Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Henri, Marcel, Quéruel naît le 15 février 1891 à Levallois-Perret (Seine / Hauts-de-Seine), chez ses parents, Charles Quéruel, 36 ans, jardinier, et Cécile Mars, son épouse, 32 ans, blanchisseuse, domiciliés au 1, rue des Arts. Par la suite, la famille emménage au 80, rue du Bois, toujours à Levallois-Perret.

Pendant un temps, alors qu’il habite encore chez ses parents, Henri Quéruel travaille comme cocher.

Le 1er octobre 1912, il est incorporé au 29e régiment de dragons afin d’accomplir son service militaire. Le 7 juillet 1914, il passe au 13e dragons, où le déclenchement de la Première Guerre mondiale le rattrape. Le 9 novembre 1915, il passe au 38e régiment d’artillerie et , le 23 décembre suivant, au 9e groupe d’artillerie d’Afrique. Son unité par combattre sur le front d’Orient. Le 1er février 1917, il est évacué à destination d’Avignon (Vaucluse). Le 10 avril, suivant il est admis à l’hôpital de Troyes, puis, le 24 avril, à l’hôpital de Brive, et enfin, le 9 mai, à l’hôpital de Limoges. Le 12 juillet suivant, il rejoint le dépôt du 38e régiment d’artillerie. Le 1er décembre 1917, il passe au 276e régiment d’artillerie de campagne. Dans la nuit du 12 au 13 janvier 1918, le P.C. de groupe du bois de la Hazelle (Meurthe-et-Moselle) subit un violent bombardement d’« obus toxiques et vésicants » (gaz de combat). Henri Quéruel, qui est à son poste de téléphoniste, est intoxiqué et subit une inflammation des paupières et des yeux. Il est évacué et soigné en hôpital jusqu’à la fin avril. Entre temps, le 15 février, il est cité à l’ordre de [l’artillerie ?] ; il reçoit la Croix de guerre avec étoile de bronze.

Le 20 août 1918, à Thonnance-les-Joinville (Haute-Marne), toujours soldat artilleur, Henri Quéruel se marie avec Cécile Burot.

Le 15 septembre suivant, il est affecté au 47e RAC. Le 18 octobre, il passe au 7e RAC. Trois jours plus tard, il est évacué. Il rentre au dépôt le 15 janvier 1919. Le 14 février, il est dirigé sur le 106 régiment d’infanterie à Châlons pour être affecté à la Compagnie des chemins de fer de l’Est (article 42 ?). Il est démobilisé le 18 août suivant.

Le 16 février 1920, Henri Quéruel est titularisé dans la même compagnie [1]. En octobre 1927, l’armée le classe réserviste dans l’affectation spéciale comme conducteur à la gare de Saint-Dizier (52).

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 104, rue de l’Aune à Saint-Dizier. Marié, il est père de deux enfants.

Toujours affecté à la gare SNCF de Saint-Dizier, il est surveillant à l’Exploitation, travaillant probablement avec Georges Fontaine et Yves Thomas.

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Saint-Dizier, la gare dans les années 1900.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 12 août 1941 – comme Pierre Gazelot -, il est arrêté, interrogé à la Feldkommandantur de Saint-Dizier, puis conduit à la prison de Chaumont (52).

À une date restant à préciser, il est transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Les deux wagons à bestiaux
du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise
d’où sont partis les convois de déportation. Cliché M.V.

Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière de la zone annexée, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures puis repart à la nuit tombée : Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Henri Quéruel est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46027 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – la moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir. Aucun document ni témoignage publié à ce jour ne permet de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a été affecté Henri Quéruel.

Il meurt à Auschwitz le 6 septembre 1942, d’après les registres du camp.

Après leur retour de déportation, les rescapés du convoi qui attestent de son décès sont Armand Saglier, de Marcilly-sur-Tille (Côte-d’Or), et Léon Thibert, domicilié à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire).

Le nom d’Henri Quéruel est inscrit sur la plaque dédiée «  aux déportés politiques, aux déportés du travail et aux victimes civiles de la guerre 1939-1945 » apposée dans le hall de l’Hôtel de Ville de Saint-Dizier. Il figure également sur la stèle commémorative du quai de la gare de Saint-Dizier dédiée « à la mémoire des agents de la SNCF tués par faits de guerre ».

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 19-05-1998).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 367 et 418.
- Archives départementales des Hauts-de-Seine (AD 92), site internet du conseil général, archives en ligne ; registre des naissances de Levallois-Perret, année 1891 (E NUM LEV N1891), acte n° 147 (vue 40/278).
- Archives de Paris ; registre des matricules militaires, recrutement de Paris, classe 1911, 2e bureau, volume 4001-4500 (D4R1 1623), Quéruel Henri Marcel, matricule 4404.
- Club Mémoires 52, Déportés et internés de Haute-Marne, Bettancourt-la-Ferrée, avril 2005, p. 45.
- Base de données des archives historiques SNCF ; service central du personnel, agents déportés déclarés décédés en Allemagne (en 1947), de A à Q (cote 0110LM0108).
- Site internet Mémorial GenWeb, Raymond Jacquot et Henri Dropsy, (2004).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 28-12-2016)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] La SNCF : Société nationale des chemins de fer français. À sa création, suite à une convention validée par le décret-loi du 31 août 1937, c’est une société anonyme d’économie mixte, créée pour une durée de 45 ans, dont l’État possède 51 % du capital.