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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Émile, André, Cavigioli naît le 3 septembre 1903 à Lausanne (Suisse).

À une date et en un lieu restant à préciser, il se marie avec Germaine Louis Camille Pourchel, née 22 septembre 1901 à Authuille (Somme-80).  Ils ont, au moins, deux enfants : Yves, né en 1925, et Yvette, née en 1927, tous deux à Albert (80).

En 1926, ils habitent au 16 rue de Corbie, à Albert. Émile Caviglioli est alors maçon chez Puci et Compagnie. En 1931, ils habitent au 6 rue de Corbie. Émile Caviglioli est toujours maçon, mais dorénavant à l’usine d’aviation Potez [1] de Meaulte, commune voisine. En 1936, n’ayant pas changé d’adresse, Émile Caviglioli est devenu riveur chez Potez.

Meaulte, usine des avions Henry Potez, dans les années 1920. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Meaulte, usine des avions Henry Potez, dans les années 1920.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 21 décembre 1940, sur une liste établie par le commissariat spécial d’Amiens (80) dans la perspective de prononcer l‘internement administratif de communistes à la suite d’une distribution de tracts, son nom apparaît orthographié « Cavignoli », Italien naturalisé Français, manœuvre, toujours domicilié rue de Corbie à Albert.

Au moment de son arrestation, Émile Cavigioli est domicilé au 5, rue d’Amiens, toujours à Albert.

Le 25 octobre 1941, Émile Cavigioli fait partie des sept « personnes de l’arrondissement de Péronne arrêtées par l’autorité allemande » – dont Florimond Dessein et les frères Villa, d’Albert – et transférées au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Il y est enregistré sous le matricule n° 2052.

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments
du secteur A : « le camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le 5 décembre 1941, suivant le rapport du Commissaire spécial d’Amiens, le préfet de la Somme demande au commandant de la Feldkommandantur 580 à Amiens la libération de quatre d’entre eux dont le nommé « Cavogioli Albert ».

Le 3 février 1942, le préfet demande la libération de dix-neuf détenus de son département arrêtés en octobre précédent et internés à Compiègne, précisant pour chacun d’eux : « Ne participe en aucune manière au mouvement communiste. A une attitude loyale vis-à-vis du gouvernement français et des autorités occupantes ». Émile Cavigioli est inscrit sur cette liste. Le préfet réitère cette demande le 2 avril pour neuf détenus dont Cavigioli.

Entre fin avril et fin juin 1942, celui-ci est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Émile Cavigioli est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45343 selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Émile Cavigioli.

Il meurt à Auschwitz le 19 septembre 1942,  selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher), alors qu’a lieu une grande sélection des inaptes au travail à la suite de laquelle 146 des 45000 sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement tués d’une piqûre intracardiaque de phénol ou gazés [2]).

Notes :

[1] La société Aéroplanes Henry Potez, très grande usine de construction, avec aérodrome, installée à Méaulte où l’ingénieur est né en 1891. Le 7 août 1936, le Front populaire nationalise toute l’industrie aéronautique : la société Potez est intégrée à la Société nationale de constructions aéronautiques du Nord (SNCAN) et l’industriel en devint le directeur. Il a donné son nom a de nombreux modèles d’avions et de moteur.

[2] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 150 et 153, 369 et 398.
- Archives départementales de la Somme (AD 80), Amiens : correspondance de la préfecture sous l’occupation (26w953, 26w831, 26w809).
- Archives départementales de l’Aisne (AD 02), Laon : dossiers du commissariat régional aux Renseignements généraux, partis politiques des départements voisins : Ardennes, Somme et Oise (970w58).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 336 (31891/1942), orthographié « Gavigioli ».

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 18-02-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.