JPEG - 81.3 ko
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

André, Jules, Victor, Bichot naît le 9 décembre 1905 à Maisoncelles-en-Brie (Seine-et-Marne – 77), fils d’Ernest Bichot, né en 1881 à Quincy-Ségy, journalier, et de Lucie Poplet, son épouse, née en 1885 à Maisoncelles, domiciliés au hameau de Montbénard (tous deux seront décédés au moment de l’arrestation de leur fils).

De la classe 1925, André Bichot effectue son service militaire au 146e régiment d’infanterie (localisation ?).

Le 4 mars 1929, il entre au chemin de fer de l’État (ou à la Compagnie des chemins de fer de l’Est ?).

Le 7 novembre 1931, à Madre ou à Neuilly-Levandin (Mayenne), André Bichot se marie avec Augustine, Lemeunier, née le 5 juin 1905 dans cette commune. Ils n’ont pas d’enfant.

Au moment de son arrestation, André Bichot est domicilié au 86, rue Victor-Hugo à Esbly (77).

Il est alors cantonnier à la SNCF, ayant sa « résidence de service » à Esbly, sur le réseau de l’Est, comme Alexandre Douchet, cantonnier principal.

JPEG - 137.5 ko
La gare d’Esbly dans les années 1910. CP coll. Mémoire Vive.
Carte syndicale CGT, Fédération des chemins de fer.  Collection Mémoire Vive.

Carte syndicale CGT, Fédération des chemins de fer.
Collection Mémoire Vive.

Les rapports de police divergent concernant l’engagement d’André Bichot : selon certains, c’est un militant connu du Parti communiste, selon d’autres, il ne serait que simple sympathisant (ce que lui-même déclare).

Le dimanche 19 octobre 1941, André Bichot est appréhendé par la Feldgendarmerie dans le cadre d’une vague d’arrestations décidée par l’occupant contre des communistes de Seine-et-Marne, pris comme otages en représailles de distributions de tracts et de destructions de récolte – meules, hangars – ayant eu lieu dans le département. En tout, sept habitants d’Esbly sont arrêtés, dont également Alexandre Douchet, André Touret et Marcel Vincent.

Ils sont rapidement interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager), parmi 86 Seine-et-Marnais arrêtés en octobre (42 d’entre eux seront des “45000”). Immatriculé sous le n° 1790, André Bichot est assigné au bâtiment A3.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ; à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8. Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ;
à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8.
Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Le 28 octobre, le commissaire de police judiciaire de Compiègne (1ère brigade) signe une fiche de renseignements biographiques et signalétiques abrégés pour chacun des otages Seine-et-Marnais enregistrés au camp de Royallieu huit jours plus tôt, toutes portant la même mention : « a été arrêté comme otage par l’Armée d’occupation à la suite de nombreux incendies de meules et d’exploitations agricoles en Seine-et-Marne. “Interné au camp de Royallieu à Compiègne” » ; transcription probable de fiches réalisées par l’administration militaire du Frontstalag 122. Une copie sera transmise à la préfecture de Seine-et-Marne.

Entre fin avril et fin juin 1942, André Bichot est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny,  et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. Cliché Mémoire Vive 2011.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation.
Cliché Mémoire Vive 2011.

Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures puis repart à la nuit tombée : Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, André Bichot est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45244 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté André Bichot.

Il meurt à Auschwitz le 2 août 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [1] ; trois semaines après l’arrivée de son convoi ; la cause mensongère indiquée est « broncho-pneumonie » [sic].

Après leur retour de déportation, les rescapés du convoi qui attestent de son décès sont Georges Brumm, de Montreuil-sous-Bois (93) et Étienne Pessot, de Cachan (92).

Le nom d’André Bichot est inscrit sur le Monument aux morts de Quincy-Voisin, à 5 km de Meaux (77).

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 9-09-1987).

Notes :

[1] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. Concernant André Bichot, c’est le 15 octobre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 73, 127 et 128, 378 et 395.
- Archives départementales de Seine-et-Marne, site internet : recensement de 1906, canton de Coulommiers (0M400 1906), Maisoncelles, vue 208/302.
- Archives départementales de Seine-et-Marne, Dammarie-les-Lys : cabinet du préfet, arrestations d’octobre 1941 (M11409).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 86 (17982/1942).
- Hervé Barthélémy, association Rail & Mémoire (message 03-2013).
- Base de données des archives historiques SNCF ; service central du personnel, agents déportés déclarés décédés en Allemagne (en 1947), de A à Q (0110LM0108).
- Cheminots victimes de la répression 1940-1945, mémorial, ouvrage collectif sous la direction de Thomas Fontaine, éd. Perrin/SNCF, Paris, mars 2017, pages 175-176.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 24-01-2014)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.