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Détenue au Fort de Romainville.
Droits réservés.

La jeunesse

Olga Méru naît le 11 décembre 1913 à Pont-Sainte-Maxence (Oise – 60), fille d’Albert Méru, boulanger-pâtissier, et de Victoria Hébert, son épouse ; deuxième d’une famille de sept enfants, dont son frère, Albert Méru, né le 3 février 1918 à Pont-Saint-Maxence.

En 1931, la famille est installée au 15, rue de la République, à Méru. Le père est boulanger chez Cornaton. Victoria, la mère, est déclarée sans profession.

En 1933, à Lardières [1], commune limitrophe de Méru, Olga se marie.

À Méru, elle travaille avec son époux dans l’industrie de la tabletterie. En 1936, sa mère, séparée de son époux, y vit également, domiciliée rue Jeanne-d’Arc avec deux de ses fils ; tous tabletiers chez Dourain-Wadel.

En 1939, une procédure de divorce entamée entre Olga et son mari est interrompue par la déclaration de guerre. Mobilisé, celui-ci est fait prisonnier de guerre en mai-juin 1940.

La Résistance

Pendant la guerre, Olga Melin vit à Paris 11e, domiciliée au 136, rue du Chemin Vert, près du métro Père-Lachaise. Elle travaille dans une imprimerie. Son fils Étienne, victime de la poliomyélite, vit chez sa mère.

Olga et son frère, Albert Méru, font partie d’un groupe d’aide aux juifs, basé dans la rue des Amandiers, auquel appartient Madeleine Morin.

Le 8 septembre 1942, tous deux sont arrêtés par la police allemande au cours d’une rafle en gare de Lyon. Sans doute devaient-ils convoyer des juifs afin de les faire passer en « zone libre ».

L’internement

Après quelques semaines à Fresnes, Olga Melin est internée au camp allemand du Fort de Romainville, situé sur la commune des Lilas [2]]] (Seine-Saint-Denis – 93), premier élément d’infrastructure du Frontstalag 122. Le 8 octobre, elle y est enregistrée sous le matricule n° 882.

Le 22 janvier 1943, Olga Melin fait partie des cent premières femmes otages transférées en camions au camp de Royallieu à Compiègne (leurs fiches individuelles du Fort de Romainville indiquant « 22.1 Nach Compiègne uberstellt » : « transférée à Compiègne le 22.1 »). Le lendemain, un deuxième groupe de cent-vingt-deux détenues du Fort qui les y rejoint, auquel s’ajoutent huit prisonnières extraites d’autres lieux de détention (sept de la maison d’arrêt de Fresnes et une du dépôt de la préfecture de police de Paris). À ce jour, aucun témoignage de rescapée du premier transfert n’a été publié concernant les deux nuits et la journée passées à Royallieu, et le récit éponyme de Charlotte Delbo ne commence qu’au jour de la déportation…. Toutes passent la nuit du 23 janvier à Royallieu, probablement dans un bâtiment du secteur C du camp.

Auschwitz-Birkenau

Le matin suivant, 24 janvier, les deux-cent-trente femmes sont conduites à la gare de marchandises de Compiègne – sur la commune de Margny – et montent dans les quatre derniers wagons (à bestiaux) d’un convoi dans lequel plus de 1450 détenus hommes ont été entassés la veille, parmi lesquels le frère d’Olga, Albert Méru.

Comme les autres déportés, la plupart d’entre elles jettent sur les voies des messages à destination de leurs proches, rédigés la veille ou à la hâte, dans l’entassement du wagon et les secousses des boggies (ces mots ne sont pas toujours parvenus à leur destinataire).

En gare de Halle (Allemagne), le train se divise et les wagons des hommes sont dirigés sur le KL Sachsenhausen, tandis que les femmes arrivent en gare d’Auschwitz le 26 janvier au soir. Le train y stationne toute la nuit. Le lendemain matin, après avoir été descendues et alignées sur un quai de débarquement de la gare de marchandises, elles sont conduites à pied au camp de femmes de Birkenau (B-Ia) où elles entrent en chantant La Marseillaise.

Olga Melin y est enregistrée sous le matricule 31708. Le numéro de chacune est immédiatement tatoué sur son avant-bras gauche.

Pendant deux semaines, elles sont en quarantaine au Block n° 14, sans contact avec les autres détenues, donc provisoirement exemptées de travail dans les Kommandos, mais pas de corvée.

Le 3 février, la plupart des “31000” sont amenées à pied, par rangs de cinq, à Auschwitz-I, le camp-souche où se trouve l’administration, pour y être photographiées selon les principes de l’anthropométrie : vues de trois-quart, de face et de profil.

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Photographiée à Auschwitz-I, le 3 février 1943.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Le 12 février, les “31000” sont assignées au Block 26, entassées à mille détenues avec des Polonaises. Les “soupiraux” de leur bâtiment de briques donnent sur la cour du Block 25, le “mouroir” du camp des femmes où sont enfermées leurs compagnes prises à la “course” du 10 février (une sélection punitive). Les “31000” commencent à partir dans les Kommandos de travail.

Le 3 août, Olga Melin est parmi les survivantes – exceptées celles du Kommando de Raïsko – placées en quarantaine, dans une baraque en bois située en face de l’entrée du camp des femmes.

Charlotte Delbo précise : « La quarantaine, c’était le salut. Plus d’appel, plus de travail, plus de marche, un quart de litre de lait par jour, la possibilité de se laver, d’écrire une fois par mois, de recevoir des colis et des lettres. » Néanmoins, cinq Françaises, trop épuisées, y succombent encore. Pour les “31000”, cette période dure dix mois.

Au même moment, les détenus politiques français d’Auschwitz et Birkenau obtiennent le droit d’écrire, malgré leur enregistrement au camp sous le statut “NN”.

La rencontre avec son mari, à Auschwitz

Au printemps 1944, pendant cette quarantaine, en revenant d’une corvée de soupe, Olga voit un détenu travailler sur les voies ferrées. Elle s’élance promptement, les kapos n’ont pas le temps de s’en apercevoir. C’est son mari, prisonnier de guerre, évadé et repris, il avait été envoyé dans un camp disciplinaire situé aux environs d’Auschwitz.

En juin 1944, les “31000” de la quarantaine sont renvoyées au travail, mais affectées dans un atelier de couture moins épuisant où elles ravaudent les vêtements laissés par les Juifs « à l’entrée de la douche ». Depuis les fenêtres de cet atelier, elles voient l’arrivée des convois de Juifs de Hongrie, débarqués sur une dérivation de la voie de chemin de fer qui se prolonge désormais à l’intérieur du camp.

Après le débarquement allié en France, le courrier ne franchit plus le nouveau front qui s’est créé à l’Ouest.

Le 2 août 1944, Olga Melin fait partie des trente-cinq “31000” transférées au KL Ravensbrück où elles arrivent le 4 ; la plupart étant enregistrée comme détenues “NN” (pas de travail hors du camp, pas de transfert dans un Kommando) et assignées à un Block réservé.

Le 2 mars 1945, Olga Melin est parmi les trente-trois “31000” transférées au KL Mauthausen où elle arrivent le 5 mars après un voyage très pénible.

La mort d’Olga

En les transportant de nuit, on conduit la plupart d’entre elles à la gare de triage d’Amstetten pour boucher les trous d’obus et déblayer les voies quotidiennement bombardées par l’aviation américaine.

Le 21 mars 1945, Olga est tuée dans un de ces bombardements, avec Charlotte Decock, de Nogent-sur-Oise, un mois avant la libération du camp.

La Déportation de son frère

Albert Méru, matricule n° 57873 à Sachsenhausen, affecté au Kommando Heinkel, revient de déportation très affaibli. Il décède le 20 décembre 1963, à 45 ans.

Sources :

- Charlotte Delbo, Le convoi du 24 janvier, Édtions de Minuit, pages 195-196.
- Marion Queny, Un cas d’exception : (…) le convoi du 24 janvier, mémoire de maîtrise d’Histoire, Université Lille 3-Charles de Gaulle, juin 2004, notamment une liste réalisée à partir du registre de Romainville (copie transmise par Thomas Fontaine), pp. 197-204, et p. 114.
- Thomas Fontaine, Les oubliés de Romainville, un camp allemand en France (1940-1944), avec le concours du Conseil général de Seine-Saint-Denis, éditions Tallandier, 2005, pages 74 à 86.
- Fondation pour la Mémoire de la Déportation, Livre-Mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression…, 1940-1945, éditions Tirésias, Paris 2004, I.74. tome 1, page 632.

MÉMOIRE VIVE

(dernière modification, le 15-03-2012)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

[1] Lardières : commune absorbée par Méru en 1963.

[2] [[Les Lilas : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne” (transfert administratif effectif en janvier 1968).