Émile STEVANCE – 46121

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz. 
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Émile, Georges, Stévance naît le 25 février 1905 à Wassigny (Aisne – 02), fils d’Émile Stévance, 35 ans, manouvrier, et de Marie Dujardin, 32 ans, son épouse (tous deux seront décédés lors de son arrestation).

De la classe 1925, Émile Stévance effectue son service militaire au 170e régiment d’Infanterie à Kehl.

Le 2 octobre 1926 à Mormant (Seine-et-Marne – 77), il se marie avec Carmen Gavel. Ils auront cinq enfants.

Il est cantonnier départemental, affecté au service vicinal, sur le chemin départemental n° 215.

Militant communiste, il est secrétaire de la cellule de Mormant, ayant pour adjoint Paul Briquet.

Le 16 février 1940, après que son attention ait « été attirée d’une façon particulière », le préfet de Seine-et-Marne demande au commissaire spécial de Melun de mener une enquête sur les agissements d’Émile Stévance et Paul Briquet, et de lui faire « toutes propositions utiles en ce qui concerne notamment l’opportunité de leur maintien dans la région [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][…] ». Le 20 février, le commissaire lui répond : « Bien queles agissements des intéressés ne tombent pas sous le coup des décrets relatif à la répression des menées anti-nationales, il y aurait lieu […] de leur appliquer une peine disciplinaire. Cette mesure aurait pour effet de diviser les membres de la cellule de Mormant, qui, bien que dissoute, peut encore avoir, à l’occasion, un caractère agissant. »

Le 19 mars, l’ingénieur en chef des Ponts et chaussée écrit au préfet pour lui indiquer des postes vacants permettant de changer de résidence les cantonniers Stévance et Briquet « en raison de leur attitude politique ».

Le 10 avril, le préfet prend un arrêté nommant Émile Stévance cantonnier sur le chemin départemental n° 75 avec résidence à Leudon-en-Brie (77), canton de la Ferté-Gaucher.

Effectivement, au moment de son arrestation, Émile Stévance est domicilié dans cette commune ; son adresse reste à préciser (occupe-t-il un logement de fonction ?).

Le 19 ou le 20 octobre 1941, Émile Stévance est appréhendé par les gendarmeries française et allemande dans la cadre d’une vague d’arrestations décidée par l’occupant et visant les communistes de Seine-et-Marne, pris comme otages en représailles de distributions de tracts et de destructions de récolte ayant eu lieu dans le département : 42 d’entre eux seront des “45000”.

Émile Stévance est rapidement interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager), où il est enregistré sous le matricule n° 1741.

Entre fin avril et fin juin 1942, Émile Stévance est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Les deux wagons à bestiaux 
du Mémorial de Margny-les-Compiègne, 
installés sur une voie de la gare de marchandise 
d’où sont partis les convois de déportation. Cliché M.V.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Émile Stévance est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46121 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Il meurt à Auschwitz le 17 août 1942, d’après les registres du camp [1] ; cinq semaines après l’arrivée de son convoi.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 27-09-2003).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 73, 127 et 128, 378 et 420. 
- Archives départementales de l’Aisne, site internet, archives en ligne Registre d’état civil de Wassigny, année 1905, acte n° 10 (vue 98). 
- Archives départementales de Seine-et-Marne, Dammarie-les-Lys, cabinet du préfet, arrestations collectives octobre 1941 (cote M11409) ; arrestations allemandes, secteur de Provins, dossier individuel (SC51231). 
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1181 (21678/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 26-12-2013)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans lesannées qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ.

Concernant Émile Stévance, c’est « le 11 juillet 1942 à Auschwitz (Pologne) et non le 6 juillet 1942 à Compiègne (Oise) » qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

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Jean-Louis STERVINOU – (46122 ?)

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Jean, Louis, Stervinou naît le 15 juin 1905 à Landeleau (Finistère – 29), fils de Henri Stervinou, 39 ans, cultivateur, et de Marguerite Goavec, 29 ans, son épouse, domiciliés au lieu-dit Stang.

En 1927, il habite au 5 rue de Villejuif (devenue avenue Stéphen Pichon) à Paris 13e. Il est déclaré comme infirmier de l’Assistance publique.

Le 21 août 1929, âgé de 24 ans, Jean-Louis Stervinou épouse Marie M., 31 ans, infirmière, veuve, habitant à la même adresse. Un des deux témoins est infirmier au 83 boulevard de L’Hôpital. Le père de Jean-Louis, veuf, est alors domicilié route d’Achères à Poissy (Seine-et-Oise / Yvelines), toujours cultivateur. Suite à l’ordonnance de non conciliation du 3 janvier 1936, ce premier mariage est dissous par jugement de divorce “prononcé de plano” le 3 décembre suivant par le Tribunal civil de la Seine.

Le 19 août 1939 à Landeleau, Jean-Louis Stervinou se marie avec Jeanne Rachel Rigal. Ils auront un enfant.

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 78, quai de la Rapée, près du pont d’Austerlitz (Paris 12e).

Jean Stervinou est agent des services hospitaliers à la Salpêtrière, infirmier boulevard de l’Hôpital (Paris 13e).

[/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Cour d’honneur de l’« hospice » de la Salpêtrière dans les années 1900. Collection Mémoire Vive.

Cour d’honneur de l’« hospice » de la Salpêtrière dans les années 1900.
Collection Mémoire Vive.

Selon sa déclaration ultérieure à la police, il ne serait pas membre du Parti communiste avant-guerre, mais sympathisant et cotisant à ce titre (?).

À la fin de l’automne 1940, un cadre du parti communiste clandestin vient trouver Jean Stervinou chez lui pour lui dire qu’il faut recommencer à « travailler ». Celui-ci accepte. Une quinzaine de plus tard, une femme vient lui apporter un paquet d’une cinquantaine de tracts qu’il diffuse sur son lieu de travail, non pas de la main à la main, mais en les plaçant sur les rebords des fenêtres ou dans « des endroits facilement accessibles à ceux qui pouvaient être intéressés ». Par deux fois, la femme revient chez lui avec un paquet contenant une centaine de tracts qu’il distribue de la même manière. Puis cette femme est remplacée par un jeune homme qui lui apporte des exemplaires de L’Humanité clandestine et de La Vie du 13e.

En février 1941, trois inspecteurs de la brigade spéciale des Renseignements généraux exercent une série de surveillances et de filatures au cours desquelles leur attention est attirée par les allées et venues de Robert Th., 20 ans, vu à plusieurs reprises transportant des paquets et soupçonné d’effectuer la liaison entre différents éléments de l’ex-parti communiste. Le 26 février, peu avant à 21 heures, ils l’interpellent alors qui vient de sortir de l’immeuble du 78, quai de la Rapée où il a déposé un paquet cylindrique emballé. Interrogé, le jeune garçon déclare l’avoir remis à Jean Stervinou, de la même manière qu’il lui a remis un cabas rempli six jours plus tôt.

Le lendemain, 27 février, Jean Stervinou est arrêté à son domicile. Au cours de la perquisition, les inspecteurs découvrent 324 exemplaires de La Voix de Paris, n° 2 de janvier 1941, deux brochures intitulées « À bas les mesures racistes prises contre les petits et moyens commerçants juifs » et un document ronéotypé donnant des instructions et conseils aux militants chargés de la propagande. Jean Stervinou rédige et signe une déclaration selon laquelle il remet « spontanément » ces documents aux policiers : s’agit-il d’une procédure équivalant à des aveux ?

Considérant que l’activité de Robert Th. et Jean Stervinou « avait pour but la diffusion des mots d’ordre de la 3e internationale communiste ou d’organismes s’y rattachant, par la distribution [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][…] de tracts et de brochures communistes », le commissaire André Cougoule, chef de la brigade spéciale, officier de police judiciaire, les inculpe d’infraction aux articles 1 et 3 du décret du 26 septembre 1939 et les fait conduire au Dépôt, à disposition du procureur de la République.

Le 6 mars, la 12e chambre du Tribunal correctionnel de la Seine condamne Jean Stervinou à dix mois d’emprisonnement et Robert Th. [1], à six mois.

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er. Tribunal correctionnel, un des porches du rez-de-chaussée. (montage photographique)

Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du rez-de-chaussée.
(montage photographique)

Jean Stervinou est successivement écroué à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (Seine / Val-de-Marne), puis à la Maison centrale de Poissy (Seine-et-Oise / Yvelines).

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Au deuxième plan, la Maison centrale de Poissy vers 1916. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Au deuxième plan, la Maison centrale de Poissy vers 1916.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Au cours du mois de novembre, en « exécution de la note préfectorale » du 14 novembre 1940, le directeur de la prison transmet au bureau politique du cabinet du préfet de Seine-et-Oise onze notices de détenus de la Seine devant être libérés à l’expiration de leur peine au cours du mois suivant. Le 22 novembre, le préfet de Seine-et-Oise transmet le dossier au préfet de police de Paris, direction des services de Renseignements généraux.

À l’expiration de sa peine, le 19 décembre, Jean Stervinou n’est pas libéré ; il est probablement maintenu en prison avec un statut de “détenu administratif”, comme Christophe Le Meur.

Le 13 février 1942, Jean Stervinou est dans un groupe de vingt-quatre « militants communistes » – composé pour moitié de futurs “45000” – transférés au dépôt de la préfecture de police de Paris (au sous-sol de la Conciergerie, île de la Cité). Le 26 mars, le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif, officialisant la situation.

Le 16 avril, Jean Stervinou fait partie d’un groupe de détenus transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Voves (Eure-et-Loir), où il est enregistré sous le matricule n° 93.

Le 10 mai 1942, il fait partie des 81 internés remis aux “autorités d’occupation” à la demande de celles-ci et transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C. Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942. Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, alignés transversalement, les six grands bâtiments du quartier C.
Isolés par une clôture de barbelés, ils ont constitué le “camp juif” du 13 décembre 1941 au 6 juillet 1942.
Ensuite, ils ont servi au regroupement des détenus pour le prochain convoi en partance.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas). Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Jean Stervinou est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46122, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage connu ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Jean Stervinou.

II meurt à Auschwitz le 30 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [2].

Il est déclaré “Mort pour la France” et homologué comme “Déporté politique”. La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 10-08-2003).

Après la guerre, son nom est inscrit sur une stèle commémorative située dans la cour Saint-Louis de la Salpétrière, dédiée « à ses déportés, internés résistants et patriotes morts pour la France » pendant la guerre 1939-1945 (derrière l’entrée du 47 boulevard de l’Hôpital).

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Jean Stervinou est inscrit parmi le personnel hospitalier,
premier nom dans la colonne de droite. © Mémoire Vive.

Notes :

[1] Robert Th. : un nommé Robert Th., membre d’un comité clandestin au sein du Front national du camp du Ljubelj, rescapé, est cité deux fois dans De Mauthausen au Ljubelj (Loibl-Pass), de Janko Tišler et Christian Tessier, éditions de L’Harmattan, 2005 ; s’agit-il du même homme ?

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France… Dans lesannées qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant de Jean Stervinou, c’est « le 11 juillet 1942 à Auschwitz (Pologne) et non le 6 juillet 1942 à Compiègne (Oise) » qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 381 et 419.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant :Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen.
- Comité du 13e arrondissement de l’ANACR, La résistance dans le treizième arrondissement de Paris, imprimé par l’École Estienne en 1977, page 89.
- Archives nationales : correspondance de la Chancellerie sur des procès pour propagande et activité communistes (BB18 7042).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux ; bureau politique du cabinet du préfet de Seine-et-Oise (1W69).
- Comité du souvenir du camp de Voves, liste établie à partir des registres du camp conservés aux Archives départementales d’Eure-et-Loir.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “Occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; dossiers de la BS1 (GB 52), n° 162, « Affaire Stervinou – Th. », 27-02-1941.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1181 (33718/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 24-01-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

François STÉPHAN – 46120

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

François, Émile, Marie, Stéphan naît le 19 mai 1908 à Nantes (Loire-Inférieure / Loire-Atlantique [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] – 44).

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 110, rue de Geôle à Caen (Calvados – 14). Il est métallurgiste (tourneur) à la Cartoucherie de Mondeville (à vérifier…).

Dans la nuit du 1er au 2 mai 1942, François Stéphan est arrêté par la police française ; il figure comme “communiste” sur une liste d’arrestations exigées par la Felkommandantur 723 de Caen à la suite du deuxième déraillement d’un train de permissionnaires allemands à Moult-Argences (Airan) [2].

Il est détenu à la Maison centrale de la Maladrerie à Caen, puis au “petit lycée” Malherbe.

Le 4 mai, considéré comme otage communiste, il fait partie du groupe de détenus transféré en train au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag122 – Polizeihaftlager). Ils y arrivent le lendemain, 5 mai, en soirée.

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C, qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C,
qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Entre début mai et fin juin 1942, François Stéphan est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, François Stéphan est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46120 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, François Stéphan est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».  « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ». « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

À une date inconnue, François Stéphan est admis au Block 20 (maladies contagieuses) de l’hôpital [3].

Il meurt à Auschwitz le 16 août 1942, selon les registres du camp ; cinq semaines après l’arrivée de de son convoi.

Le 26 août 1987, à Caen, à la demande de David Badache, rescapé caennais du convoi (matr. 46267), est inaugurée une stèle apposée par la municipalité sur la façade de l’ex-Petit Lycée, côté esplanade Jean-Marie Louvel, en hommage aux otages déportés le 6 juillet 1942.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 29-06-2003).

Le nom de François Stéphan est inscrit sur la plaque commémorative dévoilée le 19 décembre 2008 sur le pignon de l’ex-Petit Lycée de Caen, côté avenue Albert Sorel, afin de rendre hommage à tous les otages calvadosiens déportés suite à la répression de mai 1942.

© Photo Mémoire Vive.

© Photo Mémoire Vive.

Notes :

[1] Loire-Atlantique : département dénommé “Loire-Inférieure” jusqu’en mars 1957.

[2] Le double déraillement d’Airan et les otages du Calvados : Dans la nuit du 15 au 16 avril 1942, le train quotidien Maastricht-Cherbourg transportant des permissionnaires de la Wehrmacht déraille à 17 kilomètres de Caen, à l’est de la gare de Moult-Argence, à la hauteur du village d’Airan, suite au déboulonnement d’un rail par un groupe de résistance. On compte 28 morts et 19 blessés allemands.

La locomotive du premier train ayant déraillé le 16 avril 1942. Collection R. Commault/Mémorial de Caen. In De Caen à Auschwitz, éditions Cahiers du Temps, juin 2001, page 11.

La locomotive du premier train ayant déraillé le 16 avril 1942.
Collection R. Commault/Mémorial de Caen.
In De Caen à Auschwitz, éditions Cahiers du Temps, juin 2001, page 11.

L’armée d’occupation met en œuvre des mesures de représailles importantes, prévoyant des exécutions massives d’otages et des déportations. Le préfet du Calvados obtient un sursis en attendant les conclusions de l’enquête de police. Mais, faute de résultats, 24 otages choisis comme Juifs et/ou communistes sont fusillés le 30 avril, dont deux à Caen.

Dans la nuit du 30 avril au 1er mai, un deuxième déraillement a lieu, au même endroit et par le même procédé. Un rapport allemand signale 10 morts et 22 blessés parmi les soldats. Ces deux déraillements sont au nombre des actions les plus meurtrières commises en France contre l’armée d’occupation.

Au soir du deuxième attentat – à partir de listes de communistes et de juifs (130 noms sur le département) transmises au préfet par le Feldkommandant – commence une vague d’arrestations, opérées par la police et la gendarmerie françaises avec quelques Feldgendarmes. Dans la nuit du 1er au 2 mai et le jour suivant, 84 hommes au moins sont arrêtés dans le Calvados et conduits en différents lieux de détention. Pour le commandement militaire allemand, ceux qui sont maintenu en détention ont le statut d’otage.

Tous les hommes désignés n’ayant pu être arrêtés, une autre vague d’arrestations, moins importante, a lieu les 7 et 8 mai. Le préfet du Calvados ayant cette fois-ci refusé son concours, ces arrestations d’otages sont essentiellement opérées par la Wehrmacht (Feldgendarmes).

Au total plus de la moitié des détenus de ce début mai sont, ou ont été, adhérents du Parti communiste. Un quart est désigné comme Juif (la qualité de résistant de certains n’est pas connue ou privilégiée par les autorités). Des auteurs d’actes patriotiques, proches du gaullisme, sont également touchés par la deuxième série d’arrestations.

Tous passent par le “petit lycée”, contigu à l’ancien lycée Malherbe de Caen, alors siège de la Feldkommandantur 723 (devenu depuis Hôtel de Ville), où ils sont rapidement interrogés.

Caen. Le Petit Lycée. Carte postale éditée dans les années 1900. Collection Mémoire Vive.

Caen. Le Petit Lycée. Carte postale éditée dans les années 1900.
Collection Mémoire Vive.

Le 4 mai, 48 détenus arrêtés dans la première rafle sont transférés en train au camp de police allemande de Compiègne-Royallieu ; puis d’autres, moins nombreux, jusqu’au 9 mai (19 ce jour-là).

Les 8 et 9 mai, 28 otages communistes sont fusillés au Mont-Valérien, sur la commune de Suresnes (Seine / Hauts-de-Seine), pour la plupart (trois à Caen). Le 14 mai, onze otages communistes sont encore fusillés à Caen.

La plus grande partie des otages du Calvados transférés à Compiègne sera déportée à Auschwitz le 6 juillet 1942 : 57 politiques et 23 Juifs (près de la moitié des otages juifs du convoi).

[3] L’hôpital : en allemand Krakenbau (KB) ou Häftlingskrakenbau (HKB), hôpital des détenus. Dans Si c’est un Homme, Primo Lévi utilise l’abréviation “KB”. Mais les “31000” et Charlotte Delbo ont connu et utilisé le terme “Revier” : « abréviation de Krakenrevier, quartier des malades dans une enceinte militaire. Nous ne traduisons pas ce mot que les Français prononçaient «  révir  », car ce n’est ni hôpital, ni ambulance, ni infirmerie. C’est un lieu infect où les malades pourrissaient sur trois étages. », Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1967, p. 24.

Sources :

- De Caen à Auschwitz, par le collège Paul Verlaine d’Evrecy, le lycée Malherbe de Caen et l’association Mémoire Vive, éditions Cahiers du Temps, Cabourg (14390), juin 2001 ; notice par Claudine Cardon Hamet, page 125.
- Cl. Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 361 et 420 (listes).
- Jean Quellien, Résistance et sabotages en Normandie, Le Maastricht-Chebourg déraille à Airan, éditions Charles Corlet, Condé-sur-Noireau, réédition 2004, pages 130 (n° 55) et 138.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 1, cahier photos pages 92* et 93* (reproduction de la liste des prisonniers morts sur le registre d’appel) et 94* ; tome 3, page 1177 (22352/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 7-09-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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André STEFF – 46119

[fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »]

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

André, Henri, Steff naît le 7 août 1904 à Pacy-sur-Eure (Eure), chez ses parents, Henri Steff, 26 ans, chaisier, et Berthe Taverne, son épouse, 20 ans, couturière, domiciliés au 18, rue Montferrand. Auguste Steff, 49 ans (son grand-père ou un oncle ?), chaisier également, est un des deux témoins pour l’inscription du nouveau-né à l’état civil. André est baptisé à l’église de Pacy le 27 août ; il a pour marraine sa tante Berthe Steff. Plus tard, ses parents iront s’installer à Versailles [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine-et-Oise / Yvelines) – en juillet 1923, ils habitent au 4 rue Saint-Julien -, puis à Colombes (Seine / Hauts-de-Seine).

En 1924, André Steff est inscrit au bureau de recrutement militaire de Versailles.

Le 27 octobre 1923 à Versailles, âgé de 19 ans, André Steff se marie avec Jeanne Oury, née le 4 février 1904 à Paris 14e, gainière . Ils auront deux fils : Robert, né le 24 mars 1924 à Versailles, et Bernard, né le 21 septembre 1926. Mais André Steff quitte le foyer en 1927 ; la Justice le poursuit pour abandon de famille (pour ce motif, il sera condamné avec sursis en juillet 1932). Leur mariage est dissous le 8 mai 1928 par un jugement de divorce prononcé par le tribunal civil de la Seine. Il est plus que probable que les garçons restent avec leur mère, laquelle se remarie en juillet 1931.

En 1932, André Steff demeure au 33 rue de Seine, à Paris 6e. Dans cette période, il vit en ménage avec Fernande C., laquelle décède prématurément.

Polisseur sur métaux, il adhère à l’Union syndicale CGT des travailleurs de la métallurgie.

En 1935, il rejoint le Parti communiste, militant au sein du rayon des 6e et 7e arrondissements de la région Paris-ville.

Après avoir habité au 28, rue Dauphine (6e), il loge alors au 16, rue de l’Échaudé (6e).

Le 9 janvier 1935, la police municipale l’appréhende en compagnie d’autres militants alors qu’il placarde des affiches non-timbrées de l’Union des Comités de chômeurs de la région parisienne. Conduit au commissariat du quartier de l’Odéon (6e), il est relâché sans poursuite « après les vérifications d’usage ».

En mai 1936, il colle des affiches du PC pour la campagne électorale.

Dans cette période, André Steff apprend à piloter les avions au sein du Cercle populaire de Lucien Bossoutrot [2] où il obtient son brevet de pilote.

En juillet 1936, selon un témoignage ultérieur de sa future épouse, il est exclu du parti communiste.

Le 17 juillet 1936, la République espagnole du Frente popular est menacée par la rébellion du général Franco soutenue militairement par Hitler et Mussolini. Au mois d’août, André Steff s’engage dans l’aviation républicaine, signant à l’ambassade d’Espagne un contrat payé quinze mille francs par mois, plus une assurance en cas d’accident. Il combat d’abord au sein de l’escadrille dirigée par André Malraux (il est désigné comme mécanicien dans l’ouvrage André Malraux et l’Espagne), puis avec l’aviation républicaine, livrant combat « aux forces aériennes nationalistes sur tous les fronts ». Il est blessé à une épaule lors d’un combat à Tolède.

Le 4 juin 1937, à Valence, André Steff se marie avec Magdalena Hernandez y Chofer, née le 22 novembre 1916 à Madrid. Les témoins sont deux autres aviateurs : Léon Toffen, originaire d’Hazebrouck, et Robert Maroch.

La famille de Magdalena est plutôt aisée, son père est propriétaire d’un élevage de taureaux (ganadería). Son jeune frère, José-Luis, né en novembre 1922, peut poursuivre ses études. Mais leur mère est décédée vers 1935 et leur père est tué dans un bombardement de Valence, capitale de l’Espagne républicaine, par les forces nationalistes. Le jeune José-Luis suit une formation militaire aérienne sans avoir l’occasion de piloter.

En février 1938, André Steff est à Paris, pour toucher son salaire à la Banque Franco-Espagnole, avenue de l’Opéra. Début août 1938, le couple Steff rentre définitivement en France et emménage à Vanves [3] (Seine / Hauts-de-Seine)

Son épouse Magdalena obtient la nationalité française, probablement par validation de leur mariage.

La police ne connait pas d’activité politique à André Steff dans cette période.

En 1939, André Steff est inscrit pour la première fois sur les listes électorales de Vanves étant domicilié au 15, rue de l’Avenir.

André Steff a repris son métier de polisseur sur métaux. Du 8 août 1938 au 4 juin 1941, travaille à la société Chromage moderne, 36 rue du Colonel-Gillon à Montrouge (Seine / Hauts-de-Seine), puis à la Maison Marne, 50 avenue Jules-Coutant à Ivry-sur-Seine (Seine / Val-de-Marne).

Le 9 février 1939, lors de la retraite de Catalogne, José-Luis Hernandez (16 ans) franchit la frontière franco-espagnole à Port-Bout (Pyrénées-Orientales – 66). Il est interné pendant quinze jours au camp de Saint-Cyprien (66), puis libéré et autorisé à rejoindre le département de la Seine, où son beau-frère a déposé une autorisation pour l’accueillir en tant que réfugié, devenant son tuteur. De février à juin 1940, durant la période de mobilisation, José-Luis est envoyé à Tours par décision du ministre de l’Armement, pour travailler comme manœuvre aux établissements Bardet, qui fabriquent des machines automatiques ; il loge à l’hôtel. En décembre 1940, il habite une chambre au 15 rue de l’Avenir et prend ses repas chez son beau-frère, André Steff, alors domicilié au 43 de la même rue, dans un petit pavillon. José-Luis travaille alors dans une usine dirigée par les autorités allemandes au Parc des Expositions de la Porte de Versailles (en avril 1942, il travaillera pour les mêmes comme manœuvre à Suresnes).

En 1941, le responsable de la police de sécurité et de renseignements de la SS (Sipo-SD) sur le territoire français, le “conseiller” Karl Boemelburg, demande à la police française d’établir une liste des anciens combattants en Espagne républicaine, laquelle est réalisée par la 3e section des Renseignements généraux. Dès lors, la police française considère André Steff comme « dangereux à la suite d’attentats commis sur des membres de l’armée d’occupation par d’anciens légionnaires ayant combattu en Espagne ».

Le 24 décembre 1941, dans le cadre d’une vague d’arrestations organisée par la police française contre 33 anciens combattants pour l’Espagne républicaine (dont les brigadistes Jean Cazorla, Maurice Fontaine, Henri Gorgue…), André Steff est arrêté par des agents en civil du commissariat de Vanves, en même temps que Fernand Tilliet, de Vanves. Tous sont conduits à la caserne désaffectée des Tourelles, boulevard Mortier, Paris 20e, “centre surveillé” dépendant de la préfecture de police. Deux jours plus tard, le préfet de police signe l’arrêté ordonnant l’internement administratif d’André Steff – considéré comme « dangereux pour la défense nationale et pour la sécurité publique » – en application du décret du 18 novembre 1939.

La caserne des Tourelles, boulevard Mortier, avant guerre. Partagée avec l’armée allemande au début de l’occupation, elle servit surtout à interner les « indésirables étrangers ». Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne des Tourelles, boulevard Mortier, avant guerre.
Partagée avec l’armée allemande au début de l’occupation, elle servit surtout à interner les « indésirables étrangers ».
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 4 février 1942, Madeleine Steff écrit au préfet de police pour solliciter son indulgence afin que son mari lui soit rendu, déclarant que celui-ci n’a pas appartenu aux Brigades internationales en Espagne et n’a pas fait de politique depuis son retour (il semble effectivement qu’il n’y ait aucun dossier au nom d’André Steff parmi ceux des brigadistes archivés en microfilm à la BDIC).

Le 5 mai 1942 à 4 heures du matin, André Steff fait partie des 24 internés des Tourelles, pour la plupart anciens Brigadistes, que viennent « prendre des gendarmes allemands » afin de les conduire au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, André Steff est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. © Cliché M.V.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise
d’où sont partis les convois de déportation. © Cliché M.V.

Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, André Steff est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46119 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté André Steff.

Il meurt à Auschwitz le 19 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher), alors qu’a lieu une grande sélection des “inaptes au travail” à la suite de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement tués d’une piqûre intracardiaque de phénol ou gazés [4]). La cause mensongère indiquée pour sa mort est « Insuffisance cardiaque ».

Le 12 septembre 1945, Lucien Penner, de Vanves, rescapé du convoi, rédige sur papier libre une attestation par laquelle il certifie qu’André Steff est décédé à Auschwitz « fin d’année 1942 ».

Le 23 février 1946, Victor Larue et Raymond Lecour, de Malakoff, se portent garant qu’André Steff a été arrêté le 21 décembre 1941. Le 3 mai 1946, Madeleine (Magdalena) Steff remplit une demande de régularisation du statut d’un « non-rentré ».

Le 12 juin suivant, un officier de l’état-civil du ministère des anciens Combattants et Victimes de la guerre (ACVG) dresse l’acte de décès officiel d’André Steff, en fixant la date au 1er novembre 1942 sur la base des éléments figurant au dossier n° 5014.Le 16 décembre 1956, alors qu’elle est domiciliée à Malakoff, “Madeleine” Magdalena Foulon, veuve Steff, alors domiciliée au 54, rue Jules Guesde à Malakof, remplit un formulaire du ministère des (ACVG) pour demander l’attribution du titre de déporté résistant à son ex-mari. Comme motif de son arrestation, elle indique seulement : « résistant ». Plusieurs rubriques de renseignements à fournir ne sont pas complétées. Elle ne mentionne aucun enfant. Sa démarche semble rester sans suite.

Le 6 janvier 1958, Madeleine Foulon remplit un nouveau formulaire du ministère des ACVG, cette fois-ci pour demander que soit attribué à André Steff le titre de déporté politique. Comme motif de sa déportation, elle indique : « arrêté pour distribution de tracts communistes ». Elle s’y déclare comme ouvrière. Le 15 janvier, le directeur interdépartemental de Paris adresse un formulaire de demande de renseignements à la sous-direction des statuts du ministère. Dans la réponse du 11 juin, il apparaît que le ministère possède une copie de l’acte de décès d’André Steff établi au camp d’Auschwitz.

Le 27 janvier 1959, la commission départementale de la Seine énonce un avis favorable à la demande, suivie en cela par le directeur interdépartemental, puis par la commission nationale le 5 mai. Le 22 mai, le ministère des ACVG décide de l’attribution du titre de déporté politique à André Steff. Le 15 juin, la carte n° 1101.25968 est envoyée à Maria (?) Magdalena Foulon en tant que conjointe.

Le 2 juin 1975, Bernard Steff, âgé de 51 ans, alors gainier (comme sa mère, Jeanne) au 11 rue des Fontaines-du-Temple à Paris 3e, écrit au secrétaire d’État aux anciens combattants ACVG pour que lui soit communiqué le maximum de renseignements concernant son père – date d’arrestation, motif, etc. – ainsi que l’endroit où il pourrait consulter un dossier le concernant. Le 20 octobre, le directeur des statuts et services médicaux lui répond en indiquant qu’André Steff a été « déporté le 7 juillet 1942 à Auschwitz, vraisemblablement en raison de sa confession israélite… », mauvaise interprétation probable de la consonance de son nom. Le 17 décembre, Henri Gorgue, alors à la retraite dans l’Yonne, écrit à Bernard Steff, dont il a lu une annonce parue dans Le Patriote Résistant, mensuel de la FNDIRP, en lui précisant qu’il est « le seul survivant du convoi parti de la caserne des Tourelles ». Il lui propose de le rencontrer dans la période des prochaines fêtes de Noël à l’occasion d’un séjour chez sa fille qui habite en région parisienne.

 Le 13 avril 1977, Bernard Steff écrit au secrétariat d’État pour demander la rectification dans les « registres » de la cause de déportation de son père – de religion catholique et non israélite (copie de l’acte de baptême à l’appui) – laquelle est son engagement politique. Il précise : « Mon intention est de rassembler pieusement le maximum de souvenirs de mon père et, en ayant fait des photocopies, de confier un dossier à mon frère aîné, à mon fils, à mon neveu et à mes deux nièces afin qu’ils conservent dans leur cœur une image glorieuse de leur père et grand-père ». Pour ce faire, il sollicite un duplicata de la carte de déporté politique d’André Steff. Le 28 avril, le directeur des statuts et des services médicaux répond qu’il ne peut lui donner satisfaction sur ce point, car les duplicatas ne sont établis, en cas de perte ou de vol, qu’à la personne à laquelle la carte a été délivrée, en l’occurrence Madame Foulon Maria Magdalena.
À Vanves, le nom de Bernard Steff est inscrit sur le Monument élevé « en mémoire des victimes vanvéennes du nazisme » dans le square de la place de l’Insurrection.
La mention « Mort en déportation » est apposée sur l’acte de décès d’André Steff (arrêté du 26 juin 2004, JORF n° 60 du 12 mars 2005).

Notes :

[1] Versailles : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine-et-Oise (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Lucien Bossoutrot, pilote de la Grande Guerre, puis pilote dans l’aviation civile, pilote d’essai chez Farman et Blériot, membre du parti radical-socialiste, élu député du Front populaire en 1936.

[3] Vanves : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[4] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7. Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 150 et 153, 354, 384 et 420.
- Musée de la Résistance nationale (MRN) Champigny-sur-Marne (94) ; carton “Association nationale des familles de fusillés et massacrés”, fichier des victimes.
- Archives communales de Pacy-sur-Eure, registre d’état-civil, année 1904, acte n°23, recherche de Ginette Petiot.
- Archives municipales de Vanves, listes électorales.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), cartons “occupation allemande” : internés dans différents camps… (BA 1837) ; cartons “Parti communiste” , chemise “1941, perquisitions particuliers” (BA 2447) ; cabinet du préfet, dossier individuel de Steff André et Hernandez Luis (1 W 1020-50608) ; dossier RG de Steff André (77 W 3237-486593).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1169 (31869/1942).
- Pôle des archives des victimes des conflits contemporains (PAVCC), ministère de la Défense, Caen : dossier de Steff André (21 P 540 732).
- Site Mémorial GenWeb, 92-Vanves, relevé de Véronique Canova (04-2006).
- Ginette Petiot, message de correction, citant la mairie de La Bresse, où a vécu un homonyme nom/prénom (02-2017).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 11-12-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

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Marcel STARCK – 46118

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Marcel Starck (parfois orthographié STARK) naît le 12 juin 1901 à Paris 11e arrondissement, fils de Jacob Starck, 26 ans, ébéniste,, célibataire, domicilié 113, rue de Montreuil. Pour l’inscription du nouveau-né à l’état civil – sur un acte de reconnaissance établi le 18 juin, alors que l’acte de naissance n’avait pas été établi – les témoins sont Jean Starck, 56 ans, et Philippe Starck, 21 ans, respectivement père et frère de Jacob, tous deux ébénistes et domiciliés au 127, rue de Montreuil ; la mère de Marcel, Alexandrine Multier, 28 ans, “journalière”, n’y est pas mentionnée.

Le 11 mars 1907, son père, âgé de 32 ans, domicilié au 268, rue Étienne-Marcel à Bagnolet (Seine / Seine-Saint-Denis) décède à l’hôpital Tenon (Paris 20e).

Le 23 juillet 1919, sa mère, âgée de 47 ans, et habitant avec lui au 83, rue de la Réunion (Paris 20e), décède à l’hôpital Saint-Antoine (Paris 12e).

À l’approche de ses vingt ans, Marcel Starck n’a pas de tuteur. Pendant un temps, il habite encore au 83, rue de la Réunion et commence à travailler comme tourneur sur métaux.

Le 9 avril 1921, il est affecté au 21e régiment d’infanterie afin d’y accomplir son service militaire. Du 2 juillet au 15 septembre suivant, il participe à l’occupation de la Ruhr, en Allemagne, avec son unité ; puis, de nouveau, du 9 février au 15 mai 1923. Le 30 mai, il est “renvoyé dans ses foyers”, titulaire d’un certificat de bonne conduite.

Le 7 juillet 1923, à la mairie du 20e arrondissement, Marcel Starck se marie avec Lucienne Marcelle Egloff, née le 16 octobre 1902 à Paris 11e (peut-être une cousine par son père). Mais ils se sépareront.

À une date restant à préciser, il commence à fréquenter Marie Faure, née le 18 mai 1904 à Saint-Étienne (Loire), bobineuse, domiciliée au 77, rue d’Avron à Paris 11e.

Le 1er novembre 1930, leur fils René, Marcel, naît au 24, rue Trousseau (Paris 11e).
Un mois et demi plus tard, le 13 décembre, le premier mariage de Marcel Starck est dissous par jugement de divorce rendu par défaut par le tribunal civil de la Seine au profit de l’épouse.
En avril 1931, Marcel Starck habite au 40, rue de Turcy à Fontenay-sous-Bois (Seine / Val-de-Marne). L’année suivante, il loge au 13, rue Nungesser dans cette commune. Vit-il avec Marie Faure et leur fils ?
Le 13 février 1932, il reconnaît son fils René à la mairie du 11e arrondissement ; Marie Faure le reconnaîtra dans cette mairie le 22 août 1936 (?).

Le 4 février 1933, Marcel Starck entre comme chef d’équipe aux usines Renault de Boulogne-Billancourt (Seine / Hauts-de-Seine – 92).

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Boulogne-Billancourt, place Jules-Guesde, entrée des usines Renault. Collection Mémoire Vive.

Boulogne-Billancourt, place Jules-Guesde, entrée des usines Renault. Collection Mémoire Vive.

Marcel Starck est membre du Syndicat des agents de maîtrise, filiale du Syndicat des Métaux de la région parisienne (CGT) et sera considéré par ses employeurs comme « sympathisant communiste ».

En octobre 1933, Marcel Starck habite au 32, rue Lecourbe à Clamart (92) ; seul ?

Vers 1936, il se met en ménage avec une nouvelle compagne, Olga D., née le 9 janvier 1912 à Ath (Belgique), naturalisée française, elle-même séparée de son mari, et ayant déjà de celui-ci un enfant, né vers 1933 et élevé par les grands-parents. René, le fils de Marcel Starck, vit alors avec sa mère.

En novembre 1937, Marcel Starck loge au 85, rue des Martyrs, à Paris 18e.

Au moment de son arrestation, il est domicilié avec sa compagne au 4, rue Burq, à Paris 18e, vers la rue des Abbesses.

Le 24 novembre 1938, Marcel Starck est renvoyé des usines Renault pour sa participation au mouvement national de grève organisé afin de protester contre l’abandon des acquis du Front Populaire.

Du 16 décembre suivant jusqu’à son arrestation, il est ouvrier aux établissements Ragonot, Construction électrique mécanique, sis 13, rue de Montrouge (boulevard Gabriel Péri), à Malakoff [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1] (Seine / Hauts-de-Seine), fabrique de moteurs électriques pour toutes sortes de machines.

À la suite de la mobilisation, Marcel Starck est affecté pendant deux mois au 405e régiment de pionniers, à Blois (Loir-et-Cher). Puis, le 26 octobre 1939, il est réintégré comme “affecté spécial” dans son entreprise, considérée alors comme produisant pour la Défense nationale.

Début août 1941, la brigade de gendarmerie de Malakoff est « informée » (probablement une lettre de dénonciation) qu’un individu demeurant au 1, avenue Jules-Ferry à Malakoff détient des tracts communistes, notamment des exemplaires de L’Humanité clandestine, qu’il remet à Roger B., tourneur, 31 ans, Gaston G., tourneur, 42 ans, et Marcel Starck, ouvriers de l’usine Ragonot, afin qu’ils en assurent la diffusion.

Le 11 août 1941, la surveillance effectuée par les gendarmes (« revêtus de leur uniforme » ?), leur permet de procéder à l’arrestation de Fernand Treich, 36 ans, en flagrant délit de transport et de détention de tracts. Interrogée, la direction de Ragonot leur « donne la certitude » que les trois autres ouvriers sont « reconnus comme militants du Parti communiste ».

Le même jour, les trois hommes sont arrêtés sur leur lieu de travail par trois gendarmes. Aucun tract n’est alors trouvé dans leurs affaires ni dans leurs casiers.

Lors de la perquisition opérée au domicile de Marcel Starck en sa présence sont découverts un exemplaire d’une « feuille spéciale » de La Vie ouvrière, journal de la CGT clandestine, datée de mai 1941, deux brochures consacrées l’une à la Constitution de l’URSS, l’autre à sa littérature, ainsi que les photographies de Marcel Cachin, Léon Blum et Maurice Thorez. Lors de son interrogatoire à la brigade, Marcel Starck déclare d’abord : « Je ne fais partie d’aucun groupe politique. Jamais je n’ai distribué de tracts au personnel de l’usine Ragonot. L’opuscule La Littérature m’a été donné à l’usine Renault en 1937, par un camarade que je ne connais pas. Le livre Constitution, je l’ai acheté au Marché aux Puces de Saint-Ouen en 1938. La feuille spéciale de La Vie Ouvrière m’a été remise à la station de métro Vanves en mai 1941. »

Fernand Treich et Marcel Starck ont pu être amenés à se connaître auparavant : ils sont entrés aux usines Renault la même année et ils en ont été licenciés tous deux à la suite de la grève de novembre 1938. Ils ont pu ensuite se retrouver aux établissements Ragonot, où Starck travaillait déjà et où Treich a été employé du 3 février 1939 jusqu’à son licenciement le 10 juin 1940 « en raison de ses opinions extrémistes ». [2]

Interrogé, Gaston G. déclare : « Les deux brochures [L’État et la révolution, et Le Parti bolchevik en lutte pour activer la construction de la société socialiste…] que vous avez trouvées chez moi m’ont été vendues par Starck à l’atelier. J’ai acheté celles-ci dans un but d’humanité, Starck disant que l’argent provenant de cette vente était destiné aux familles des emprisonnés politiques… ». Confronté à Gaston G., Marcel Starck reconnaît lui avoir remis un opuscule, mais sans le faire payer, « à titre de propagande ».

Interrogé à son tour, Roger B. – embauché chez Ragonot seulement depuis février 1941 – déclare : « L’opuscule que vous avez trouvé chez moi [Le parti bolchevik en lutte… constitution] m’a été remis un jour que je me trouvais au marché de la Convention à Paris avec ma femme. Un individu que je ne connais nullement m’a abordé en me disant : “On ne fait rien pour la solidarité avec les gosses”. Je lui ai alors remis la somme de un franc. Quant au livre [L’agonie du capitalisme], il m’a été remis il y a trois ou quatre ans environ par un camarade ; je ne me rappelle même plus de son nom. La feuille L’Humanité n° 119 de juin 1941 m’a été remise il y a quelque temps à la sortie du métro Pasteur par un inconnu. Je ne connais pas Treich et je n’ai jamais entretenu de relations avec cet homme, et ne fais pas partie du Parti communiste. »

Les gendarmes téléphonent ensuite au procureur de la République, qui leur prescrit de mettre leurs trois suspects en état d’arrestation pour infraction au décret du 26 septembre 1939. Ceux-ci sont alors placés dans la chambre de sûreté de la caserne en attendant le passage de la voiture cellulaire qui doit les conduire à disposition du procureur.

Les trois hommes sont ensuite écroués à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e).

À la suite de ces arrestations, un “Comité populaire” diffuse un tract à l’intérieur de l’usine : « Dans l’après-midi du 11 août, à l’atelier des tours, un capitaine de gendarmerie, assisté d’inspecteurs en civil, est venu arrêter trois ouvriers. Ce sont René B., père de trois enfants, G., père de trois enfants, trésorier du syndicat, et Marcel Starck. Quels crimes avaient-ils commis ? Ils sont accusés, sans l’ombre d’une preuve, d’avoir participé à la diffusion d’un journal dévoilant le scandale du marché noir à l’intérieur de l’usine. Ouvriers, ouvrières ! De toutes opinions, vous ne permettrez plus que l’on vienne arrêter vos camarades à leur tour, à leur établi, sans protester, sans les défendre. Déjà, dans de nombreux endroits, de telles actions ont porté leurs fruits. Les policiers ont dû lâcher leurs proies. La force de l’occupant n’est faite que de votre désunion et de la servilité d’une poignée de traitres indignes du nom d’homme. Groupez-vous dans votre “Comité Populaire”, aidez par tous les moyens vos camarades emprisonnés, leurs femmes et leurs enfants. Tous unis dans un “Front national” pour l’indépendance de la France, nous chasserons les brutes fascistes et leurs auxiliaires qui déshonorent la France et les Français. »

Le 5 novembre, les trois hommes sont relaxés par la Justice – très probablement faute de charges suffisantes – mais ils ne sont pas relâchés pour autant : dès le lendemain, le préfet de police signe pour chacun un arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1939. Ils sont probablement conduits au Dépôt de la préfecture de police en attendant leur transfert.

Le 10 novembre 1941, tous trois font partie d’un groupe de 58 militants communistes transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne).

Le 8 avril 1942, Olga D. écrit à un préfet (celui de la Vienne ?), afin de solliciter la libération de Marcel Starck, « ses deux compagnons […] furent touchés par une demande de libération qu’ils ont émargée, et mon compagnon de vie ne fut pas touché par cette faveur. Espérant toujours le retour, dans ces moments difficiles, pour nous permettre de nous régulariser notre situation ».

Le 27 avril, le ministre secrétaire d’État à l’Intérieur écrit au préfet de police pour lui indiquer que son attention a été attirée sur Marcel Starck, en lui demandant de lui « faire connaître, d’urgence, les raisons de la décision prise à l’encontre de l’intéressé, ainsi que votre avis sur l’opportunité d’une mesure de clémence à son égard » (formule administrative stéréotypée). Le 27 mai suivant, le préfet transmet en retour une notice biographique établie par les Renseignements généraux et s’achevant par « la libération de Starck ne semble pas devoir être envisagée pour le moment », le préfet concluant lui-même par : « J’estime inopportune, dans les circonstances actuelles, la libération de ce détenu » (autre formule administrative stéréotypée).

Entre temps, le 22 mai, Marcel Starck a fait partie d’un groupe de 148 détenus (pour la plupart déportés avec lui) [3] remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, Marcel Starck est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

transportaquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Marcel Starck est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46118 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Marcel Starck est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».  « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».
« Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Il meurt à Auschwitz le 13 janvier 1943, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher). Selon Marcel Cimier, il attend avec lui la visite de consultation devant le Block 28 un matin après le départ des Kommandos quand ils sont encerclés par des gardiens SS pour une sélection “surprise”. Le major SS oriente Marcel Starck vers un groupe qui comptera finalement près de 300 détenus. « Dix minutes après, des camions découverts à benne basculante arrivaient où tous les internés du côté opposé au mien furent obligés d’y monter à coups de matraques et ce fut la direction Birkenau, Block 7 (block d’attente pour passer à la chambre à gaz) ».

Départ en camion pour la chambre à gaz. Dessin de François Reisz, in Témoignages sur Auschwitz, 1946, page 149. Coll. Mémoire Vive.

Départ en camion pour la chambre à gaz.
Dessin de François Reisz, in Témoignages sur Auschwitz, 1946, page 149. Coll. Mémoire Vive.

Le 21 mars 1946, Marie Faure, épouse M., « mère et tutrice », domiciliée au 32, rue Lacombe à Clamart (92), remplit, au nom du père de son fils, une fiche de renseignement sur un déporté.

Le 15 novembre suivant, René Starck, âgé de 17 ans, remplit un formulaire du ministère des Anciens combattants et victimes de guerre (ACVG) en vue d’obtenir la régularisation de l’état civil d’un « non-rentré ».

Le 25 novembre, Lucien Penner, de Vanves (92), rescapé du convoi, complète et signe un formulaire à en-tête de l’Amicale d’Auschwitz-FNDIRP, par lequel il certifie que Marcel Starck est décédé au camp d’Auschwitz à la date du… « septembre 1942 ».

Le 28 janvier 1947, l’officier de l’état civil alors en fonction au ministère des ACVG dresse l’acte de décès officiel de Marcel Starck « sur la base des éléments d’information figurant au dossier du de cujus, qui nous a été présenté ce même jour » (en l’occurrence l’attestation de L. Penner) et en fixant la date à « septembre 1942 ».

Le 23 septembre 1961, René Starck remplit un formulaire du ministère des ACVG pour demander l’attribution du titre de déporté politique à son père. À la rubrique à remplir pour mentionner les enfants vivants et reconnus nés du déporté, il inscrit son nom et biffe les lignes suivantes en y inscrivant « seul enfant » en grosses lettres capitales (afin de bien signifier qu’il ne saurait y avoir d’autre bénéficiaire). Dans sa séance du 25 septembre 1963, la commission départementale des déportés politiques rend un avis favorable, suivie par le ministère qui notifie sa décision au demandeur le 14 octobre suivant (carte n° 1175.17096).

La mention “Mort en déportation” est apposée en marge de l’acte de décès de Marcel Starck (JORF du 6-05-2003).

Notes :

[1] Malakoff : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Fernand Treich comparaît le 1er décembre 1941 devant la section spéciale de la Cour d’appel de Paris, qui le condamne à dix ans de travaux forcés pour « activité ayant pour but de propager les mots d’ordre de la IIIe Internationale ». Le 4 décembre, il est écroué à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (Seine / Val-de-Marne). Plus tard, il est transféré à la Maison centrale de Fontevrault (Maine-et-Loire), puis à celle de Blois (Loir-et-Cher) ; cellule 75. Au cours du mois de février 1944, il est remis aux autorités d’occupation qui le transfèrent à Compiègne. Le 28 février, il est déporté dans un convoi “NN” de 49 hommes arrivé le lendemain à Sarrebruck (camp de Neue Bremm). Le 23 mars, tous sont dirigés vers le KL Mauthausen où ils arrivent trois jours plus tard ; Fernand Treich y est immatriculé sous le matricule n° 60763. Transféré ensuite au KL Flossenburg, il est affecté au Kommando de Zschachwitz, créé en novembre 1944 près de Pirna, sur l’Elbe, au sud-est de Dresde. Le 17 juin 1945, après avoir été libéré, Fernand Treich décède à Prague (République tchèque). Source : Livre-Mémorial de la Déportation, I.182, pages 230-232.

[3] Gaston G. n’est pas choisi par les autorités d’occupation le 22 mai 1942 pour être transféré de Rouillé au camp de Royallieu à Compiègne. Le 31 octobre suivant, il est transféré au CCS de Voves (Eure-et-Loir). Maurice Foulon – ex-premier adjoint de Pierre Laval, maire d’Aubervilliers, ex-sous-secrétaire d’État au Travail et à la Prévoyance sociale en 1931 dans les gouvernements de Pierre Laval, ex-sous-secrétaire d’État à l’Intérieur en 1932 – intervient en sa faveur. Le 12 mars 1943, avec l’accord du préfet de police, le préfet d’Eure-et-Loir rapporte la mesure d’internement prise à l’encontre de Gaston G. Au préalable, celui-ci doit signer un « engagement d’honneur de se rallier à l’ordre social nouveau et de respecter l’œuvre et la personne du Maréchal Pétain, chef de l’État ». Par la suite, il ferait partie du groupe de résistance “Honneur de la police” (dans quel contexte ?).
Roger B. n’est pas non plus transféré à Compiègne. Son épouse et lui multiplient les courriers auprès de diverses autorités. « … je vous l’affirme de toutes mes forces, Monsieur le Préfet, je ne suis pas, je n’ai jamais été et ne serai jamais un communiste », « … je n’éprouve aucune sympathie pour ce parti, au contraire. J’ai été syndiqué de 1936 à 1939, puis en 1941 au syndicat légal, reconnu par le gouvernement du Maréchal et purgé de ses éléments perturbateurs. […] j’ai toujours protesté contre la mainmise des éléments communistes sur le Syndicat des Métaux, et j’en appelle au témoignage de mon ami G. Gaston […], avec lequel j’ai eu l’occasion de travailler en 1937 et qui a lutté avec moi contre l’ingérence communiste. Je me désolidarise complètement de Marcel Starck, arrêté le même jour que moi, que je ne connaissais que de vue et avec lequel je n’avais aucune relation amicale ou autre. […] Je tiens à déclarer que j’adhère sans réserve à la politique du Maréchal Pétain et de son gouvernement, et que je suis prêt à suivre fidèlement leurs directives. Et cela, je le jure sur la mémoire de mon père [mort au champ d’honneur le 3 octobre 1918] ». Le 3 mai 1943, finalement, le préfet de police écrit au préfet de la Vienne pour lui faire connaître qu’il ne s’oppose pas à la libération du nommé B. « qui paraît animé de bonnes résolutions à l’égard des institutions nouvelles ». Cependant, il faut encore attendre l’avis de la Commission de révision des internements administratifs, laquelle se montre favorable à cette libération le 18 juin. Le 19 août, le préfet de la Vienne envoie un télégramme au préfet de police pour lui faire savoir qu’il a libéré conditionnellement pour trois mois Roger B., astreint à résidence à son domicile avec obligation de se présenter aux Renseignements généraux dès son retour. Roger B. retrouve alors son emploi chez Ragonot. Le 14 décembre 1943, le préfet de police rapporte définitivement l’arrêté d’internement de Roger B., libération qui lui est notifiée quatre jours plus tard lors d’une convocation à la direction des RG.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 374 et 420.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (dossier individuel – fichier central).
- Archives de Paris, site internet, archives en ligne : extrait du registre des naissances du 11e arrondissement à la date du 18-06-1901 (V4E 9291), acte n° 2603 (vue 3/31).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374) ; dossier individuel du cabinet du préfet (1 W 47-25621) ; dossier individuel des Renseignements généraux (77 W 1762-107578).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI-42, n° 171.
- Marcel Cimier, Les incompris, souvenirs présentés par Béatrice Poulle, conservateur aux Archives départementales du Calvados, Les cahiers de Mémoire : déportés du Calvados, textes publiés par le Conseil Général du Calvados, 1995, p. 97.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1164 (1746/1943).
- Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, Caen ; dossier de Starck Marcel (21 P 540 664), recherches de Ginette Petiot (message 01-2019).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 4-02-2019)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.[/fusion_builder_column][/fusion_builder_row][/fusion_builder_container]

Roland SOYEUX – (46113 ?)

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Roland, Louis, Eugène, Soyeux naît le 16 janvier 1912 à Reims (Marne – 51), fils de Louis Soyeux et de Julie Jacob, son épouse.

Le 17 août 1931, à Vitry-le-François (51), déjà employé de chemin de fer, Roland Soyeux se marie avec Sylviane Ghislain, née le 28 mai 1911 à Saint-Quentin (Aisne). Ils ont deux enfants : Liliane, née le 7 septembre 1934, et Denis, né le 12 août 1936, tous deux à Frignicourt, commune limitrophe au sud de Vitry-le-F.

Au moment de l’arrestation du chef de famille, celle-ci est domicilié au 62, rue du Docteur-Thomas à Reims, à proximité de la voie ferrée.

Cheminot, mécanicien ou chauffeur de route au dépôt SNCF de Reims (agent n° 43 824), Roland Soyeux est un militant très connu de la cellule d’entreprise du Parti communiste, notamment au moment desaccords de Munich (septembre 1938).

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Reims. La gare (dans les années 1930 ?).
Carte postale non datée. Collection Mémoire Vive.

Après l’armistice, il fonde le premier groupe de résistance de la SNCF à Reims, avec Maurice Roussel, René Manceau (déportés le 6 juillet 1942), et Gaston Lelaurain (arrêté dès le 24 juin 1941, déporté en 1943 à Oranienbourg où il meurt en 1945).

Le jeudi 26 février 1942, vers 8 heures du matin, en rentrant chez lui après son travail de nuit, Roland Soyeux est arrêté sans explication par deux Feldgendarmes. Pris comme otage en représailles après des attentats contre des soldats allemands à Chalon-sur-Saône et à Montceau-les-Mines, en même temps que dix-sept autres Marnais (membres de la communauté juive, militants syndicaux et politiques dont Jules Huon, Marcel Gauthier, René Manceau, Félix Reillon, Maurice Roussel et Henri Roy – tous suspectés d’activité communiste clandestine et futurs compagnons de déportation), Roland Soyeux est d’abord conduit au siège de la Gestapo, rue Jeanne d’Arc, puis à la Maison d’arrêt de Reims, boulevard Robespierre, et enfin à la prison de Châlons-sur-Marne (à vérifier…).

Le 5 mars, il est transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager), où il est enregistré sous le matricule n° 3676.

Entre fin avril et fin juin 1942, Roland Soyeux est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Roland Soyeux est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46113, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

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Portail du sous-camp de Birkenau, secteur B-Ia, semblable
à celui du secteur B-Ib par lequel sont passés tous les “45000”.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Roland Soyeux est dans la moitié des déportés du convoi sélectionnés pour rester dans ce sous-camp, alors que les autres sont ramenés à Auschwitz-I (voir ci-dessous le témoignage de Guy Lecrux).

Roland Soyeux meurt le 14 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1].

Le 27 septembre 1946, Guy Lecrux, cheminot de Reims, rescapé du convoi, signe une attestation selon laquelle Roland Soyeux est mort à Auschwitz-Birkenau avant le 4 mars 1943. À plusieurs reprises, il rédigera des certificats semblables afin que la veuve de son camarade puisse faire avancer des dossiers administratifs de pension (15 février 1947, 13 décembre 1948). Le 24 décembre 1946, dans une lettre adressée au chef du bureau de l’état civil déporté du ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre, il explicite sa certitude. « 1/ J’ai connu Monsieur Soyeux au camp de Compiègne (Frontstalag 122), où il est arrivé le 3 mars 1942, en qualité d’interné politique. 2/ Nous avons été déportés ensemble le 6 juillet 1942 au camp d’Auschwitz (Haute-Silésie) où nous sommes arrivé le 9 juillet. / Notre convoi fut coupé en deux le 12 juillet, une partie dirigée sur l’annexe Birkenau, dont Monsieur Soyeux, et l’autre restant au camp central, dont moi-même. 4/ M’étant rendu à Birkenau en novembre 1942, j’appris par des camarades que Monsieur Soyeux était entré à l’infirmerie à la suite de mauvais traitements. /5 Le 4 mars 1943, les Français survivants de Birkenau, malades ou non, furent ramenés au camp central au nombre de vingt-deux. Monsieur Soyeux n’était pas parmi eux. 6/ Tous les Français du camp d’Auschwitz et de ses annexes ayant été mis en quarantaine le 14 août 1943, nous étions à ce moment cent-vingt-deux, et nous n’avons pas retrouvé Monsieur Soyeux. 7/ Ayant interrogé des internés allemands travaillant au secrétariat du camp sur ce qu’il était advenu des autres Français de notre transport, ils nous répondirent qu’aucun n’était parti en transport [vers un autre camp, ils sont] donc décédés. Monsieur Soyeux est donc décédé entre fin octobre 1942 et mars 1943. » (quelques dates sont décalées d’un jour ou deux)

Le 1er aout 1946, le général Bonneau, délégué général des Forces françaises combattantes de l’intérieur (FFCI) délivre une attestation certifiant que Roland Soyeux est « lié au service […] en qualité d’agent demission de 3ème classe ». Le 13 septembre suivant, le lieutenant Lucien Bazin, responsable départemental du réseau “Turma-Vengeance” (secteur 130), certifie que Roland Soyeux « figure sur les dossiers des milices patriotiques […], groupement passé sous [son] contrôle pendant la clandestinité ». Le 30 juin 1948, le bureau des FFCI délivre une nouvelle attestation d’appartenance de Roland Soyeux, comme agent P.1 au réseau Résistance Fer d’octobre 1940 à février 1942. Le 26 novembre 1953, sur un “certificat de cause à effet”, le liquidateur de Résistance Fer indique comme motif de l’arrestation : renseignements et sabotages.

Le 28 janvier 1947, un officier d’état civil du ministère dresse un acte de décès au nom de Roland Soyeux enregistrant comme date « le mois de mars 1943 » sur la base des éléments d’information figurant au dossier. En février, la mention « mort pour la France » est apposée en marge de l’acte de décès.

Le 2 avril suivant, Sylviane Soyeux – qui a deux enfants à charge – se remarie avec Joseph Dien, également employé de la SNCF.

Le 4 décembre 1953, Sylviane Dien, veuve Soyeux, signe un formulaire de demande d’attribution du titre de déporté résistant au nom de son ancien mari et en tant que tutrice de son enfant mineur. Le 14 juin 1954, la Commission départementale des déportés et internés politiques émet un avis favorable, suivi par la commission nationale le 18 novembre 1955 (attestations et enquête désignent sans réserve Roland Soyeux comme résistant). Le 14 décembre suivant, la demande est acceptée par le ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre et, le 25 janvier 1956, le chef du bureau des déportés et des statuts divers envoie une carte de déporté résistant délivrée à « Madame Dien Sylviane » (n° 1018.28448).

Après la guerre, une plaque commémorative est apposée à l’ancien domicile du cheminot déporté : « Ici demeurait Roland Soyeux, patriote mort en déportation au camp de Birkenau (Allemagne) 1912-1943 ».

Son nom figure également sur la plaque apposée en gare de Reims « À la mémoire des agents SNCF tués pour faits de guerre » et sur celle apposée dans la salle de réunion de la Bourse du Travail de Reims (devenue Maison régionale des syndicats), au 13 boulevard de la Paix, « À la mémoire de nos camarades tombés dans la lutte pour la liberté, victimes de la barbarie nazie » (ce dernier adjectif ayant remplacé “barbarie allemande”).

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 27-09-2003).

Notes :

[1] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

 

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 366 et 420.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour Mémoire Vive, citant : Recherche de Jocelyne Husson, professeur à Reims – Liste (incomplète) du convoi (archives FNDIRP) – Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier national des déplacés de la Seconde guerre mondiale).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1151 (30489/1942).
- Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen : dossier de Roland Soyeux (21 p 540 378), recherches de Ginette Petiot (message 05-2013).
- Site Mémorial GenWeb, relevés d’Alain Girod (11-2002 ; photo) et de Bernard Butet (10-2009 ; photo).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 23-09-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Roland SOYER – (46112 ?)

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Roland Soyer en 1931. © Collection Michel Winkel, son neveu.

Roland Soyer en 1931.
© Collection Michel Winkel, son neveu.

Roland, Henri, Anatole, Soyer naît le 7 février 1911 à Fouilloy (Oise – 60) – village traversé par la route nationale 15 bis – fils de Henri Soyer, 33 ans, employé des chemins de fer à la Compagnie du Nord, et de Marguerite Daverton, son épouse, 26 ans, couturière (il est possible que celle-ci meurt en couches). Roland a trois sœurs, Liliane, née en 1904, Madeleine, née en 1905, et Cécile, née en 1907.

Tout au long de la Première Guerre mondiale, leur père est mobilisé comme « affecté spécial” sur le réseau du Nord.

Mais il décède le 9 septembre 1921 à Cailly (Seine-Inférieure / Seine-Maritime).

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Roland Soyer enfant. © Collection Michel Winkel, son neveu.

Roland Soyer enfant.
© Collection Michel Winkel.

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Roland Soyer conscrit. © Collection Michel Winkel.

Roland Soyer conscrit.
© Collection Michel Winkel.

Au moment de son arrestation, Roland Soyer est domicilié à Abancourt (60) ; son adresse reste à préciser.

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Mariage de Roland et Émilia. © Collection Michel Winkel.

Mariage de Roland et Émilia.
© Collection Michel Winkel.

Marié à Émilia, ils ont deux enfants : Pierre et Rolande.

Roland Soyer est cheminot, homme d’équipe à la gare d’Abancourt (désigné comme aiguilleur sur un document).

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Abancourt. La gare. Carte postale envoyée en 1936. Coll. Mémoire Vive.

Abancourt. La gare. Carte postale envoyée en 1936. Coll. Mémoire Vive.

La police ne lui connaît pas d’activité politique.

En septembre 1941, il est surpris au moment où il dessine, « dans un lieu public [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][?], les attributs du Parti communiste ». Il prend alors « l’engagement de ne plus se livrer à aucune propagande subversive ».

Le 17 octobre, le commissaire de police spécial de Beauvais remet une liste des communistes de l’arrondissement à la Kreiskommandantur. Roland Soyer y est inscrit parmi quatre cheminots d’Abancourt.

Le 20 octobre, Roland Soyer est arrêté et rapidement interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Il y est enregistré sous le matricule n° 1837.

Le camp vu depuis le mirador central. Les “politiques français” étaient dans le secteur constitué par la ligne de bâtiments de gauche (“camp communiste”) Photo Hutin, Compiègne, carte postale. Droits réservés.

Le camp vu depuis le mirador central.
Les “politiques français” étaient dans le secteur constitué par la ligne de bâtiments de gauche (“camp communiste”)
Photo Hutin, Compiègne, carte postale. Droits réservés.

Le 20 février 1942, le chef de la Feldkommandantur 580 à Amiens – ayant autorité sur les départements de la Somme et de l’Oise – insiste auprès du préfet de l’Oise, Paul Vacquier [1], afin que la fiche de chaque interné du Frontstalag 122 pour activité communiste demandée à l’administration préfectorale indique « son activité politique antérieure (très détaillée si possible), ainsi que les raisons qui militent pour ou contre sa prompte libération du camp d’internement ».

Le 10 mars, le préfet de l’Oise écrit au Ministre secrétaire d’État à l’Intérieur pour lui transmettre ses inquiétudes quant à cette demande : « Étant donné que parmi les internés du camp de Compiègne une vingtaine déjà ont été fusillés en représailles d’attentats commis contre les membres de l’armée d’occupation, il est à craindre que ces autorités aient l’intention de se servir de mon avis pour désigner de nouveaux otages parmi ceux pour lesquels j’aurais émis un avis défavorable à la libération. Me référant au procès-verbal de la conférence des préfets régionaux du 4 février 1942, qui précise “qu’en aucun cas les autorités françaises ne doivent, à la demande des autorités allemandes, procéder à des désignations d’otages”, j’ai l’honneur de vous prier de vouloir bien me donner vos directives sur la suite qu’il convient de réserver à la demande dont je suis saisi… »

Le 24 avril, Paul Vacquier transmet à la Feldkommandantur 580 les notices individuelles concernant les « personnes internées au camp de Compiègne, figurant sur la liste [qui lui a été] communiquée et domiciliées dans le département de l’Oise » qui mentionnent uniquement « des renseignements concernant l’état civil, la parenté et la situation matérielle ». En outre, le préfet demande quelle suite a été réservée aux demandes de libération d’internés français qu’il a présentées dans ses lettres des 14 et 17 avril. Une notice concernant Roland Soyer figurait dans le deuxième courrier avec le commentaire : « Sa libération ne constituerait aucun danger pour l’ordre public et la sécurité des troupes d’occupation. »

Le 13 mai 1942, répondant à des directives concernant la désignation d’otages par les autorités allemandes, le préfet de l’Oise demande au chef du gouvernement, ministre secrétaire d’État à l’Intérieur (Laval ?) d’intervenir afin de faire libérer 24 « personnes (…) non susceptibles d’être dangereuses ». Parmi celles-ci, figure Roland Soyer, « impulsif qui a été signalé comme propagandiste ; mais ne paraît pas dangereux ».

Enfin, le 29 juin, Paul Vacquier écrit à la Feldkommandantur 580 pour essayer d’obtenir la sortie du Frontstalag 122 de soixante-quatre ressortissants de son département – dont Roland Soyer – au motif « qu’aucun fait matériel d’activité communiste n’a été relevé à leur encontre depuis l’arrivée des forces allemandes dans la région », envisageant la possibilité d’interner certains d’entre eux « dans un camp de concentration français ». Sa démarche ne reçoit pas de réponse.

Le mal est probablement déjà fait : quand elles ont procédé à des arrestations dans l’Oise entre juillet et septembre 1941, les forces d’occupation ne disposaient-elles pas déjà d’informations et d’appréciations transmises par certains services de la police française ? N’en ont-elles pas obtenu d’autres par la suite ? Le préfet craignait la fusillade. Ce sera la déportation.

Entre fin avril et fin juin 1942, Roland Soyer est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures puis repart à la nuit tombée : Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Roland Soyer est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46112 selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Roland Soyer.Il meurt à Auschwitz à une date inconnue, très probablement avant la mi-mars 1943 [2].

Son nom est inscrit sur la plaque dédiée par « la SNCF à ses morts, guerre 1939 1945 » et apposée dans la salle d’attente de la gare d’Abancourt, ainsi que sur une plaque sur le monument aux morts de Fouilloy.

À une date restant à préciser, le conseil municipal d’Abancourt a donné son nom à une rue de la commune.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 27-09-2003).

Notes :

[1] Paul Vacquier, nommé préfet de l’Oise le 22 mai 1940, au début de l’offensive allemande, cherche ensuite à maintenir un semblant de souveraineté française à l’échelon local, ce qui lui vaut son départ le 30 octobre 1942.

[2] Date de décès inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant de Roland Soyer, c’est 15 octobre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 369 et 420.
- Archives départementales de l’Oise, site internet : recensement de 1906 et de 1911 à Fouilloy.
- Archives départementales de l’Oise, Beauvais ; cote 33W 8253/1, exécutions d’internés, camp de Royallieu, mesures contre les communistes ; cote 141w 1162, Internement administratif.
- Archives départementales de la Somme, Amiens, correspondance de la préfecture sous l’occupation, cote 26w809.
- Site Mémorial genWeb, relevé de Cédric Hook (11-2004).
- Blog de l’association Rail et Mémoire, et message de Véronique Desormeaux (06-2015).
- Cheminots victimes de la répression 1940-1945, mémorial, ouvrage collectif sous la direction de Thomas Fontaine, éd. Perrin/SNCF, Paris, mars 2017, pages 1387-1388.
- Message de Michel Winkel, fils de Cécile, sœur de Roland Soyer (06-2015).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 28-09-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Léo SOUQUE-LAFORGUE – (46111 ?)

Léo, Robert, Joseph, Souque-Laforgue naît le 10 ou 13 août 1913 à Bègles (Gironde – 33), chez ses parents, André Souque-Laforgue, 28 ans, chaudronnier, et Marguerite Bergez, 26 ans, vestonnière, son épouse, domiciliés au 37 rue Chagneau.

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Léo Souque-Laforgue (1913-1942).
Collection Monic Mercier. Droits réservés.

De mars 1927 à février 1933, André Souque-Laforgue est domicilié rue de l’Élysée à Bègles.

Le 6 juin 1936, à Floirac (33), Léo Souque-Laforgue épouse Pilar Vilz (?), appelée couramment Paulette, née en 1914. Ils n’auront pas d’enfant.

Le 1er août 1936, il est embauché par la Compagnie du chemin de fer du Paris-Orléans (« P.O. », puis SNCF le 1-01-1938). Il devient chaudronnier aux ateliers de Vitry (Les Ardoines [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][2]).

À partir de 1937 et jusqu’à son arrestation, il est domicilié au 33, avenue de Rouilly (devenue av. André-Maginot) à Vitry-sur-Seine [1] (Seine / Val-de-Marne).

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Dans un port de Normandie (Trouville ?) vers 1938,
de gauche à droite : Léonie Guichard, épouse
d’un collègue, Robert Mercier, collègue et ami,
avec son épouse Suzanne et son fils Monic
(né en 1926) ;
accroupis à leurs pieds,
“Paulette” et Léo Souque-Laforgue.
Collection Monic Mercier. Droits réservés.

Communiste, il est trésorier de cellule.Dans la clandestinité, il est membre d’un groupe de trois. Selon la police, des réunions se tiennent à son domicile. Il est considéré par les Renseignements Généraux comme un « meneur particulièrement actif ».

Le 23 mars 1941, une perquisition est effectuée à son domicile au cours de laquelle il est trouvé quatre brochures « toutes récentes » (1er trimestre 1941) : La Vie du PartiManifeste du P.C. février 1941Le Parti communiste a vingt ans, Comment se défendre ?

Le 8 avril, Souque-Laforgue est convoqué au commissariat de police de la circonscription d’Ivry pour être informé qu’il est « tenu responsable par les autorités allemandes des tracts et affiches séditieuses non lacérées » sur un secteur autour de l’église de Vitry. Mais une autre source rapporte qu’il est arrêté, avec Gouin, « en diffusant du matériel antiallemand ».

Le 26 juin 1941, il est arrêté (probablement à son domicile) dans le cadre d’une vague d’arrestations visant 92 militants ouvriers. Le préfet de police a signé l’arrêté ordonnant son internement administratif « en application du décret du 18 novembre 1939 ». Mais, en réalité, il est pris dans le cadre d’une vaste opération menée en concertation avec l’occupant. En effet, pendant quelques jours, plusieurs dizaines de militants de Paris et de la “petite couronne” arrêtés dans les mêmes conditions sont aussitôt conduits dans la cour de l’Hôtel (de) Matignon [3], alors désigné comme siège de la Geheime Feldpolizei (GFP), pour y être « mis à la disposition des autorités d’occupation » [4]. Tous sont ensuite regroupés au Fort de Romainville, sur la commune des Lilas (Seine / Seine-Saint-Denis), premier élément du Frontstalag 122 ; considérés comme étant en transit, ils ne sont pas enregistrés sur les registres du camp. Le lendemain, ils sont conduits à la gare du Bourget et un train les transporte à Compiègne (Oise), où ils sont parmi les premiers internés du camp allemand de Royallieu, administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager) [5].

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures puis repart à la nuit tombée : Francfort-sur-le-Main (), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Léo Souque-Laforgue est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46111, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Léo Souque-Laforgue.On ignore la date exacte de sa mort à Auschwitz ; probablement avant la mi-mars 1943 [6].

(aucun des treize “45000” de Vitry n’est revenu).

Un temps, ses camarades de la SNCF l’ont cru « parti aux organisations Todt en Ukraine ».

En 1946, “Paulette” (Pilar) Souque-Laforgue habite toujours à la même adresse. Plus tard, elle se remarie et part en province

Une attestation d’activité de Résistance semble avoir été rédigée après la guerre au titre de la Résistance Fer de la France Combattante.

Dans les ateliers de Vitry de la SNCF, le nom de Léo Souque-Laforgue est inscrit sur la stèle érigée « A la mémoire des agents de l’atelier tués par faits de guerre, 1939-1945 », parmi les résistants déportés.

Son nom est inscrit sur le monument « À la mémoire de Vitriotes et des Vitriots exterminés dans les camps nazis » situé place des Martyrs de la Déportation à Vitry (« SOUQUE Léo »).

Une plaque dédiée aux “45000” vitriots a été apposée au dos du monument. Elle est parfois masquée par la végétation.

Une plaque dédiée aux “45000” vitriots a été apposée
au dos du monument. Elle est parfois masquée par la végétation.

La plaque apposée pour le 50e anniversaire de la libération des camps (avril 1995).

La plaque apposée pour le 50e anniversaire de la libération des camps (avril 1995).

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 27-09-2003).

Notes :

[1] Vitry-sur-Seine : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Les Ardoines : une grande partie des ateliers, déployés sur 15 hectares, est aujourd’hui (2007) désaffectée. Ceux qui sont encore utilisés constituent un centre de maintenance pour les rames de la ligne C du RER.

[3] L’hôtel Matignon, 57 rue de Varenne (Paris 7e) : le 8 septembre 1940, les Renseignements généraux de la préfecture de police constatent la réquisition de l’hôtel pour le bureau de cantonnement des hommes de la police militaire secrète : Geheime Feldpolizei – Dienstelle – Männer-Unterkunft (source : Cécile Desprairies, Paris dans la Collaboration, éditions du Seuil, mars 2009, page 268).

[4] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante. En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht. Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. Fin août, 200 d’entre eux font déjà partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

[5] Les arrestations de la fin juin 1941 dans le département de la Seine, trois témoignages :
Jean Lyraud :  (déporté à Sachsenhausen le 24 janvier 1943). Le 26 juin, à 5 heures du matin, il est réveillé par des policiers français : « Veuillez nous suivre au poste avec une couverture et deux jours de vivres. » Un autobus le prend bientôt avec trois autres personnes arrêtées. Le véhicule fait le tour des commissariats de Montreuil et du 11e arrondissement. Après un crochet à l’hôtel Matignon où les “internés administratifs” sont livrés à l’armée d’occupation, c’est le transport jusqu’au Fort de Romainville où ils passent la nuit dans les casemates transformées en cachots. « Le lendemain 27 juin dans l’après-midi, nous embarquons en gare du Bourget dans des wagons spéciaux pour Compiègne. Nos gardes ont le revolver au poing et le fusil chargé, prêts à faire feu. Dans la soirée nous arrivons au camp. Quelques jours après, d’autres contingents de la région parisienne nous rejoignent. »
Henri Pasdeloup (déporté à Sachsenhausen le 24 janvier 1943), cheminot de Saint-Mihiel (Meuse), est arrêté le 23 juin 1941 par la Gestapo qui le conduit à la prison de la ville. Le 27 juin, avec d’autres détenus emmenés à bord de deux cars Citroën, il arrive devant le camp de Royallieu vers 16 h 30 : « À l’arrivée face au camp, nos gardiens nous font descendre. Alignement sur la route, comptages et recomptages. En rangs par trois nous passons les barbelés… À 19 heures, environ 400 prisonniers en provenance de la région parisienne entrent en chantant L’Internationale… Le lendemain 28 juin, réveil à 7 heures : contrôle d’identité, toise, matricule. J’ai le numéro 556. Pour notre groupe de la Meuse, cela va de 542 à 564. Ceux de la région parisienne, bien qu’arrivés après nous, sont immatriculés avant… »
Henri Rollin : « Le 27 juin 1941, vers 6 heures de matin, ma femme et moi nous sommes réveillés par un coup de sonnette. Trois inspecteurs de la police française viennent nous arrêter ; perquisition rapide sans résultat (nous avions la veille au soir distribué les derniers tracts que nous avions). Nous arrivons à l’hôtel Matignon où nous trouvons de nombreux cars et camions, résultat d’une rafle dans toute la région parisienne. Nous sommes remis par la police française aux autorités allemandes. Au moment de ma remise aux Allemands, j’ai aperçu qu’on leur donnait une petite fiche portant mon nom et la mention “communiste”, soulignée à l’encre rouge. Nous subissons un court interrogatoire d’identité… Attente… Vers la fin de l’après-midi, départ en car. Arrivée au fort Romainville, fouille, identité. Départ de Romainville le 1er juillet, au matin, par train spécial et bondé au Bourget, arrivée l’après-midi à Compiègne. Le lendemain, même cérémonie, refouille et identité, ensuite la vie de camp… ».

[6] Date de décès inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, pris entre l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès pour des déportés et la nécessité d’établir les documents nécessaires aux familles, les services français d’état civil ou des Anciens combattants et victimes de guerre (pensions) ont souvent fixé des dates fictives, sur la base du témoignage généralement approximatif des rescapés. C’est ainsi qu’a été établie la date du 15 novembre 1942 pour Léo Souque-Laforgue.

Sources :

- Informations collectées par José Martin (frère d’Angel Martin) pour Roger Arnould (FNDIRP), 1973.
- Communication de Monic Mercier, fils de Robert Mercier, collègue d’atelier et ami de Léo Souque-Laforgue (06-2008).
- 1939-1945, La Résistance à Vitry, Ville de Vitry-sur-Seine, 1992, page 19.
- Hervé Barthélémy, association Rail et Mémoire (journal Notre Métier, de 1946).
- Archives communales de Vitry-sur-Seine : listes électorales 1937, 1945.
- Musée de la Résistance Nationale, Champigny-sur-Marne : fiche de police de Léo Souque-Laforgue au commissariat d’Ivry-sur-Seine.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 390 et 420.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, liste des internés communistes (BA 2397) ; dossier individuel au cabinet du préfet (1 W 709-26253).
- Base de données des archives historiques SNCF : région Sud-Ouest, agents arrêtés par les autorités allemandes (0303LM0015-002, vues 88-100/339).
- Cheminots victimes de la répression 1940-1945, mémorial, ouvrage collectif sous la direction de Thomas Fontaine, éd. Perrin/SNCF, Paris, mars 2017, pages 1384-1385.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 26-02-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Henri SOUPION – 46110

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Henri Soupion.

Henri, Célestin, Joseph, Soupion naît le 1er avril 1898 à Angers (Maine-et-Loire), chez ses parents, Joseph Soupion, 28 ans, domestique puis manœuvre, et Louise Plassé, 23 ans, chemisière, son épouse, domiciliés au 2, cloître Saint-Martin. Plus tard, après avoir vécu au 54, rue Eblé à Angers. ceux-ci habiteront à Paris 18e.

Henri Soupion commence à travailler comme mouleur en fonte.

Pendant un temps, il habite à Beaumont-sur-Oise (Seine-et-Oise / Val d’Oise).

Le 15 avril 1917, Henri Soupion, initialement mobilisé au 3e dépôt de la Flotte, est incorporé aussitôt [fusion_builder_container hundred_percent= »yes » overflow= »visible »][fusion_builder_row][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][?] au 81e régiment d’artillerie lourde. Il passe successivement au 105e et 117e RAL, puis au 11e régiment d’artillerie de campagne. Ensuite, il est affecté au 111e RAL, puis aux 503e et 506e régiments d’artillerie d’assaut. Le 17 juin 1920, il est renvoyé dans ses foyers, titulaire d’un certificat de bonne conduite. Il est possible que ce soit au cours de sa mobilisation qu’il obtienne le permis de conduire les automobiles et les poids-lourds.

En septembre 1920 [?], Henri Soupion habite au 55, rue Jean Jaurès à Bezon (Seine-et-Oise / Val-d’Oise).

Le 23 novembre 1922, à Rennes (Ille-et-Vilaine – 35), alors qu’il habite au 49, rue du Mail, il se marie avec Eugénie Maury, née le 7 juillet 1889 à La Bouéxière (35), couturière, veuve de Jules Guillemot, “Mort pour la France” le 11 mai 1915 à Reclincourt (Pas-de-Calais). Le père et les deux oncles d’Eugénie sont eux-même mouleurs en fonte. En février 1923, le couple demeure à  Servon-sur-Vilaine (35).

Le 24 juin 1924, alors qu’ils habitent au 19, rue Pouchet, à Paris 17e, Eugénie met au monde leur fille, Odette, Geneviève, née au 35, rue Doudeauville, à Paris 18e (?).

En septembre 1929, la famille habite au 42, route de Choisy à Antony (Seine / Hauts-de-Seine). En 1931, Henri est chauffeur chez Talbot (l’usine automobile ?), Eugénie est épicière.
En janvier 1935, elle demeure au 1, rue Voltaire à Fresnes [1] (Seine / Val-de-Marne).
Henri Soupion connaît de petits déboires avec la Justice. Le 16 décembre 1933, la 10e chambre du tribunal correctionnel de la Seine le condamne à une amende pour « ouverture illicite d’un débit de boisson » commis le 24 juillet 1932. Le 9 octobre 1935, la 10e chambre le condamne à une petite amende pour « outrage à agents » commis le 2 juin précédent.
En 1936, la famille est recensée au 73, avenue de Versailles à Fresnes. Henri Soupion déclare de nouveau travailler comme mouleur, son épouse est alors déclarée comme employée dans une épicerie à (Paris ?). À une date restant à préciser, la famille emménagera au 8 avenue de Versailles.
Aux élections partielles des 27 juin et 4 juillet 1937, Henri Soupion est élu conseiller municipal communiste de Fresnes, sur la liste dirigée par Maurice Catinat. Il est alors déclaré comme commerçant (épicier, au moment de son arrestation).

Hebdomadaire communiste du “rayon” de Villejuif.

Hebdomadaire communiste du “rayon” de Villejuif.

Le 23 septembre 1939, Henri Soupion, affecté au bataillon de l’Air 109 depuis le décret de mobilisation générale, ne peut se rendre à la dernière réunion du conseil municipal. Trois jours plus tard, le 26 septembre, le Parti communiste est dissous par un décret-loi.

Le 5 octobre, comme pour la plupart des villes de la “banlieue rouge », le conseil municipal de Fresnes est “suspendu” par décret du président de la République (sur proposition du ministre de l’Intérieur) et remplacé par une Délégation spéciale nommée par le préfet.

Le 3 février 1940, le conseil de préfecture de la Seine déchoit de leur mandat les 22 élus municipaux de Fresnes, dont Henri Soupion, pour n’avoir pas « répudié catégoriquement toute adhésion au Parti communiste » ; avec effet rétroactif au 21 janvier.

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Le Populaire, quotidien édité par la SFIO,
édition du 17 février 1940.
Archives de la préfecture de police, Paris.

Le 5 octobre 1940, Henri Soupion est appréhendé par la police française, comme onze autres anciens élus et trois membres du PC de Fresnes, lors de la grande vague d’arrestations organisée dans les départements de la Seine et de la Seine-et-Oise par les préfets du gouvernement de Pétain contre des hommes connus avant guerre pour être des responsables communistes (élus, cadres du PC et de la CGT) ; action menée avec l’accord de l’occupant. Après avoir été regroupés en différents lieux, 182 militants de la Seine sont conduits le jour-même en internement administratif au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé à cette occasion dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt.

Tel qu’il est photographié, le pavillon Adrien Bonnefoy Sibour ne laisse pas entrevoir la grande forêt qui l’entoure et l’isole de la campagne environnante.

Tel qu’il est photographié, le pavillon Adrien Bonnefoy Sibour ne laisse pas entrevoir la grande forêt qui l’entoure et l’isole de la campagne environnante.

Conçus à l’origine pour 150 malades, les locaux sont rapidement surpeuplés : en décembre 1940, on compte 524 présents, 600 en janvier 1941, et jusqu’à 667 au début de juin.

Le 29 mars 1941, quinze épouses de détenus Fresnois adressent une lettre commune au préfet de la Seine afin d’être autorisées à leur rendre visite avec leurs enfants ; « attendu que les prisonniers de droit commun (criminels, voleurs) ont droit à des visites, nous ne pouvons comprendre que nos maris et pères, étant des hommes honnêtes, n’y ont pas droit. » Le 11 avril, le chef de cabinet du préfet demande au commissaire de police de la circonscription de Choisy-le-Roi d’ « avertir les pétitionnaires, en la personne de Mme Soupion » (probablement à l’origine de la lettre) que « le règlement intérieur du camp (interdit) les visites aux détenus. »

Début août, Eugénie Soupion écrit au préfet de Seine-et-Oise afin de solliciter une autorisation de rendre visite à son mari au camp accompagnée de sa fille, en proposant de venir le 15 août : « Je suis dans le commerce et j’ai beaucoup de choses personnelles à traiter avec [lui] ». Elle donne comme adresse le 8, avenue de Versailles, à Fresnes.

Le 6 septembre, Henri Soupion fait partie d’un groupe de 150 détenus d’Aincourt (dont 106 de la Seine) transférés transférés au camp français (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne), pour l’ouverture de celui-ci.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

À Fresnes, un groupe clandestin de treize jeunes de Fresnes se constitue réunissant d’anciens adhérents des JC et des Jeunes filles de France, parmi lesquels Lucette Catinat, 17 ans, fille de Maurice, et d’autres enfants d’internés : Odette Soupion, 17 ans, fille de Henri, Andrée Denizou, 21 ans, et René Denizou, 19 ans, enfants de Géry, Raymond Villeminot, 21 ans, fils de Louis. André Ch., de nouveau secrétaire de la cellule, reçoit leur cotisation – 2 ou 3 francs par mois, peut-être destinés au détenus d’Aincourt – depuis mai 1941 et rassemblée par Lucette Nicolas. S’il reçoit un peu de propagande, le groupe n’en diffuse pas.

Le 20 novembre, vers 21 heures, à la suite d’une enquête de police (dénonciation ?), André Ch. est arrêté à son domicile. Interrogé le lendemain dans les bureaux des renseignements généraux à la préfecture de police, il met en cause ses camarades fresnois ainsi que René Plaud, de Villejuif mais arrêté à Montreuil-sous-Bois, et “Ginette”, Marie Matéos, 23 ans, domiciliée rue de la Santé, à Paris 13e, chef de secteur avec laquelle il a lui-même rendez-vous le vendredi 21 novembre à la station de métro Tolbiac. Ce même jour, douze jeunes gens de Fresnes sont appréhendés à leurs domiciles respectifs (généralement chez leurs parents), ce qui suscite une certaine émotion parmi la population. Raymond Villeminot, absent de chez sa mère, n’est pas arrêté.

Aucun fait délictueux n’ayant pu être retenu à la charge de Raymond Saint-Lary au cours de l’enquête, celui-ci est le seul a être relaxé le 23 novembre. Le même jour, les quinze autres jeunes gens ayant reconnu les faits, dont Odette Soupion, sont inculpés d’infraction au décret du 26 septembre 1939 et conduits au dépôt de la préfecture de police, à la disposition du procureur de la république. Suite à vérifier…

Le 9 février 1942, Henri Soupion est parmi les 52 « communistes » (dont 36 seront déportés avec lui) remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits par des Feldgendarmes à la gare de Poitiers. Enfermés dans deux wagons à bestiaux, ils sont transférés – via Paris – au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Henri Soupion est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Henri Soupion est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46110 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Henri Soupion est dans la moitié des déportés du convoi sélectionnés pour rester dans ce sous-camp, alors que les autres sont ramenés à Auschwitz-I.

Le 2 novembre suivant, dans la chambre (Stube) n°5 du Revier de Birkenau (Block n° 8 – en brique – du secteur BIb), où se trouvent également Czapla, Faudry, Flageollet, Nicolazzo et Royer, Henri Soupion reçoit 6 comprimés de charbon (Kolbe) et 3 gouttes d’Urotropine. Dans ce dispensaire, le SS-Rottenführer Franz Schulz exécute certains détenus avec une injection mortelle dans le cœur…

Henri Soupion meurt – à Birkenau – le 4 décembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [2].Le 30 septembre 1944, lors de l’assemblée plénière du Comité local de libération, il est encore considéré comme «  conseiller déporté en Allemagne » (supposé vivant… ?). Son épouse Eugénie (alors domiciliée au 8, avenue de Versailles) y est présentée comme conseillère. À la séance du 1er octobre de cette instance, faisant fonction de conseil municipal, elle est désignée à la Commission d’hygiène et travaux. Henri Soupion est noté comme « absent excusé : interné politique, déporté en Allemagne ».

Seul rescapé fresnois de son convoi, Raymond Saint-Lary annonce à la population de Fresnes le décès des camarades déportés avec lui, dont celui d’Henri Soupion.

Le 11 novembre 1945, le nom de celui-ci est inscrit sur la plaque apposée à l’extérieur de la mairie : « Hommage du conseil municipal et de la population de Fresnes à leurs conseillers municipaux victimes de la barbarie Nazie », ainsi que sur le monument aux morts de Fresnes, à l’intérieur du cimetière, parmi les “déportés politiques et fusillés”.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 27-09-2003).

Eugénie Soupion décède à Nogent-le-Roi (Eure-et-Loir) le 9 janvier 1980.

Notes :

[1] Fresnes : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite au Journal Officiel : dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – s’appuyant sur le ministère des Anciens combattants qui avait collecté le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. Concernant Henri Soupion, c’est le 15 décembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. La parution au J.O. rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts ; comme sur la plaque de la mairie de Fresnes.

Sources :

- Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, Élus municipaux de Paris et de la banlieue de 1919 à 1940, Les Éditions de l’Atelier/Les Éditions Ouvrières, 1990-1997, CD-rom, version 3.61 (citant : Arch. dép. Seine, D M3 et Versement 10451/76/1 – Arch. com. Fresnes)
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 355, 388 et 399.
- Archives communales de Fresnes : recensement de 1935, liste de candidats aux élections de 1937, listes de déportés…, recherches conduites par Dominique Couderc.
- Françoise Wasserman, Juliette Spire et Henri Israël, 1939-1944, Fresnes dans la tourmente, ouvrage édité par l’Écomusée de Fresnes à la suite de l’exposition présentée du 18-10-1994 au 8-05-1995, pages 13, 18 et 19, 50, 120.
- Département de Maine-et-Loire, site internet, archives départementales (AD 49), archives en ligne : registre des naissances du 3e arrondissement d’Angers, année 1898, acte n° 48 (vue 11/100) ; registres matricules du recrutement militaire, bureau d’Angers, classe 1918, matricules de 1501 à 2000, n° 1463 (vue 750/807).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), site du Pré-Saint-Gervais : cartons “occupation allemande” (BA 2374) ; dossiers de la brigade spéciale 1 des renseignements généraux (GB 61), « affaire Ch., Mateos, Plaud et autres » (468).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt, dossier individuel (1w154).
- Archives départementales de la Vienne, Poitiers : camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1150 (43088/1942).
- Site internet Mémorial GenWeb, relevé de Bernard Tisserand (02-2004).
- Jaques Potel, arrière-petit-fils d’un des oncles d’Eugénie Soupion, née Maury (message de rectification, 12-2016 ; copie de l’acte de naissance d’Odette Soupion, reçu de la mairie de Paris, service des archives).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 26-01-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes (FNDIRP) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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Olivier SOUEF – 46109

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Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Olivier Souef naît le 26 juin 1921  à la maternité de Port-Royal, 123 boulevard de Port-Royal, Paris 14e, fils d’Antonin Édouard Souef, 32 ans, comptable dans une banque (pendant un temps sympathisant des Croix de feu) et d’Angèle Gaudefroy, 37 ans, son épouse, violoniste (sympathisante communiste), alors mariés depuis deux ans. Olivier a un frère plus jeune, Claude, né le 18 novembre 1922. La famille habite alors au 8 rue Saint-Vincent-de-Paul (Paris 8e).

En février 1925, la famille s’installe dans un lotissement, la villa du Parc, à Athis-Mons (Seine-et-Oise, Essonne). Olivier suit les cours de l’école primaire de cette commune, dans le groupe Pasteur.

Mais les parents se séparent (ils divorceront).

Au recensement du printemps 1931, Angèle, la mère, vit seule avec ses deux fils. En 1932, tous trois emménagent à Paris (en 1935, le père habite au 8 rue de Castiglione à Paris 1er).

Au moment de son arrestation, Olivier Souef habite encore chez sa mère, au 7, rue de Tournon (3e étage, porte gauche) à Paris 6e. Celle-ci est alors chef du petit orchestre du cinéma Éden Palace (dont l’adresse est à vérifier…).

L’année de leur arrivée à Paris, Olivier est admis au lycée Rollin, dans le 9e arrondissement [/fusion_builder_column][fusion_builder_column type= »1_1″ background_position= »left top » background_color= » » border_size= » » border_color= » » border_style= »solid » spacing= »yes » background_image= » » background_repeat= »no-repeat » padding= » » margin_top= »0px » margin_bottom= »0px » class= » » id= » » animation_type= » » animation_speed= »0.3″ animation_direction= »left » hide_on_mobile= »no » center_content= »no » min_height= »none »][1].

Il s’engage très jeune dans la vie politique, au lendemain du 6 février 1934, et plus activement au moment du Front Populaire et de la Guerre d’Espagne, adhérant aux Jeunesses communistes en 1936.

D’abord responsable du comité des lycéens antifascistes dans son établissement, il est bientôt à la tête de ce comité pour tous les lycées parisiens. En 1937, il participe à la création de l’organisation Lycéens de Paris, liée à l’Union fédérale étudiante (UFE), proche du Parti communiste. Ses amis – Claude Lalet, Claude Dreyfus, Edgard Nahoum (E. Morin), plus tard Tony Bloncourt et Karl (« Carlo ») Schönhaar – le surnomment « Robespierre ». Il affronte des membres des Croix de Feu, mouvement d’extrême-droite.

Secrétaire du cercle des Jeunesses communistes au lycée Rollin, il devient le dirigeant des Lycéens communistes de Paris, puis le responsable national des Lycéens communistes.

En mai 1938, il adhère au Parti communiste qui l’affecte à la cellule Delta du 9e arrondissement.

En mars 1939, Olivier Souef est admis comme étudiant en Lettres à la Sorbonne. Début avril 1939, il est désigné au premier Bureau national de l’Union des étudiants communistes de France (UEC) dont la conférence nationale constitutive se tient à Ivry-sur-Seine. Plus tard, il dira à Pierre Daix qu’il a eu des désaccords avec les autres membres du bureau.

Après la déclaration de guerre (septembre 1939), l’UEC, rejointe par les lycéens issus du Congrès des lycéens anti-fascistes, devient l’Union des étudiants et lycéens communistes (UELC), dont Pierre Hervé aurait été secrétaire national (il s’agit des lycéens des « grandes classes »).

Par crainte des bombardements, les classes préparatoires aux grandes écoles des lycées parisiens sont évacuées vers Rennes (Ille-et-Vilaine). Olivier Souef s’y trouve avec Joseph Récanati. Vers le 20 octobre, il y rencontre Pierre Daix, 17 ans, venant lui de la “prépa” du lycée Henri IV. Celui-ci, qui vient d’adhérer au Parti communiste clandestin, est subjugué par le « vieux » militant qui a réponse à tout et ils deviennent amis. Séparés lors de la débâcle, ils se retrouvent dès leur retour à Paris.

Pour les lycéens, l’Académie de Paris annule l’épreuve du baccalauréat en juin 1940, quand déferle l’offensive allemande.

Après l’armistice, au cours du mois de juillet, de nombreux étudiants rentrent à Paris avant la reprise des cours.

Perspective sur la place de la Sorbonne dans les années 1940. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Perspective sur la place de la Sorbonne dans les années 1940.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Olivier Souef revient à la Sorbonne. Il y obtiendra sa licence de Lettres, parlant le russe presque couramment. En même temps, pour gagner sa vie, il travaille comme surveillant d’externat dans un lycée.

À la Sorbonne, aux côtés de Claude Lalet, il assume des responsabilités au sein du groupe de l’UELC clandestine. Il est bientôt un des principaux animateurs du Mouvement.

La direction clandestine des “Étudiants” demande à Pierre Daix, connu comme adepte du camping, de relancer le Club des Lycéens et étudiants ajistes de la Sorbonne, antenne du Centre laïque des Auberges de la Jeunesse (CLAJ), qui n’a pas été interdit. Daix en devient le secrétaire, avec pour mission d’assurer une couverture légale et provisoire aux “Étudiants” et d’en faire un vivier pour le recrutement. Bientôt, une cinquantaine de jeunes, communistes et sympathisants, dont Carlo Schönhaar, se réunissent « à peu près toutes les semaines pour y discuter de questions sportives (camping) etc. », sans demander d’autorisation. Daix est cependant prêt à saborder le CLAJ s’il devait y avoir compromission avec les autorités allemandes d’occupation, ce qui lui vaut une menace d’exclusion d’un émissaire de la direction du PC qui tente alors une politique légaliste. Daix se rend chez son ami Olivier Souef pour obtenir son soutien moral.

Peu après leur arrivée à Paris, les Allemands veulent imposer leur présence, y compris en y organisant des conférences d’intellectuels collaborationnistes dans les lieux du savoir. Le 26 juillet 1940, le grand amphithéâtre de la Sorbonne s’apprête à accueillir Abel Bonnard, poète fasciste, et Georges Claude, chimiste, membre d’honneur du groupe Collaboration, quand, soudain, une pluie de tracts signés de l’UELC tombe depuis les hauteurs de la salle. Les deux lanceurs de tracts, étudiants en Sciences, Félix Kauer et Christian Rizo, sont rapidement arrêtées puis écroués à la Maison d’Arrêt de la Santé. Ils en sortiront sans jugement le 10 octobre.

Selon Pierre Daix, qui est sous ses ordres dans un groupe de trois, Claude Lalet, étudiant en Histoire et Géographie, détient les clés de la petite bibliothèque de documentation historique de la Sorbonne, sous l’escalier C. Dans ce local minuscule, l’organisation des étudiants se structure et reproduit La Relève, journal de l’UELC, dans un petit format ronéotypé. Olivier Souef et Tony Bloncourt en sont les meilleurs distributeurs, les remettant aux lycéens parisiens, à la sortie des bibliothèques, des cinémas, des piscines et des gymnases. Ils sèment aussi des papillons sur les quais du métro.

Après la rafle de militants opérée par la police française le 5 octobre à Paris et en banlieue, les “Étudiants” décident de créer des « groupes de choc » pour réaliser les tâches difficiles, telles les inscriptions murales. Olivier Souef est responsable du groupe de la Sorbonne, avec Pierre Daix sous ses ordres.

Le 30 octobre, la police allemande arrête le physicien et militant pacifiste Paul Langevin. Le 8 novembre, Olivier Souef, Pierre Daix, Tony Bloncourt, Christian Rizo et quelques dizaines d’étudiants manifestent dans la cour de la Sorbonne, puis devant le Collège de France et enfin sur le boulevard Saint-Michel aux cris de « Libérez Langevin ». Pierre Daix, et Bernard Kirchen ont les poches bourrées de tracts, mais ne reçoivent pas la consigne de les lancer.

Lorsque les étudiants et les lycéens communistes se rallient à l’idée d’une manifestation le 11 novembre 1940 devant l’Arc de triomphe à l’Étoile – événement, où s’affirme déjà la volonté de résistance d’une partie de la jeunesse -, Olivier Souef participe à l’organisation de celle-ci pour ce qui concerne les étudiants communistes. Son frère Claude l’accompagne.

Le lendemain de la manifestation, qui connait un grand succès de participation, toutes tendances politiques confondues, pas un mot dans la presse collaborationniste. Mais le recteur Gustave Roussy, jugé trop laxiste, est remplacé par Jérôme Carcopino. Le lendemain, 12 novembre, la Sorbonne est fermée. Le 16 novembre, un communiqué officiel publié dans la presse indique que les autorités allemandes ont ordonné la fermeture de toutes les institutions universitaires à Paris. Les étudiants parisiens sont astreints à se présenter chaque jour au commissariat. L’Université ne sera rouverte que le 20 décembre.

Le 18 novembre 1940, l’administrateur de la Bibliothèque Nationale signe un courrier dactylographié sur un papier à en-tête de son institution et adressé à Monsieur Langeron, préfet de police : « Mon cher Préfet. L’escalier de la Bibliothèque Mazarine (bibliothèque qui dépend de la Bibliothèque Nationale) est, en ce moment, régulièrement arrosé de brochures communistes et gaullistes. Pour des raisons évidentes, nos gardiens ne peuvent effectuer cette surveillance. Puis-je vous demander d’envoyer, le plus tôt possible, un homme sûr se présenter à M. Lailler, conservateur de la Bibliothèque Mazarine, qui y habite, afin que l’on découvre le ou les initiateurs de cette propagande. J’ai donné des ordres pour que rien ne soit fait, afin que vos services puissent poursuivre les coupables, sans que ceux-ci aient été alertés précédemment. Agréez je vous prie, mon cher Préfet, l’assurance de mon cordial dévouement. »

Deux jours plus tard, le 20 novembre, à 12 h 15, deux inspecteurs de la brigade spéciale des Renseignements généraux, appréhendent Gisèle V., 20 ans, sans profession, alors qu’elle vient de déposer sur une table un tract intitulé « Soutenez les étudiants dans leur lutte ». Dans son sac à main sont découverts cinq autres exemplaires de ce tract et des papillons gommés portant les slogans : « L’Oeuvre paraît mais L’Humanité reste interdite » et « Signal paraît mais L’Humanité reste interdite ». Elle reconnaît être responsable des dépôts précédents de tracts dans la bibliothèque, dont celui de la veille, mais affirme d’abord « être entrée en possession des écrits par le truchement de la poste et ignorer tout de l’expéditeur ».

Interrogée, elle déclare qu’elle vit avec Jean Commère, 20 ans lui aussi, étudiant aux Beaux-Arts, sculpteur, dont elle a une fillette de dix-huit mois, reconnue par lui. Elle tente de le mettre hors de cause en indiquant : « Mon ami […] m’avait déconseillé de procéder à cette diffusion, craignant des ennuis et n’admettant pas que les idées anarchistes puissent se servir des méthodes communistes » [sic].

Les inspecteurs escortent Gisèle V. jusqu’au domicile de la mère de son ami, où tous deux habitent. Celui-ci est interpellé au moment où tous arrivent simultanément dans l’immeuble. Surpris, il admet aussitôt avoir distribué des tracts clandestins et remet un paquet de ceux dont il est porteur. La perquisition de l’appartement amène la découverte d’une machine à polycopier, d’une facture d’achat de cette machine et de papier, d’une feuille de stencil vierge, d’un paquet de tracts ronéotypés intitulés « Vive la liberté », « Soutenez les opinions des étudiants dans leur lutte » — du type de ceux qu’il avait sur lui – et « C’en est assez ». Les deux jeunes gens sont ramenés à la préfecture de police pour y être interrogés. Le lendemain, 21 novembre, le commissaire principal André Baillet, chef de la brigade spéciale, 1re section, officier de police judiciaire, les inculpe conjointement d’infraction aux articles 1 et 3 du décret du 26 septembre 1939 et les fait conduire au Dépôt (la Conciergerie, sous le Palais de Justice, dans l’île de la Cité), à disposition du procureur de la République. Mais Commère a livré aux policiers un rendez-vous fixé le 25 novembre à 14 heures à la station de métro Odéon, au cœur du Quartier latin, au cours duquel il aurait dû recevoir un nouveau paquet de tracts et de papillons gommés.

Les deux mêmes inspecteurs y tendent une souricière et interpellent Claude Lalet, son épouse, Eugénie,  18 ans, comptable sans emploi, et Maurice D., 19 ans, ex-auxiliaire des PTT, alors employé temporaire à la mairie du 3e arrondissement. Dans une serviette en cuir, Eugénie Lalet transporte les tracts, des papillons gommés et une gomme sculptée formant tampon.

Lors de la perquisition au domicile des Lalet, les policiers trouvent – en plus de tracts imprimés et ronéotypés, et de papillons gommés – des feuilles de papier blanc sec et d’autres enduites de colle sur une face et prêtes à être collées, une boîte de lettres en caoutchouc et un composteur pour les papillons, portant les slogans « À bas la répression ! Vivent les étudiants communistes », une machine à écrire Underwood, une boîte de bâtons de craie indélébile pour les inscriptions murales, et des livres et brochures à tendance communiste.

Claude Lalet déclare qu’il est « entré en relations avec Commère par le truchement d’un camarade du nom de Jean [Jean Suret Canale ?] connu en classe au lycée Rollin ». Il précise : « J’ai rencontré Jean à la gare du Luxembourg trois fois. À chacune des (illisible) il m’a remis des tracts imprimés ronéotypés. Le nombre à ce jour est de 400 environ. Tous les exemplaires ont été remis par mes soins à Commère Jean qui se chargeait de la diffusion. Le paquet trouvé ce jour sur moi (illisible) été remis vendredi dernier par Jean. Je devais revoir Jean vendredi 29 novembre à la gare du Luxembourg pour recevoir de nouveaux des tracts. J’ai appartenu à l’organisation anti-fasciste du lycée Rollin de 1935 à 1936. J’ai fréquenté les Auberges de la Jeunesse de 1937 à 1939.  Je n’ai jamais fréquenté les étudiants communistes. Je n’ai jamais été inscrit au PC. Si je m’occupe de la diffusion des tracts, c’est par esprit de solidarité ». « Je n’ai jamais distribué de tracts, ni collé de papillons moi-même, me contentant d’assurer le transport des paquets qui m’étaient remis par Jean. Je devais remettre à Commère le morceau de caoutchouc sur lequel sont gravés la faucille et le marteau (« il devait appliquer l’effigie de cette dite gomme sur tout ce qu’il pouvait juger utile »), et le morceau de craie indélébile qui ont été trouvés sur moi. Ce matériel m’avait été donné par Jean ». Interrogé sur un carnet trouvé sur lui, il répond qu’il n’est pas à lui : « J’ignore à qui il appartient, mais je peux signaler qu’il m’a été remis par ma femme quelques minutes avant mon arrestation ». Interrogée sur la provenance de ce carnet, Eugénie Lalet répond : « Il m’a été donné, je ne puis préciser quand, ni par qui. J’avais pour mission de le conserver jusqu’à ce que l’on me donne des instructions en vue de sa remise à une autre personne. Je ne puis fournir aucune indication sur les notes qui figurent à l’intérieur de ce carnet ».

Lors de la perquisition chez les parents de Maurice D., où celui-ci habite, les policiers trouvent – en plus de tracts imprimés et ronéotypés – une machine à écrire portative Remington Junior, des listes de souscription, « de nombreux livres et brochures écrits en langue étrangère ou à tendance communiste ». Interrogé par les RG, il déclare : « J’ai reçu, à trois ou quatre reprises, des paquets de 250 tracts environ, d’un nommé Jean, étudiant en médecine, que j’avais connu pendant l’exode. J’avais pour mission d’entreposer ce matériel à mon domicile, à l’insu de mes parents, et de le redonner à Jean quand il me le demandait. À plusieurs reprises, j’ai copié des notes manuscrites et des listes de noms pour le compte de Jean. »

Le lendemain matin, 26 novembre, à 7 h 30, Jean Rozynoer, 20 ans, étudiant en médecine, est arrêté aux abords de son domicile. La perquisition qui y est effectuée amène la découverte – en plus de tracts imprimés et ronéotypés, de livres et brochures à tendance communiste – de deux projets de tract rédigés de sa main et d’un carnet d’adresses. Jean Rozynoer est conduit dans les bureaux de renseignements généraux. Ayant présenté sa carte d’identité, sur laquelle a été apposée la mention « Juif », il réfute la version de faits présentée par Maurice D., déclarant que le sens de transmission des tracts était inverse : « J’ai connu D. au Quartier latin il y a plusieurs mois et nous avions constaté que nous avions des idées politiques communes. Il m’a fait parvenir, soit sur ma demande, soit au cours de rendez-vous, un certain nombre de tracts ronéotypés ou imprimés qui avaient toujours trait à l’activité communiste clandestine. Il m’est arrivé de jeter ces tracts sur la voie publique après les avoir lus. » Il réfute : « Les déclarations de D. sont inexactes ; j’affirme n’avoir jamais reçu de lui des paquets de 250 tracts, de ne lui avoir jamais donné le matériel entreposé chez lui et de n’avoir jamais eu recours à lui pour lui faire recopier à la machine des textes quelconques ».

Sur une nouvelle interpellation des inspecteurs, Maurice D. corrige : « En réalité, les paquets de tracts que j’ai reçus m’étaient remis par un individu que je ne connais que sous le nom de “Mimile” et qui me les remettait de la part de Jean. J’en prélevais quelques-uns que je remettais directement à Jean. Quant au reste, il m’était repris quelque temps après par Mimile qui me disait les remettre à Jean également. Quant aux travaux à la machine que j’exécutais, ils m’ont toujours été demandés par Mimile, qui me les reprenait une fois terminés. Dans mon esprit, j’ai toujours cru que ce travail était demandé à Mimile par Jean. […] Je tiens à préciser que le nommé Mimile […] m’a proposé, à plusieurs reprises, de militer activement… »

De nouveau interrogé, Claude Lalet déclare : « Tout le matériel – papier, tracts, papillons, machine à écrire – trouvé à mon domicile m’a été remis par un nommé Jean qui n’est pas celui qui a été arrêté aujourd’hui (Rozinoer). J’ai distribué un certain nombre de ces tracts, entre autres à Commère et à un autre étudiant prénommé Stéphane. C’est moi qui ai composé les papillons gommés, toujours avec le matériel fourni par Jean. J’en ai donné surtout à Commère. Ma femme m’accompagnait à presque tous les rendez-vous que j’avais avec des camarades ; elle était au courant de mon activité ». Eugénie Lalet maintient qu’elle n’est au courant de rien : « À part la machine à écrire qui m’a été donnée, je ne me rappelle plus par qui, j’ignorais [la présence] à mon domicile de tout le matériel de propagande qui a été saisi et ne puis, par conséquent, fournir aucune information quant à sa provenance. » Enfin, Rozinoer déclare : « Les tracts m’ont été remis par D. Quant aux livres, ils sont ma propriété personnelle et leur achat remonte à plusieurs années. Les deux projets de tracts que j’avais élaborés ont été faits par moi à la demande de D. Il ne s’agit pas à mon avis de tracts, mais de considérations sur les événements actuels, susceptibles d’être utilisés par D. »

Le jour même, 26 novembre, le couple Lalet, Maurice D. et Jean Rozynoer sont à leur tour inculpés d’infraction au décret du 29 septembre 1939 et conduits au Dépôt.

Un inspecteur principal et six autres inspecteurs alors sont chargés par le commissaire principal Baillet, « de procéder à toutes investigations utiles en vue d’identifier et d’appréhender les auteurs de la propagande clandestine communiste sévissant dans les milieux universitaires de la capitale, et plus particulièrement au Quartier latin, au moyen de tracts, papillons et brochures à tendances communistes ». Il est possible que le carnet d’adresses trouvé chez Jean Rozinoer ait permis aux policiers d’orienter leurs recherches. Le même jour, 26 novembre, « à la suite d’enquêtes et de surveillances qui ont permis d’établir avec certitude leur sympathie agissante vis-à-vis des doctrines communistes et des membres de l’ex-parti communiste », sont arrêtés Jean-Claude Lévy, 17 ans, Othman ben Aleya 24 ans, Olivier Souef, 19 ans, Jean Gros, 18 ans (déporté lui aussi dans le convoi du 6 juillet 1942), Pierre Daix, 18 ans (appréhendé à 20 h 15, aux abords du pavillon de ses parents), Raymond Guglielmo, 17 ans (appréhendé vers 18 h 15, au domicile de ses parents), et Jeanne Brunschwig, 19 ans.

Selon une note des inspecteurs accompagnant sa mise à disposition, Olivier Souef était chef de groupe dans l’organisation de propagande dirigée par Maurice D. Néanmoins, la perquisition opérée par les inspecteurs à son domicile n’amène la découverte d’aucun document compromettant.

« Interpellés [interrogés], Lévy, Ben Alaya et Souef nient toute participation à la propagande clandestine. Gros, Daix, Guglielmo et la demoiselle Brunschwig reconnaissent, par contre, participer activement à la propagande clandestine effectuée actuellement dans les milieux universitaires ».

Lors de son interrogatoire par les policiers, Olivier Souef se défend en déclarant : « Je n’ai jamais appartenu au Parti communiste ni à aucun autre parti politique. J’ai fait partie, avant les hostilités, des Auberges de la Jeunesse et j’ai adhéré au Club des Lycéens, étudiants Ajistes en septembre dernier. J’affirme n’avoir jamais milité en aucune manière ni avoir participé à aucune manifestation ou distribution quelconque. Je ne suis pas au courant de l’activité clandestine de Lévy, Ben Aleya, Gros, Daix, Guglielmo et de la demoiselle Brunschwig. Je ne connais Ben Aleya que de vue ; j’ai connu Daix à Rennes où nous faisions nos études ».

Le lendemain, 27 novembre, au vu du rapport des inspecteurs et après les interrogatoires des sept étudiants arrêtés dans la même « affaire », considérant que leur activité « avait pour but la diffusion des mots d’ordre de la IIIe Internationale communiste ou des organismes s’y rattachant, par la distribution et la détention en vue de la distribution de tracts et brochures à caractère communiste », le commissaire principal André Baillet, chef de la brigade spéciale, officier de police judiciaire, les inculpe conjointement d’infraction aux articles 1 et 3 du décret du 26 septembre 1939 et les fait conduire au Dépôt (la Conciergerie, sous le Palais de Justice, dans l’île de la Cité) à disposition du procureur de la République.

Le jour suivant, Olivier Souef est écroué à la Maison d’arrêt de la Santé, à Paris 14e.

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Palais de Justice de Paris, île de la Cité, Paris 1er.
Tribunal correctionnel, un des porches du 1er étage.
(montage photographique)

Le procès dure tout le mois de février, en quatre séances. Les jeunes sont défendus par Maîtres Ferruci, Hajje et Vienney. Le 1er mars 1941, Olivier Souef comparaît avec ses camarades devant la chambre des mineurs (15e) du Tribunal correctionnel de la Seine. Celle-ci le relaxe le lendemain, probablement parce qu’il a nié toute implication et qu’aucune preuve à charge n’existe contre lui. Olivier Souef sort avec Pierre Kast et Pierre Daix, lesquels ont purgé en détention préventive les trois mois d’emprisonnement auxquels ils ont été condamnés. Comme ils sont mineurs (la majorité est alors fixées à 21 ans), leurs parents doivent aller les chercher dans les bureaux des Renseignements généraux. Claude Lalet, lui, est condamné à 10 mois de détention et rejoint Guy Môquet à la Maison d’arrêt de Fresnes. À l’expiration de leur peine, tous deux seront tous deux internés administrativement au centre de séjours surveillé de Choisel à Châteaubriant (Loire-Atlantique), avant d’être du nombre des otages fusillés le 22 octobre.

Olivier Souef souhaite reprendre aussitôt ses activités clandestines. Mais on tarde trop à le contacter. Pierre Daix est le premier convoqué. Il rencontre Jacques d’Andurain chez lui, lequel lui demande s’il accepte de reconstituer le groupe de choc des étudiants. Quand Daix lui répond que c’est Olivier Souef qui en est le responsable, d’Andurain réplique que celui-ci doit être mis à l’écart, la direction des “Étudiants” jugeant anormal que lui – militant connu d’avant-guerre – ait été purement et simplement relaxé. « Dans la clandestinité, le doute doit toujours profiter à la vigilance… ». Meilleur ami de Souef, Pierre Daix doit non seulement cesser tout contact avec lui, sans même l’en avertir, mais également faire appliquer cette décision par leurs autres camarades. Il plaide en vain : « Mais le Parti est tout pour Souef ». À la fin de l’entretien, Pierre Daix fonce chez son ami, qui y étudie alors seul, pour l’informer de cette décision qu’il estime injuste. Mais c’est Souef qui entreprend alors de lui justifier la sévérité en matière de sécurité : « Je me mets à la place de la direction… ». Pierre Daix déclare alors qu’il relaiera la consigne, mais ne l’appliquera pas lui-même, ne croyant pas à l’accusation.

Bientôt, Pierre Daix quitte les Lettres pour les Sciences, et est amené à fréquenter d’autres étudiants – Christian Rizo, Tony Bloncourt, Giuzsi Weisberger, Sam Radzinski – qui, eux-mêmes, se tournent davantage vers les Jeunesses communistes. Parallèlement, Daix est chargé par le nouveau responsable des “Étudiants”, Léon Lavallée, d’assurer la liaison entre les groupes de choc des Étudiants communistes et ceux des Jeunesses communistes ; en fait, ceux du 11e arrondissement qui vont devenir la base de l’organisation spéciale (l’O.S. [2]), laquelle aura pour tâche la protection des manifestations suivantes contre l’occupant. En mai, un dirigeant clandestin des “Étudiants”, convoque Pierre Daix pour lui intimer l’ordre de cesser tout contact avec lui et de faire appliquer cette décision par leurs autres camarades.

Le 14 juillet, Pierre Daix associe Olivier Souef à une opération de diversion organisée par Christian Rizo au Quartier latin alors que la véritable manifestation se déroule sur les Grands boulevards, réunissant les Jeunesses communistes avec les étudiants et lycéens de l’UELC et des gaullistes. Du côté du boulevard Saint-Germain, à hauteur du Musée de Cluny, Christian Rizo et Tony Bloncourt se lancent sur la chaussée en brandissant des drapeaux, tandis que Pierre Daix et Olivier Souef surveillent les avertisseurs de police du parcours, prêts à intervenir physiquement contre qui voudrait s’en servir. L’action se déroule sans anicroche et le journal collaborationniste Je Suis Partout en rend compte. Le dimanche 26 juillet encore, une centaine de jeunes remontent, drapeaux tricolores en tête le quartier populaire du Faubourg du Temple, du boulevard Richard Lenoir à la rue des Pyrénées.

Danielle Casanova, Camille Baynac, André Leroy, Lucien Dorland, Pierre Georges et Albert Ozoulias, cadres dirigeants des Jeunesses communistes, décident d’une manifestation gare Saint-Lazare le 13 août 1941, à 18 heures 30, période de grande affluence. Lors d’une réunion de préparation, Pierre Daix – désigné depuis peu comme recruteur parmi les “Étudiants” pour l’O.S. – avance encore la candidature d’Olivier Souef à l’organisation du service d’ordre, toujours sans succès. Daix passe outre et enrôle son ami.

Vers 18 heures, de toutes les rues du quartier Saint-Lazare et autour du square de la Trinité, les partisans se dirigent vers la gare. Mais sur les lieux, il y a plus de policiers que d’habitude. Des fuites, sans doute… Les militants se passent alors la consigne : « Tous à la Porte Saint-Denis ! ». Chaque petit groupe prend alors le métro, direction la station Strasbourg-Saint-Denis.

À 19 heures, Pierre Daix est au point de rendez-vous avec Olivier Souef. Deux drapeaux tricolores roulés sur leurs manches de bois sont arrivés, mais pas les garçons désignés pour les porter. Chacun en prend un et le déploie.

C’est le signal. La Marseillaise éclate ; les cris fusent : « À bas Hitler ! », « Vive la France ! », « Vive l’Union soviétique ! », « Vive l’Angleterre ! ». Les manifestants, sur le trottoir de droite du boulevard Saint-Martin, se dirigent vers la place de la République. À l’angle du boulevard Sébastopol, un cordon de policiers français ne parvient pas à les empêcher de continuer leur marche.

 

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Sur le boulevard Saint-Denis, entre la Porte Saint-Denis, au fond, et la Porte Saint-Martin, au premier plan, là où la manifestation des Jeunesses communistes se déploya
le 13 août 1941 avant d’être dispersée par l’armée allemande.
Carte postale d’après guerre. Collection Mémoire Vive.

Mais, après la rue du Faubourg-Saint-Martin, le détachement allemand motorisé cantonné au Conservatoire des Arts et métiers apparaît.

Alors que le cortège vient de franchir le boulevard Sébastopol, un premier side-car surgit de la rue du Faubourg Saint-Martin. La manifestation se disperse aussitôt. Les deux amis s’enfuient dans des directions opposées. Un soldat allemand poursuit Pierre Daix en tirant. Mais Henri Gautherot, jeune métallurgiste appartenant à un groupe de protection, s’interpose et le fait tomber d’un croche-pied. Pierre Daix parvient alors à s’enfuir en traversant plusieurs cours d’immeubles jusqu’à la rue Meslay, puis retrouve Christian Rizo dans leur lieu de repêchage. Plus tard, Daix se fera rabroué pour s’être rendu trop visible en tant que membre de l’organisation.

Ce fait d’arme d’Olivier Souef ne permet pas toujours pas sa réintégration au sein de l’organisation clandestine.

Rencontrant Léon Lavallée, son responsable au sein de l’organisation des étudiants, Pierre Daix n’obtient de lui aucune mission pour son ami, alors que les manifestations ont cessé, à cause des pertes engendrées, et que celui-ci se morfond, écarté du combat.

Vers le 22 octobre, Christian Rizo – membre de l’O.S. et second de Gilbert Brustlein – apporte à Pierre Daix une nouvelle tâche pour Olivier Souef, qui n’a toujours reçu aucune affectation : noter les allées et venues du président de la Cour spéciale nommée par le gouvernement Pétain à la demande des autorités d’occupation et qui a fait guillotiner Catelas et autres militants. Ils proposent à la direction de l’O.S. un « règlement de compte entre Français » ne devant pas entraîner d’exécution d’otages, mais l’idée ne sera pas retenue.

Pierre Daix a retrouvé Olivier Souef, qui doit lui transmettre les premiers résultats de sa filature, quand la liste des otages fusillés à Châteaubriand paraît, sur laquelle est inscrit le nom de leur ami Claude Lalet.

Christian Rizo est arrêté au soir du 26 novembre, en allant porter son salaire chez sa mère. Tony Bloncourt, dont la photo a été publiée par la police, est arrêté le 6 janvier 1942 en tentant d’échapper à un barrage. Pierre Daix est arrêté le lendemain chez ses parents.

Coupé de tout contact avec les organisations clandestines, Olivier Souef poursuit ses études en vivant chez sa mère.

Le 28 avril 1942, des policiers allemands assistés d’un inspecteur français arrêtent Olivier Souef et son frère Claude à leur domicile, ainsi que Jean Gros, lors d’une grande vague d’arrestations (397 personnes) organisée dans le département de la Seine par les « autorités d’occupation », avec le concours de la police française et visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin ayant précédemment fait l’objet d’une poursuite policière ou judiciaire et ayant été libérés, soit après avoir bénéficié d’un non-lieu, d’un acquittement ou d’un sursis, soit après avoir fini de purger une courte peine, parmi lesquels beaucoup de jeunes gens.
Du commissariat du 7e arrondissement, les captifs sont conduits à l’École Militaire, puis à la Gare du Nord, par autobus.Le jour même, ils sont conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Olivier Souef entre dans l’organisation clandestine du camp : il est choisi par la direction de celle-ci pour être responsable politique au sein du nouveau triangle mis en place après l’évasion réussie de Georges Cogniot, André Tollet et de 19 autres communistes, le 22 juin 1942.

Entre fin avril et fin juin 1942, Olivier Souef est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Olivier Souef est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46109 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage connu ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Olivier Souef .

Il meurt à Auschwitz le 9 août 1942, selon le registre d’appel quotidien des détenus du camp (Stärkebuch), parmi les premiers “45000”, un mois après l’arrivée du convoi. Il a 21 ans.

Déclaré « Mort pour la France”, son homologation comme “Déporté Résistant” est refusée malgré un certificat d’appartenance à la RIF (18 juin 1948) et il est désigné comme “Déporté politique”. Il est décrit comme « un jeune homme blond, les yeux bleus, grand (1m 83), l’air décidé ». Ses amis le surnommait Robespierre.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 10-08-2003).

Notes :

[1] Le lycée Rollin, avenue Trudaine, est le seul établissement parisien à avoir changé de nom après la Libération pour prendre celui de Jacques Decour – Daniel Decourdemanche -, professeur d’allemand au lycée à partir de 1937, créateur dans la clandestinité de L’Université Libre et de La Pensée Libre, responsable du Comité National des Écrivains, arrêté par la police française le 17 février 1942, livré à l’occupant et fusillé au Mont-Valérien le 30 mai 1942.

[2] O.S. : organisation spéciale armée du Parti communiste clandestin, créée à l’origine pour protéger les militant(e)s prenant la parole en public et les distributeurs de tracts.

[3] Henri Gautherot tombe à son tour, se relève. Mais l’ennemi aussi. Il tire sur Henri et l’atteint grièvement aux jambes. Arrêté, le résistant est transporté à l’Hôtel-Dieu, sous surveillance. Le 17 août 1941, Henri Gautherot est fusillé avec Maurice Tyzelmann.  Pierre Daix, né le 24 mai 1922 à Ivry-sur-Seine, est déporté de Compiègne dans le convoi de 1218 hommes qui part le 22 mars 1944 et arrive au KL Mauthausen trois jours plus tard (matricule n° 59807). Il est parmi les sept détenus libéré à Mauthausen par la Croix-Rouge suisse le 23 avril 1945. (source : Guillaume Quesnée, Livre-mémorial de la FMD, tome 3, page 268-269, 283, I.191)

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 88, 371 et 420.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Lettre de son frère, Claude Souef (décembre 1988) – Lettres de Marie-Elisa Cohen (mai 1882) et de Francis Cohen (1er mai 1982) – Article de Francis Cohen : Les étudiants communistes , le 11 novembre 1940 – Albert Ouzoulias, lettres (avril-mai 1982) et mention dans son ouvrage Les Bataillons de la Jeunesse, p. 60 – Témoignages de “45000” : Georges Brumm et Henri Mathiaud.
- Jean Maitron, Dictionnaire biographique du Mouvement ouvrier français, tome 41, page 375.
- Boris Dänzer-Kantof, historien, message (12-04-2005).
- Pierre Daix, Dénis de mémoire, Témoins Gallimard, août 2008.
- Pierre Daix, Les combattants de l’impossible, La tragédie occultée des premiers résistants communistes, Robert Laffont, novembre 2013.
- Emmanuel Lemieux, Tony, 1942, Un procès oublié sous l’Occupation, François Bourin éditeur, mars 2012, pages 48 à 108.
- Anne Thoraval, Des résistants à Paris, Chemins d’Histoire dans la capitale occupée, 14 juin 1940 – 19 août 1944, éditions SPE-Barthélémy, Paris, octobre 2001, page 234, “Métro Strasbourg-Saint-Denis”.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “Occupation allemande”, liste arrestations 1946-1947, attestation de Firmin Vieillard (BA 1798) ; dossiers de la BS1 (GB 52) ; n° 35, « affaire Vallepin – Commère », 22–11-1940 ; n° 40, « Lalet – Rozinoer- D. », 26-11-1940 ; n° 42, « affaire Lévy – Ben Aleya – Souef – Gros – Daix – Guglielmo et Brunschwig », 27-11-1940.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995,  tome 3 : Annexes, relevé du registre d‘appel, Stärkebuch  (Stb. 2, 281-284), page 1607.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 18-01-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

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