- Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.
Louis, Paul, Goudailler naît le 14 mai 1904 à Paris 15e (75).
Entre 1929 et 1935, il est domicilié au 31, rue de Sébastopol à Choisy-le-Roi [1] (Val-de-Marne – 94).
Le 1er mai 1926, il se marie (à qui ?). Il a une fille, née vers 1927.
Le 1er juin suivant, il devient jardinier titulaire à la Ville de Paris. Plus tard, il est affecté au cimetière parisien de Thiais.
Filleul de Marcel Cachin, c’est par son intermédiaire que celui-ci vient s’installer à Choisy.
Au moment de son arrestation, il est domicilié au 3, rue Paul-Carle à Choisy.
Le 25 août 1929, Louis Goudailler est mobilisé au 22e BOA à Vincennes (Val-de-Marne). Réformé pour maladie le 21 novembre, il est rappelé le 21 mai 1940 avec la même affectation. Le 16 août, il est démobilisé à Lavaur (Tarn).
En septembre 1939, sa fille, malade, entre en traitement à l’hôpital Trousseau à Paris.
Sous l’occupation, la police française considère Louis Goudailler comme un « communiste actif » participant à la propagande clandestine.
Le 5 octobre 1940, à l’aube, il est arrêté à son domicile, en même temps que 16 autres militants de Choisy dont les frères Jean (secrétaire de section avant guerre), Paul Andrieux, André Beaure (responsable syndical), André Grillot, Camille David et Maurice Loiseau (conseillers municipaux communistes) et Alain Martin, de Thiais, lors de la grande vague d’arrestations organisée dans les départements de la Seine et de la Seine-et-Oise par les préfets du gouvernement de Pétain contre des hommes connus avant guerre pour être des responsables communistes (élus, cadres du PC et de la CGT) ; action menée avec l’accord de l’occupant.
Après avoir été regroupés en différents lieux, 182 militants de la Seine sont conduits le jour-même en internement administratif au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Val-d’Oise – 95), créé à cette occasion dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt.
- Le sanatorium de la Bucaille à Aincourt dans les années 1930.
Le centre de séjour surveillé a été installé dans la longue bâtisse située au premier plan à gauche. Afin de pouvoir y entasser les détenus, il a fallu y transporter le mobilier des autres bâtiments.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.
Conçus à l’origine pour 150 malades, les locaux sont rapidement surpeuplés : on compte 524 présents en décembre 1940 et 600 en janvier 1941.
Début 1941, Louis Goudailler est affecté à un travail de bûcheron, probablement par lien avec son métier de jardinier.
Le 11 février, en réponse à une directive du chef de camp concernant la révision du dossier de certains internés de la Seine, Louis Goudailler lui transmet l’exposé de sa situation en concluant qu’il considère son internement : « comme une mesure arbitraire » et demande sa libération immédiate.
En février, alors que les autorités françaises envisagent le transfert de 400 détenus d’Aincourt vers « un camp stationné en Afrique du Nord », le docteur du centre dresse trois listes d’internés inaptes. Louis Goudailler figure sur celle des internés « non susceptibles absolus » en raison d’une pleurotomie gauche.
Le 25 février, sur le formulaire de « Révision trimestrielle du dossier » de Louis Goudailler, à la rubrique « Avis sur l’éventualité d’une mesure de libération », le commissaire spécial, directeur du camp, émet un avis défavorable en s’appuyant sur le constat que cet interné « suit les directives du parti communiste », tout en lui reconnaissant une « attitude correcte ».
Le 5 avril, les internés d’Aincourt protestent devant l’absence de réponse du commandant du camp à la demande de certains d’entre eux de recevoir leurs premières visites à l’occasion de Pâques, appuyant leur revendication par un refus de travail.
Sur environ 500 détenus ayant participé au mouvement, 54 sont isolés par mesure disciplinaire ; parmi eux, Louis Goudailler. Afin de manifester leur solidarité, leurs camarades refusent de s’alimenter pendant toute une journée, mais rien n’y fait : le lendemain, les 54 sont transférés à la Maison centrale de Poissy (Yvelines – 78).
- Au deuxième plan, la Maison centrale de Poissy vers 1916.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.
Le 8 mai, le même groupe de militants communistes est transféré en voitures cellulaires de Poissy à lagare Montparnasse à Paris et, de là, au camp français (CSS) de Choisel à Châteaubriant (Loire-Atlantique – 44) ; Louis Goudailler y est enregistré sous le matricule 509. Il s’y trouve au moment de la fusillade massive d’otages du 22 octobre 1941.
- Louis Goudailler, à gauche, au camp de Châteaubriant © Droits Réservés.
Le 7 février 1942, il est remis aux autorités d’occupation à leur demande et transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise – 60), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 -Polizeihaftlager).
Entre la fin avril et la fin juin 1942, Louis Goudailler est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet, Louis Goudailler est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45618 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée [2]).
Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.
Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.
Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Louis Goudailler est dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.
Pendant un temps, il est assigné au Block 16a, avec Marcel Gauthier, Louis Girard et Louis Guidou.
Il meurt à Auschwitz le 27 octobre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp.
La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 10-02-1994).
Sources :
Choisy infos n°77, journal municipal de la Ville de Choisy-le-Roi, avril 2005 (page 14, légende d’une photographie).
Marinette Hocquart, 8 mai 1945, la fin du cauchemar, édité par la Ville Choisy-le-Roi, en mai 2005, p. 13.
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 387 et 406.
Cl. Cardon-Hamet, Biographies des déportés du convoi du 6 juillet 1942 de Choisy-le-Roi, fichier informatique, décembre 2006.
Nadia Ténine-Michel, Le camp d’Aincourt (Seine-et-Oise), 5 octobre 1940 – 15 septembre 1942, article in Les communistes français de Munich à Châteaubriant (1938-1941), sous la direction de Jean-Pierre Rioux, Antoine Prost et Jean-Pierre Azéma, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, novembre 1987.
Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “occupation allemande” : BA 2214 (communistes fonctionnaires internés…, Le préfet de police au préfet de la Seine, courrier et liste du 7 octobre 1940) ; BA 2374.
Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux, centre de séjour surveillé d’Aincourt ; cotes 1w74 (révision trimestrielle), 1w77, 1w119 (dossier individuel).
Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 379 (37777/1942).
Service d’information sur les anciens détenus, Biuro Informacji o Byłych Więźniach, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne ; registre du Block 16.
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 25-06-2015)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.
[1] Choisy-le-Roi : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).
[2] Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été reconnue par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin Après Auschwitz, n°21 de mai-juin 1948). Son nom est orthographié « Gorydayr » : il s’agit certainement d’une “coquille”.