Fernande LAURENT, née Liéval, vient au monde le 31 décembre 1902 à Nantes dans une famille de dix-huit enfants. Le père était mécanicien de chemin de fer ; victime d’un accident du travail, il est réformé avec une pension et travaille ensuite dans une scierie.

À force de travail, Fernande acquiert un métier : mécanicienne sur chaussure.

En 1919 – à dix-sept ans – elle épouse Laurent, un ouvrier du bâtiment. Le couple a trois enfants, nés en 1921, 1922 et 1924. Sous l’occupation, la famille est domiciliée au 16, rue Saint-Jacques à Nantes, dans le quartier du même nom, sur la rive gauche de la Loire, près de l’hospice général.

Trente otages déportés par pure vengeance

Un matin, le 11 juin 1942, Fernande Laurent, qui habite au premier étage, descend chercher de l’eau à la fontaine qui se trouve au rez-de-chaussée dans le couloir de l’immeuble.

Arrivée au bas de l’escalier, elle volt un soldat allemand qui tient un revolver devant lui. Le soldat dit, en français, sans une pointe d’accent : « Je suis touché. Aidez-moi. » « Baissez votre arme, dit-elle. Et ne restez pas là. Allez-vous en. Il y a un commissariat un peu plus loin. »

L’homme s’en va. En fait, c’est le neveu de la voisine, engagé dans la L.V.F, il vient d’être blessé par un résistant, en sortant de chez sa tante.

Le lendemain matin, 12 juin 1942, six hommes de la Gestapo perquisitionnent chez Fernande Laurent – ne trouvent rien, et emmènent Fernande à la Kommandantur, puis à la prison La Fayette. Deux fois les policiers de la Gestapo la confrontent avec le blessé, à l’hôpital militaire Broussais.

Suite à ces faits, la Gestapo arrête trente-neuf personnes comme otages, désignées par la voisine. Neuf sont relâchés : enfants et mères de jeunes enfants.

Les trente autres otages, hommes et femmes seront tous déportés, dirigés sur différents camps. De ces trente otages, huit seulement reviendront.

Fernande Laurent est transférée à Paris le 14 octobre 1942, enfermée au fort de Romainville, puis Auschwitz…

JPEG - 128.9 ko

Ce sera Birkenau, la quarantaine, Ravensbrück, Mauthausen d’où elle est libérée par la Croix-Rouge le 22 avril 1945.

Au retour, Fernande Laurent trouve la maison où elle habitait détruite, soufflée par l’explosion d’un pont. Son mari loge chez des amis, les enfants ailleurs.

En rentrant, elle fait successivement sept hémoptysies et passe deux ans en Suisse dans un sanatorium du “Don suisse” où il y a quelques places pour les déportées les plus atteintes.

Fernande Laurent décède le 23 novembre 1965 à l’hôpital de Nancy, à 63 ans.

Sources :

- Charlotte Delbo, Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1965 (réédition 1998), pages 170-171.