JPEG - 56.9 ko
(droits réservés)

Henri, Jules, Asselineau naît le 27 février 1893 à Entrains-sur-Nohain, non loin de Clamecy (Nièvre – 58), au sein d’une famille paysanne du Nivernais.

Il effectue son service militaire dans l’infanterie lorsque la Première guerre mondiale est déclenchée. Il a 21 ans et, durant trois années, il connaît l’enfer des tranchées, la boue, le froid, les poux, les bombardements incessants et le massacre de ses camarades lors des tentatives de percée du front. En 1917, son unité est engagée sur le front de l’Yser, au mont Cassel. Avec toute sa section, il est victime d’une arme nouvelle, l’ypérite, un gaz asphyxiant. Gravement atteint aux voies respiratoires, il est hospitalisé. Diminué physiquement à vie, il reçoit une pension après la guerre.

Il devient membre de l’ARAC (Association républicaine des anciens combattants) dès sa fondation parHenri Barbusse et Paul Vaillant-Couturier. Il en est un militant actif : il est membre de la commission exécutive fédérale (fédération de la région parisienne) et secrétaire de la section de Chatou.

Sa protestation contre la guerre et son idéal de justice et d’égalité le conduisent à adhérer au Parti communiste (SFIC) dès sa création en 1920, et il devient un des secrétaires de la section de Chatou.

Domicilié au 35, rue Ribot à Chatou (Yvelines – 78) depuis 1921, sa santé précaire le contraint à exercer un emploi de bureau : il est comptable dans le commerce. Il se marie et devient, en 1931, père d’une petite fille.

À Chatou, il est le porte-parole habituel de Parti communiste, et plusieurs fois son candidat aux élections locales. Il est le coprésident du Comité local du Front populaire en 1936.

Le 2 septembre 1939, avec deux de ses camarades, il est arrêté par la police municipale de Chatou pour distribution de tracts communistes. Il est probablement écroué à Versailles.

Depuis le 26 août 1939, la presse et les écrits communistes étaient interdits, car considérés par le gouvernement comme favorables à une puissance étrangère hostile, à la suite de la signature du pacte germano-soviétique. Pourtant au moment de l’arrestation de Henri Asselineau, le Parti communiste, tout en refusant de dénoncer ce pacte dit de “non agression” – dont il ignorait les clauses secrètes – était sur une position de défense nationale. Ainsi L’Humanité clandestine du 28 août publiait des extraits d’une déclaration de Maurice Thorez affirmant que si Hitler déclarait le guerre, il trouverait « devant lui le peuple de France, les communistes au premier rang pour défendre la sécurité du pays, la liberté et l’indépendance des peuples ».

Le 21 février 1940, Henri Asselineau est condamné par le 2e Tribunal militaire de Paris à trois ans de prison, cinq ans de privation de ses droits civiques et à 500 F d’amende, pour infraction au décret-loi sur la censure et la publicité des écrits (lorsqu’il est jugé, le Parti communiste avait dû adopter en octobre 1939 la thèse officielle de la IIIe Internationale qualifiant le conflit de “guerre impérialiste”).

Le 2 mars 1940, il est écroué à la Maison d’arrêt de Fresnes (arrêt 3972). Le 21 mars 1940, son pourvoi en cassation est rejeté.

Emprisonné également à la Maison d’arrêt de la Santé à Paris et à la Maison centrale de Poissy (78), il est évacué lors de la débâcle de juin 1940. Il est conduit dans une voiture cellulaire à la Maison centrale de Fontevraud-L’Abbaye [1] (Maine-et-Loire – 49), enchaîné avec 19 autres prisonniers.

JPEG - 91.8 ko
Fontevraud, l’entrée. Carte Postale. Collection Mémoire Vive.

Dans cette autre prison, sous le matricule 5990, il fait fonction de bibliothécaire. Il est libérable le 13 juin 1942.

JPEG - 106.5 ko
Fontevraud, l’ancien réfectoire des moines. 
Carte postale des années 1900. Collection Mémoire Vive.

Mais la Feldkommandantur de Saint-Cloud (92) exige son transfert en détention de police allemande, car elle l’a inscrit comme otage « sur une liste de personnes à proposer en cas de représailles ». Le 21 juin 1942, il quitte Fontevrault par le train, emmené par deux gendarmes français qui le remettent aux Allemands au camp de Royallieu à Compiègne (Oise – 60) le 22 à 11 heures (matr. 6003).

Parmi les “45000”, Henri Asselineau est l’un des militants qui connaît la détention la plus longue avant sa déportation.

Entre la fin avril et la fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits sous escorte allemande à la gare de Compiègne et entassés dans des wagons de marchandises ; le train part à 9 h 30, dès que les portes sont verrouillées.

JPEG - 128.9 ko

Le trajet dure deux jours et demi. N’étant pratiquement pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent essentiellement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Henri Asselineau est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45179 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

JPEG - 76.8 ko
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942. 
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 
Oswiecim, Pologne. 
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Après l’enregistrement, tous les arrivants sont rassemblés dans les Blocks 19 et 20 du camp-souche où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous les hommes du convoi sont conduits à pied à Birkenau, camp annexe.

Le 13 juillet – après les cinq premiers jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Henri Asselineau est dans la moitié du convoi qui reste dans ce camp en construction choisi pour mettre en œuvre la “solution finale” (contexte plus meurtrier).

Il meurt à Birkenau le 1er septembre 1942, d’après les registres du camp [2].

Son nom est inscrit sur le Monument aux Morts de Chatou.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 30-04-1988).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 378 et 393. 
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Yvelines, citant : Témoignage et documents de Georgette Asselineau, sa veuve (carte d’identité, carte de membre de la Commission exécutive fédérale de l’ARAC, carte postale du camp de Compiègne-Royallieu, datée du 25 juin 1942, relatant son transfert) – Archives municipales de Chatou – Archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC), Paris. 
- Archives Départementales du Val-de-Marne, répertoire de registres d’écrou, cote 2Y5 43 (hommes de 1940 à 1941). 
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 34 (26499/1942).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 8-12-2009)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Fontevraud-L’Abbaye, souvent orthographié Fontevrault au 19e siècle.

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil :

Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ.

Concernant Henri Asselineau, c’est le 31 décembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès.

Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.