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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Henri Fontaine naît le 27 août 1901 à Nancy (Meurthe-et-Moselle – 54), fils Claude Léon Fontaine, 32 ans, employé de commerce, et de Marthe Bohrer, 27 ans, son épouse, domiciliés au 6 bis, rue Saint-Anne. À sa naissance, Henri a un frère aîné, Georges, né le 23 novembre 1899. Leur sœur Léontine naît le 5 octobre 1903. Plus tard, ils emménagent à Pont-à-Mousson (54), où leur sœur Georgette naît en 1909.

En 1921, la famille est installée au 128 ou 139, rue de Véel à Bar-le-Duc (Meuse) ; Henri est électricien dans l’usine à gaz de la ville, et Léontine est employée de commerce à la Coopérative départementale. Son frère Georges accomplit alors son service militaire.

Henri, lui, est exempté de service militaire à trois reprises (1921, 1922 et 1923), pour « faiblesse générale », par le Conseil de révision de la Meuse. Par la suite, il semble ne pas avoir été appelé.

Le 16 janvier 1926, à Bar-le-Duc, Henri Fontaine se marie avec Henriette Klipffel, née en 1907 à Bar-le-Duc. Ils s’installent au 54, rue de Couchot. Henri travaille alors comme électricien dans la fonderie Durenne de la ville, spécialisée dans la fabrication de conduites de gaz en fer (entreprise Bradfer et fils et Cie. A. A. Durenne). Henriette est tisserande chez Unterner. Ils auront – au moins – deux filles : Jacqueline, née en 1927, et Colette, née en 1929, toutes deux à Bar-le-Duc.

En 1926, Henri Fontaine adhère au Parti communiste.

En avril 1928, il est secrétaire par intérim du syndicat unitaire des Métaux (CGTU) lorsqu’il se présente aux élections législatives dans l’arrondissement. Sa candidature ne fait cependant pas l’unanimité parmi les militants communistes : la majorité des membres de la cellule de Ligny-en-Barrois décide de soutenir le candidat socialiste (SFIO), tandis que le secrétaire de celle-ci adhère au Parti socialiste.

En juillet 1929, la famille Fontaine est installée à Ligny-en-Barrois, village situé à 15 km au sud-est de Bar-le-Duc, sur les bords du canal de la Marne au Rhin. En 1931, ils habitent rue Leroux (au n° 72 ?) ; Henri Fontaine est ouvrier électricien (avec André Ipcher, chef de secteur électricien pour l’entreprise Meuse et Marne).

Ligny-en-Barrois. Carte postale postée en 1933. Collection Mémoire Vive.

Ligny-en-Barrois.
Carte postale postée en 1933. Collection Mémoire Vive.

En 1936, et jusqu’au moment de son arrestation, Henri Fontaine et sa famille habitent une maison individuelle sur la route de Morlaincourt (D156), au bord de l’Ornain, à proximité d’un grand transformateur de distribution électrique (s’agit-il d’un logement de fonction ?).

Début 1940, après avoir été un temps classé « inapte à l’infanterie », Henri Fontaine rejoint finalement le 6e dépôt d’infanterie militaire le 15 avril. Le 13 mai, il rejoint le dépôt de guerre d’infirmiers n° 6 comme soldat de 2e classe. Le lendemain, il est affecté à l’hôpital complémentaire Libergier (dans l’École Pratique de Commerce et d’Industrie ?) à Reims. Le 20 juillet, il est dirigé sur la 16e section d’infirmiers militaires (SIM) à Lunel (Hérault) – en zone non-occupée – où il est démobilisé le lendemain, pouvant dès lors rentrer à Ligny.

Henri Fontaine est arrêté entre le 22 et le 24 juin 1941, probablement dans le cadre de l’Aktion Theoderich [1], ainsi que son frère Georges, pris à Saint-Dizier (52) : ils suivent ensuite le même parcours en détention. Dans les jours suivants, ils sont internés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942,  les frères Fontaine sont sélectionnés avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Dans un wagon, les détenus de la Meuse se sont rassemblés autour de Charles Duny.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Henri Fontaine est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45548 selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée). Son frère Georges a été enregistré sous le matricule précédent : 45547.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Henri Fontaine.

Son frère Georges succombe dès le 14 août suivant.

Henri Fontaine meurt à Auschwitz le 2 novembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Le 11 mars 1947, une date approximative est inscrite une première fois en marge de son acte de naissance : « décédé en septembre 1942 ». Le 17 mars 1995, cette mention est rectifiée en indiquant la date retrouvée dans les archives du camp.

À Ligny-en-Barrois, le nom d’Henri Fontaine a été ajouté sur l’ancien monument aux morts 1914-1918 dans le parc municipal (… de Luxembourg). Il est également inscrit sur une des plaques commémoratives apposées contre un mur intérieur de l’église Notre-Dame-des-Vertus, et sur la plaque portant treize noms ajoutée au monument commémoratif des déportés, à l’extrémité sud du chemin des Canons.

Notes :

[1] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante.

En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht.

Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. 131 d’entre eux, arrêtés entre le 21 et le 30 juin, font partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 369 et 404.
- Archives départementales de la Meurthe-et-Moselle, site internet, archives numérisées en ligne.
- Archives départementales de la Meuse, site internet, archives numérisées en ligne.
- Archives départementales de la Côte-d’Or, Dijon : cote 1630, article 252.
- Death Books from Auschwitz, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 300 (38548/1942).
- Site Mémorial GenWeb, Ligny-en-Barrois : relevé initial n° 1574 effectué par Jean-Pierre Leisen (2000) ; relevé initial n° 53150 effectué par Guy Chaillaud (2010) ; relevé initial n° 76140 effectué par Bernard Butet (2015).
- Site du Maitron en ligne : notice FONTAINE Henri, https://maitron.fr/spip.php?article24571

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 21-01-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.