JPEG - 77.1 ko
Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz. 
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Pierre, Marcel, Peschard naît le 12 octobre 1906 à Paris 14e (75).

Le 2 octobre 1931, il est embauché par une compagnie de chemin de fer qui fusionnera au sein de la SNCF début 1938 [1].

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 3, passage Vallet [2] à Paris 13e, à l’angle de la rue Pinel. Il est marié.

Pierre Peschard est militant communiste et responsable syndical CGT.

JPEG - 309.8 ko
Carte syndicale CGT, Fédération des chemins de fer. 
Collection Mémoire Vive.

Le début de l’occupation le trouve affecté au chemin de fer de petite ceinture. En août 1940, il fait partie de la soixantaine de militants du 13e arrondissement qui recomposent la section clandestine du PC.

La police française le considère comme un « militant communiste notoire, (ayant) pris une part importante dans le développement de la propagande clandestine ».

Au moment de son arrestation, Pierre Peschard est affecté comme menuisier, aide-ouvrier, aux ateliers SNCF de Saint-Ouen les docks.

Le 28 mai 1941, il est arrêté pour propagande communiste clandestine et écroué au dépôt de la préfecture de police (Conciergerie, sous-sol du Palais de Justice, île de la Cité). Il est probablement jugé et condamné à une peine de prison (à vérifier…). Le 23 septembre, le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif. Pendant un temps, il est détenu au dépôt.

Le 9 octobre 1941, il est parmi les 60 militants communistes (40 détenus venant du dépôt, 20 venant de la caserne des Tourelles) transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne – 86) ; départ gare d’Austerlitz à 8 h 25, arrivée à Rouillé à 18 h 56.

Le 9 février 1942, Marcel Peschard est parmi les cinquante-deux « communistes » (dont trente-six seront déportés avec lui) remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits par desFeldgendarmes à la gare de Poitiers. Enfermés dans deux wagons à bestiaux, ils sont transférés – via Paris – au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht(Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

JPEG - 145.8 ko
Les deux wagons à bestiaux 
du Mémorial de Margny-les-Compiègne, 
installés sur une voie de la gare de marchandise 
d’où sont partis les convois de déportation. Cliché M.V.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Marcel Peschard est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45971 ; plausible selon les listes reconstituées, ce numéro est également celui d’un détenu enregistré à la morgue à la date de son décès (la photo d’immatriculation correspondant à ce numéro n’a pas été retrouvée).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartisdans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différentsKommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir. Aucun document ni témoignage publié à ce jour ne permet de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a été affecté Marcel Peschard.

Il meurt à Auschwitz le 29 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp  [3]. Ce jour-là, sous prétexte d’enrayer une épidémie de typhus dans le camp principal, le nouveau médecin SSde la garnison, Kurt Uhlenbroock, ordonne d’effectuer une sélection dans les Blocks de l’hôpital, notamment le Block 20. 746 détenus atteints du typhus et convalescents sélectionnés dans la cour fermée séparant les Blocks 20 et 21 sont chargés dans deux grands camions bâchés qui les transportent par rotation jusqu’aux chambres à gaz de Birkenau. Il s’agit de la première grande opération d’extermination des détenus malades. La désinfection du Block 20 dure dix jours ; du 29 août au 8 septembre, le registre du Block ne comporte aucune inscription.

Après leur retour de déportation, les rescapés du convoi qui attestent de son décès sont Henri Marti, de Paris 5e, et Auguste Monjauvis, de Paris 13e.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 14-12-1997).

Après la guerre, une plaque commémorative est apposée sur le bâtiment où il habitait au moment de son arrestation. À une date restant à préciser, celui-ci a été démoli et la plaque n’a pas été réinstallée sur la façade de l’immeuble qui l’a remplacé.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 372 et 416. 
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier central) – Témoignage d’Auguste Monjauvis et de Henri Marti. 
- Louis Chaput, Auguste et Lucien Monjauvis (entre autres), Le 13e arrondissement de Paris, du Front Populaire à la Libération, les éditeurs français réunis, Paris 1977, pages 95 et 111. 
- Comité du 13e arrondissement de l’ANACR, La résistance dans le treizième arrondissement de Paris, imprimé par l’École Estienne en 1977, page 89. 
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “occupation allemande” : BA 2374 (camps d’internement…) : BA 2397 (liste des internés communistes, 1939-1941). 
- Archives départementales de la Vienne, cote 109W75 (camp de Rouillé). 
- Auschwitz, camp de concentration et d’extermination (version française), ouvrage collectif sous la direction de Franciszek Piper et Teresa Swiebocka, éd. du Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oswiecim 1993-1998, p. 175 
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 920 (25672/1942). 
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Service d’information sur les anciens détenus, Biuro Informacji o Byłych Więźniach ; liste de la morgue (« Leihenshalle »). 
- Base de données des archives historiques SNCF ; service central du personnel, agents déportés déclarés décédés en Allemagne (en 1947), de A à Q (cote 0110LM0108).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 23-08-2013)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] La SNCF : Société nationale des chemins de fer français. À sa création, suite à une convention validée par le décret-loi du 31 août 1937, c’est une société anonyme d’économie mixte, créée pour une durée de 45 ans, dont l’État possède 51 % du capital.

[2] Le passage Vallet : voie classée en 1935, du nom d’un propriétaire.

[3] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ.

S’agissant de Pierre Peschard, c’est 6 novembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.