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Photographiée à Auschwitz-I, le 3 février 1943.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Emma Laumondais naît le 11 décembre 1900 à Royan (Charente-Maritime – 17).

L’avant Guerre

À une date restant à préciser, elle se marie avec Roger Bolleau, né le 14 avril 1898 à Prignac (17). Ils ont une fille unique, Hélène, née le 6 avril 1924 à Royan, où ils s’installent définitivement en 1936, au 11, rue des Clos-Fleuris.

Roger Bolleau est alors facteur-chef à Pontaillac, quartier résidentiel de Royan, sur le front de mer.

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Pontaillac-Royan. La plage et la façade de Verthamon.
Carte postale écrite en 1933. Collection Mémoire-Vive.

Avant la guerre, Roger Bolleau est un militant du parti communiste.

Résistants dès 1940

Dès 1940, Roger, de sa propre initiative et sans liaison avec le parti communiste, devient un Résistant, comprenant qu’il faut se préparer à lutter contre l’occupant. Il ramasse les armes que l’armée française abandonne dans sa débâcle. Aidé de sa femme, Emma, il continue à faire paraître La Voix des Charentes dont plusieurs numéros, tirés à la ronéo, sont distribués sous le manteau.

Puis la résistance se structure. Les Bolleau recueillent de l’argent pour les emprisonnés et leurs familles, formant le premier groupe de Francs-tireurs et partisans (FTP) en Charente-Maritime.

Roger Bolleau, dit Germain, est arrêté le 7 mars 1942, en revenant de Saintes où il a rencontré Octave Rabaté chez les Lemasson.

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Photo anthropométrique (après arrestation), le 17 mars 1942.
Archives de la préfecture de police, Paris.

Les gendarmes arrêtent en même temps sa fille Hélène, qui n’a pas encore dix-huit ans et qui aide ses parents en tapant les stencils.

Six jours plus tard, Hélène est relâchée et vivra désormais dans la clandestinité.

Mais, le 7 août suivant, elle est à nouveau arrêtée par des policiers allemands et écrouée à la prison Lafond de La Rochelle. Elle réussit à prévenir sa mère, Emma, qui, depuis l’arrestation de son mari, fait mine de n’avoir aucune activité suspecte.

Emma Bolleau est arrêtée le 15 septembre, en apportant un colis à sa fille en prison ; pendant l’instruction, un prévenu avait dit ne pas avoir eu affaire à la fille mais à la mère.

Roger Bolleau est fusillé comme otage au Mont-Valérien le 21 septembre 1942.

Le 28 octobre, Emma et Hélène sont transférées à la prison d’Angoulême.

Le 18 novembre, elles sont conduites au Fort de Romainville. Emma y est enregistrée sous le matricule n° 1222.

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L’unique entrée du Fort de Romainville (Haftlager 122),
surplombée par un mirador.
© Musée de la résistance nationale (MRN),
Champigny-sur-Marne (94).

Le 22 janvier 1943, cent premières femmes otages sont transférées en camions au camp de Royallieu à Compiègne (leurs fiches individuelles du Fort de Romainville indiquent « 22.1 Nach Compiègne uberstellt » : « transférée à Compiègne le 22.1 »).

Le lendemain, Emma et Hélène Bolleau font partie du deuxième groupe de cent-vingt-deux détenues du Fort qui les y rejoint, auquel s’ajoutent huit prisonnières extraites d’autres lieux de détention (sept de la maison d’arrêt de Fresnes et une du dépôt de la préfecture de police de Paris).

Toutes passent la nuit du 23 janvier à Royallieu, probablement dans un bâtiment du secteur C du camp.

Le matin suivant, 24 janvier, les deux-cent-trente femmes sont conduites en camions à la gare de marchandises de Compiègne et montent dans les quatre derniers wagons (à bestiaux) d’un convoi dans lequel plus de 1450 détenus hommes ont été entassés la veille.

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En gare de Halle (Allemagne), le train se divise et les wagons des hommes sont dirigés sur le KL Sachsenhausen, tandis que les femmes arrivent en gare d’Auschwitz le 26 janvier au soir. Le train y stationne toute la nuit.

Auschwitz

Le lendemain matin, après avoir été descendues et alignées sur un quai de débarquement de la gare de marchandises, elles sont conduites à pied au camp de femmes de Birkenau (B-Ia) où elles entrent en chantant La Marseillaise.

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Portail du secteur B-Ia du sous-camp de Birkenau (Auschwitz-II)
par lequel sont passés les “31000”
(accès depuis la rampe de la gare de marchandises
et le “camp-souche” d’Auschwitz-I…).
© Gilbert Lazaroo, février 2005.

Emma Bolleau y est enregistrée sous le matricule 31806. Le numéro de chacune est immédiatement tatoué sur son avant-bras gauche.

Pendant deux semaines, elles sont en quarantaine au Block n° 14, sans contact avec les autres détenues, donc provisoirement exemptées de travail.

Le 3 février, la plupart des “31000” sont amenées à pied, par rangs de cinq, à Auschwitz-I, le camp-souche où se trouve l’administration, pour y être photographiées selon les principes de l’anthropométrie de la police allemande : vues de trois-quart avec un couvre-chef (foulard), de face et de profil.

Le 12 février, les “31000” sont assignées au Block 26, entassées à mille détenues avec des Polonaises. Les “soupiraux” de leur bâtiment de briques donnent sur la cour du Block 25, le “mouroir” du camp des femmes où sont enfermées leurs compagnes prises à la “course” du 10 février (une sélection punitive). Les “31000” commencent à partir dans les Kommandos de travail.

Emma Bolleau tient cinquante-deux jours ; c’est beaucoup à Birkenau. Elle n’a que quarante-deux ans.

Charlotte Delbo ajoute : « Si aucune mère n’est revenue, c’est parce que les mères souffraient doublement : en elles-mêmes, en leur fille pour qui elles ne pouvaient rien, qu’elles devaient laisser battre sans broncher, qu’elles ne pouvaient plus protéger, à qui elles avaient bientôt le sentiment d’être à charge. »

Rapidement malade de dysenterie, totalement déshydratée, Emma Bolleau ne peut plus s’alimenter et devient squelettique. Elle meurt au camp de femmes de Birkenau le 20 mars 1943.

Sources :

- Charlotte Delbo, Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1965 (réédition 1998), pages 45-47.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 115 (16125/1943).
- Concernant Roger Bolleau : Serge Klarsfeld, Le livre des otages, Les éditeurs français réunis, Paris 1979, pages 174 à 179, fiche allemande, page 197.
- Dany Allaire, fils d’Hélène Allaire (message 04-2013).

MÉMOIRE VIVE

(dernière modification, le 2-04-2013)

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