Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Roger, Célestin, Morin naît le 30 octobre 1912 à Tours (Indre-et-Loire – 37), chez ses parents, Édouard Joseph Morin, 42 ans, brigadier chargeur des Postes, et Célestine Vennevier, 32 ans, son épouse, domiciliés au 24 rue Chambert. Roger a une sœur, Yvonne, née en 1901, et un frère, Robert, né en 1907, tous deux à Tours.

Roger Morin acquiert un bon niveau de formation, se déclarant comme archiviste dessinateur lors du conseil de révision.

Le 25 octobre 1933, il est affecté au 2e régiment d’aviation afin d’y accomplir son service militaire. Mais, le 21 novembre suivant, la commission de réforme de Tours le réforme définitivement n° 2 pour « insuffisance mitrale, souffle systolique de la pointe propagée à l’aisselle ». Il est aussitôt “renvoyé dans ses foyers” et se retire chez ses parents au 24 rue Chambord à Tours.

Le 2 décembre 1933, à Saint-Pierre-des-Corps, alors âgé de 21 ans, comptable, Roger Morin se marie avec France Marcelline Albertine Blanvillain, née le 8 avril 1907 à Tours, domiciliée au 105 rue de la Noue à Saint-Pierre-des-Corps (37), commune implantée entre le Cher et la Loire, chez son père, alors veuf et retraité de la Compagnie  de chemin de fer de Paris à Orléans (P.O.).

René et France ont – au moins – une fille, Éliette, née en 1934 à Tours.

En 1936, tous trois habitent au 105, rue de la Noue. Roger Morin est employé de bureau à la Compagnie Générale de construction et d’entretien du matériel de chemin de fer (CGCEM), entreprise privée qui devient Compagnie Industrielle de Matériel de Transport (CIMT) cette même année.

Saint-Pierre-des-Corps, vue générale des ateliers de la CGCEM. Carte postale “voyagée” en 1935, collection Mémoire Vive.

Saint-Pierre-des-Corps, vue générale des ateliers de la CGCEM.
Carte postale “voyagée” en 1935, collection Mémoire Vive.

Morin est arrêté puis finalement interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C, qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C,
qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Roger Morin est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45900 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Roger Morin.

Il meurt à Auschwitz le 9 août 1942, d’après le registre d’appel du camp (Stärkebuch) ; un mois après l’arrivée de son convoi. En France, cette date sera portée en marge de son acte de naissance.

Le nom de Roger Morin est inscrit sur le Monument aux morts de Saint-Pierre-des-Corps.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 364 et 414.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995, tome 3 : Annexes, relevé du registre d‘appel, Stärkebuch  (Stb. 2, 281-284), page 1555.
- Site Mémorial GenWeb, relevé de Stéphane Le Barh et Catherine Rouquet (08-2003).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 10-01-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.