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Photographiée à Auschwitz-I, le 3 février 1943.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Madeleine Demiot naît le 17 mars 1913 à Saint-Aigny (Indre – 36), dans une famille de deux enfants. Son père est cultivateur au Breuil, commune de Saint-Aigny. Elle va a l’école de Mérigny (36), commune voisine.

Après avoir obtenu le certificat d’études, Madeleine aide ses parents à la ferme jusqu’à l’âge de quinze ans, puis part travailler à Paris.

En 1930, âgée de 17 ans, elle épouse René Damous, né le 19 février 1908 à Paris, comptable. Le couple s’installe à Champigny-sur-Marne [1] (Val-de-Marne – 94).

René est communiste, secrétaire de la section de Champigny des Amis de l’Union soviétique. Madeleine le rejoint dans ses convictions.

Sous l’occupation, ils poursuivent leur engagement et sont actifs au sein de la résistance communiste clandestine.

Le 1er avril 1942, le couple est arrêté à Paris par les brigades spéciales de la préfecture de police.

Madeleine Damous est emprisonnée à la Maison d’arrêt de la Santé, à Paris 14e, au secret.

Le 29 septembre, elle fait partie d’un groupe de détenues – dont sept seront déportées avec elle – transférées au camp allemand du Fort de Romainville, situé sur la commune des Lilas [1] (Seine-Saint-Denis – 93), premier élément d’infrastructure du Frontstalag 122, gardé par la Wehrmacht.

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L’unique entrée du Fort de Romainville (Haftlager 122),
surplombée par un mirador.
© Musée de la résistance nationale (MRN),
Champigny-sur-Marne (94).

Madeleine Damous y est enregistrée sous le matricule n° 807.

Le 22 janvier 1943, elle fait partie des cent premières femmes otages qui sont transférées en camions au camp de Royallieu à Compiègne (leurs fiches individuelles du Fort de Romainville indiquent « 22.1 Nach Compiègne uberstellt » : « transférée à Compiègne le 22.1 »).

Le lendemain, un deuxième groupe de cent-vingt-deux détenues du Fort les y rejoint, auquel s’ajoutent huit prisonnières extraites d’autres lieux de détention (sept de la maison d’arrêt de Fresnes et une du dépôt de la préfecture de police de Paris). Toutes passent la nuit du 23 janvier à Royallieu, probablement dans un bâtiment du secteur C du camp.

Le matin suivant, 24 janvier, les deux-cent-trente femmes sont conduites en camion à la gare de marchandises de Compiègne et montent dans les quatre derniers wagons (à bestiaux) d’un convoi dans lequel plus de 1450 détenus hommes ont été entassés la veille. Comme les autres déportés, la plupart d’entre elles jettent sur les voies des messages à destination de leurs proches, rédigés la veille ou à la hâte, dans l’entassement du wagon et les secousses des boggies (ces mots ne sont pas toujours parvenus à leur destinataire).

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En gare de Halle (Allemagne), le train se divise et les wagons des hommes sont dirigés sur le KL [2] Sachsenhausen, tandis que les femmes arrivent en gare d’Auschwitz le 26 janvier au soir. Le train y stationne toute la nuit.

Le lendemain matin, après avoir été extraites de wagons et alignées sur un quai de débarquement de la gare de marchandises, elles sont conduites à pied au camp de femmes de Birkenau (B-Ia) où elles entrent en chantant La Marseillaise.

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Portail du secteur B-Ia du sous-camp de Birkenau (Auschwitz-II)
par lequel sont passés les “31000”
(accès depuis la rampe de la gare de marchandises
et le “camp-souche” d’Auschwitz-I…).
© Gilbert Lazaroo, février 2005.

Madeleine Damous y est enregistrée sous le matricule 31690. Le numéro de chacune est immédiatement tatoué sur son avant-bras gauche.

Pendant deux semaines, elles sont en quarantaine au Block n° 14, sans contact avec les autres détenues, donc provisoirement exemptées de travail.

Le 3 février, la plupart des “31000” sont amenées à pied, par rangs de cinq, à Auschwitz-I, le camp-souche où se trouve l’administration, pour y être photographiées selon les principes de l’anthropométrie de la police judiciaire allemande : vues de trois-quart avec un couvre chef (foulard), de face et de profil. La photo de Madeleine Damous a été retrouvée.

Le 12 février, les “31000” sont assignées au Block 26, entassées à mille détenues avec des Polonaises. Les “soupiraux” de leur bâtiment de briques donnent sur la cour du Block 25, le “mouroir” du camp des femmes où sont enfermées leurs compagnes prises à la “course” du 10 février (une sélection punitive).

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Les châlits du Block n° 26. La partie inférieure, au ras du sol,
est aussi une “couchette” où doivent s’entasser huit détenues.
Les plus jeunes montent à l’étage supérieur, où il est possible
de s’assoir. Photo Mémoire Vive.

Les “31000” commencent à partir dans les Kommandos de travail.

Madeleine Damous est admise au Revier de Birkenau.

C’est là qu’elle succombe vers le 15 mars 1943, selon le témoignage des rescapées.

Charlotte Delbo raconte : « Elle avait été battue à coups de bâton par une kapo qui lui tenait les mains pour l’empêcher de se protéger. Quelques jours après, elle a eu le visage écarlate et enflé au point que le regard ne filtrait plus à travers les paupières et qu’on a dû la guider pour aller à l’appel. Après l’appel, Germaine Renaudin et Gilberte Tamisé l’ont accompagnée au Revier où elle est morte très vite (érésypèle). »

Sa mère apprend son décès au retour des rescapées.

René Damous, conduit au fort de Romainville (matricule à préciser) le même jour que Madeleine, y est resté en qualité d’otage (« Sühneperson »). Le 2 octobre 1943, il est fusillé au fort du Mont-Valérien (Suresnes) parmi cinquante hommes désignés en représailles de l’exécution de Julius Ritter, président allemand du service de la main-d’œuvre en France, par un groupe des FTP-MOI le 28 septembre. Gustave Normand, mari de Madeleine, et Jean Sabail, le mari de Léonie, font également partie des fusillés.

Madeleine et René Damous n’avaient pas d’enfant.

Sources :

- Charlotte Delbo, Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1965 (réédition 1998), pages 77-78
- Marion Queny, Un cas d’exception : (…) le convoi du 24 janvier, mémoire de maîtrise d’Histoire, Université Lille 3-Charles de Gaulle, juin 2004, notamment une liste réalisée à partir du registre du Haftlager 122 (copie transmise par Thomas Fontaine), pp. 197-204, et p. 114.
- Serge Klarsfeld et Léon Tsevery, Les 1007 fusillés au Mont-Valérien parmi lesquels 174 Juifs, Association des fils et filles des déportés juifs de France, mars 1995.

MÉMOIRE VIVE

(dernière modification, le 17-02-2013)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

[1] Champigny-sur-Marne et Les Lilas : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.