrès de la Côte d’Or. Ils ont alors une fillette âgée de six ans.

En 1936, ayant pris une part très active aux grèves, André Renard est renvoyé de la société d’optique où il travaille. Cette année-là, et jusqu’au moment de son arrestation, il est domicilié au 4 rue des Perrières à Dijon.

Ensuite, il est employé aux usines Lipton à Dijon comme ajusteur mécanicien (tourneur).

Sous l’occupation, il est actif dans la Résistance : le 11 novembre 1941, il est « congédié à la suite d’apposition de tracts communistes à l’intérieur de l’usine » selon un rapport des Renseignements Généraux (RG) du 30 mai 1942 ; «  il s’est fait embaucher le lendemain à la Maison Faucillon-Lavergne, rue du Transvaal à Dijon ». Le même rapport précise également que ses voisins le considèrent « comme un syndicaliste sincère et ardent, agissant toujours lorsqu’il s’agissait de revendications pour l’amélioration du sort des ouvriers ».

Le 11 janvier 1942, il est arrêté comme otage à la suite de l’attentat manqué contre le foyer du soldat allemand (Soldatenheim) de Dijon [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1], mis à la disposition des autorités d’occupation et conduit au quartier allemand de la prison de Dijon, rue d’Auxonne. Selon les enquêteurs, certaines pièces entrant dans la fabrication de la bombe ont été fabriquées dans l’usine Lipton et André Renard, bien que renvoyé des établissements Lipton au mois de novembre précédent, figure néanmoins sur la liste des ouvriers suspects, considéré « comme un élément extrémiste dangereux ».

Le 19 janvier, le Commissaire divisionnaire, chef de la Police Judiciaire, informe par courrier le Préfet de Dijon que, sur les 26 ouvriers de l’usine arrêtés le 11 janvier, 21 ont été remis en liberté. Sur les cinq hommes gardés en détention, deux détenus ont avoué leur complicité (Pierre Dubost et Serge Guillerme) et trois sont gardés en otages en raison de leur ex-affiliation au Parti communiste : Julien Faradon, Henri Poillot et André Renard (futurs “45000”) ; Eugène Bonnardin (autre futur “45000”), arrêté avec les autres puis libéré le 18 janvier, est de nouveau incarcéré dès le lendemain.

Le 6 février probablement, André Renard est interné avec ses camarades au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Le camp vu depuis le mirador central. Les “politiques français” étaient dans le secteur constitué par la ligne de bâtiments de gauche (“camp communiste”) Photo Hutin, Compiègne, carte postale. Droits réservés.

Le camp vu depuis le mirador central.
Les “politiques français” étaient dans le secteur constitué par la ligne de bâtiments de gauche (“camp communiste”)
Photo Hutin, Compiègne, carte postale. Droits réservés.

Le 13 avril, Angèle Renard, privée de ressources financières depuis l’arrestation de son mari, écrit au Préfet de la Côte d’Or pour demander une allocation, ainsi que la libération de son époux. Le 18 avril, le Préfet demande une enquête auprès du commissaire principal chef des RG. Le 5 mai, Angèle Renard écrit à nouveau au Préfet pour solliciter cette libération. Le 11 mai, celui-ci lui répond qu’il n’est pas possible actuellement d’intervenir en faveur de son mari, mais qu’il a consulté le Ministre de l’Intérieur pour l’attribution d’une allocation spéciale aux familles des internés. Dans son rapport du 30 mai, l’inspecteur des RG donnera un avis favorable à l’attribution d’un secours et le 26 juin, le Préfet intervient auprès du Secours National.

Entre fin avril et fin juin 1942, André Renard est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 30 juin, Angèle Renard renouvelle ses demandes de secours et de libération de son mari auprès du Préfet. Sa belle-famille est très éprouvée, car deux autres fils (sur six enfants) sont déjà prisonniers de guerre en Allemagne.

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Les 14 déportés de Côte d’Or se regroupent dans le même wagon. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, André Renard est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46045 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage actuellement connu ne permet de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté  André Renard.Le même jour, le Préfet de Région répond à Angèle Renard qu’il n’est pas possible d’envisager une intervention en faveur de son mari, mais qu’il a signalé sa situation au délégué du Secours National.

André, Julien, Renard meurt à Auschwitz le 18 août 1942, selon le registre d’appel quotidien (Stärkebuch) et l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Le 19 août, Fernand (de) Brinon [2], Ambassadeur de France, Secrétaire d’État auprès du chef du gouvernement, délégué général du gouvernement français dans les territoires occupés, s’adresse au Préfet de Côte-d’Or pour savoir s’il juge bon d’intervenir en faveur de Monsieur Renard. Le 28 août le Préfet répond qu’en fonction des renseignements recueillis, il ne lui a pas été possible d’intervenir.

Le 22 octobre 1942, dans un courrier à caractère urgent, le Préfet de la Côte-d’Or demande au Commissaire central de Dijon que celui-ci lui fasse connaître si l’intéressé a été libéré et, dans la négative, de lui préciser quelles sont les personnes à charge, leur situation matérielle et son avis sur l’opportunité de leur attribuer une aide financière.

André, Julien Renard est homologué comme Déporté Résistant ; sa carte (n° 1-016-02234) est délivrée en janvier 1953 à Angèle Renard.

La mention « Mort pour la France » est apposée sur son acte de naissance.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 14-12-1997).

Un nommé Lucien Renard est fusillé le 28 octobre 1941, à 28 ans : s’agit-il d’un parent ? (rue Jean-Moulin, rond-point du 8 mai 1945 : « Ici 129 patriotes ont été fusillés 1940-1945 »). L’enquête des RG ne précise pas qu’un membre de sa famille aurait été fusillé.

Notes :

[1] « Les Soldatenheim étaient des maisons exclusivement affectées aux Allemands : les plus grands hôtels, restaurants étaient réservés à cet effet. (…) Dans la nuit du 10 au 11 janvier 1942, Lucien Dupont (de Chenove), âgé de dix-neuf ans, Armand Tosin, âgé de vingt-et-un ans, et leurs camarades attaquent à la bombe la Soldatenheim, place du Théâtre à Dijon. Lucien Dupont est en liaison avec un groupe qu’il a constitué à l’usine Lipton avec Pierre Dubost et Serge Guillerme ; ce sont ces derniers qui ont fabriqué la bombe à l’usine même. » Albert Ouzoulias,Les bataillons de la jeunesse, les jeunes dans la résistance, Editions sociales, Paris 1972, réédition juillet 1990, page 220.

«  Le 31 janvier 1942, le préfet de l’Aube au préfet délégué

Ce jour à 4 heures du matin, 231 perquisitions ont été effectuées dans les hôtels et garnis de Troyes par les services allemands de la G.F.P. qui avaient requis l’assistance de 16 gardiens de la Paix de la police municipale troyenne. Ces opérations étaient faites en vue de retrouver un nommé Dupont qui serait l’auteur du dernier attentat commis au foyer du soldat à Dijon. (…) » APPP, carton 1928, chemises Arrestations, infractions au décret du 29-9-1939

Arrêté le 15 octobre 1942 à Paris, ou dans sa banlieue, Lucien Dupont est fusillé au Mont-Valérien le 26 février 1943.

« Le 10 janvier 1942, un attentat au moyen d’engins explosifs a été commis contre le foyer du soldat allemand à Dijon. Le 27 janvier, à Montceau-les-Mines, un soldat allemand a été tué d’un coup de feu par des éléments communistes. Le 29 janvier, à Montchanin-les-Mines, un douanier allemand a été grièvement blessé à coups de revolver, par des criminels appartenant aux mêmes milieux. En représailles de ces lâches attentats, l’exécution d’un certain nombre de communistes et juifs, considérés comme solidaires des coupables a été ordonnée. Der Chef der Mil. Verw Nordostfrankreich ».

Le 7 mars, cinq jeunes gens sont fusillés au champ de tir de Montmuzard : René Romenteau, Pierre Vieillard, René Laforge, Jean-Jacques Schellnenberger, dit Jean Coiffier, tous élèves maîtres à l’école Normale d’instituteurs de Dijon, promotion 1939-42, et Robert Creux, jeune ébéniste dijonnais, communiste, qui remplace Pierre, Jouanaud, jeune instituteur, celui ci ayant bénéficié d’un non lieu trois jours avant l’exécution.

[2] (De) Brinon : ancien journaliste et “ultra” de la collaboration, Fernand (de) Brinon était Délégué général du gouvernement de Vichy auprès des autorités militaires allemandes d’occupation. Quand des requêtes étaient formulées par les familles des détenus auprès de l’administration française, la Délégation générale les transmettait à la Commission d’armistice (bipartite), après enquête de la police ou de la gendarmerie pour s’assurer des conditions d’arrestation et de l’honorabilité du détenu. Une lettre était ensuite adressée aux familles sous couvert de l’organisme qui en avait fait la demande : elle leur annonçait que l’intervention avait eu lieu et leur faisait part de la réponse fournie par les autorités allemandes.

Ainsi, un très grand nombre de fiches de la Délégation générale portent le nom de “45000” ; surtout après le départ du convoi, le 6 juillet 1942, et l’absence de nouvelles résultant de leur statut “NN”.

La plupart de ces fiches se trouvent dans les dossiers d’état civil des déportés conservés au BAVCC (anciennement archives du secrétariat d’État aux Anciens Combattants).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 363 et 418.
- Archives départementales de Côte-d’Or, site internet : recensement de Dijon-ouest 2, 1936 (p. 178) ; fonds : cotes 6J61 à 62 (fiches individuelles des déportés de Côte-d’Or, don de Pierre Gounand, historien), cote 1630W, article 168 (attentats) et article 244.
- Jean-Michel Picard, mise en ligne du livre de son père Henri Picard, Ceux de la Résistance, Bourgogne, Nivernais, Morvan, éditions Chassaing, Nevers 1947, chapitre “Je regarde la mort en face”,http://maquismorvan.blogspirit.com/.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1002 (22064/1942).
- Serge Recorbet, site internet Mémorial GenWeb, 2003.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 14-01-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Rémy RÉMY – 46044

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Rémy RÉMY naît le 12 septembre 1897 à Lens (Pas-de-Calais), fils de Victor Rémy et de Joséphine Lenteben.

Pendant un temps, Rémy Rémy est mineur et habite le Mas-d’Agenais (Lot-et-Garonne), sur la Garonne au Sud-Est de Marmande.

De la classe 1917, il est définitivement exempté de service militaire pour perte du gros orteil droit, « martellement des deux orteils suivants » et atrophie du pied. On peut supposer un accident du travail (à vérifier…).

Il obtient le permis poids-lourds et le permis de transport en commun.

Probablement chauffeur de taxi, il est membre de la Chambre syndicale des cochers chauffeurs du département de la Seine. Au moment de son arrestation, il est déclaré comme terrassier.

Il est présumé communiste.

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 44 ou au 64, avenue de Châtillon à Paris 14e, devenue avenue Jean-Moulin.

Sous l’occupation, il distribue des tracts anti-allemands et sert d’agent de liaison (selon le BAVCC).

Le 22 juillet 1941, il est arrêté et interné administrativement comme « détenu communiste » à la caserne désaffectée des Tourelles, boulevard Mortier à Paris 20e, “centre surveillé” dépendant de la préfecture de police de Paris.

Le 5 mai 1942, Rémy Rémy fait partie des 24 internés des Tourelles, pour la plupart anciens Brigadistes, que vient chercher une escorte de Feldgendarmes afin de les conduire à la gare de l’Est prendre un train à destination du camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Rémy Rémy est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46044 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau -, une moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I). Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Rémy Rémy.

Il meurt à Auschwitz le 17 août 1942, d’après le registre d’appel et le registre des décès établis par l’administration SS du camp.

Il est homologué comme “Déporté politique”.

Une plaque apposée à son domicile honore sa mémoire (« Aux Résistants morts pour la France »).

Son nom est inscrit sur le monument en forme de tombe érigé dans le cimetière communal de Levallois-Perret par la CGT « en hommage à ses camarades chauffeurs de taxis parisiens tombés dans les luttes pour l’émancipation des travailleurs, pour la liberté, pour la démocratie, pour la France, pour la République » (situé en vis-à-vis de la tombe de la communarde Louise Michel).

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Cimetière de Levallois-Perret.
Monument des chauffeurs de taxis parisiens CGT.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (14-12-1997).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 372 et 418.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier central) – M. Cottard, Revue d’Histoire du 14e, n° 29 de février 1989, p. 71.
- Archives départementales du Pas-de-Calais, site internet, archives en ligne, registre matricule du recrutement militaire pour l’année 1917, bureau de Béthune, numéros 3501-4000 (cote 1 R 8333), matricule 4364 (vue 669/928).
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “occupation allemande” : BA ? (…).
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; registre d’appel avec la liste des détenus décédés (« Verstorbene Häftlinge).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1002 (21327/1942).
- Site Mémorial GenWeb, 92-Levallois-Perret, relevé d’Émilie Pessy et de J.C., élèves de 3e5 (04-2003).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 1-04-2014)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

 

Émile REINHARD – (46043 ?)

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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Émile, Pierre, Reinhard naît le 7 janvier 1890 à Reims (Marne), au domicile de ses parents, Jean Reinhard, 31 ans, cordonnier, et Delphine Mayer, son épouse, 24 ans, gantière, demeurant au 69, rue des Trois-Piliers.

Puis la famille s’installe à Paris, au 58 rue Pixéricourt, dans le 20e arrondissement. Émile commence à travailler comme employé de commerce.

Le 9 octobre 1911, il est appelé à accomplir son service militaire et rejoint le 37e régiment d’infanterie comme soldat de 2e classe. Le 15 avril 1913, il passe au 167e R.I. Le 8 novembre suivant, il passe dans la réserve, titulaire d’un certificat de bonne conduite, et se retire chez ses parents au 145, rue de Ménilmontant, à Paris 20e.

Le 3 août 1914, il est rappelé à l’activité militaire par le décret de mobilisation générale et “rejoint son corps” le jour même. Le 20 juillet (ou septembre) 1914, à Maurey ou Mamey (Meuthe-et-Moselle), il est blessé au cuir chevelu. En 1915, il est intoxiqué par les gaz (dans des circonstances restant à préciser…). Le 1er juin 1918, à la ferme Grenouillère Merthiers ou Mortiers ou Monthiers (Aisne), il est blessé par balle à l’avant-bras gauche (plaie perforante). Le 18 décembre 1919, la 2e commission de réforme de la Seine le proposera pour une pension temporaire de deux ans (invalidité de 25 %) : « insuffisance respiratoire avec prédominance au sommet droit sans expectoration bacillifère » (pas de tuberculose).

On ne sait pas vraiment à quelle date il est dégagé de ses obligations militaires… Début 1919, il habite de nouveau chez ses parents, rue de Ménilmontant.

Le 5 février 1919 à la mairie du 20e, Émile Reinhard déclare reconnaître pour sa fille Yvonne Gilloppé, née le 20 juillet 1912 à Paris 13e. Le 22 février suivant, il se marie avec la mère de l’enfant, Georgette Gilloppé, née le 2 avril 1893 à Fontaine-Fourches (Seine-et-Marne), domestique, domiciliée au 42, rue de Charonne ; son frère Léon Reinhard est témoin au mariage.

Au printemps 1926, la petite famille habite au 177 rue Pelleport ; Yvonne, 14 ans, est apprentie modiste. Au printemps 1931, la jeune fille, 19 ans, a quitté leur domicile.

En octobre 1932 et jusqu’au moment de son arrestation, le couple est domicilié au 3, square de la Gascogne, vers la Porte de Montreuil (20e), dans un groupe d’immeubles récents. Au printemps 1936, Émile Reinhard est employé aux Magasins Modernes (Paris 8e).

Militant communiste, il a des responsabilités au 2e “rayon” de la Région parisienne en 1932. Il est aussi « Président fondateur de l’Amicale des Locataires » (de l’ensemble d’immeubles où il habite ? HBM ?).

Le 2 avril 1938, à Chatou (Seine-et-Oise), Yvonne Reinhard se marie avec Théophile Weiss.Sous l’occupation, la police française considère Émile Reinhard comme un « communiste notoire, propagandiste acharné ».

Le 26 octobre 1940, le préfet de police signe l’arrêté ordonnant son internement administratif ; 38 personnes étant visées ce jour-là dans le département de la Seine (dont 12 futurs “45000”). Le jour même, Émile Reinhard est interpellé et conduit au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé au début du mois dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt.

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Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930. Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche. Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930.
Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche.
Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

En février 1941, alors que les autorités françaises envisagent le transfert de 400 détenus d’Aincourt vers « un camp stationné en Afrique du Nord », le docteur du centre dresse trois listes d’internés inaptes. Émile Reinhard figure sur celle des internés « non susceptibles absolus » en raison de son asthme et de son état général.

Le 6 mars 1941, sur le formulaire de « Révision trimestrielle du dossier » de Émile Reinhard, à la rubrique « Avis sur l’éventualité d’une mesure de libération », le commissaire spécial, directeur du camp, ne formule pas son avis, mais constate que cet interné est un « communiste certain » incapable d’activité, « en raison de son état physique précaire (sclérose pulmonaire, bronchite chronique), ne peut se livrer à aucune propagande », ajoutant « en traitement à l’infirmerie depuis son arrivée ».

Le 5 mai 1942, après dix-huit mois d’internement à Aincourt, Émile Reinhard fait partie d’un groupe de détenus transférés au “centre de séjour surveillé” de Voves (Eure-et-Loir). Enregistré sous le matricule n° 466, il ne reste que cinq jours dans ce camp.

Le 10 mai, il fait partie des 81 internés remis aux “autorités d’occupation” à la demande de celles-ci et transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

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Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ; à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8. Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ;
à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8.
Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin, malgré son inaptitude au travail pour cause de maladie, Émile Reinhard est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Émile Reinhard est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46043, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

[/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Émile Reinhard.

Il meurt à Auschwitz le 22 septembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Une plaque commémorative a été apposée à sa dernière adresse, square de la Gascogne.

Sources :

- Nathalie Viet-Depaule, notice in Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, t.40, p. 28, citant : Arch. Préfecture de police 393 – Arch. Secrétariat d’État des Anciens combattants.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 381 et 419.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, fichier central, Caen.
- Archives départementales de la Marne (AD 51), site internet, archives en ligne : registre des naissances de Reims, année 1890 du 1er janvier au 13 juillet (2 E 534/308), acte n° 43 (vue 13/409).
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “Occupation allemande”, liste des internés communistes, 1939-1941 (BA 2397).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt ; cotes 1w74 (relevé trimestriel), 1w77, 1w80, 1w149 (notice individuelle).
- Comité du souvenir du camp de Voves, liste établie à partir des registres du camp conservés aux Archives départementales d’Eure-et-Loir.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 995 (32325/1942).
- Site Les plaques commémoratives, sources de mémoire (aujourd’hui désactivé – nov. 2013).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 23-09-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Félix REILLON – (46042 ?)

JPEG - 77 ko
IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Félix, François, Jean-Baptiste, Reillon naît le 29 janvier 1890 à La Héronnière, commune de Laigné [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Mayenne – 53), fils de Félix, Ernest, Reillon, 26 ans, et de Marie Hamon, 23 ans, son épouse, agriculteurs. Félix a une sœur aînée, Marie, née en 1889.

Son père décède prématurément à son domicile le 22 octobre 1894, âgé de 32 ans ; décès enregistré à l’état civil sur déclaration de son beau-père, Jean-Baptiste Hamon, 57 ans, cultivateur, et de son frère, Pierre Reillon, quarante ans, aubergiste débitant. La mère de Félix a 28 ans, et lui, 4 ans et demi. En 1901, La Héronnière a changé d’exploitant.

Entre 1901 et 1906, Félix vit chez une tante maternelle, épouse de Jean Poirier, propriétaire cultivateur au lieu dit Les Boquelleries (section de Chassebourg) à Laigné.

Le 11 octobre 1910 à Bouchamps-lès-Craon (53), sa mère se remarie avec Prosper Bignon, veuf de 60 ans, journalier agricole chez Aubert (fermier à La Corbinière ?) ; ils habitent au bourg, route de Chérancé. Au printemps 1911, Félix Reillon ne vit pas avec eux. Il commence à travailler comme boulanger.

Le 1er octobre 1911, il est appelé à accomplir son service militaire à la 22e section de commis et ouvriers d’administration. Le 26 septembre 1912, il est nommé caporal. Le 8 novembre 1913, il passe dans la réserve de l’armée active, et se retire à Bouchamps, auprès de sa mère, titulaire d’un certificat de bonne conduite. En janvier 1914, il habite à Vert-le-Petit (Seine-et-Oise / Essonne – 91). En mai suivant, il habite à Montainville (Eure-et-Loir). En juillet, il habite à Chamarande (91).

Rappelé à l’activité par le décret de mobilisation générale du 1er août 1914, il rejoint la 4e section de commis trois jours plus tard. Le 3 juin 1916, il est cassé de son grade de caporal, et passé au 151e régiment d’infanterie le 5 juin. Le 13 octobre suivant, il passe au 408e R.I.

Après la seconde bataille de Verdun (20 août-18 septembre) ayant permis de dégager le secteur, le 408e R.I. occupe des tranchées au nord de Douaumont. Le 12 novembre 1917, Félix Reillon est blessé (ce jour-là, le régiment compte 3 tués et 10 blessés). Il est cité à l’ordre de la brigade : « Blessé à la main (…), a fait preuve d’endurance et de courage en restant à son poste de combat ; n’est allé se faire panser que le lendemain et a repris sa place aussitôt après. » Le 22 juin 1918, il est de nouveau nommé caporal. Le 9 août 1919, il est envoyé en congé illimité de démobilisation et se retire encore à Bouchamps (53). Début juillet 1921, il habite à Saint-Chéron (91).

En mars 1923, il s’installe à Reims (Marne – 51), habitant d’abord rue Flin des Oliviers (Tinqueux).

Le 30 avril 1923, à Reims, Félix Reillon épouse Marie Hubeau, née le 16 mai 1891 à Roubaix (Nord), cuisinière. Début janvier 1924, ils habitent au 20 impasse des Jardins. Ils ont quatre enfants : Jeanne, née le 13 mars 1926, Jean, né le 18 juillet 1928 mais décédé le 9 septembre suivant, Jacques, né le 26 janvier 1930, et Marcel, né le 20 août 1932. Ils habitent alors au 8 rue de Brest, cité Maison Blanche.

Le 10 juillet 1936, Félix Reillon déclare habiter au châlet Saint-Eshedy (?), rue Nicole, à Berck (Pas-de-Calais) ; une location de vacances ?

Début septembre 1939, il habite au 7 rue Émile-Barrau à Reims.

Le 1er juin 1940, il déclare habiter au bourg du Coudray (53) ; réfugié ?

Au moment de l’arrestation du chef de famille, celle-ci est domiciliée au 7, rue de la Garenne à Reims.

Félix Reillon est ouvrier-boulanger.

Bien qu’il n’appartienne à aucun parti politique selon la police française, celle-ci le considère « comme ayant des sentiments communistes ».

Le 25 février 1942, Félix Reillon assiste à une manifestation organisée devant l’Hôtel de Ville et la sous-préfecture de Reims pour protester contre la vie chère et l’insuffisance du ravitaillement.

Le lendemain, 26 février, il est arrêté à son domicile par des Feldgendarmes accompagnés d’un interprète qui l’emmènent à leur poste, rue du général-Sarrail, puis à la Kommandantur. Il est pris comme otage en représailles après des attentats contre des soldats allemands à Chalon-sur-Saône et à Montceau-les-Mines, en même temps que dix-sept autres Marnais (membres de la communauté juive, militants syndicaux et politiques…). Appréhendé en même temps que Jules Huon, Marcel Gauthier, René Manceau, Maurice Roussel, Henri Roy et Roland Soyeux – tous suspectés d’activité communiste clandestine et futurs compagnons de déportation -, Félix Reillon est conduit à la Maison d’arrêt de Reims, boulevard Robespierre.

Début mars, il est interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager), où il est enregistré sous le matricule n° 3674. Guy Lecrux, de Reims, déjà interné, le voit arriver en même temps qu’André Crépin, Jules Huon, René Manceau et Roland Soyeux.

Entre fin avril et fin juin 1942, Félix Reillon est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Félix Reillon est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46042, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Portail du secteur B-Ib du sous-camp de Birkenau par lequel sont passés tous les “45000”. © Mémoire Vive 2015.

Portail du secteur B-Ib du sous-camp de Birkenau par lequel sont passés tous les “45000”. © Mémoire Vive 2015.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Félix Reillon est dans la moitié des déportés du convoi sélectionnés pour rester dans ce sous-camp, alors que les autres sont ramenés à Auschwitz-I, selon un témoignage d’André Montagne.

Il meurt à Auschwitz le 19 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) ; six semaines après l’arrivée du convoi.

Le 20 mars 1943, son épouse effectue une demande d’information qui est traitée par les services de Fernand de Brinon (un lien est fait avec le « Dossier Killian »… ?).

Dès le 24 juin 1945, Guy Lecrux, de Reims, rescapé du convoi, signe une déclaration attestant de la disparition de Félix Reillon à Auschwitz avant le 3 mars 1943. Le 14 mai 1946, André Montagne, de Caen, autre rescapé, signe un certificat attestant également de son décès.

Le 18 février 1947, interrogé par la direction de l’état civil et des recherches du ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre sur la question du lieu de décès, Guy Lecrux répond : « …il n’existe aucune discordance entre la déclaration de Monsieur Montagne et la mienne. En effet, si Monsieur Reillon Félix est décédé sur le territoire du camp de Birkenau, ce camp faisait partie, comme annexe, du camp d’Auschwitz. Administrativement, Monsieur Reillon, était inscrit au camp d’Auschwitz et dépendait de lui, ce qui m’a fait écrire qu’il était décédé à Auschwitz. Vous pouvez donc indifféremment le considérer décédé à Birkenau ou à Auschwitz, ces deux camps, avec plusieurs autres (Gleiwitz 1 et 2, Kattowitz, Buna), ne formant qu’une seule administration pénitentiaire qui était au camp d’Auschwitz ».

Le 25 avril, un officier d’état civil du ministère dresse un acte de décès au nom de Félix Reillon enregistrant comme date « antérieurement au 3 mars 1943 » sur la base des éléments d’information figurant au dossier.

Le 31 mai suivant, suite à une demande officielle déposée par Madame Reillon, le ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre décide que la mention « mort pour la France » soit apposée en marge de l’acte de décès de Félix Reillon.

Une plaque commémorative a été apposée sur le mur de l’immeuble du 7, rue de la Garenne où habitait Félix Reillon. Son nom est également inscrit sur une plaque commémorative apposée « À la mémoire de nos camarades tombés dans la lutte pour la liberté, victimes de la barbarie nazie » (ce dernier adjectif a remplacé “barbarie allemande”), dans la salle de réunion de la Bourse du Travail de Reims, devenue Maison régionale des syndicats, 13 boulevard de la Paix, et sur le monument aux martyrs de la résistance et de la déportation, situé sur les Hautes Promenades à Reims.

Marie Reillon, sa veuve, décède à Reims le 5 septembre 1950.

Le 26 février 1962, Marcel Reillon, son fils, cultivateur, signe un formulaire de demande d’attribution du titre de déporté politique au nom de son père. Contacté à la suite de cette démarche, Gabriel Lejard, de Dijon, rescapé du convoi, confirme le décès de Félix Reillon à Auschwitz « peu après son arrivée ». Guy Lecrux, interrogé à son tour par la brigade de gendarmerie de Précy-sous-Thil, atteste de l’appartenance de Félix Reillon au Front national.

Le 12 octobre 1962, la demande est acceptée par le ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre et le chef du bureau des fichiers et de l’état-civil déporté envoie une carte de déporté politique (n° 1157 1061).

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. 14-12-1997).

Notes :

[1] Depuis le 1er janvier 2018, Laigné – associée à la commune voisine d’Ampoigné – constitue une commune déléguée au sein de la commune nouvelle de Prée-d’Anjou, disposant d’un maire délégué.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 366 et 418.
- Archives départementale de Mayenne, site internet, archives en ligne : registre de recensement 1891 de Laigné (p.19).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 994 (22423/1942).
- Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen : dossier de Félix Reillon (21 p 529 994), recherches de Ginette Petiot (message 05-2013).
- Site Mémorial GenWeb, relevés d’Alain Girod (11-2002 ; photo) et de Bernard Butet (11-2009 ; photo).

MÉMOIRE VIVE

( dernière mise à jour, le 23-09-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Jean REICH – 46041

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942. Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne. Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Jean, Pierre, Reich naît le 1er mai 1911 à Arcueil [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Val-de-Marne), chez ses parents, Jean-Pierre Reich, 42 ans, vernisseur, et Madeleine Oswald, 33 ans, papetière, domiciliés au 34, avenue Carnot.

En 1931, il habite chez ses parents, au 41 rue Madame Curie à Bagneux, et travaille comme chaudronnier.

Le 15 avril 1932, il est incorporé au 26e régiment d’infanterie, arrivant au corps une semaine plus tard. Le 10 avril 1933, il est renvoyé dans ses foyers titulaire d’un certificat de bonne conduite.

Le 18 janvier 1936, à Paris 14e, Jean Reich se marie avec à Annette Marle, née le 19 juillet 1919 à Paris 5e ; ils n’ont pas d’enfant.

En novembre 1936, il est domicilié au 11, rue Victor-Carmignac à Arcueil. Au moment de son arrestation, il habite au 25, rue du Midi, toujours à Arcueil, une petite voie butant sur l’aqueduc de la Vanne.

À une date restant à préciser, Jean Reich entre comme régleur (AM) aux établissements Renault de Boulogne-Billancourt.Il adhère au Parti communiste en 1936, appartenant à la cellule de son entreprise. Il est très actif lors du mouvement de grève de novembre 1938, ce qui entraîne son licenciement.
Après avoir effectué une période d’activité militaire comme réserviste au 26e R.I. du 15 juillet au 4 août 1939, il est rappelé sous les drapeaux à la suite de l’ordre de mobilisation générale de la fin août 1939, puis affecté spécial au titre des établissements Bamarec, fabriquant des composants pour l’automobile et l’armement à Fougères (Ille-et-Vilaine) ; il loge provisoirement chez l’habitant au 76, rue Piatené [?].
Après avoir été démobilisé le 8 novembre 1940, il trouve un emploi de cimentier-terrassier à la maison Bentz ou Dantz, size au 56, boulevard de Picpus (Paris 12e) ; il prend des trains partant de la Gare de Lyon, qu’il rejoint à vélo depuis chez lui.
Le 10 octobre 1941, les services de la première section des renseignements généraux de la préfecture de police ouvrent une information concernant un individu signalé et décrit mais non identifié, soupçonné d’activité communiste clandestine. Le 20 octobre suivant, vers 18 h 20, des inspecteurs repèrent cet individu sortant du lycée Charlemagne, 101 rue Saint-Antoine (Paris 4e) et commencent à le filer. Après consultation du registre de l’hôtel François 1er de la rue d’Ormesson (Paris 4e) où ils l’ont vu rentrer pour la nuit, ils l’identifient comme étant Pierre Neve, 30 ans, répétiteur (professeur-adjoint) au lycée [2]. Dès le lendemain et les jours suivants, les filatures s’enchaînent, notamment à partir de sa sortie à heure régulière du lycée, amenant le repérage de tous ses contacts, les inspecteurs passant de l’un à l’autre jusqu’à repérer leurs domiciles respectifs. Les policiers comptabiliseront vingt-et-une rencontres de Pierre Neve entre le 20 octobre et le 4 novembre.
Le 29 octobre, à 19 heures, à une sortie du métro sur la place de la Nation, les policiers assistent à un rendez-vous entre Neve et André Saunier, ajusteur outilleur de 36 ans. Quand les deux hommes se séparent, ils suivent ce dernier qui se rend au café-tabac situé à l’angle du boulevard Diderot et de la rue de la Rapée, où il retrouve Charles Roth, ébéniste de 36 ans, avec lequel il consomme et « cause » au comptoir. Vers 20 h 10, les deux hommes sortent de l’établissement en même temps qu’un troisième, lequel part aussitôt dans une autre direction. Celui-ci sera identifié ultérieurement par le numéro de la plaque d’immatriculation de sa bicyclette (37081 RJI), relevé par un inspecteur : il s’agit de Jean Reich, demeurent à Arcueil. D’autres surveillances et filatures se poursuivent en cascade jusqu’au 6 novembre, en impliquant d’autres personnes…
Le 8 novembre, la direction de la 1ère section des RG lance une opération d’ensemble (“coup de filet”) qui aboutira à l’arrestation de 34 personnes amenées dans les locaux des RG, à la préfecture de police, à disposition du commissaire pour leur interrogatoire.
Le lendemain matin, dimanche 9 novembre, Jean Reich est arrêté à son domicile par deux inspecteurs. La perquisition opérée alors n’amène la découverte d’aucun « document suspect ».
André Saunier est le premier interrogé sur sa présence dans le café-tabac : « …en même temps que vous retrouviez Roth, vous avez également pris une consommation avec un cycliste qui a été identifié comme étant le nommé Reich, 68, Grande Rue à Montrouge [?]. Expliquez-vous. » Saunier répond : « Je n’avais pas personnellement rendez-vous avec Reich. Je ne le connais aucunement. J’ai consommé à ses côtés car il accompagnait mon ami Roth. »Interrogé à son tour sur sa présence dans le café-tabac, Charles Roth déclare : « Il est possible que j’ai vu mon camarade Saunier à cet endroit […] De toutes façons, je n’ai pas vu d’autre personne avec lui. » Les policiers le questionnent davantage : « Des déclarations du nommé Saunier dont nous vous donnons lecture il résulte [qu’alors] qu’il vous a retrouvé au café-tabac […] vous étiez accompagné d’un individu identifié comme étant le nommé Reich… » Roth répond : « Je ne nie pas […] avoir adressé ce jour-là et dans le débit à une personne en compagnie de laquelle Saunier m’a trouvé. Je ne connais nullement cette personne et ignorer à plus forte raison qu’il s’agit d’un nommé Reich. »Interrogé le lendemain, Jean Reich déclare n’avoir aucune activité politique. Concernant la circonstance au cours de laquelle il a été repéré, il explique : « Il est exact que je suis sorti de ce débit à l’heure et au jour que vous indiquez. Je vous fait remarquer, d’ailleurs, que je me rends à ce café tous les soirs et toujours à l’heure indiquée. En effet, le train qui me ramène de mon travail arrive à la gare de Lyon à 19 h 30. Je suis toujours accompagné d’un camarade de travail, le nommé Robert S. Je vous affirme que je ne connais nullement les nommés Saulnier et Roth. Si je suis sorti ce jour-là avec eux du débit de boisson indiqué, ce qui est possible, c’est une simple coïncidence et je suis certain de ne pas leur avoir adressé la parole. D’ailleurs, dans ce café, je ne me souviens pas avoir été accompagné par d’autres personnes que par mon camarade S. Je ne puis rien vous dire de plus. » Jean Reich est conduit au dépôt de la préfecture (Conciergerie, sous-sol du Palais de Justice, île de la Cité).Le 12 novembre, concluant l’information conduite par son service, le commissaire explique que le groupe du parti communiste clandestin du secteur Est de Paris qui a été démantelé était dirigé par un “triangle” composé de Pierre Neve, responsable de la propagande, Charles Roth, responsable politique, et André Saunier, responsable aux cadres (?). À moins que la troisième tête du triangle soit Marcel Daveau, mécanicien-ajusteur de 34 ans, responsable aux masses (?). Dans ce rapport de conclusion, le commissaire explicite sa décision concernant Jean Reich : « Attendu que son activité passée le représente comme un militant actif du parti communiste légal, qu‘il a notamment été l’un des fauteurs de grève de la grève politique du 30 novembre 1938, attendu que s’il reconnaît la matérialité du rendez-vous avec Saunier, il l’attribue uniquement au hasard, que ce système de défense ne pourrait que confirmer son appartenance à l’organisation illégale, disons qu’il est inculpé d’infraction au décret du 26-09-1939 ».Jean Reich est écroué à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e). Le 20 mars 1942, il fait l’objet d’un ordre de mise en liberté provisoire par l’institution judiciaire, probablement parce que les charges portées contre lui sont insuffisantes. Mais, considéré comme un « propagandiste notoire des doctrines moscoutaires, susceptible de prendre la fuite », il est interné administrativement dès le lendemain par arrêté du préfet de police selon une procédure d’urgence (circulaire PN IV n° 142 du 11-02-1942 du ministère de l’intérieur) et en application du décret du 18 novembre 1939. Il est alors ramené au Dépôt.

Le 16 avril, Jean Reich est transféré au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Voves (Eure-et-Loir) avec plusieurs dizaines de détenus, dont une quarantaine qui seront plus tard déportés avec lui. Il est enregistré sous le matricule n° 76.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943. Musée de la Résistance nationale (MRN). Champigny-sur-Marne.

Entrée du camp de Voves. Date inconnue, probablement après mars 1943.
Musée de la Résistance nationale (MRN). Champigny-sur-Marne.

Le 10 mai, il fait partie des 81 détenus remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).  ; Jean Reich y est enregistré sous le matricule n° 5755. Le 16 juin, l’administration militaire du camp établit un certificat de présence à son nom, probablement envoyé à son épouse.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Jean Reich est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne – sur la commune de Margny – et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Jean Reich est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46041 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photo), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » (le génocide des Juifs européens), ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20.
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.
Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau –  Jean Reich est dans la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers utilisant certains ouvriers qualifiés.
Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».  « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ». « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Pendant un temps, il est assigné au Block 4.

Malade, il est admis au Revier [3]. Louis Eudier, du Havre, partage la même couchette que lui. Affamé, Jean Reich énonce des menus extraordinaires. Pesant 40 kilos pour une taille d’1,85 m, il est sélectionné pour la chambre à gaz [4] par un major SS. L’infirmier vient lui inscrire son numéro matricule sur la poitrine avec un crayon indélébile [5]. Très lucide, Jean Reich dit au compagnon qui partage sa dernière nuit : « Je suis comme toi : j’ai joué la vie et j’ai perdu. »« Mon camarade, je te souhaite d’être sur la ligne d’arrivée de la Libération, pour expliquer toutes les tortures qu’ils nous ont faites. »

Jean Reich meurt à Auschwitz le 14 février 1943, selon plusieurs registres du camp [6].

Le 29 décembre 1942, son épouse avait écrit au Fronstalag 122 de Compiègne. Le 7 janvier 1943, l’administration militaire du camp lui répondait que son mari avait été transporté vers un camp de travail, mais que l’adresse de celui-ci ne pouvait lui être communiqué sur ordre de la police de sûreté du Reich (Gestapo).

Le 16 septembre 1945, sa sœur, alors épouse Igel domiciliée à Olivet (Loiret), écrit au ministère des anciens combattants et victimes de guerre pour demander des renseignements sur son frère, arrêté « comme communiste », « déporté politique », présumé en Haute-Silésie, sans nouvelle de lui depuis le 26 juin 1942 : « J’avais jusqu’à présent l’espoir de le voir revenir parmi nous parmi tous ces pauvres rescapés. Mais, hélas, les rapatriements s’achèvent maintenant. C’est pourquoi je m’adresse à vous si vous pouvez me fournir quelques détails sur l’exil de mon pauvre frère. » Le 7 octobre, dans un nouveau courrier, elle transmet un court signalement et une photographie (absente du dossier).

Le 23 mars 1946, Annette Reich – encore considérée comme épouse – remplit une fiche de renseignements du ministère des ACVG. Deux jours plus tard, deux voisins de la rue du Midi à Arcueil complètent un formulaire par lequel ils se portent garant que Jean Reich a été arrêté comme communiste par la police française le 9 novembre 1941. Le 24 avril, le ministère des ACVG certifie que Jean Reich « n’a pas été rapatrié à ce jour ». Et, le 11 septembre suivant, le ministère « décide » sa disparition (acte de disparition ne pouvant être transcrit sur les registres d’état-civil). Le 7 juillet 1947, Annette Reich écrit au ministère pour solliciter la délivrance d’un acte de décès. Le 13 août suivant, le chef du bureau de l’état civil-déportés lui répond que ses services « ne sont habilités à dresser les actes de décès des déportés que dans les seuls cas où ils ont des preuves du décès ou de très fortes présomptions de preuves. Or, aucun élément nouveau n’est venu modifier l’état du dossier… ». Il lui indique cependant qu’elle peut adresser une requête au procureur de la République en vue de faire déclarer judiciairement le décès de son mari, du seul fait de la disparition et du non-retour au 1er juillet 1946 (loi du 30 avril 1946). Début 1948, la démarche est engagée. Le 11 juin suivant, le Tribunal de la Seine déclare « constant » le décès de Jean Reich, en fixant pour date celle du dernier courrier qu’il a adressé à ses proches (le 26 juin 1942) [5].

En août 1951, sa veuve est déclarée remariée avec Jean Schmitz.

À Arcueil, le nom de Jean Reich est inscrit sur la stèle des déportés parmi celles dressées en « hommage aux victimes de la seconde guerre mondiale (1939-1945) », place de la République, derrière le Centre Marius Sidobre (ancienne mairie).

Photographies Mémoire Vive.

Photographies Mémoire Vive.

REICH Jean est le quatrième nom en partant du bas de la stèle à gauche.

REICH Jean est le quatrième nom en partant du bas de la stèle à gauche.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 8-03-1997).

Notes :

[1] Arcueil : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Pierre Nève (ou Néve), né le 23 mai 1911 à Denain (Nord), professeur adjoint au lycée Charlemagne, remis aux autorités allemandes le 30 novembre 1941, fusillé comme otage le 13 avril 1942 au Mont-Valérien (source : Jean-Pierre Besse, Odette Hardy-Hémery, Le Maitron en ligne).

[3] Revier, selon Charlotte Delbo : « abréviation de Krakenrevier, quartier des malades dans une enceinte militaire. Nous ne traduisons pas ce mot que les Français prononçaient révir, car ce n’est ni hôpital, ni ambulance, ni infirmerie. C’est un lieu infect où les malades pourrissaient sur trois étages. ». In Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1967, p. 24.
Le terme officiel est pourtant “hôpital” ; en allemand Häftlingskrakenbau (HKB), hôpital des détenus ou Krakenbau (KB). Dans Si c’est un Homme, Primo Lévi utilise l’abréviation KB.

[4] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail”. Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés montent dans des camions qui les conduisent à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.

[5] La scène se passe avant que le tatouage systématique, ordonné le 22 février 1943 par la Kommandantur du camp, ait pu être appliqué à tous les détenus (Allemands et Autrichiens non-juifs en sont exemptés).

[6] L’officialisation de sa date de décès a été corrigée une première fois : J. O. n° 57 du 8 mars 1997, page 3684 : « … 01/07/1942 en Allemagne, et non le 26/06/1942 à Compiègne (Oise) ». Dans les années qui ont suivi la guerre – devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles – les services français d’état civil, par l’intermédiaire du Ministère des Anciens Combattants, ont très souvent fixé des dates fictives. La parution au J.O. rendant ces dates officielles, certaines ont même quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

V Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection Mémoires, 2005, pages 136, 387 et 418.
V Louis Eudier (45523), “Notre combat de classe et de patriotes, 1934-1945”, imprimerie Duboc, Le Havre, sans date (1977 ?), pages 36 et 37.
V Comité du souvenir du camp de Voves, liste établie à partir des archives départementales d’Eure-et-Loir.
V Archives municipales d’Arcueil, recherches de Cécile Lizée.
V Archives de la préfecture de police (Seine /Paris), site du Pré-Saint-Gervais : cartons “Occupation allemande” ; cabinet du préfet, dossier individuel (1 W 617-23148) ; dossier individuel des RG (77 W 124-109598) ; dossiers de la 1ère brigade spéciale, “Affaire Neve, Roth et autres” (GB 56).
V Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 : relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 992 (7673/1943).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 14-04-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de laFédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Marceau REBOURG – (46039 ?)

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IDENTIFICATION INCERTAINE
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Marceau, Louis, Rebourg, naît le 3 juin 1920 à Foug, 10 km à l’ouest de Toul (Meurthe-et-Moselle), fils de Julien, Marceau, Rebourg, 22 ans, et de Louise Guillemin, 19 ans, son épouse.  Après Marceau – qui est l’aîné – naissent André en 1921, Régine et Roxane en 1923, Marguerite en 1924, tou.te.s à Foug.

En 1926, la famille habite rue Gustave Paul, à Foug ; les parents hébergent également le frère du chef de famille, Désiré Rebourg, né en 1888 à Nancy, également mouleur en fonte à la Fonderie de Foug. Le recensement clôt le 1er avril 1936 indique le n° 9 pour la rue Gustave Paul. La famille s’est alors agrandie de Micha, né en 1930. Marceau (15 ans) est alors mouleur à la fonderie, où son frère André (14 ans) est modeleur.

Au moment de son arrestation, Marceau Rebourg est domicilié au 5, rue Lenglet à Foug.

Il n’appartient à aucune organisation, mais son père, Julien Rebourg, était, avant guerre, secrétaire de l’usine métallurgique PAM (fonderie) de Foug, exerçant des responsabilités au sein de la Fédération des Métaux CGT. Le 15 novembre 1938, au congrès national de la CGT réuni à Nantes, il est un des six délégués de Meurthe-et-Moselle, représentant la fédération des Métaux, avec Charles Jacquet et Joseph Schneider.

Militant communiste, Julien Rebourg est déchu de son mandat de conseiller municipal pour ne par avoir renié son engagement après octobre 1939.

Le 16 juin 1940, il est arrêté avec ses deux fils pour propagande communiste.

Julien Rebourg sera condamné à deux ans de prison en août 1941 (?) pour propagande communiste et écroué à la Maison centrale de Clairvaux.

Ses deux fils, André et Marceau, sont internés au camp de Fanlac, installé dans le château du Sablou [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1], canton de Montignac-sur-Vézère (Dordogne), « centre de séjour surveillé pour indésirables français ».

Montignac-sur-Vézère, le château du Sablou, colonie de vacance d’Alfortville après guerre. Carte postale des années 1950. Collection Mémoire Vive.

Montignac-sur-Vézère, le château du Sablou, colonie de vacance d’Alfortville après guerre.
Carte postale des années 1950. Collection Mémoire Vive.

Fin décembre 1940, ils sont parmi les 228 “Sablousards” transférés au camps de Saint-Paul-d’Eyjeaux, près de Limoges (Haute-Vienne).

Le 25 février 1941, le Tribunal correctionnel de Nancy (54) condamne Marceau Rebourg à un mois de prison (peut-être avec son frère).

Le 10 novembre 1941, Marceau Rebourg s’évade du camp de Saint-Paul-d’Eyjeaux et rentre chez lui.

Le 12 février, il est arrêté par les gendarmes de Foug. Le 12 mars, la Cour d’appel de Nancy de Nancy le condamne à un an de prison. Marceau Rebourg est écroué à la prison de Saint-Mihiel (54), où il ferait de la « propagande communiste ».

Le 7 mai 1942, il est interrogé par les autorités allemandes, alors qui serait libérable le 13 mai.

Le 10 juin, il est transféré de la prison de Saint-Mihiel au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Parmi les futurs “45000”, Marceau Rebourg est un des derniers a être conduit dans ce camp.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C. Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.     L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C.
Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Marceau Rebourg est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46039 selon les listes reconstituées (la photo du jeune détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Marceau Rebourg.

On ignore la date de sa mort à Auschwitz [2] ; probablement avant la mi-mars 1943. Il a 22 ans.

Son nom est inscrit – parmi les déportés – sur le Monument aux morts de Foug, situé près de la Poste.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 8-03-1997).

Notes :

[1] Le château du Sablou : il est désaffecté après le transfert des internés de la fin 1940. Après la guerre, devenu propriété de la commune d’Alfortville (Val-de-Marne), il est transformé en centre pour colonies de vacances. Il fonctionne ainsi pendant vingt-cinq ans, jusqu’au début des années quatre-vingt-dix. Aujourd’hui propriété privée, il a vocation de centre d’hébergement et de gîte d’étape pour touristes.

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant de Marceau Rebourg, c’est 15 août 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74, 78, 127 et 128, 367 et 418.
- Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 117.
- Archives Départementales de Meurthe-et-Moselle, Nancy : fiches du centre de séjour surveillé d’Écrouves (ordre 927 W) ; recherches de Daniel Dusselier.
- Jacky Tronel, Le Journal du Périgord, mars 2006, site.
- Site Mémorial GenWeb, relevé de Guy Chaillaud (03-2005).
- Jean-Claude et Yves Magrinelli, Antifascisme et parti communiste en Meurthe-et-Moselle, 1920-1945, Jarville, avril 1985, pages 118 et 119 (à propos de Julien Rebourg).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 28-11-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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