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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Isidore Thiais naît le 16 mai 1889 à Paris 1er – au 95 rue Saint-Honoré, peut-être chez une sage-femme -, fils d’Amélie Thiais, 30 ans, native de Bourges (Cher – 18), domestique, domiciliée au 60, rue de Turbigo, et de « père non dénommé ».

Pendant un temps, sa mère habite au 86 bis avenue de Wagram à Paris 17e.

Le 27 mai 1908, le tribunal correctionnel de la Seine condamne Isidore Thiais à six jours de prison et 16 francs d’amende pour outrages à agents.

Le 8 juillet 1909, à la mairie de Bourges, il s’engage volontairement pour trois ans comme soldat de 2e classe au 6e régiment de chasseurs. Du 11 juillet suivant au 20 mai 1911, il est affecté en Algérie, puis dans les confins algérois-marocains jusqu’au 17 juin suivant. Il reçoit la médaille commémorative du Maroc avec agrafe “Maroc”.

Entretemps, le 29 octobre 1910, à Bourges, sa mère, domiciliée 43 rue Bourbonnoux à Bourges, âgée de 51 ans, a épousé Marie Adrien Berthé, 50 ans, veuf, tourneur sur métaux, en présence de ses frères, Maurice Thiais, 47 ans, sellier, et Charles Sellier, 44 ans, mouleur, tous deux domiciliés à Bourges.

Dès le 2 août 1914, Isidore Thiais est « aux armées », mais d’abord dans son unité en Algérie. Le 3 août 1915, il passe au 7e régiment de marche de chasseurs d’Afrique. Le 31 mars 1917, il est aux armées en France. Le 17 mai 1918, il est blessé à la jambe droite par un coup de pied de cheval et évacué vers une ambulance. Le 30 mai, il est admis à l’hôpital auxiliaire 104 à Marseille. Le 5 juin, il est transféré à l’hôpital complémentaire 22 de Grasse. Le 19 juillet, il part en convalescence pour vingt jours, revenant aux armées le 15 août. Le 2 janvier 1919, il est cité à l’ordre de son régiment : « Très bon soldat au front depuis le début a fait partie de nombreuses reconnaissances où il s’est distingué par sa belle attitude et son sang froid ». Il reçoit la Croix de guerre avec étoile de bronze. Le 26 juillet 1919, il est mis en congé illimité de démobilisation et se retire chez sa mère et son beau-père au 60 bis rue de Mazières à Bourges. En 1921, il est manœuvre dans la manutention.

En 1931, il y vit seul avec sa mère (probablement veuve) au 60 bis. Il est manœuvre chez A.B.S (?).

En 1936 et jusqu’au moment de son arrestation, Isidore Thiais est domicilié au 26, rue de Mazières à Bourges.

Le 22 juin 1941 [1], lors de la grande rafle des communistes du Cher, il est arrêté et bientôt interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Isidore Thiais est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46137 selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Isidore Thiais.

Il meurt à Auschwitz le 23 août 1942, d’après selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) : l’acte de décès de l’état civil français a enregistré la période de fin août-début septembre).

Son nom est inscrit sur la stèle commémorative « Honneur à nos morts tombés pour que vive la France », apposée sur un mur mitoyen de la section du PCF de Bourges, 45 rue Théophile-Lamy (149 noms).

Notes :

[1] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est défini le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante. En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht. Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. 131 d’entre eux, arrêtés entre le 21 et le 30 juin, font partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 73, 362 et 421.
- Centre de documentation juive contemporaine (CDJC), Paris : liste de 44 otages FK 668, 24-10-1941.
- Archives départementales de Paris, site internet, archives en ligne : extrait du registre des naissances du 1er arrondissement à la date du 16-05-1889 (rV4E 5382), acte n° 427 (vue 15/31).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1245 (24629/1942).
- MémorialGenWeb, relevé n° 58355, par Claude Richard, 07-2011.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 17-10-2020)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.