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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Guiseppe (Joseph) Carattoni naît le 10 juin 1915 à San Marino (Italie).

Pendant un temps, il est domicilié à Gouraincourt, 10 km au nord d’Étain (Meuse – 55) ; son adresse reste à préciser. Il est célibataire.

Il est manœuvre (dans quelle entreprise ? à vérifier…).

Sous l’occupation, il dirige un groupe du parti communiste clandestin, actif notamment par la distribution de tracts. Il a sous ses ordres une section en contact avec René Getti, de Longlaville.

Le 8 novembre 1941, Joseph Carattoni est arrêté à Longwy (Meurthe-et-Moselle – 54) comme communiste : il est interné administrativement au centre de séjour surveillé d’Écrouves, près de Toul (54) quand il est désigné comme otage.

Dans la nuit du 4 au 5 février 1942, un groupe de résistance communiste mène une action de sabotage contre le transformateur électrique de l’usine sidérurgique d’Auboué qui alimente également dix-sept mines de fer du Pays de Briey. Visant une des sources d’acier de l’industrie de guerre allemande (Hitler lui-même s’en préoccupe), l’opération déclenche dans le département plusieurs vagues d’arrestations pour enquête et représailles qui concerneront des dizaines de futurs “45000”.

Guiseppe Carattoni est inscrit – n°2 – sur une « liste communiquée le 19 (février ?) au soir à la KK (Kreiskommandanturde Briey par le sous-préfet » pour préciser la nationalité de cinquante-trois hommes : il est désigné comme français (par naturalisation).

Le 5 mars, Joseph Carattoni est parmi les trente-neuf détenus transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Dans ce camp, il discute politique avec Raymond Montégut du degré de sacrifice qu’un militant peut consentir pour obéir aux ordres du Parti.

Entre fin avril et fin juin 1942, Joseph Carattoni est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures et repart à la nuit tombée : Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Joseph Carattoni est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45328 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. On les fait attendre dans l’allée principale pendant quatre heures, puis ils sont conduits dans un baraquement pour y recevoir une première soupe. À cette occasion, ils peuvent échanger leurs premières impressions : Joseph Carattoni discute avec Raymond Montégut, René Amand, Alphonse Rousseau et Yves Jahan. Ensuite, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Joseph Carattoni  est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Raymond Montégut témoigne : « (…) lorsque j’ai pu te revoir, c’était au cœur de l’hiver, tu avais faim et comme moi tu mendiais devant un Block de caïds ; tu étais squelettique… Nous avons pris rendez-vous pour partager le lendemain nos maigres récoltes. Tu ne devais pas venir, hélas ! car ce jour-là tu étais entré à l’hôpital que tu ne quittas, m’a-t-on dit, que pour aller à la chambre à gaz. »Joseph Carattoni meurt à Auschwitz le 31 décembre 1942, selon une copie du registre de la morgue (Leichenhalle) relevée clandestinement par la résistance polonaise interne du camp, et où est inscrit le matricule n° 45428 (ce local de regroupement temporaire des cadavres est situé au sous-sol du Block 28).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 369 et 398.
- Jean-Claude et Yves Magrinelli, Antifascisme et parti communiste en Meurthe-et-Moselle, 1920-1945, Jarville, avril 1985, pages 54, 55.
- Raymond Montégut, Arbeit macht Frei, Éditions du Paroi (imprimeur), juin 1973, Recloses, 77-Ury, 349 p., pages 17, 54-55.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 30-11-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.