- Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.
Stanislas Slovinski ou Slowinski [1] naît le 11 mars 1901 à Mierzcice (Pologne), fils de Jean Slovinski et de Juliana Pavinlkik (?).
Le 26 octobre 1924 en Pologne, il se marie avec Marie Stemprick. Ils ont quatre enfants.
Au moment de son arrestation, il est domicilié rue de l’Argonne à Mancieulles (Meurthe-et-Moselle – 54).
Il est mineur de fer au puits de Saint-Pierremont à Mancieulles.
- Mancieulles. Les deux puits, accumulateurs et stock
de la Société anonyme des mines de fer de Saint-Pierremont.
Prenant en compte l’importance des travailleurs immigrés,
la légende est également rédigée en polonais et en italien.
Carte postale des années 1900. Collection Mémoire Vive.
Stanislas Slovinski est syndiqué CGT à la Fédération du sous-sol de 1936 à 1939.
Militant communiste, il est responsable d’une cellule polonaise de la mine.
Sous l’occupation, la police française le considère comme « propagandiste ».
À une date restant à préciser, le préfet de Meurthe-et-Moselle signe un arrêté ordonnant son internement administratif à la Maison d’arrêt de Briey à la suite d’une distribution de tracts dans son secteur d’habitation (il y est gardé trente jours).
Dans la nuit du 4 au 5 février 1942, un groupe de résistance communiste mène une action de sabotage contre le transformateur électrique de l’usine sidérurgique d’Auboué qui alimente également dix-septmines de fer du Pays de Briey. Visant une des sources d’acier de l’industrie de guerre allemande (Hitler lui-même s’en préoccupe), l’opération déclenche dans le département plusieurs vagues d’arrestations pour enquête et représailles qui concerneront des dizaines de futurs “45000”.
Le nom de Stanislas « Flovinski » figure – n°33 – sur une « liste communiquée le 19 (février ?) au soir à la KK (Kreiskommandantur) de Briey par le sous-préfet » pour préciser la nationalité de cinquante-trois hommes : il est désigné comme polonais.
Stanislas Slovinski est arrêté comme otage dans la « rafle effectuée dans la nuit du 19 au 20 » février par les autorités allemandes (rapport du préfet de la région de Nancy).
Le jour même, il fait partie d’un groupe d’otages transférés par la police allemande au centre de séjour surveillé d’Écrouves, près de Toul (54), en attente « d’être dirigés sur un autre camp sous contrôleallemand en France ou en Allemagne ».
Le 2 mars, Stanislas Slovinski est transféré à Nancy (pour interrogatoire ?) avant d’être dirigé sur le camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 -Polizeihaftlager).
Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures, puis repart à la nuit tombée. Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, Stanislas Slovinski est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46260 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).
Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartisdans les Blocks 19 et 20. Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.
Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Stanislas Slovinski est probablement dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.
En juillet 1943, la plupart des détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”) reçoivent l’autorisation d’écrire – en allemand et sous la censure – à leur famille et d’annoncer qu’ils peuvent recevoir des colis (à vérifier le concernant…).
À la mi-août 1943, Stanislas Slovinski est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) aupremier étage du Block 11 – la prison du camp – pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.
- Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 – où se pratiquaient
les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues –
et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage
de la “quarantaine”. Au fond, le mur des fusillés.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.
Le 12 décembre 1943, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blockset Kommandos d’origine.
Le 3 août 1944, Stanislas Slovinski est parmi les trois-quarts des “45000” présents à Auschwitz qui sont de nouveau placés en “quarantaine” en préalable à un transfert (selon Claudine Cardon-Hamet).
Le 28 août 1944, il est dans le petit groupe de trente-et-un détenus dont vingt-neuf “45000” transférés auKL [2] Flossenbürg (Haut-Palatinat bavarois, proche de la frontière tchèque) et enregistrés dans ce camp le 31 août (matr. 19883). On ignore le trajet suivi ensuite par Stanislas Slovinski.
Il décède le 1er juin 1946, à 45 ans.
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74, 367 et 420.
Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 117.
Archives Départementales de Meurthe-et-Moselle, Nancy, cote WM 312 ; fiches du centre de séjour surveillé d’Écrouves (ordre 927 W) ; recherches de Daniel Dusselier.
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 16-05-2010)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.
[1] Stanislas Slovinski : il semble que deux autres Polonais vivants en France portent ces nom et prénom au cours de la guerre 1939-1945, dont un habitant d’Houdain (62) ; un autre – ou le même – d’abord détenu au camp du Vernet d’Ariège, est mort au cours de son évasion du « train fantôme » le 25 août 1944.
[2] KL : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.